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Psychologie du deuil
Le mot deuil vient du latin dolere (souffrir). Le deuil est un état affectif individuel[1] douloureux provoqué par la mort d’un être aimé. Il désigne aussi la période qui suit cette disparition et l’état dans lequel on se trouve après cette disparition. En anglais, il existe une plus grande richesse sémantique en différenciant :
- Bereavement : la perte d’un être cher (bereave est apparenté à rob : priver de, dépouiller) ;
- Grief, c'est-à-dire l'affliction : le chagrin, la tristesse, l’état d’accablement dans le deuil (à ne pas confondre avec pain : douleur physique ; grief est apparenté au français grief, du latin gravis, « grave ») ;
- Mourning : le fait de porter le deuil par la couleur[2] de ses vêtements, de se comporter en état de deuil (mourn est apparenté au français « morne W). Les rites de deuil sont des pratiques de deuil, dans une société ou dans un groupe culturel donné, qui mettent en forme et servent de guide de comportement pour les personnes endeuillées. Elles sont souvent un devoir imposé par le groupe.
Une personne est « normalement » endeuillée lorsqu'on remarque chez elle l'apparition de nouvelles émotions (tristesse, colère, culpabilité, remords, anxiété, impression de solitude, impuissance, choc, nostalgie languissante, soulagement, engourdissement...), des sensations physiques (creux dans l'estomac, sensation d'oppression dans la poitrine, serrement dans la gorge, fatigue, hypersensibilité au bruit, dépersonnalisation (« Je marche dans la rue et rien ne semble réel, y compris moi-même »), la sensation d'essoufflement, la faiblesse dans les muscles, le manque d'énergie, la sécheresse de la bouche...), par des nouveaux processus cognitifs (incrédulité, confusion, préoccupation, hallucinations avec l'impression de la présence réelle de la personne décédée, difficulté de se concentrer, rêves du défunt, évitement de se rappeler la personne décédée...) ou des comportements inhabituels (troubles du sommeil, troubles de l'appétit, retrait social, recherche et appel du défunt à voix haute, soupirs profonds et prolongés, suractivité agitée, pleurs, visite sur des lieux de vie du défunt, recherche d'objets qui rappellent la survivance symbolique de la personne décédée...).
Parfois le processus de deuil peut être compliqué[3] par tout un ensemble de raisons liées à l’âge, au sexe, à la brutalité de la perte, aux causes et aux circonstances du deuil, aux styles d’attachement, aux caractéristiques socio-démographiques du sujet, etc. La réaction de deuil est le corollaire d’un investissement émotionnel envers la personne (l'objet) de son attachement. Le deuil peut être traumatisant[4], il peut déclencher une phase dépressive ou être retardé (différé) ou inhibé. Il peut enfin devenir chronique et ne jamais atteindre la réadaptation. Lorsque les complications du deuil se prolongent, le deuil devient pathologique[5]. Les pathologies du deuil comprennent les deuils psychiatriques[6] et aussi des troubles psychologiques, somatiques ou comportementaux déclenchés a posteriori[7].
Les théories de la psychologie du deuil
L’analyse du deuil renvoie à des courants théoriques en psychologie (dynamique, cognitive, comportementale, développementale, etc.) et à d'autres disciplines (archéologie[8], anthropologie, sociologie, histoire, économie, etc.) qui apportent des éclairages différents sur ce phénomène. Le deuil fait l’objet d’importantes études en sciences de gestion car il n’est plus exclusivement lié à la mort ou au décès. Le sens du deuil s’est très nettement affranchi de la mort, sur le point sémantique, pour se rapprocher de la perte, ce qui a élargi ses champs d'investigation. Le deuil peut être préalable au décès dans le cas d'un deuil anticipé[9]. L’héritage psychanalytique freudien[10] a perdu son poids d'ancrage, ce qui a facilité le développement d'autres angles méthodologiques.
La notion de deuil est utilisée pour interpréter les réactions émotionnelles de certains acteurs confrontés à des changements profonds dans leur univers professionnel. L'analogie s'établit par les similitudes des réactions éprouvées, dans leur durée, dans l'intensité ainsi que dans la mise en place de schèmes de coping[11]. Cette vision s'est affirmée dans de nombreux travaux :
- Sur la transmission d’entreprise (l’attachement émotionnel du cédant à son entreprise)[12]
- Sur l’échec entrepreneurial
- Sur les processus de restructuration et/ou de changement organisationnel (ils portent sur les processus métier, la masse salariale, le cadre de travail, etc.)[13]
- Sur la perte d’emploi[14]
- Sur la mort organisationnelle[15]
Dans cette dernière partie, il existe encore peu d'études sur la mort de l’État. Tel le sphinx, l'État renaît toujours de ses cendres comme un régime royaliste héréditaire. « Le Roi est mort, vive le roi » ; L'État est mort, vive l'État[16] même si des illusions de réformes apparaissent, dans ces circonstances, comme des espérances de changement et des échéances de procrastination. Mais, l'Etat-nation est voué à une fausse mort[17]. Il reste encore beaucoup à analyser les conséquences des ruptures ou des pertes de références fondamentales autour desquelles un individu structure sa vie et l'implication de son adaptation au changement vers un moindre État, un autre État ou un non-État.
Il existe plusieurs auteurs différents qui s'appuient sur la théorie du deuil :
- Le modèle psychanalytique du travail de deuil (Freud)[18]
- Les théories cognitives[19] d'adaptation[20] face au deuil stressant[21] et sociologique[22]
- La théorie de l'attachement[23]
- Les modèles des stades du processus de deuil[24]
Les phases du deuil au sein de l'organisation
Chaque changement (interne ou externe, souhaité ou subi), dans l'organisation, implique, pour l’ensemble des collaborateurs, de s’y adapter en acceptant la fin d’une situation et une phase d'évolution pour intégrer la nouvelle situation. Ces étapes peuvent inclure une résistance au changement.
Dans un changement simple comme un déménagement des locaux de l’entreprise, chaque employé a besoin d’accepter le départ des anciens locaux et d’intégrer pleinement l’idée de travailler dans les nouveaux. La seconde étape ne peut être finalisée sans la première.
Plusieurs auteurs ont décrit la succession de stades dans la psychologie du deuil. Ils arrivent à des variantes quant au nombre de stades (de trois à sept) ou à leur ordre de succession.
- Le modèle des 4 étapes du deuil
- John Bowlby[25] : 1) Engourdissement, 2) Languissement et recherche de la personne perdue, 3) Désorganisation et désespoir, 4) Réorganisation
- Willima J. Worden[26] se réfère aux quatre tâches du deuil : 1) Accepter la réalité de la perte[27], 2) Ressentir la douleur du chagrin[28], 3) S'adapter à une vie sans son bien-aimé, 4) Pouvoir investir son énergie émotionnelle dans une nouvelle vie.
- Le modèle des 5 étapes du deuil normal (Elisabeth Kübler- Ross)[29] : 1) Déni et isolement, 2) Colère, 3) Marchandage, 4) Dépression, 5) Acceptation.
Afin de supporter une situation difficile ou pour lutter contre la douleur de la mort, un individu met en œuvre des mécanismes de défense. Ces actions sont des processus conscients ou des pratiques de routines (non conscientes) qui sont disponibles à tout moment pour un individu :
- La combativité (résilience ou sublimation) afin de transformer l’événement difficile en action positive. L’énergie supprime le découragement et laisse place à la confiance et l’espoir ;
- Le déni. C’est le refus de croire à la difficile réalité ;
- La dénégation. A la différence du déni, l'individu connait la réalité mais la rejette car il la considère comme inacceptable ;
- Le transfert qui consiste à déplacer son angoisse sur quelqu’un d'autre ;
- L'isolement dans un comportement de détachement et de précision ;
- La projection agressive sur autrui quand l’autre es tenu comme responsable de la situation ;
- La rationalisation lorsque la personne essaie de comprendre l’origine et la raison de la situation pour mieux la contrôler et la maîtriser ;
- La régression en prenant des attitudes ou des comportements anciens par rapport à son statut actuel.
Pour illustrer ce processus de "résistance", puis celui de son acceptation, on utilise un schéma, une courbe indifféremment nommée « courbe du changement », « courbe du deuil », "vallée de la peur", "vallée des larmes" ou "processus de conversion"[30]. Deux grandes phases s'opèrent. D’abord une phase descendante (choc, déni, colère, peur, tristesse) qui s’accompagne d’une attitude négative et contre-productive, tournée vers le passé et le refus. Ensuite s'ensuit une phase ascendante (acceptation, pardon, quête de sens, renouveau, sérénité, croissance) où l’attitude est productive et tournée vers le futur et le positif.
- Le choc est une phase courte qui a lieu lors de l’annonce. John Bowlby interprète cette phase comme un engourdissement affectif. La personne reste sans émotion apparente. Elle est "sidérée". Le changement est vécu comme brutal. Exemples : "Je te quitte", "C'est fini", "Vous êtes viré", "départ du responsable de l'entreprise ou d'un proche".
- Le déni représente le refus de croire l'information et donc de nier la réalité de la situation. La personne argumente et conteste. Il s'agit d'une réaction normale consistant à rationaliser des émotions bouleversantes. Le déni est d’autant plus fort que le changement touche à quelque chose d’important. C'est un mécanisme de défense qui sert de tampon au choc immédiat. Peu à peu, le rejet de l'information fait place à une discussion intérieure ou/et extérieure. Certaines personnes s’enferment dans cet état de refuge. Elles préservent la chambre du disparu intacte, elles continuent à mettre son assiette à table, elles cachent la perte d’emploi à leurs proches, etc. Exemples : « ce n'est pas vrai », « ce n'est pas possible... », « je ne peux pas le croire », « non, pas lui quand même… », « ça ne peut pas être définitif » , « je vais parfaitement bien », « il ne s’est rien passé », « non, il n’est pas possible que cela me soit arrivé », « c’est simplement un cauchemar »... Ce stade peut durer des heures, ou beaucoup plus longtemps.
- La confrontation avec les faits peut engendrer une attitude de révolte. La colère peut être dirigée vers des objets inanimés, de parfaits inconnus, des amis, la famille ou le défunt. Le médecin qui a diagnostiqué la maladie et qui a été incapable de la guérir peut devenir une cible facile. Exemples : « vous ne l’avez pas sauvé », « vous auriez pu en faire davantage ». Les comportements ont une forte amplitude, allant de l'emportement ou l'enfermement dans le plus grand mutisme. Souvent, la personne pleure, à la fois en protestation contre la perte et dans une tentative de retrouver la personne perdue. Pleurer attire l’attention sur la perte et constitue un appel à l’aide. Rationnellement, on sait que la personne n'est pas à blâmer. Émotionnellement, cependant, on ressent que la personne nous cause de la douleur. On se sent coupable d'être en colère, ce qui fait se sentir encore plus en colère. Des pulsions de vengeance peuvent ainsi la pousser à des comportements qu'elle ne comprend pas elle-même. Exemple : « c’est de leur faute, ils n’ont jamais rien fait pour moi ». Parfois la colère et l’hostilité sont dirigées contre la personne elle-même : « j’aurais dû être présente", « j’aurais pu aider ». Parfois aussi, la colère est dirigée contre la personne décédée : « pourquoi m’as-tu laissé ? j’ai besoin de toi ».
- Une phase de marchandage peut aussi apparaître à ce moment-là, qui peut prendre une tournure à la fois magique et religieuse. La personne endeuillée s'adresse à une entité invisible. Elle promet de ne plus faire telle ou telle chose si la situation originelle peut revenir. La réaction normale envers des sentiments d'impuissance et de vulnérabilité est souvent nécessaire afin de reprendre le contrôle de soi. Confrontée à l'impossibilité d'un retour à la situation première, la personne passe par de nombreuses émotions : reproches, remords, ressentiments, dégoûts, répulsion, séduction ou agression. Exemples : « si seulement nous avions consulté un médecin plus tôt ... », « si seulement nous avions eu une deuxième opinion d'un autre médecin ... », « si seulement nous avions essayé d'être une meilleure personne... »
- La tristesse est un état de désespérance : « ce n’est pas juste », « pourquoi elle m’a fait ça à moi ? », « que vais-je devenir ? »...
- Deux types de dépression sont associés au deuil. Le premier cas est une réaction avec des implications pratiques relatives à la perte. La tristesse et les regrets y prédominent. Nous nous inquiétons des coûts et de l'organisation de l'enterrement. Nous craignons aussi que, dans notre peine, nous passions moins de temps avec d'autres personnes qui dépendent de nous. Cette phase peut être facilitée par une simple clarification et par un réconfort. Le deuxième type de dépression est plus subtil et plus intime. Cela exige une préparation au calme afin de supporter la séparation et d'offrir un dernier adieu. La dépression est une phase aiguë du deuil. Elle peut se manifester par un retrait social, une incapacité à maintenir les habitudes de travail et les relations interpersonnelles. L'endeuillé peut s'identifier de façon inconsciente au défunt avec des préoccupations de santé similaires, ou une imitation temporaire de ses manières d'être, de se comporter, de ses habitudes. Au cours de cette période, même si l'endeuillé est conscient de l'absence réelle du défunt, des perceptions sensorielles d'allure hallucinatoires peuvent survenir (impression d'entendre la voix ou le pas du défunt, de sentir son contact, de l'entrapercevoir, etc.).
- La résignation est l'étape de l'abandon de cette lutte au cours de laquelle la personne peut avoir le sentiment d'avoir tout essayé pour revenir à la situation perdue. Elle n'a aucune visibilité de ce qu'elle peut faire et agit au gré des circonstances. L’heure est au fatalisme (litt. du latin fatum, destin). Ce contexte est soutenu par de nombreuses cultures populaires : l'attente du revers de fortune, la volonté des dieux, etc. Cette résignation peut aussi se composer de rejet. Exemple : « c'est la vie, c'est comme ça ».
- Dans l'acceptation, le caractère obsédant de la cause du deuil s’amenuise. Il arrive encore que la personne manifeste des états antérieurs, mais l’intensité y est moins marquée. Les périodes d’abattement sont moins longues. L'optimisme renaît. Quelques projets sont envisagés.
Selon les personnes et le contexte, ces étapes sont vécues de manière plus ou moins longue, avec une intensité variable.
Critiques du modèle des stades du processus de deuil
Les chercheurs ont tendance à généraliser abusivement le terme de deuil. Le fait de subir émotionnellement une perte n'implique pas nécessairement d'être confronté à un deuil.
Dans notre deuil, nous passons différentes longueurs de temps à chaque étape, et nous exprimons chaque étape plus ou moins intensément. Les différentes étapes ne se produisent pas nécessairement dans l'ordre. Nous passons souvent entre les étapes avant de parvenir à une acceptation plus paisible de la mort. Ces approches des étapes du deuil appliquées au changement dans l'organisation présentent davantage un portrait des réactions à la perturbation qu’une modélisation de l’adaptation à celle-ci. Il serait plus utile de considérer les différentes étapes comme des guides dans le processus de deuil afin de s'en servir comme aide, comme mode de compréhension afin de se remettre en contexte.
Le processus de deuil est un processus individuel et personnel. Par conséquent, il est très délicat d’utiliser la courbe des étapes du deuil dans des contextes de projets dans lesquels des centaines de personnes sont impactées, voire des milliers ou des millions.
Le modèle des stades a une lecture trop linéaire et séquentielle de l'ajustement afin de réussir une gestion personnelle et collective de l’impact émotionnel du deuil.
Plusieurs émotions sont souvent ressenties par les acteurs, dans le cadre de la perte d'emploi, par exemple, qui ne se retrouvent pas dans la théorie des étapes du deuil : anxiété, peur, appréhension et sentiments de panique.
L'amalgame hâtif du modèle des stades de la psychologie du deuil, originellement destinée à la mort d'un être cher à celui d'un autre domaine comme le changement en entreprise est contestable sur un plan éthique, il est dangereux méthodologiquement et humainement, dans le contexte de l’entreprise, de transformer :
- Le déni en refus de comprendre ou en mutisme
- La révolte en résistance
- La dépression en décompression
- Le marchandage en résignation
- L'acceptation en intégration
L'approche épistémologique du modèle des stades du deuil repose sur un processus de deuil quasi déterministe. Il débouche automatiquement sur un happy end : l'acceptation. Si certaines personnes n'atteignent pas cette étape heureuse, les théoriciens en induisent qu'elles souffrent d'une pathologie. Autrement dit, leur approche suit un ideal type normatif. Ils considèrent qu'il n'est pas normal que la réalité diffère de leur modèle.
La question se pose de l'universalité du deuil, au sens de l'affliction ressentie (grief). Selon la théorie de l'ordre sensoriel connexionniste et proprioceptif, l'expérience émotionnelle provient de la perception des modifications expressives, corporelles et physiologiques. Ceci signifie donc que la réaction émotionnelle de deuil n'est pas exclusivement dépendante des normes sociales. L'approche socio-constructiviste, au contraire, considère que l'expérience émotionnelle de deuil est socialement déterminée. Pour ces auteurs, ce sont les normes et les règles sociales qui dictent l'ensemble des réactions que le sujet doit avoir dans une certaine situation. Pour arriver à leur conclusion de l'universalité du ressenti du deuil, ils utilisent des procédés méthodologiques relativistes encombrants et critiquables. En réalité, la réaction émotionnelle de chaque individu face au deuil est insondable. Les études comparatives inter-culturelles sur les rites, les coutumes, les symptômes, la durée, les phases, et tous les moyens mis en œuvre par les sociétés pour diminuer l'impact de la perte occupent beaucoup les esprits des chercheurs et dévorent les budgets de recherche. Mais l'essentiel est ailleurs. Il ne s'agit pas de chercher si la signification du deuil est universelle. Mais, inversement, pour le chercheur il s'agit d'adopter une méthodologie a priori. L'homme agit. L'axiome de la praxéologie constitue une vérité universelle. Certaines personnes agissent face au deuil afin d'atténuer la douleur, d'autres ont une attitude de réconfort face à la mort de leur proche. La mère d'un combattant mort sur le champ de bataille se réjouit que son enfant ait fait avancer la cause de la liberté de son peuple. Certaines religions pensent même que les victimes gagnent leur place au paradis. Les chrétiens sont à la fois peinés de la mort physique d'un parent, mais ils sont aussi heureux d'accompagner l'âme de l'être cher dans la direction d'un paradis dans l'au-delà.
Références
- ↑ De façon exceptionnelle, suite au décès d’une personnalité importante ou d’un événement qui a marqué les esprits comme par exemple, un attentat, le deuil peut être officiel et collectif. En France, des drapeaux sont mis en berne sur la façade des bâtiments officiels publics (mairies, écoles...)
- ↑ La couleur du deuil varie selon les cultures et les mœurs. En France, et généralement en Europe, cette couleur est le noir. Au Vietnam, en Corée du Sud et en Inde, c’est le blanc. Au Japon, c’est le blanc et le noir. En Chine, c’est le rouge, combiné au blanc.
- ↑ Le deuil est compliqué lorsque le travail du deuil est perturbé. Ainsi, il peut être amplifié (intensifié), absent (retardé par un déni) ou inachevé (débordement émotionnel ultérieur).
- ↑ Lors de l’annonce du décès
- ↑ Le deuil pathologique est caractérisé par l’apparition de troubles psychiatriques au cours du processus de deuil. La personne peut avoir des troubles hystériques, obsessionnels ou délirants, mais généralement il s’agit d’une anxiété ou des troubles de l’humeur : Dans le deuil pathologique, le sujet refuse la perte, mais, il arrive aussi que certaines personnes vivent le deuil sans ressentir la perte. Elles estiment qu'elles n'ont rien perdu. Ces non-deuils (pertes sans valeur affective ou encore appelés invalidation du deuil chez les auteurs cognitivistes), sont appelés des « facteurs blancs ». Il s'agit des situations qui ne contiennent pas la valeur de la perte d’une personne aimée ou d’une dissolution d’un lien (par exemple, rupture avec un/une partenaire aux relations uniquement érotiques, licenciement ou démission d'une entreprise qui ne correspond pas à ses aspirations, décès d'un membre de sa famille avec laquelle les relations étaient froides...)
- ↑ Décompensation caractérisée d’une personnalité pathologique mais jusqu’à présent non exprimée
- ↑ L’alcoolisme, par exemple
- ↑ Les archéologues ont fait la découverte de tombes et de rites funéraires dans la vie de premiers hommes intelligents vivant sur Terre (l'Homo Sapiens Sapiens)
- ↑ La mort lente d’un proche âgé ou atteint d’une maladie incurable peuvent entraîner un deuil anticipé. Dans ce cas, une personne endeuillée développe des mécanismes de défenses adaptatives. Le travail de deuil commence lorsque l'idée de la mort vient à l'esprit et qu’elle est confirmée par le diagnostic du médecin. Dans certaines circonstances, le deuil anticipé peut arriver à son terme avant même la mort de l'intéressé (cas des femmes de soldats annoncés prématurément morts au combat. Ces épouses n'ont pas retrouvé leur ancien attachement affectif au retour des corps. Le deuil anticipé est spécifique parce qu’il commence alors que la personne est toujours en vie. Il se réalise progressivement, de telle manière que le sujet endeuillé se sent moins submergé par la peine ou par le chagrin lorsque le décès survient.
- ↑ Freud définissait le deuil comme « la réaction habituelle à la perte d’une personne aimée ou d’une abstraction mise à sa place, la patrie, la liberté, un idéal, etc.» p259. Sigmund Freud, 1915, « Deuil et mélancolie », Œuvres complètes, tome XIII. Paris : P.U.F., pp259-279. Freud a initié l'étude du phénomène de deuil par une comparaison avec la mélancolie. Il différencie la mélancolie (forme de dépression) et le deuil. Pour ce dernier, il n'y a pas de diminution du sentiment de soi (estime de soi) et il n'y a pas de culpabilité ni de reproche vis-à-vis de soi-même.
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Les stratégies de coping désignent l’ensemble des comportements qu’un individu adopte, par des règles tacites ou implicites, en vue de maîtriser, tolérer ou diminuer l’impact d'un événement perçu comme menaçant pour lui afin d'améliorer son bien-être physique et psychologique.
- 1984, J. C. Latack, "Career transitions within organizations: An exploratory study of work, nonwork, and coping strategies", Organizational Behavior and Human Performance, vol 34, no 3, pp296-322
- ↑ Théorie du deuil sur la transmission d'entreprise
- 1999, P. Pailot, "Freins psychologiques et transmission d'entreprise : un cadre d'analyse fondé sur la méthode biographique", Revue Internationale des PME, 12 (3), pp9-32
- 2000, P. Pailot, "De la difficulté de l’entrepreneur à quitter son entreprise", In: T. Verstraete, dir., "Histoire d’entreprendre : Les réalités de l’entrepreneuriat", Paris : Editions EMS, pp275-286
- 2008, M. Dubouloy, "Reprise d’entreprise : deuil et transmission", In: H. Bouchiki, dir., "L’art d’entreprendre – Des idées pour agir", Pearson Education France, pp67-78
- 2009, T. Bah, "La transition cédant-repreneur : Une approche par la théorie du deuil", Revue Française de Gestion, 35 (194), pp123-148
- 2009, H. Mahé de Boislandelle, 2009, "Vaincre les freins dans la transmission d’entreprise : Deuil, craintes, et ambiguïtés", In: B. Pras,, dir. "Management : Tensions d’aujourd’hui", Paris : Editions Vuibert, pp73-82
- ↑ J. L. Roy, 1997, "De l’usage du deuil dans l’entreprise", L’Expansion Management Review, 86, pp84-93
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- 2002, D. Linhart, "Perte d’emploi, perte de soi", Paris : Editions Erès
- 2003, J. Archer et V. Rhodes, "The grief process and job loss: A cross-sectional study", British Journal of Psycholgy, 84 (3), pp395-410
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- ↑ Théorie du deuil dans les organisations
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- 2006, G. Blau, "A process model for understanding victim responses to worksite/function closure", Human Resource Management Review, 16 (1), pp1025-1040
- 2008, M. L. Marks et R. Vansteenkiste, "Preparing for organizational death: Proactive HR engagement in organizational transition", Human Resource Management, 47 (4), pp809-827
- 2011, Jacques-Antoine Malarewicz, "Petits Deuils en Entreprise", Paris: Editions Pearson
- ↑ Charles Gave, 2010, L'État est mort, vive l'État, Bourin Éditeur, ISBN 2849411922
- ↑ Pierre Manent, 2006, « La fausse mort de l'État-nation », Entretien donné à L'Expansion, article paru le 1er octobre 2006
- ↑ La notion de travail de deuil a été pour la première fois introduite par Freud. Toute l'analyse psychanalytique de Freud commence par le sexe. La satisfaction des besoins d'un individu s'exprime plus particulièrement par la libération d'une énergie libidinale. L'amour est conceptualisé comme un attachement (cathexis) à la personne aimée (objet) ou à tout ce qui y est associé. Quand un individu est endeuillé, il est confronté à l'absence de son objet d'amour. L'expérience de son Moi entre en conflit avec la représentation ou la sensation venant de l'extérieur. Il ressent la manifestation d'affects pénibles de terreur, d'angoisse, de honte ou de douleur psychique. Il libère ses affects par des pleurs, des plaintes, des lamentations et des expressions auprès d'autrui. Il liquide ses affects pénibles (effet cathartique) jusqu'à l'épuisement de son stock d'énergie libidinale. La cathexis est alors rompue. L'énergie se reconstituera par l'intermédiaire d'autres liens affectifs. Le détachement (décathexis) s'effectue par un travail de pensée (qui demande beaucoup d'énergie) afin de recréer de nouvelles associations mentales. Ce travail se termine lorsque toutes les pensées, souvenirs ou espoirs sont détachés de l'objet. Pour Freud, le travail de deuil est donc une activité psychique extrêmement précieuse.
- ↑ Le deuil provoque chez l'individu une modification de sa cognition :
- Par des processus de perceptions subjectives et objectives de la réalité de la mort
- Par des schèmes de comportement via son système de croyance et sa vision du monde (injuste, incontrôlable et perdant toute sa signification). Tous les individus possèdent des représentations internes du monde, utilisées pour appréhender la réalité et projeter leurs comportements.
- Par une recherche de sens (search for meaning). Le fait de percevoir des bénéfices à la perte peut aider à réduire les dissonances cognitives qu’un évènement traumatique crée automatiquement.
- ↑ Le modèle du double processus d’ajustement à la perte. Ce modèle définit deux types de stresseurs auxquels les personnes endeuillées sont confrontées. Le premier agent stresseur est orienté vers la perte, et le second est orienté vers la restauration. Le premier renvoie à l’expérience de la perte en elle‐même (grief) alors que le second englobe toutes les conséquences de la perte (bereavement). Ces deux orientations sont des sources d’excitation et de stress pour la personne en deuil. Ce modèle spécifie un processus dynamique d'ajustement et d'évitement qui s’inscrit dans une oscillation entre stresseur orienté vers la perte et stresseur orienté vers la restauration. L’oscillation entre ces deux stresseurs est nécessaire à l’adaptation de la personne endeuillée. L’endeuillé s’ajuste à la perte du lien avec la personne décédée (il donne une signification à la perte). Parallèlement, il gère les changements indirects dont des problèmes de fond causés par la perte en restaurant des modèles psychologiques liés à sa propre identité, à la définition de son soi et à ses relations avec les autres. Margaret S. Stroebe et Henk Schut, 1999, "The dual process model of coping with bereavement : Rationale and description", Death studies, 23(3), pp197-224
- ↑ Le deuil est un événement de la vie intégrant plusieurs facteurs de stress, dont certains peuvent être évalués comme modifiables, d'autres non. Selon une échelle d'intensité de stress à trois niveaux : le premier niveau est d'intensité faible. Il représente les tracas de la vie quotidienne (embouteillage en voiture, verre que l'on casse, repas brûlé, examen à passer, etc.). Le deuxième niveau est d'intensité plus élevée, il représente des événements stressants de la vie (perte d'un travail, mariage, naissance d'un enfant, début d'une carrière professionnelle). Et le troisième niveau, au sommet de l'échelle de stress habituelle, représente les événements négatifs extrêmes ou événements majeurs de vie ou encore événements susceptibles d'induire l'état de stress post-traumatique ou PTSD (DSM-III-R) (accident de transport en commun, catastrophes naturelles ou prises d'otages). Le deuil post-traumatique décrit un état psychologique dans lequel se trouve une personne qui échappe à une situation dramatique, brutale, imprévue, de mort collective ou de menace de mort à plusieurs. L’endeuillé est frappé par un double traumatisme (il a manqué mourir d’une part, et il est témoin de la mort de proches connus ou inconnus).
- 1981, A. G. Billings, R. H. Moos, "The role of coping responses and social resources in attenuating the stress of life events", J ournal of Behavioral Medicine, 4, pp139–157
- 1984, R. S. Lazarus, S. Folkman, "Stress, appraisal, and coping", Springer Publishing : New-York
- 1994, C. Aldwin, "Stress, coping, and development: An integrative approach", New York: Guilford
- 1994, C. S. North, E. M. Smith, E. L. Spitznagel, "Post-traumatic Stress Disorder in Survivors of a Mass Shooting", American Journal of Psychiatry, 151, pp82-88
- ↑ Lorsqu’une personne se trouve devant l'incapacité de gérer l'ampleur cognitive de ses émotions douloureuses de façon individuelle, elle se tourne vers les institutions qui incarnent la mémoire collective. Afin de donner du sens à ses émotions, l'individu a tendance à se référer à une entité abstraite qui la rassure sur l'existence potentielle d'un ordre social culturel supra-ordonné, d'un socle culturel partagé socialement, d'un système social stable... Il peut, dans ce cas, participer à des rituels sociaux pour contrecarrer son impression d’insuffisance cognitive individuelle. Face à des émotions négatives qui les submergent, certaines personnes ressentent le fort besoin d’interaction sociale, soit en face à face (dialogue avec des amis ou la famille), soit de manière médiatisée de façon passive (par la télévision : messe mortuaire) ou active (par téléphone de façon synchrone, et/ou par les réseaux sociaux d'internet de façon synchrone et asynchrone). Tout en protégeant l'individu d'une empathie douloureuse du deuil subi, Internet et ses réseaux sociaux fournissent un élément cognitif radicalement différent des rites sociaux classiques. Par exemple, dans le cadre du deuil d'une célébrité, Internet donne la possibilité d’individualiser le processus de deuil, selon le rythme et les besoins de chaque fan.
- « Avec Internet, le fan, devenant acteur, gère lui-même l’utilisation des sites et des interactions sociales basées sur le décès, sélectionne les messages qu’il a envie de lire au moment où il a envie de les lire… Ainsi, selon l’étape du processus de deuil dans laquelle chaque fan se situe, il trouve sur Internet de quoi répondre à son besoin immédiat : vivre le deuil dans la solitude, en éteignant son ordinateur, ou vivre le deuil en recherchant de l’information, mais sans interagir avec les autres ou encore en interagissant en direct ou de manière asynchrone avec les autres fans. Internet offre donc la possibilité d’autogérer son deuil » Marie-Pierre Fourquet-Courbet et Didier Courbet, 2012, "Comment les fans réagissent-ils lors du décès de la célébrité ? Usages des communications et des médias sociaux dans le deuil de Michael Jackson", Communication, Vol 30, n°12
- ↑ Les positions théoriques de John Bowlby sur la notion d’attachement sont construites en rupture avec les postulats de la psychanalyse, notamment par la critique de la théorie des pulsions. Le deuil est compris par la psychologie du Moi conscient et non d'un Moi obscur inconscient libidineux de la psychanalyse freudienne, qui serait un manipulateur des comportements des individus.
L'attachement est un besoin humain fondamental permettant d’instaurer des liens forts et durables. Ce besoin nait des premiers liens qu'entretient un enfant avec sa mère et se nourrit par la qualité de la relation avec une ou des figures d’attachement (la mère, le père ou un pair). Cet attachement est une source de sécurité/d’insécurité pour tout individu. Par conséquent, l’intensité du deuil ressenti par un individu serait fonction de l’intensité de l’attachement éprouvé vis-à-vis de la personne défunte, et ferait écho au comportement d’attachement et aux circonstances de séparation d’avec la ou les personnes d'attachement dans la petite enfance de l'endeuillé.
- 1969, John Bowlby, "Attachment and loss", vol. 1 Attachment, Basis Books : New-York
- 1974, John Bowlby, "Attachment and loss", vol. 2 Separation : anxiety and anger", Basis Books : New-York
- Traduit en français en 1978, "Attachement et perte : séparation, angoisse et colère", Presses Universitaires de France
- 1979, John Bowlby, "The making and breaking of affectional bonds", London: Tavistock
- 1980, J. Bowlby, "Attachment and loss", vol. 3 Loss : sadness and depression", Basis Books : New-York
- 1999, Nigel P. Field et al., "The relation of continuing attachment to adjustment in conjugal bereavement", Journal of Consulting and Clinical Psychology, 67(2), pp212-218
- ↑ Le deuil ressenti par une personne peut être bloqué à plusieurs niveaux.
- ↑ John Bowlby, 1961, "Process of mourning", International Journal of Psychoan., 42, pp317-340
- ↑ William J. Worden critique la passivité qui se dégage des autres théories des stades du deuil. Il propose une conception volontariste et thérapeutique afin de donner aux endeuillés un sentiment de contrôle et d’espoir afin d'agir sur la souffrance engendrée par la perte.
- Willima J. Worden, 1982, "Grief Counseling and Grief Therapy: A Handbook for the Mental Health Practitioner", Springer
- ↑ Les réactions initiales à la perte se manifestent par le choc, la torpeur, la confusion, l'incrédulité, la colère et certains symptômes physiques. Accepter la perte, c'est parler des circonstances entourant la mort et ne pas donner à la nature irréversible de la perte un caractère trop important
- ↑ Le survivant ne ressent plus le besoin d’éviter les souvenirs de la perte qui étaient provoqués par peur de ressentir des remords ou une douleur intense. Le fait de ne rien ressentir provoque une multiplication de problèmes physique ou psychologiques
- ↑ Elisabeth Kübler-Ross, psychiatre et psychologue, a analysé ce cheminement en plusieurs étapes, dans son livre de 1969, "On Death and Dying".
Beaucoup d'auteurs en organisation se sont inspirés de ce modèle dont M. Alain. Il met en valeur le processus de résistance négative au changement. Il indique que les réponses émotionnelles peuvent être mises sur un graphique en forme de « W ».
- M. Allain, 1996, "Prendre en main le changement – Stratégies personnelles et organisationnelles", Montréal: Éditions Nouvelles:
- D. Perlman et G. J. Takacs, 1990, "The 10 Stages of Change", Nursing Management, Vol 21, n°4, pp33-38
- ↑ Terme utilisé par le cabinet de conseil en réorganisation, Korda & Partners, pour appliquer la théorie des stades de la psychologie du deuil à l'entreprise France Télévision
Bibliographie
- 2005, M. Keirse, "Faire son deuil, vivre son chagrin", Bruxelles : Editions De Boeck Université.
- 2006, Emmanuelle Zech, "Psychologie du deuil : Impact et processus d’adaptation au décès d’un proche", Sprimont, Éditions Mardaga
- 2007, M. F. Bacqué, "L’un sans l’autre : Psychologie du deuil et des séparations", Editions Larousse : Paris
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