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Darwinisme social

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Le darwinisme social, ou spencérisme, ou évolutionnisme social, est une doctrine politique évolutionniste apparue au XIXe siècle qui postule que la lutte pour la vie entre les hommes est l'état naturel des relations sociales. Selon cette idéologie, ces conflits sont aussi la source fondamentale du progrès et de l'amélioration de l'être humain. Son action politique préconise de supprimer les institutions et comportements qui font obstacle à l'expression de la lutte pour l’existence et à la sélection naturelle.

Envisagé à l’échelle de la compétition entre les individus, il préconise la levée des mesures de protection sociale, l’abolition des lois sur les pauvres ou l’abandon des conduites charitables. Le sociologue Herbert Spencer, un des idéologues, pense ainsi que « toute protection artificielle des faibles est un handicap pour le groupe social auquel ils appartiennent, dans la mesure où cette protection a pour effet [...] de le mettre en position d'infériorité face aux groupes sociaux rivaux. » Dans sa version extrême, on aboutit à des thèses racistes ou eugénistes.

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Darwinisme social et libéralisme

L'idéologie du darwinisme social telle qu'exposée par Herbert Spencer ou William Graham Sumner part du principe que, dans la nature, il y a toujours lutte et anéantissement implacable des plus faibles. Les plans du libéralisme pour une vie sociale pacifique seraient le fruit d'un rationalisme illusoire, car contraires à l'ordre naturel. Il faudrait laisser l’évolution agir et éliminer les moins adaptés socialement : le droit naturel équivaudrait alors au droit du plus fort.

Selon les libéraux, le darwinisme social ignore le fait rationnellement démontré que, pour l'homme, le moyen le plus adéquat à l'amélioration de sa condition est la coopération sociale et la division du travail, et non la guerre de tous contre tous.

Les antilibéraux accusent parfois le libéralisme de n'être qu'un "darwinisme social" qui lâcherait le "renard libre dans le poulailler libre". Il est en réalité aisé de montrer que c'est l'étatisme qui est un "darwinisme social", puisque l’État, monopole de la violence légale, agit en vertu du droit du plus fort au travers de ceux qui sont à sa tête (y compris en démocratie) pour accorder des privilèges, des faux droits ou instaurer un capitalisme de connivence. Par ailleurs, la conquête du pouvoir et l'accaparement des leviers de la machine étatique par les luttes politiques (élections) ou militaires (coups d'État, guerres) est un excellent exemple de ce qu'est le darwinisme social en action, puisque c'est une lutte pour « devenir le plus fort » et imposer sa volonté au reste de la population :

«  L’État substitue à la lutte pacifique pour le service mutuel, la lutte à mort d’une compétition darwiniste pour les privilèges politiques. »
    — Murray Rothbard, Éthique de la liberté

«  Votre système est une guerre civile légale, où les hommes se constituent en groupes antagonistes et se battent entre eux pour s’emparer de la machine à fabriquer les lois, laquelle leur sert à écraser leurs rivaux jusqu’à ce qu’un autre gang s’en empare à son tour pour les évincer, le tout dans une protestation perpétuelle d’attachement au bien non spécifié d’un public non précisé. »
    — Ayn Rand, Atlas Shrugged, Discours de John Galt

Assimiler la concurrence économique à un "darwinisme social" revient à affirmer que l'échange volontaire est une forme de violence analogue à la lutte entre espèces animales, jeu à somme nulle, alors que le libre échange est un jeu à somme positive (chacun trouve bénéfice à l'échange, sinon l'échange n'aurait pas lieu) :

«  Le libre marché n'est pas, comme les darwinistes sociaux l'imaginent, une lutte entre riches et pauvres, entre forts et faibles. C'est pour les êtres humains le principal moyen de coopérer pour vivre. Si chacun devait produire sa nourriture et son gîte par lui-même, pratiquement personne ne pourrait survivre. L'existence de la société à grande échelle dépend absolument de la coopération sociale au travers de la division du travail. »
    — David Gordon, Social Darwinism and the Free Market[1]

On parle parfois de "darwinisme institutionnel" à propos des idées de Friedrich Hayek sur l'évolution des sociétés : un ordre institutionnel performant s'impose non par une planification venue d'en haut, mais par sélection des institutions les plus efficientes en termes de coordination des actions individuelles.

Darwinisme social et sélection naturelle

On peut remarquer également que le terme de darwinisme, d'un point de vue scientifique, ne désigne en aucune façon une "loi du plus fort", mais l'un des mécanismes qui causent l'évolution des espèces : la sélection naturelle. Ainsi Charles Darwin réfute d'emblée, dans L'origine des espèces, l'idée répandue que "le plus fort" ait un avantage vital dans la lutte pour la survie :

«  Ce sujet est si peu compris que j'ai entendu plusieurs fois exprimer de la surprise à l'idée que de grands monstres tels le mastodonte et plus anciennement les dinosaures se sont éteints : comme si la simple force physique donnait la victoire dans la bataille pour la vie. La simple taille, au contraire, peut en certains cas entraîner, comme l'a remarqué Owen, une extermination plus rapide du fait de la plus grande quantité de nourriture requise. »
    — Charles Darwin, L'origine des espèces, chapitre XI

Selon la sélection naturelle, les individus les plus adaptés à leur environnement survivent et se reproduisent davantage, et les variations héréditaires qui confèrent un avantage sélectif seront davantage transmises à la génération suivante. L'économie d'un pays est ipso facto darwiniste (si l’État ne s'en mêle pas), puisque avec le phénomène de destruction créatrice seules survivent les entreprises les plus adaptées à leur environnement (le marché). Refuser cet état de fait reviendrait à demander la survie des incompétents, au prix d'une régression de la société :

«  En fin de compte, cette dénonciation constante du « darwinisme social » n'est qu'un procédé d'intimidation pour faire taire tout argument appliquant les principes de l'évolution à la société humaine. Les socialistes aiment se moquer des fondamentalistes juifs et chrétiens parmi leurs opposants (mais perversement, rarement des musulmans) qui nient que l'évolution ait eu lieu dans le passé, et de les traiter d'antiscientifiques ; mais plus antiscientifiques encore, ils nient que ces principes s'appliquent au présent ou au futur, alors que cette application présente et future est bien plus directement importante pour toute décision politique que toute application passée hypothétique ou réelle. »
    — Faré

Par ailleurs, Charles Darwin ne défendait pas le "darwinisme social", mais la concurrence :

«  Il doit y avoir une libre concurrence entre les hommes. Les plus capables ne doivent pas être interdits de réussir par des lois ou des coutumes. »
    — Charles Darwin, La filiation de l'homme, 1871

Bibliographie

  • 1944, Richard Hofstadter, "Social Darwinism in American Thought, 1860-1915", Philadelphia
  • 1979, Robert C. Bannister, "Social Darwinism: Science and Myth in Anglo-American Social Thought", Temple University Press, Philadelphia
  • 1980, G. Jones, "Social Darwinism and English Thought", Brighton: Harvester Press
  • 1984, Donald C. Bellomy, "‘Social Darwinism’ Revisited", Perspectives in American History, n.s., Vol 1, pp1–129
  • 2011, P. Pelikan, "Evolutionary developmental economics: How to generalize Darwinism fruitfully to help comprehend economic change", Journal of Evolutionary Economics, 21(2), pp341–366
  • 2012, P. Pelikan, "Agreeing on generalized Darwinism: a response to Geoffrey Hodgson and Thorbjoern Knudsen", Journal of Evolutionary Economics, 22(1), pp1–8

Voir aussi

Notes et références


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