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Éthique

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Définition

L'éthique est classiquement considérée comme l'une des trois branches de la philosophie, à côté de la physique et de la logique (par exemple, chez les Stoïciens, chez Kant). L'éthique est la connaissance normative du comportement humain, dont la fin est la connaissance et l'action droites : les Stoïciens grecs privilégient la connaissance, les Romains l'action. Pour ces philosophes, il s'agit de connaître les normes de la nature, c'est-à-dire de la raison (car le monde physique est informé selon ses lois qui sont l'expression du divin) ; cette connaissance est la sagesse, état de la psyché (âme) qui la rend en quelque sorte invincible. En ce sens, l'éthique suppose une maîtrise surhumaine des passions ; au point de vue des Anciens, cette maîtrise rapproche du dieu du monde.

L'éthique permet de déterminer ce qui est "bon" et ce qui est "mauvais", ce qu'il est légitime de faire, et ce qui est illégitime. L'usage moderne de ce mot tend à le rendre équivalent à la « morale » ("morale" et "éthique" sont des mots d'origine respectivement latine et grecque qui ont tous deux le sens de "moeurs" : les philosophes emploient souvent les deux termes en leur donnant des sens différents, variables d'un philosophe à l'autre).

L'étude du fondement de la morale est une question philosophique difficile. Plusieurs philosophes (Kant, Schopenhauer) affirment qu'une éthique repose nécessairement sur une métaphysique. Hume soutient qu'on ne peut inférer une éthique normative de propositions factuelles ou de prémisses descriptives. Un utilitariste tel que John Stuart Mill fait dériver les règles morales de l'expérience, qui a permis aux hommes d'acquérir "des croyances fermes concernant les effets de certaines actions sur leur bonheur". Le fondement de la morale sera trouvé selon les cas dans une théologie morale, dans une anthropologie philosophique (qu'est-ce que l'homme et que doit-il être ?), ou dans une approche non dogmatique qui privilégie la cohérence des principes éthiques plutôt que la recherche de leur fondement (ce qui est la tendance moderne).

Ethique normative

Il y a différentes façons de juger une action. On peut distinguer trois types d'éthiques :

  • l'éthique conséquentialiste : une action doit être jugée uniquement sur les conséquences qu'elle entraîne (hédonisme, utilitarisme...);
  • l'éthique déontologique : au contraire, une action ne doit pas être jugée sur ses conséquences, elle est bonne ou mauvaise en elle-même (morale kantienne, principe de non-agression, principe de non-nuisance...);
  • l'éthique téléologique : est bonne une action ou un comportement qui est sa propre finalité, qui est conforme à la nature humaine (aristotélisme...).

L'éthique libérale utilise ces trois types de jugements dans ses argumentaires : ainsi les jusnaturalistes et les "égalitaristes" rawlsiens invoqueront des arguments déontologiques, tandis que les utilitaristes préfèreront des arguments conséquentialistes et les randiens des arguments téléologiques.

Ethique libérale

L'éthique normative ne permet pas de trancher entre les différentes éthiques qui peuvent exister. L'éthique se vit d'abord comme une affaire personnelle, la conduite de chacun relevant ultimement de sa seule conscience individuelle. Elle devient subjective, individuelle et relative.

Cependant, l'éthique des uns n'intéressant les autres que du point de vue de l'interaction sociale entre les hommes, on discute et analyse souvent l'éthique comme un ensemble de règles (par exemple le code éthique d'une profession) et de schémas de coopération.

Il faut donc distinguer l'éthique individuelle, l'éthique propre à un groupe d'individus (éthique professionnelle, déontologie) et l'éthique sociale, qui rend possible la vie en société.

L'éthique libérale consiste plus précisément à reconnaître l'existence de lois objectives, extérieures à la volonté de l'homme, mais incrites dans sa nature sociale, et qui l'obligent à les respecter sous peine d'engendrer le désordre. Il s'agit du droit à la vie, dont est déduit le droit de propriété, duquel découlent ensuite les droits de contracter, d'échanger, de tester, ou encore la liberté de circuler et de vivre comme on l'entend tant que ce mode de vie ne suppose pas l'agression d'autrui, etc. Ces droits ne dépendent pas de l'approbation d'une majorité de la population ou de l'imprimatur d'une autorité politique ; ils sont inhérents à la nature même de l'homme. Tout ceci signifie aussi que le libéralisme n'est pas axiologiquement neutre: il défend des valeurs bien définies qui ne sont pas compatibles, sur le plan purement politique, avec le totalitarisme ; ou, sur le plan des idées, avec la défense de conceptions anti-universalistes, par exemple.

Ethique libertarienne

L'éthique sociale des libertariens est une éthique universelle qui s'exprime au travers du droit naturel ou du droit de propriété sur soi. Cette éthique objective rend compatibles entre elles les différentes morales individuelles. Les principes de base sont les suivants :

  1. chacun est propriétaire de lui-même et des fruits de son action ;
  2. une personne ne peut échanger que ce dont elle est propriétaire ;
  3. l'échange repose sur le principe d'autonomie de la volonté et le consentement des acteurs (axiome de non-agression).

Toute action qui n'est pas conforme à ces principes est une violence illégitime. Par exemple : vol, meurtre, impôts, lois qui restreignent la liberté individuelle, refus d'exécuter un contrat librement accepté, obligation imposée par l'Etat, etc.

Ethique minimale

Le philosophe Ruwen Ogien décrit une "éthique minimale" ([1]) qui rejoint les conceptions libérales et libertariennes et qui repose sur trois principes :

  1. neutralité à l’égard des conceptions substantielles du bien ;
  2. principe négatif d’éviter de causer des dommages à autrui ;
  3. principe positif qui nous demande d’accorder la même valeur aux voix ou aux intérêts de chacun.

Dans une version postérieure, ces principes deviennent les suivants :

  1. principe de considération égale, qui nous demande d’accorder la même valeur à la voix et aux intérêts de chacun (plus précisément : considération égale de la voix et des revendications de chacun dans la mesure où elles possèdent une valeur impersonnelle);
  2. principe de neutralité à l’égard des conceptions du bien personnel (plus précisément : principe d'indifférence morale du rapport à soi-même) ;
  3. principe d’intervention limitée aux cas de torts flagrants causés à autrui (ou plus simplement : principe de non nuisance).

Alors que l'éthique minimale libérale ne s'applique qu'au champ du politique et du rapport à l'autre (en ce sens, c'est une éthique incomplète), Ruwen Ogien généralise la démarche libérale et expose un minimalisme moral radical, dans le sens que "ce que nous faisons de nous-mêmes n'a aucune importance morale" (indifférence morale du rapport à soi-même).

Ethique économique et sociale

L'éthique économique et sociale s'intéresse à l'organisation de la société dans une dimension tant individuelle qu'institutionnelle : c'est un autre nom pour la philosophie politique. Les courants majeurs sont aujourd'hui les suivants (d'après Ethique économique et sociale, Arnsperger et Van Parijs, 2003) :

Citations

  • Si par "éthique", on veut parler d'une théorie complète de la normative du comportement, capable de décider en toute occasion du bien et du mal pour les actions d'une personne donnée, alors NON, le libéralisme n'a RIEN à voir avec une telle éthique, car il ne se prétend ni complet, ni applicable à tout contexte. Le libéralisme est une théorie du droit. (...) Le droit s'applique pour les interactions entre individus, mais ne dit rien sur ce que doivent faire les individus au sein de leur propriété. Il n'est pas une éthique complète. Il ne s'applique qu'aux arrangements mutuels pour établir et maintenir un état de civilisation pacifique. Il ne peut pas prendre en compte a priori les éléments sur lesquels chacun de nous agit, en dehors de tout arrangement et parfois contre des arrangements existants. Il ne s'applique donc pas directement à la prise de décisions individuelles dans le contexte de la connaissance qu'a chaque individu du monde dans lequel il agit. Il s'applique aux négociations entre individus à la lumière de l'information partageable par ces individus. Bref, le libéralisme n'a RIEN à voir avec l'éthique au sens strict. (François-René Rideau)
  • Le libéralisme a un fondement essentiellement moral. Est moral tout ce qui permet à l’homme d’agir selon sa nature et la nature humaine est caractérisée par la rationalité de l’être humain, par sa capacité à imaginer le futur, et les meilleurs moyens d’atteindre les objectifs qu’il poursuit. (Pascal Salin)
  • (...) les propositions politiques sont nécessairement des jugements de valeur : la philosophie politique est donc nécessairement normative et il est par conséquent nécessaire de proposer un système explicite de normes si on veut fonder le principe de la liberté personnelle. (Murray N. Rothbard)
  • C’est cette conviction que l'économie de marché est bonne moralement parce qu’elle seule peut nourrir les pauvres, qui sera à l’origine de l’idée d’ industrialisme, imaginée par Turgot et développée parJean-Baptiste Say. La société recèle en son sein des trésors de richesses dormantes, qui seront réveillées si l’ économie est libérée de ses entraves. Alors non seulement les pauvres mangeront à leur faim, mais, parce qu’ils ne seront plus affamés, ils seront moins tentés de s’entretuer, soit à l’intérieur des frontières (sous la direction d’un Robespierre et de ses semblables) ou à l’extérieur (sous celle d’un Napoléon et de ses semblables). L’économie de marché nourrit et pacifie les hommes. Comment des chrétiens ne l’approuveraient-ils donc pas – dès lors du moins que, marchant sur les pas de la Révolution papale, ils ont décidé de mettre l’intelligence et la science au service de la charité ? (Philippe Nemo)
  • Il est toujours tentant pour n'importe quel groupe de pression d'user de la contrainte publique pour imposer aux autres ses propres goûts ou ses propres intérêts privés. Mais l'usage de la violence politique par un groupe de pression pour promouvoir sa propre morale montre on ne peut plus clairement que la morale qu'on cherche à imposer n'est pas aussi bonne qu'on le dit puisqu'il faut user de la violence pour que les gens l'adoptent. On ne conçoit pas qu'une morale puisse s'imposer par une procédure majoritaire. (Bertrand Lemennicier)
  • L'éthique comprend l'ensemble des règles, obligatoires ou non, qui doivent gouverner les relations interindividuelles. La philosophie politique forme le sous-ensemble de l'éthique qui définit les droits individuels, c'est-à-dire des règles obligatoires (i.e. à imposer par la force) dans les relations interindividuelles. Comme les libéraux, les anarcho-capitalistes insistent sur cette distinction entre le droit, qui dit les règles morales légitimement imposables par la force, et l'éthique, qui contient aussi des normes non obligatoires. Pierre Lemieux, L'anarcho-capitalisme, PUF
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