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Retraite

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La retraite est la situation d'une personne qui se caractérise par :

  • l'arrêt de toute activité professionnelle et le retrait du marché du travail,
  • des revenus basés sur le produit d'un capital accumulé, le versement d'une rente viagère et/ou le bénéfice d'une pension de vieillesse (ou pension de retraite) obtenue, généralement sous certaines conditions (âge minimal, durée passée en emploi, etc.), à titre gratuit ou contre cotisations préalables. Ces cotisations ont pu être versées en partie par un tiers (un employeur, l'État...) à une caisse de retraite. Par ailleurs la pension de retraite peut, elle aussi, être complétée par un tiers.

La retraite, historiquement rare et courte, a été créée par Bismarck au XIXe siècle (l'anecdote veut qu'il ait demandé à fixer l'âge de la retraite de façon à n'avoir presque jamais à la verser). La retraite se généralise au XXe siècle avec l'allongement de la durée de vie et l'augmentation sans précédent des richesses.

Devenue perspective probable, elle pose des problèmes aigus de financement lorsqu'elle est gérée par l'État-providence, du fait de l'horizon temporel inhabituellement lointain du départ à la retraite (décalage de plusieurs dizaines d'années) et donc de l'incertitude sur les conditions dans lesquelles elle pourra s'exercer ; les hommes politiques peuvent profiter de cette incertitude pour spolier les jeunes actifs, en augmentant les cotisations sans que les citoyens réagissent, ainsi que les générations futures. A contrario, une gestion libre et responsable d'une épargne-retraite aboutit à des rendements élevés dans un cadre pérenne. Des revers de capitaux ponctuels (hedge-funds, ENRON) ne remettent pas en cause cet état de choses dans son ensemble.

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Types de retraites

Plusieurs grands types de fonctionnement, qui peuvent être combinés, existent :

  • la solidarité familiale : chaque groupe (famille, famille élargie, clan, etc.) prend en charge ses retraités et leur assure l'existence. C'est ce mécanisme qui était généralement appliqué historiquement, lorsque les marchés financiers n'existaient pas encore et que le bien moindre respect de l'État de droit empêchait la préservation de l'épargne.

C'est d'ailleurs le cas dans les pays du Moyen-Orient. Le cas le plus intéressant est celui de la Turquie. En effet, le taux des prélèvements obligatoires (en y incluant les charges sociales) n'est que de 25 %. Ce qui signifie que chaque famille habitant Smyrne a une résidence secondaire à Kusadaci. Cet exemple n'est pas le seul en Turquie. Ce qui a pour effet d'héberger les personnes âgées de la famille de façon confortable.

  • la retraite par capitalisation : de l'épargne est accumulée par les actifs (futurs retraités), soit individuellement soit collectivement, constituant ainsi un capital. Les intérêts produits par ce capital, et le capital lui-même, sont dépensés lors de la retraite. Dans le cas d'un régime privé de retraite par capitalisation, le retraité peut gérer lui-même ce capital ou bien le confier à un ou plusieurs professionnels de gestion de patrimoine. Cela suppose des gestionnaires efficaces et un contexte économique et réglementaire qui permette de mettre en œuvre sereinement une stratégie de placement diversifiée et durable. Dans certains pays comme la France, ce type de retraite est limité par les pouvoirs publics, qui ont introduit dès les années 1940, puis maintenu, la retraite par répartition comme régime obligatoire. Il convient de signaler que durant les années 1930 et 1940, les organismes de retraite par capitalisation ont subi les effets de la Grande Dépression et de la Seconde Guerre mondiale, en particulier les vagues d'inflation qui ont spolié les épargnants de la majorité de leur capital. Le capital accumulé peut être placé dans des produits plus ou moins risqués (pour une durée de placement suffisamment longue, les produits risqués génèrent un rendement plus élevé que les produits sans risque, mais peuvent se réduire à peau de chagrin). Généralement, l'épargne des jeunes actifs est placée dans des produits risqués, et au fur et à mesure que la date de retraite approche, l'épargne est transférée vers des produits à faible risque (obligations d'entreprise ou obligations d'État par exemple).
  • la rente viagère : le détenteur d'un capital provenant d'une capitalisation ou d'une autre source ne connaît pas son espérance de vie et il sait que ses capacités de travail vont s'amoindrir, ce qui limite les possibilités de bonne gestion d'un capital. Il peut donc préférer convertir son capital en rente viagère qui sera versée par un organisme de placement ; celui-ci, gérant un grand nombre de ces rentes viagères, peut, en moyennant les espérances de vie de ses clients, prévoir les futurs flux financiers et leur garantir individuellement un montant versé jusqu'à leur décès.
  • la retraite par répartition : ce sont les cotisations des travailleurs et employeurs actuels qui payent les retraités actuels. Deux présentations existent de ce système :
    • La doctrine officielle est celle d'une « solidarité » élargie, collective et intergénérationnelle, où chaque (futur) retraité prend en charge les retraités du moment (et sera pris en charge lui-même par les cotisants futurs). Dans ce système, le cotisant d'aujourd'hui n'acquiert aucun actif réel, sa retraite sera fonction de la cotisation donc de son salaire d'actif, en exacte proportion et le montant total des cotisations est partagé entre les retraités selon des clefs complexes et souvent injustes (pourcentage du salaire selon le nombre de trimestres cotisés, validés, plus proche de 50 % que de 100 %).
    • Dans l'imaginaire collectif et dans la présentation publicitaire, ce système est plutôt perçu comme une épargne collective (ce qu'il n'est pas, c'est une acquisition de points multipliés par les trimestres cotisés), un système de capitalisation mutuel, où le futur retraité acquiert des droits réels sur les futurs cotisants ; même si elles sont fixées par des règles complexes illisibles, les pensions peuvent être financées par une recherche de ressources financières.
Ces deux doctrines cohabitent plus ou moins bien selon la souplesse laissée aux inévitables variations de population et la gestion politique des intérêts contradictoires des pensionnés et des cotisants. Dans la réalité, la retraite par répartition présente des caractéristiques similaires à la vente pyramidale (ou au schéma d'escroquerie de Bernard Madoff, le plus grand escroc du XXIe siècle)[1]avec ses défauts, et le système génère son propre type de scandale, conduisant par contrecoup à réhabiliter les autres systèmes, y compris la capitalisation.

Position libérale

Les systèmes de capitalisation et de répartition sont très différents : la capitalisation est un système individuel ou collectif de placement, alors que la répartition est forcément un système collectif, sinon collectiviste, de « protection sociale » que ses promoteurs font passer pour une assurance vieillesse (alors que les techniques de l'assurance ne sont en fait jamais employées) ce qui est d'autant plus surprenant que la vieillesse n'est plus un « risque » peu probable, mais un événement à très forte probabilité.

Lorsque la croissance démographique est modérée, le rendement d'un système de retraite par capitalisation est largement supérieur à celui d'un système par répartition. Dans le système par répartition, les cotisations sont en fait analogues à un impôt (proportionnel au revenu) dont les fonds recueillis ne sont pas investis, mais immédiatement redistribués par les organismes de retraite publics ou parapublics (privés avec mission de « service public »).

Le système par répartition est proche de ce qu'on appelle la vente pyramidale, où le revenu est basé sur le « recrutement » de nouvelles personnes, et non sur la constitution de droits réels : on vend à prix coûtant un produit futur (la future pension de retraite), qui n'est en fait qu'une simple promesse de ce produit. Ce revenu futur n'est pas officiellement garanti et est constamment révisable. Ce système sacrifie l'avenir au nom de l'immédiat, au nom d'une soi-disant solidarité intergénérationnelle (alors que la « solidarité » est par définition une action volontaire, qui n'existe plus lorsqu'elle est rendue obligatoire). Il ne peut fonctionner que si la coercition étatique s'applique et oblige tout le monde à cotiser (c'est la fonction, dans un certain nombre de pays, des institutions de « sécurité sociale »).

Ce que Michel Godet appelle le « théorème de Sauvy » régit le fonctionnement de la retraite par répartition : les retraites futures ne se préparent pas en s’occupant des personnes âgées, mais en mettant au monde des enfants et en les élevant correctement. Une retraite par répartition doit tenir compte, non des cotisations versées par le passé (qui n'existent plus) mais de la démographie, puisque les pensions des moins jeunes sont prélevées sur les revenus des plus jeunes.

Les « solutions » étatiques au phénomène de transition démographique et de vieillissement de la population consistent à diminuer le montant des retraites, augmenter les cotisations ou obliger les salariés à travailler toujours plus longtemps : les victimes sont tantôt les actifs, tantôt les retraités, souvent les deux. De plus, la gestion des retraites tend à être discriminatoire en France, les bénéficiaires des régimes spéciaux de retraite et les fonctionnaires étant avantagés par rapport aux actifs du secteur privé. Une autre injustice tient au fait qu'avec la répartition, celui qui décède avant sa retraite a cotisé pour rien, ses héritiers n'obtenant rien[2].

La retraite comme instrument de spoliation

Retraite par répartition et solidarité intergénérationnelle

L'injustice fondamentale, qui remonte à la mise en place du système par répartition, est que la première génération de retraités qui a bénéficié du système n'a jamais cotisé ; cette dette cachée, perpétuée par le système, empêche aujourd'hui un passage brutal de la répartition à la capitalisation (dans le sens inverse, le passage de la capitalisation à la répartition est très facile, et les gouvernements ne se sont jamais privés de mettre en œuvre cette action confiscatoire et de détruire les systèmes individuels qui existaient déjà). On pourrait dire que la spoliation des générations suivantes a été installée dès le début, permettant alors aux politiciens promoteurs du système d'empocher leurs profits sur le marché politique. Afin de corriger ou d'atténuer ce passage « brutal » de la répartition à la capitalisation, il convient de dire qu'il peut être réalisé et qu'une méthodologie traduisant cette évolution existe et a été appliquée. En effet, des procédures et des élargissements progressifs à toute la population ont été menées, non en France, mais au Chili, dans le cadre de la libéralisation et de la Privatisation de l'économie, lorsque, entre 1978 et 1980, José Piñera était ministre du Travail et des Retraites.

La seule issue est un passage progressif de la répartition à la capitalisation, avec à terme la suppression de l'obligation de cotiser à un organisme de retraite étatique ou pseudo-étatique :

« Passer d'un système de répartition à un système de capitalisation, c'est stimuler le seul véritable moteur de la croissance, à savoir l’épargne. Dans ce système, les individus ont en effet intérêt à épargner, c'est-à-dire à accumuler du capital et à créer de la richesse, de manière à subvenir à leurs propres besoins une fois qu'ils ne seront plus en âge de travailler. Dans un système de capitalisation, on ne compte plus sur la générosité obligatoire des autres dans le futur pour subvenir à ses besoins lorsqu'on sera retraité. On compte sur soi-même, et c'est en ce sens que le passage à la capitalisation constitue une véritable révolution morale. Elle représente en effet le retour à la responsabilité individuelle. »
    — Pascal Salin, Libéralisme (2000)

Pour certains libéraux, une obligation d'épargner pour sa propre retraite devrait être maintenue, tout en permettant aux actifs de choisir leur mode d'épargne ou de cotisation. En France, avec l'abrogation du monopole de la Sécurité sociale, des organismes de retraite concurrents proposeraient différentes solutions, permettant un choix libre et responsable des individus.

Pour d'autres libéraux et pour les libertariens, au même titre que les cotisations d'assurance maladie ou d'assurance chômage, les cotisations retraite obligatoires constituent tant une spoliation qu'une déresponsabilisation des individus, qui relève d'un paternalisme méprisant[3] (« si on les laisse faire ce qu'ils veulent, ils vont dépenser tout leur revenu et n'épargneront pas pour leurs vieux jours »), les mêmes individus étant cependant jugés assez responsables pour pouvoir voter et influer ainsi sur l'évolution de leur pays.

Par conséquent, les personnes doivent retrouver une liberté de choix totale, ce qui signifie qu'elles sont libres de préparer leur retraite comme elles l'entendent. Une mauvaise solution serait de décréter que la gestion des retraites soit confiée à l'entreprise dans laquelle travaillent les salariés, celle-ci pouvant alors avoir tendance à placer le fonds de retraite des personnels dans ses propres actions, engendrant ainsi un risque énorme pour les salariés concernés (perte à la fois de son emploi et de son épargne en cas de faillite : voir le scandale du fonds de retraite Enron en 2001 aux États-Unis). Les moyens éprouvés d'investir à long terme, en diversifiant son risque, ne manquent pas[4] et permettent de se passer avantageusement des "services" de l'État, ou, si on est salarié, des services très intéressés de son propre employeur.

Les opposants à la capitalisation soulignent le risque plus élevé de ce type de système puisque l'argent a vocation à être investi dans le système productif via des actions, supposées risquées. C'est oublier que la sécurité des placements s'obtient par la diversification, et qu'une gestion financière simple permet historiquement des rendements de 5 à 7 % par an en bourse, avec un risque faible sur le long terme. L'offre de placements possible peut être très large, qu'elle soit à but lucratif ou non : assurances, organismes financiers, mutuelles, associations, etc., sans compter la solidarité familiale, qui a toujours été historiquement la vraie solidarité intergénérationnelle (par le don, l'héritage, la mise en commun).

À l'inverse, la retraite par répartition consiste à mettre tous ses œufs dans un seul panier, celui de l’État, sans aucune diversification ni même garantie. Les travaux économiques montrent que la retraite par répartition rapporte environ deux fois moins aux cotisants qu'un système de retraite par capitalisation[5]

Exemples de calculs pour comparer répartition et capitalisation

Le Rapport de la Révolution bleue sur les freins à la croissance présente un exemple d'estimation des rendements comparés des systèmes : « Prenons l’exemple d’un jeune âgé de 25 ans qui perçoit 1200 euros net par mois, ce qui correspond à 1900 euros pour l’entreprise en tenant compte des cotisations salariales et patronales afférentes à la santé et la retraite. On lui prélève 700 euros par mois soit 8400 euros par an. Si ces 8400 euros lui étaient reversés, il pourrait souscrire une assurance maladie (1400 euros par an) et placer chaque année 7000 euros pendant 40 ans au taux de 4 %. À l’age de 65 ans, il aurait un capital de 725 000 euros qui lui rapporterait 29 000 euros par an, soit une retraite mensuelle de 2417 euros, sans entamer le capital transmissible à ses héritiers. Avec le régime de répartition actuel, il percevra au mieux 750 euros, et ne laissera rien à ses enfants. »

Autre calcul (fourni par les retraites par répartition, un luxe inabordable) : Un salarié moyen du privé percevant 1950 euros net par mois (salaire moyen du privé), percevra une retraite par répartition équivalente à 70 % de son salaire brut d'activité. Régime général et régimes complémentaires confondus, il disposera de 1750 euros brut mensuels. S'il avait pu capitaliser en actions les 8000 euros qu'il est contraint de verser chaque année à l'assurance vieillesse, il disposerait d'un capital supérieur à 1,8 million d'euros en quarante ans, ce qui lui fournirait un revenu mensuel de 3000 euros, sans même entamer son capital.

Un calcul purement mathématique permet de comparer répartition et capitalisation[6]. Les hypothèses sont les suivantes :

  • deux salariés commencent leur carrière en même temps, à l'âge de 20 ans ;
  • leur carrière dure 40 ans, après quoi ils bénéficient de 20 ans de retraite ;
  • leurs conditions sont identiques d’un point de vue salarial : leur salaire de départ est de 2000 euros, chaque année il est augmenté de 2 % ;
  • le premier salarié a un régime de retraite entièrement par répartition : il cotise pour sa retraite à hauteur de 25 % de son salaire ;
  • le second a un régime de retraite entièrement par capitalisation : il cotise pour sa retraite à hauteur de 25 % de son salaire, et cet argent est investi dans un fonds d’épargne étatique qui garantit des intérêts composés annuels de 3 % par an (les intérêts sont incorporés au capital chaque année).

Le calcul donne les résultats suivants au moment de la retraite :

  • le salaire du premier passera de 4329 euros à 1500 euros (taux de remplacement de 34 %, dans l'hypothèse très optimiste où il récupère en allocations retraite l'équivalent des montants cotisés) ;
  • le salaire du second passera de 4329 euros à 2635 euros (taux de remplacement de 60 % pour la capitalisation).

La répartition équivaut en réalité à un placement à taux zéro ! Même avec un taux d'intérêt des placements qui serait de 1 % par an la capitalisation est supérieure.

L'origine pétainiste des retraites par répartition en France

C'est un décret-loi de l'État français (régime de Vichy) du 14 mars 1941 qui réforme l'assurance vieillesse pour imposer le système de la répartition à la place du système de la capitalisation, en créant une allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS), indépendante des cotisations versées. Les fonds des caisses vieillesse privées (20 milliards de francs de l'époque) sont confisqués (ils deviennent inutiles dans le cadre de la répartition, et permettent de financer immédiatement l'allocation).

Les prétextes n'ont pas manqué à l'époque : les fonds des systèmes par capitalisation auraient été laminés par l'inflation et la crise économique des années 1930, les redistribuer tout de suite était donc affaire de « justice » ; la retraite des vieux avec interdiction pour eux de travailler permettait prétendument de lutter contre le chômage des jeunes et des adultes d'âge moyen.

À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le général de Gaulle entérine les choix de Vichy, et ce seront Francis Netter et Pierre Laroque, deux anciens conseillers de René Belin (le syndicaliste CGT rallié au pétainisme, ministre de 1940 à 1942, auteur de la loi du 14 mars 1941), qui mettront en place la Sécurité sociale à la Libération.

Ce « dépouillement des générations futures », comme le dira Alfred Fabre-Luce, a depuis été avalisé par tous les hommes politiques français au pouvoir depuis sa mise en place en 1941. Il faut dire qu'il présente de nombreux avantages pour les politiciens, notamment celui de mettre la population sous la dépendance de l'État, seul capable de financer les déficits des régimes, seul décideur du montant des retraites versées (par fixation de la valeur du point de retraite) et seul garant des retraites futures, puisque seule la coercition étatique oblige les jeunes à cotiser pour les moins jeunes (se révolter contre l'État serait donc mettre en péril le versement des retraites « qui nous sont dues »[7]).

L'État ne prend d'ailleurs aucun risque : il dirige les systèmes de retraites du secteur privé (comme ceux du secteur public) mais ne s'est jamais engagé à leur paiement (les organismes de retraite sont par nature privés). La faillite de ces systèmes ne saurait en rien le concerner et le temps venu, il trouvera toujours le moyen de se défausser de sa responsabilité sur le marché, la conjoncture, les délocalisations, le dumping fiscal, etc., et venir comme le chevalier blanc « sauver les retraites » (au prix de nouvelles ponctions et potions amères). Une étude relative à l'origine pétainiste de la retraite par répartition, en France, a été réalisée en 2010 par Philippe Simonnot. Il fait état, effectivement, de la crise des retraites : le cadavre de Pétain bouge encore !

Erreurs courantes

  • "Le passage de la répartition à la capitalisation ne sert à rien, parce que, de toute façon, il faut bien tirer des ressources quelque part pour payer les retraites ; peu importe que ces prélèvements soient effectués par un régime de répartition ou par un système de capitalisation" : ceux qui font ce raisonnement oublient que l'épargne, à la différence de la redistribution, aboutit in fine à une création de richesses. On ne prélève donc pas les retraites sur une quantité de ressources identiques, mais sur une quantité de ressources qui s'accroît lorsqu'on est dans un système de capitalisation[8]. Il suffit de comparer le revenu fourni par un régime de répartition avec celui qu'offre la capitalisation, même avec un taux de rendement modeste : la capitalisation rapporte davantage.
  • Une variante plus élaborée de cet argument est la suivante : la retraite par capitalisation est indexée sur le revenu du capital, tandis que la retraite par répartition l’est sur les salaires (sur lesquels elle est prélevée) ; or, l’équilibre économique à long terme exige que revenu du capital et revenu salarié progressent au même rythme, celui de la croissance économique (« règle d'or» de l'économiste britannique Nicholas Kaldor) ; le rendement des deux types de retraites doit donc être équivalent. Or (en laissant de côté l’aspect éthique qui ne permet pas de mettre sur le même plan prélèvement forcé et épargne volontaire) il n’y a pas de raison pour que ces revenus progressent de la même façon, les gestionnaires de fonds pouvant, par exemple, dans une économie mondialisée, investir là où les perspectives de profit sont élevées (économies émergentes à croissance rapide).
  • "Dans un système de capitalisation, les rendements sont incertains, il y a des cracks boursiers, etc. ; il y a donc davantage de risques" : rien n'est certain dans la vie (on peut aussi mourir avant d'arriver à la retraite), mais ce qui est sûr est que les régimes actuels de répartition sont en faillite, et que le sort de tous les futurs retraités est menacé si rien ne change. Le contre-exemple du système privé de retraite chilien montre que le rendement du système privé est supérieur à celui des régimes gérés par l’État, même à proximité d'une crise, en l'occurrence en 2009. De plus, le système de retraite par capitalisation chilien propose différents niveaux de risque, permettant aux individus de se prémunir totalement contre le risque boursier, s'ils le souhaitent[9]. D'après Jacques Garello, du fait que les fonds de pension font des placements à long terme, la certitude d'avoir 6 à 7 % de rendement annuel est acquise à 100 % au bout de quarante ans de placement.
  • "On ne peut laisser les retraites subir les aléas du marché, la répartition est donc plus sûre" : c'est oublier un autre risque (outre le risque démographique inhérent à la répartition), qui est le risque politique (hyperinflation, faillite de l'État, dette publique excessive), car rien ne garantit aujourd'hui que l'État parviendra dans le futur à obliger les jeunes générations à cotiser pour payer les retraites des moins jeunes (une des premières mesures prises par les États en faillite, comme l'Argentine en 2002, est de diminuer le montant des retraites). Le risque politique existe également, dans une bien moindre mesure, pour la capitalisation (cas où les avoirs sont majoritairement constitués de titres publics ; confiscation des fonds de placement privés par un État en manque de ressources).
  • "Il est normal que ceux qui exercent des travaux pénibles ou dangereux aient le droit de partir à la retraite plus tôt que les autres" : Si un emploi est pénible, les candidats seront rares et donc, pour attirer des candidats, le salaire versé par l'employeur devra être plus élevé que pour un emploi non pénible ; dans un marché libre, la pénibilité est donc déjà prise en compte par un salaire plus élevé (sauf blocage autoritaire des salaires par l'État), ce qui permet au travailleur d'épargner davantage pour sa retraite et donc, de toucher une pension de retraite plus élevée et/ou de partir plus tôt, selon son choix. Travail pénible ou non, tout le monde devrait pouvoir partir en retraite quand il le veut (ce qui en France est actuellement impossible).
  • "Partir tôt à la retraite permet de donner du travail aux jeunes" : vieille erreur malthusienne. Les jeunes n’ont pas besoin qu’on leur libère une place : ils sont capables d’occuper un poste nouvellement créé. Une main-d'œuvre supplémentaire ne signifie pas moins de travail pour les autres : elle signifie des bras (ou des cerveaux) supplémentaires. Un départ précoce à la retraite ne profite en rien à la société.

Citations

  • « Le cerveau dûment lavé - et même lessivé - les Français s'imaginent pour la plupart que l'argent de leur retraite existe quelque part. Ils sont persuadés d'avoir, leur vie durant, cotisé pour eux-mêmes. Profonde erreur. Ils ont cotisé pour les autres, et leur argent a disparu. Ils ne sont riches que de l'espoir de voir l'État parvenir à contraindre les générations suivantes à cotiser pour eux. Pour la contrainte l'État s'y entend. Mais si les générations suivantes ont disparu, c'est-à-dire ne sont plus assez nombreuses, comme c'est le cas en France, que peut l'État ? Rien, strictement rien. Sauf mettre le système en faillite. C'est exactement ce qu'il se prépare à faire en s'abstenant d'agir aujourd'hui. » (Claude Reichman)
  • « Un spectre hante le monde : celui de la faillite du système de retraite de l'État. Le système de retraite par répartition qui règne en suprématie à travers la plus grande partie de ce siècle a un défaut fondamental enraciné dans une fausse conception sur le comportement de l'être humain : il détruit à un niveau individuel le lien essentiel entre l'effort et la récompense. En d'autres termes, entre les responsabilités personnelles et les droits individuels. Chaque fois que cela se produit à grande échelle et sur une longue période, le résultat est désastreux. » (José Piñera)
  • « Je suis allé à la rencontre des travailleurs, à la télévision, à la radio, et je leur ai dit : voulez-vous confier les prélèvements sociaux à un programme gouvernemental semblable à un trou noir dans l'univers, puisqu'on ne sait pas exactement comment l'argent est utilisé et où il va, ou préfèreriez-vous avoir cet argent dans un livret d'épargne, un livret de retraite qui resterait votre propriété, que personne ne pourrait s'approprier ? » (José Piñera)
  • « L'assurance et le marché financier, c’est la gestion de la durée. Le plan de Sécurité sociale (de 1945) va consister à faire vivre les gens dans un monde où la durée n’existe pas. On veut vous convaincre de faire abstraction du temps dans quoi que vous fassiez. On vous fait vivre au jour le jour, et on vous dit : faites-nous confiance, on s’occupe de vous. » (Georges Lane, 23 août 2011)
  • « La répartition est un mode de couverture qui n'est ni technique, ni nouveau, mais suppose et fait en sorte que le temps n'existe pas, c'est-à-dire soit retiré du calcul économique ; la répartition est un mode de couverture qui, pour pouvoir fonctionner, doit reposer sur l'obligation et la spoliation légales. » (Georges Lane, 2011)
  • « Ce dépouillement des générations futures [...] tend à préparer pour les enfants en bas âge une politique de privations. Mais ceux-ci, devenus adultes, rejetteront le fardeau. Tout le monde le sait déjà, et c'est pourquoi la défiance règne [...]. La contradiction est si bien entrée dans nos mœurs que nul ne s'étonne de voir coexister dans les projets des réformateurs un système d'assurance fondé sur la répartition et un système financier fondé sur l'appel à l'épargne. [...] Le rentier et l'ouvrier finiront par comprendre qu'ils sont également dupes dans cette affaire. Coupons dépréciés pour l'un, cotisations doublées pour l'autre, tel sera le bilan — alors que le fonctionnement normal de la capitalisation en régime de monnaie stable eût pu les satisfaire tous deux… Peut-être verra-t-on alors ces victimes faire cause commune contre l'État qui les exploite ? En travaillant à l'institution d'un système d'assurances sociales, les théoriciens de la lutte des classes n'avaient sans doute pas vu qu'ils vouaient l'ouvrier à découvrir, par l'expérience, leur solidarité. » (Alfred Fabre-Luce, 1938, Le Secret de la République)
  • « A démographie non constante et diminuant, la répartition est peut être maintenant une escroquerie. Nous faisons financer les points que nous décidons de nous attribuer par la génération suivante qui, elle, n'aura pas l'aide d'une bonne démographie, et nous osons appeler cela la solidarité intergénérationnelle ! Le nom de solidarité cache des montages immoraux. Aller à la banque, se servir en créant un découvert sur le compte du voisin sous prétexte qu'il est plus jeune, n'est pas ma conception de la solidarité entre les générations. » (docteur Gérard Maudrux, président de la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France, juin 2007)
  • « Il faut trouver un moyen de préserver les générations à venir de la cupidité des générations présentes pour ne pas recourir à la banqueroute. » (Napoléon Bonaparte)
  • « Il faut dépenser pendant qu'on est jeune l'argent qu'on gagnera quand on sera vieux. » (Sacha Guitry)
  • « Dès lors que la solidarité est obligatoire, elle n’a plus de valeur morale. Et pour ce qui est des retraites, elle ne désigne en fait que le vol d’une génération par une autre. » (Pascal Salin)
  • « La retraite par répartition est un système de Ponzi qui a réussi à se maintenir grâce à l’intervention des pouvoirs publics. Ceux-ci ont remplacé la crédulité des épargnants par la contrainte légale. » (Jacques Bichot[10])
  • « Ce système par répartition selon lequel une génération prétend vivre aux crochets d’une autre est tout simplement indigne et immoral. La dignité du bipède consiste à subvenir lui-même à ses besoins. La démographie se chargera de tuer ce système honteux inadapté à une population vieillissante. » (Simone Wapler[11])
  • « Charles Ponzi est ce fameux escroc américain qui en moins de 8 mois en 1928 avait réussi à ruiner 40,000 épargnants. Il leur promettait des rendements spectaculaires, qui bien sûr étaient versés aux premiers déposants par l’apport des suivants. Ponzi a fait des émules (au début des années 90 en Russie, notamment), mais seuls les États européens ont osé mettre en place une carambouille de plus grande ampleur encore avec les « retraites par répartition ». » (Christian Michel, Le Crépuscule des guerriers[12])

Notes et références

  1. Toutefois, la vente pyramidale ne fonctionne que parce que le nombre de clients augmente d'étape en étape ; elle se termine forcément en faillite. Le système de retraite par répartition peut facilement spolier particulièrement une génération donnée et donc n'aboutit pas forcément à une faillite.
  2. Bien que les « pensions de reversion » aient été inventées pour pallier un peu ce problème, elles ne concernent que le veuf/la veuve/les enfants et ne représentent que 50 % de la pension que le conjoint décédé aurait pu obtenir.
  3. Paternalisme qui était la conception prussienne quand Bismarck instaura le premier système de retraites en 1883. Aux États-Unis, Franklin D. Roosevelt instaura la Social Security en 1935 en prévision des élections de 1936. En France, la retraite par répartition trouve son origine dans l’AVTS (Allocation des Vieux Travailleurs Salariés), créée par Pétain en 1941.
  4. fonds de pension, assurances-vie, rentes viagères, plans d'épargne, investissements immobiliers, fonciers, métaux précieux, actions, obligations, etc.
  5. Retraites par répartition, une taxe « implicite » de 50 à 70 %, Contrepoints
  6. Trouvé dans Les maths au carré, Falissard, éd. Ellipses, 2011
  7. À noter que dans certains pays, la justice affirme que le paiement des retraites n'est en aucun cas garanti et reste entièrement à la discrétion de l'État (par exemple Supreme Court Case: Flemming vs. Nestor). En France, selon le Conseil de normalisation des comptes publics (CNOCP), « le système par répartition entraîne l'absence d'obligation relative aux prestations de retraite au-delà de l'exercice annuel pour les caisses de retraite gestionnaires des régimes, qu'ils soient de base ou complémentaires. Ces entités ne doivent donc pas comptabiliser de passif au titre des engagements futurs des régimes de retraite ».
  8. Pascal Salin
  9. Le système privé de pension chilien sort indemne de la crise, Contrepoints, mars 2010
  10. Jacques Bichot, Retraites, Le dictionnaire de la réforme, l’Harmattan, 2010
  11. Les taux d’intérêt bas menacent votre retraite, 23 mai 2017
  12. Le Crépuscule des guerriers

Bibliographie

  • 1979, Carolyn L. Weaver, "Social Security: Has the Crisis Passed?", Cato Policy Report, January
    • Repris en 2002, "Social Security: Has the Crisis Passed?", In: David Boaz, dir., "Toward liberty. The idea that is changing the world: 25 years of public policy", Washington DC: Cato Institute, pp95-104
  • 2008,
    • Mitchell Orenstein, Privatizing Pensions: The Transnational Campaign for Social Security Reform, Princeton, NJ: Princeton University Press
    • Brink Lindsey, "Social security", In: Ronald Hamowy, dir., "The Encyclopedia of Libertarianism", Cato Institute - Sage Publications, pp479-480

Voir aussi

Liens externes


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