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Évolutionnisme

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Définition de l'évolutionnisme

L'évolutionnisme est un terme qui peut englober plusieurs significations suivant le domaine auquel il s'attache : anthropologie, sciences, philosophie ou économie. Souvent, il concerne l'idée d'évolution biologique, le darwinisme, et ses rapports et affectations avec les phénomènes sociaux, économiques, voire aussi épistémologiques. Selon l'approche et paradigme évolutionniste, la théorie de l’évolution a des répercussions et implications sur les organisations sociales, économiques et même le psychisme humain.

De manière générale, on définit l'évolutionnisme « comme la tendance générale à supposer et à rechercher une loi d'évolution dans la série des changements observables ou prévisibles ». Si c'est dans la biologie qu'on identifie le plus aisément l'évolutionnisme, il est présent dans nombre de disciplines.

Évolutionnisme anthropologique

L'évolutionnisme anthropologique est l'étude du progrès de l'humanité depuis la condition la plus primitive. La pensée évolutionniste s'attache à élucider les processus de transformation des organismes vivants, que ce soit au niveau génétique ou morphologique, ou bien dans une perspective plutôt d'ordre culturelle ou sociologique. Il existe plusieurs théories évolutives, la plus connue, la théorie de la sélection naturelle a été initialement décrite par Charles Darwin.

Contexte et origine de l'évolutionnisme

Il convient en tout premier lieu de préciser l'origine de l'évolutionnisme. En effet, l'évolutionnisme s'est constitué, au XIXe siècle, en réaction, voire en opposition à la conception religieuse du créationnisme. Darwin a dénoncé la notion de génération spontanée. Déjà, au XVIIIe siècle, Lavoisier, père de la chimie actuelle avait dit : « Rien ne se perd, rien ne se crée. Tout se transforme ». Cette conception de l'évolution, appliquée en économie, adopte soit la métaphore des gènes, soit celle de la théorie des mèmes.

Le terme évolution est généralement utilisé dans deux types de discussions : celle qui concerne les théories évolutionnaires et celle des théories évolutionnistes, sans que la distinction entre les deux soient nettement importantes. La théorie évolutionnaire concerne les mécanismes qui produisent le changement, tandis que la théorie évolutionniste s'attache à la direction du changement et à sa destination finale.

L'application de l'évolutionnisme et ses diverses interprétations dans la compréhension des phénomènes économiques

L'économie évolutionniste comprend un grand horizon de différentes approches qui accentuent le caractère dynamique des processus économiques. Joseph Schumpeter est souvent considéré comme l'économiste le plus emblématique de cette conception. Diverses écoles de pensée économique ont ce type d'approche dont l'Institutionnalisme américain de Thorstein Veblen, l'École autrichienne de Friedrich Hayek et de Carl Menger), l'école de la régulation d'inspiration marxiste et marxienne. Parmi les différents courants de la théorie des organisations et de la firme, on trouve notamment la théorie des routines de Richard R. Nelson, Sidney G. Winter et Giovanni Dosi, ainsi que la théorie de la convention.

Ces différentes approches partagent la conviction qu'avec ses principes de base d'optimisation et de modèle d'équilibre statique, l'école néoclassique n'est pas capable de saisir convenablement la dimension dynamique du développement économique, spécialement les innovations et le progrès technologique comme les déterminants principaux de la croissance économique à long terme.

L'école autrichienne d'économie est reconnue pour son apport sur l'évolution sur les institutions. En particulier, des auteurs comme Friedrich Hayek prolongent les analyses déjà ouvertes par Herbert Spencer à la fin du XIXe siècle et des théoriciens des équilibres ponctués[1].

Les évolutionnistes voient l'Homme, au sens d'humanité, comme un être en perpétuelle recherche de connaissance, qui doit sans cesse faire face à la rareté des ressources à sa disposition. Les utilitaristes de l'école néoclassique, au sens strict, estiment que la vie n'est perceptible que par sa dimension économique directe ou par son impérialisme sur les autre disciplines. La vie de l'individu est normalisée par le désir de richesse. L'acteur, s'il n'est pas strictement omniscient, est toutefois en possession des données pertinentes qui lui permettent d'agir avec rationalité. Les théoriciens évolutionnistes s'appuient, eux, sur le processus social pour mobiliser des ressources limitées et leurs connaissances naturellement partielles et faillibles. Ils savent que les millions d'actions humaines produisent une cascade en chaîne de conséquences imprévues, et ils voient donc dans les sciences sociales le seul moyen de les éclairer. En contraste, chez les théoriciens utilitaristes, les acteurs sont des calculateurs qui connaissent les résultats à atteindre avant même d'agir. Les intentions suffisent à aboutir au résultat souhaité. Ainsi, la réduction de l'individu au statut d'homo œconomicus et l'adoption des instruments de calculs tels que les mathématiques et les statistiques leur permettent de résoudre les problèmes économiques et sociaux comme le feraient des ingénieurs dans des laboratoires stériles. L'utilitarisme, au sens strict, renonce à la créativité de l'acteur et à l'incertitude des résultats des évolutionnistes de l'école autrichienne d'économie, par exemple.

Les théoriciens évolutionnistes se reposent quant à eux sur l'utilité des règles, qui sont les habitudes, les routines ou les conventions de la coopération sociale volontaire. Par contre, les auteurs utilitaristes invoquent l'utilité des actes. Les théoriciens évolutionnistes sont intimement liés à l'État de droit et à la limitation de la sphère d'intervention de la puissance publique. Par contre, les utilitaristes s'abandonnent inévitablement à leur conviction que le bonheur peut être atteint pour le plus grand nombre, et que donc l'État est le mieux placé pour aboutir à cet idéal, au mépris, bien souvent, des droits fondamentaux de l'individu isolé et opposé à la mouvance majoritaire de la démocratie illimitée de la gouvernance par le peuple.

L'évolutionnisme comme survie des institutions efficaces

Dans les derniers écrits de Friedrich Hayek, l'évolution s'interprète comme la survie des institutions les plus efficaces. En effet, le processus d'évolution est un processus d'essais et d'erreurs représentés par des plans et des actions individuelles. Le processus conduit à des succès ainsi qu'à des plans infructueux, lorsqu'ils sont perçus comme des échecs. Les individus tentent de corriger leurs erreurs par la méthode de nouveaux essais. L'évolution est donc un processus d'apprentissage continuel.

Cependant, l'évolution ne peut pas conduire à une performance optimale, car la capacité de survie comprend également la possibilité de créer des variations plus ou moins aléatoires qui sont expérimentées dans le contexte des acteurs. Ainsi, la variabilité fait partie de la stratégie d'évolution des institutions survivantes. L'évolution est un processus continu de sélection qui favorise les personnes et les structures sociales qui maintiennent la possibilité d'expérimenter et d'apprendre de nouvelles choses. Les critère de sélection et d'efficacité sont donc deux concepts distincts. L'efficacité des institutions ne se réfère pas à un calcul d'optimisation mais se conçoit comme un processus intégrant la flexibilité, l'adaptabilité et la capacité à expérimenter. L'efficacité des institutions est davantage une capacité à produire de nouvelles variantes et de s'auto-corriger par l'apprentissage plutôt qu'une observation objective et finale d'un résultat optimal.

La théorie évolutionniste de la firme

L'ouvrage de Richard R. Nelson et Sidney G. Winter, An Evolutionary Theory of Economic Change en 1982, est considéré comme la base fondatrice de ce courant de pensée. L'école évolutionniste a pour objet d'expliquer les évolutions affectant les institutions, les entreprises et les mécanismes de l'innovation.

En ce qui concerne la théorie évolutionniste de la firme, chaque entreprise renferme un ensemble de règles appelées routines qui déterminent ses performances selon le type d'activité et qui guident sa trajectoire technologique. Pour l'essentiel, ces routines sont propres à chaque entreprise et relativement informelles (tacites) et leurs évolutions expliquent les trajectoires suivies par les entreprises.

Les décisions prises par les dirigeants et les savoirs détenus par les salariés, peuvent être adaptées à l'évolution du marché ou bien au contraire inadaptées. À chaque nouveau cycle d'innovations, certaines entreprises disparaissent et d'autres se créent : il y a une forme de sélection des routines par le marché. Les deux principes routines internes/sélection par le marché permettent d'envisager la dynamique économique d'ensemble.

Les économistes évolutionnistes avancent aussi le concept de sentier de dépendance (path dependancy) qui exprime l'idée que les performances et les trajectoires des firmes sont largement fonctions de leur histoire particulière et des routines qu'elles ont accumulées. Ainsi, un choix effectué au temps T (par exemple, l'adoption d'un certain standard technologique) va conditionner le développement futur d'un certain nombre de routines organisationnelles, et donc les choix stratégiques futurs de l'entreprise.

Limites de la théorie évolutionniste

Une théorie évolutionniste qui donne l'impression que tout évolue sans que l'acteur ne puisse en modifier le cours est fortement critiquable. On pourrait croire que cette théorie prend une position qui minimise et qui néglige la conscience, la cognition humaine[2] et l’importance du principe de rationalité. Mais, il ne s'agit pas de la position de Friedrich Hayek, dont le maître-mot est d'éviter une attitude constructiviste menant à la destruction des institutions.

L'autre point menant à la critique concerne la notion selon laquelle l’adaptation est optimale lorsque les acteurs s'alignent sur un système dominant. Là, de la même manière, l'analyse de Friedrich Hayek n'est pas comportementaliste. Il ne vise pas à donner des conseils sur les attitudes à avoir en fonction des institutions. Il explique simplement que la survie d'une institution est le résultat de pratiques en quantités suffisamment élevées durant une période. L'argument de certains scientifiques comme Stephen Jay Gould[3] ou de Murray Gell-Mann Murray, [4] expliquant la survie, la disparition ou la prolifération d’une espèce particulière n'ont de valeur que dans le monde biologique ou animal. On ne trouve pas chez Friedrich Hayek, comme chez d'autres auteurs de l'évolutionnisme comme Elinor Ostrom, un « adaptionnisme panglossien », comme le critique Stephen Gould et R. Lewontin (1979)[5] c'est-à-dire un évolutionnisme où chaque élément du système est sélectionné pour concourir au fonctionnement harmonieux de l’ensemble.

Enfin, les théories évolutionnistes expliquent des phénomènes qui se produisent dans la longue durée. De ce fait, elles sont inappropriées pour expliquer des phénomènes particuliers qui se déroulent sur une échelle de quelques vies humaines.

Citations

  • L'évolution ne mène pas à un but ultime, elle est elle-même un but. (Moritz Schlick, Le sens de la vie)

Informations complémentaires

Notes et références

  1. À l'inverse de la théorie gradualiste, la théorie des équilibres ponctués défendue par Niles Eldredge et Stephen Jay Gould soutient que l'évolution ne suit pas une dynamique infinitésimale à la marge [graduelle]. De longues phases de stabilité [équilibre] sont régulièrement ponctuées de changements rapides et importants, aboutissant à l'apparition d'une nouvelle espèce.
  2. * Barry Schwartz, 1986, The Battle for Human Nature : Science, Morality and Modern Life, W. W. Norton
  3. Stephen Jay Gould, 1989, Wonderful Life : The Burgess Shale and the Nature of History, W. W. Norton
  4. Murray Gell-Mann Murray, 1994, The Quark and the Jaguar : Adventures in the Simple and the Complex, W. H..Freeman
  5. Stephen J. Gould, R. C. Lewontin, 1979, "The sprandels of San Marco and the Panglossian paradigm: a critique of the adaptationist programme" (Les pendentifs de la Basilique Saint-Marc et le paradigme panglossien : une critique du programme adaptionniste), Proceedings of the Royal Society of London. Biological Sciences, n° 205, p. 581-598
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Voir aussi

Liens externes


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