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Hiérarchie
Étymologiquement, la notion de hiérarchie est basée sur le caractère plus ou moins sacré attribué à une personne, à un concept ou à une chose [1]. Bien que présentées de façon antinomique, la hiérarchie et l'anarchie ne sont pas des termes symétriquement opposés même s'ils sont mutuellement incompatibles. L'analyse linguistique permet de rassembler sous le même radical, "archie" toute la famille liée au commandement dont font partie les concepts de hiérarchie, d'anarchie, de démarchie, d'héterarchie ou de panarchie.
En anthropologie politique et en sociologie, le concept de hiérarchie est souvent contestable car il donne lieu à l'établissement d'une échelle des valeurs fictive, arbitraire et figée reposant sur des différences de pouvoir, de statut ou de richesse, si ce n'est de gènes. Du point de vue éthique, cette référence à la hiérarchie est détestable (la ségrégation raciale, la caste sociale, la féodalité servile par exemple), et elle est contestable car elle conduit à des aberrations méthodologiques comme la mise en place du holisme (Par exemple, le critère irréel de la notion de classe sociale agissante).
Le critère hiérarchique dans les différentes disciplines
Le critère hiérarchique établit un ordre de supériorité ou de priorité. Dans une organisation (entreprise, association, corporation, syndicat) chacun de ses éléments se trouve subordonné à celui qui lui est supérieur. L'église catholique[2], la famille, l'Etat, l'administration et l'armée représentent donc des exemples notables d'organisations hiérarchiques tant pour des questions d'efficacité que d'image symbolique du pouvoir renforçant l'ordre. La société bourgeoise du 19ème siècle évoque aussi cette structure sociale hiérarchique avec la richesse et l'argent comme symboles d'être parvenu à une certaine échelle sociale supérieure tout comme le fait de payer le cens (impôt foncier), donc le droit de voter, et d'employer des domestiques. Selon Rousseau, l'argument selon lequel la société repose sur la supériorité de certains individus est réfutable. Il nie la remarque que si "tout homme né dans l'esclavage", est aussi né pour l'esclavage et pour y rester. La hiérarchie sociale n'est pas naturelle, précise l'auteur du "Du Contrat social ou Principes du droit politique", mais elle repose sur une convention originelle qui ne doit pas être déterministe.
Tandis que sur le plan éthique, on évoque la hiérarchie des valeurs ; sur le plan informatif, nous nous référons à la hiérarchie médiatique ou informatique[3]. En Droit, il est fait mention du "respect de la hiérarchie des normes", comme un des critères essentiels d'un État de Droit. Hans Kelsen est à l'origine de cette théorie dite de la pyramide des normes visant à donner une base objective, conforme, rationnelle et laïque à l'ordonnancement des différentes sources du droit. Ainsi, les normes de Droit inférieures héritent des attributs des normes qui leur sont directement supérieures, sans risque de déclencher des conflits d'interprétation du Droit.
La vision autrichienne de la hiérarchie
Dans une vision autrichienne, il n'y a de hiérarchie acceptée que par l'évaluation effectuée par un individu agissant dans sa relation sur un objet, sur une idée ou sur un service rendu par un autre personne ou par une organisation. Proche de la notion de Chester Barnard, l'autorité est acceptée et elle est un élément potentiel d'une hiérarchie formelle et informelle. Comme le formulait également un autre auteur en management, Mary Parker Follett, le pouvoir est un "pouvoir avec", c'est-à-dire un co-pouvoir plutôt qu'un "pouvoir sur". Autrement dit, il ne peut pas y avoir de hiérarchie s'il n'existe pas des individus consentants pour construire ensemble des relations de pouvoir. Le pouvoir totalitaire et absolu, que ce soit dans la société ou dans une organisation est illusoire et éphémère.
En économie, Carl Menger, fait référence à la hiérarchie des besoins dans le processus d'évaluation des biens. Cet ordonnancement s'effectue par l'intermédiaire des outils méthodologiques que sont l'individualisme méthodologique et le subjectivisme. C'est-à-dire que la hiérarchie des besoins ne peut s'effectuer qu'à l'échelle de l'individu agissant au moment même de son choix. Dans son ouvrage Droit, Législation et Liberté, Friedrich Hayek complète cette approche au niveau de l'ordre du marché, autrement appelé la catallaxie. Il indique qu'une société libre est une société pluraliste sans hiérarchie commune de fins particulières. Une société libre est donc une société où il n'est pas possible de hiérarchiser les besoins d'un individu ou de lui imposer une hiérarchisation avant qu'il ne l'effectue par ses actions non contraintes par une forme de coercition extérieure. Comme le présente également Chandran Kukathas, une société libre n'est pas gouvernée par une hiérarchie de liens de supériorité ou de subordination, mais par un archipel de concurrence, et par un chevauchement de compétences. La théorie de la connaissance de Fritz Machlup, remplit aussi ce même critère de non hiérarchisation cognitive de la part de l'acteur agissant, même si une typologie de la connaissance est utile pour le chercheur.
Michael Polanyi, dans la philosophie sociale tirée de son ouvrage "La Logique de la liberté", souligne l'impossibilité de la planification et il contraste la supériorité des sociétés polycentriques sur les sociétés monocentriques. Dans l'ordre organisé des sociétés monocentriques, chaque personne de la hiérarchie ne peut diriger efficacement qu'un nombre limité de personnes. À l'opposé, l'ordre spontané des sociétés polycentriques offre une organisation où les actions de tous les individus sont coordonnées par des liens réticulaires à l'infini.
La hiérarchie dans la théorie de l'organisation
Les auteurs en organisation du Néo-institutionnalisme, Ronald Coase, Alfred D. Chandler et Oliver Williamson ont focalisé leur approche de l'organisation partagée entre d'un côté, faire appel au marché avec des coûts de transaction et de l'autre, la hiérarchie. Graphiquement représentée par l'organigramme, la hiérarchie positionne les acteurs de l'organisation en fonction de leur responsabilité et du pouvoir de contrôle sur leurs subalternes.
La contestation de la hiérarchie au sein d'une organisation peut se réaliser à deux niveaux. Soit à l'échelon du membre de l'organisation qui, selon l'expression d'Alfred Hirschman, va soit exprimer (par oral ou par écrit) son mécontentement, voire sa révolte ou sa désobéissance civile ; soit va quitter l'organisation (quand le coût de la sortie est abordable. Il s'agit du vote par les pieds analysé selon Charles Tiébout) ou alors agir en tant qu'intrapreneur au sein de l'organisation. La modification de la hiérarchie peut provenir également de la tête de l'organisation qui peut décider de changer la politique de délégation et de décentralisation en adoptant de nouvelles formes d'autorité comme la subsidiarité ou l'entreprise réseau.
Dans sa théorie de la firme J, Masahiko Aoki avance que les organisations peuvent éviter un système hiérarchique grâce à une coordination horizontale par le transfert d'informations entre les unités de production.
Annexes
Notes et références
- ↑ Du grec hieros (« sacré ») et archos (« commandement », ou « ce qui est premier »)
- ↑ Le catholicisme a réussi a se développer grâce à une organisation basée sur une hiérarchie ecclésiale
- ↑ En informatique, le concept de hiérarchie est beaucoup utilisé dans les schémas d'organisation de structures de données. Même si aujourd'hui les bases de données hiérarchiques sont souvent remplacées par d'autres types de bases de données (bases de données réticulaires, relationnelles, orientées objet), les bases de données XML ont conservé, elles, une structure hiérarchique.
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