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Robespierre

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Robespierre
Homme politique

Dates 1758-1794
Robespierre.jpg
Tendance Antilibéral jacobin
Nationalité France France
Articles internes Autres articles sur Robespierre

Citation « La Terreur n'est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible »
Interwikis sur Robespierre

Maximilien Marie Isidore de Robespierre est un homme politique français né à Arras, le 6 mai 1758 et mort à Paris le 10 thermidor an II ou 28 juillet 1794. Il est la figure la plus mystérieuse de la Révolution, souvent considéré même comme l'âme de la Révolution française. Ses admirateurs comme ses détracteurs ont vu en lui un précurseur de Lénine et dans le jacobinisme une préfiguration du bolchevisme.

L'ascension d'un avocat

Fils d'un avocat, élevé par sa grand-mère et deux tantes, il fait des études au collège d'Arras puis à Louis-le-Grand et fait son droit. Avocat à Arras, il participe aux concours des académies et se montre un disciple de Jean-Jacques Rousseau. Il mène une existence terne et respectable où la passion n'a pas sa place. Il ne supporte ni désordre dans la tenue ou les sentiments ni la vulgarité ni aucune forme d'exhibition ; sur ce plan, la Révolution ne devait rien changer à cet homme « insupportablement honnête » (Büchner).

Ses opinions avancées en font un député du Tiers État de l'Artois en 1789. La chandelle d'Arras n'est guère éloquente mais comme le souligne Mirabeau il croit tout ce qu'il dit. Son langage est celui de la prédication et de l'Inquisition : il se fait le dénonciateur inlassable d'intrigues et de conjurations. Il prononce plus de 170 discours à l'Assemblée tout en s'imposant au club des Jacobins dont il devient le principal animateur. Il dénonce le suffrage censitaire et l'exclusion des citoyens passifs du droit de pétition : Je défendrai surtout les plus pauvres. Plus un homme est malheureux et faible, plus il a besoin du droit de pétition. Il acquiert un poids politique important car l'hostilité qu'il doit affronter dans l'Assemblée nourrit sa popularité en dehors de celle-ci : il fait régner le « despotisme d’opinion » (Louvet). La Constituante suit sa proposition de non-réélection des députés sortants à la Législative. Porté en triomphe lors de la séparation de la Constituante, accusateur public auprès du Tribunal criminel de Paris, il conserve une grande influence au club des Jacobins. Il s'oppose à la guerre révolutionnaire défendue par les Girondins par crainte de voir Louis XVI utiliser l'armée à son profit.

Au Comité de salut public

Membre de la commune insurrectionnelle lors de la chute de la Monarchie (août 1792), il se montre très prudent lors des massacres de Septembre : il théorise la Révolution plus qu'il ne participe aux événements. Il est le mieux élu des députés de Paris à la Convention (338 voix sur 525 votants) et devient l'un des chefs de la Montagne. Il vote pour la mort de Louis XVI (La clémence qui compose avec la tyrannie est barbare) et provoque la chute des Girondins dont il a été le principal accusateur le 31 mai 1793. Membre du Comité de salut public, il frappe sur sa gauche les hébertistes avec l'appui de Danton en mars 1794 avant de se retourner sur sa droite contre les Indulgents et dantonistes. Après la chute des factions, il se trouve l'homme le plus influent de la Révolution : membre du Comité de salut public, maître du club des Jacobins et de la Commune de Paris qu'il a fait épurer au profit de ses partisans.

Le 5 février 1794, il s'était fait le défenseur de la Terreur associée à la vertu : La terreur n'est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible ; elle est donc une émanation de la vertu ; elle est moins un principe particulier, qu'une conséquence du principe général de la démocratie, appliqué aux plus pressans besoins de la patrie. Louis-Sébastien Mercier devait le qualifier de sanguinocrate.

La Grande Terreur

Il se montre soucieux de moraliser la Terreur en faisant rappeler les terroristes les plus féroces et en centralisant la répression à Paris par la suppression des tribunaux révolutionnaires des départements. La loi du 10 juin 1794 (22 prairial an II) aggrave la Terreur après un attentat contre Collot d'Herbois et une tentative contre Robespierre. Le rapporteur, Couthon, fidèle robespierriste, déclare : Le délai pour punir les ennemis de la patrie ne doit être que le temps de les reconnaître. Il s'agit moins de les punir que de les anéantir. Il n'est pas question de donner quelques exemples, mais d'exterminer les implacables satellites de la tyrannie ou de périr avec la République. Les ennemis du peuple devaient être condamnés à mort : répandre des fausses nouvelles relevait de cette catégorie. L'interrogatoire préalable et la présence d'avocats étaient supprimés, les preuves matérielles ou morales dispensaient de l'audition de témoins. L'article 16 précisait : La loi donne pour défenseurs aux patriotes calomniés des jurés patriotes ; elle n'en accorde point aux conspirateurs. Face aux protestations de certains députés, Robespierre réplique :

« Qu'on examine cette loi. Au premier aspect, on verra qu'elle ne renferme aucune disposition qui ne fût adoptée d'avance par tous les amis de la liberté ; qu'il n'y a pas un seul article qui ne soit fondé sur la justice et la raison ; qu'il n'est aucune de ses parties qui ne soit rédigée pour le salut des patriotes et pour la terreur des aristocrates. Citoyens, on veut vous diviser, on veut vous épouvanter ; eh bien, qu'on le sache donc, c'est nous qui avons défendu une partie de cette assemblée contre les poignards que des hommes animés d'un faux zèle voulaient aiguiser contre nous. Nous nous exposons aux assassins particuliers pour poursuivre les assassins publics ; nous voulons bien mourir, mais nous voulons que la patrie et la Convention soient sauvés. »

Après le vote de la loi, dont Robespierre a exigé un vote immédiat et unanime, il y eut 1376 exécutions en un mois et demi contre 1251 entre avril 1793 et juin 1794.

Les idées politiques et sociales de Robespierre

Cet avocat méticuleux, continuant d'arborer cravate et perruque poudrée au milieu des sans-culottes, a incarné l'esprit de la Révolution. Inaccessible aux passions, il est entièrement disponible pour la vertu. Il est l'idéologie incarnée. Il lance à Brissot : « Apprenez que je ne suis pas le défenseur du peuple ; je suis du peuple, je n’ai jamais été que cela, je ne veux être que cela ; je méprise quiconque a la prétention de vouloir être quelque chose de plus ». Il n'est pas un homme d'action, il ne participe à aucun comité de la Constituante et refuse les fonctions judiciaires que les électeurs lui proposent. Il se veut le défenseur de la cause de l'humanité. Quand les autres proposent ou agissent, il examine pour déceler l'intention cachée derrière les actes : l'exercice du soupçon est général et permanent. Ces discours interminables et monotones, qui excluent le débat et la contradiction, sont acclamés aux Jacobins, le rythme de l'incantation important plus que la rigueur du raisonnement. La périphrase et l'insinuation permettent de dénoncer le complot toujours mis en échec mais toujours renaissant. La Terreur est là dans le magistère de la parole.

Si jusqu'en septembre 1792, il défend les principes de la démocratie directe chère à Rousseau, il se fait le chantre de la représentation dès son élection à la Convention. Il entre enfin au Comité de salut public en juillet 1793, le pouvoir s'étant déplacé de la base vers le sommet. Son génie est d'épouser toujours la conjoncture : il peut être monarchiste le 9 août 1792 et républicain le 11 sans contradiction, le peuple souverain ayant tranché le 10. Le peuple est censé vouloir ce que veut la Convention et celle-ci ce que lui dictent Robespierre et le Comité de salut public. La République n'est pas faite tant que la France reste moralement monarchique : « Nous avons élevé le temple de la liberté avec des mains encore flétries des fers du despotisme ». Mais cette nécessaire régénération ne semble pas avoir de fin, chaque épuration annonce de nouvelles proscriptions.

Politiquement démocrate, il a compris le lien entre démocratie politique et démocratie sociale : à ses yeux, de trop grandes inégalités de fortune risquent de rendre impossible la démocratie. Il déclare cependant : l'égalité absolue des biens est une chimère et il condamne la loi agraire. Il n'est à aucun moment intervenu dans le débat sur la loi Le Chapelier. Il entend cependant lutter contre l'extrême disproportion des fortunes, source de bien des maux et des crimes. Comme il l'affirme : le premier droit est celui d'exister, la première loi sociale est donc celle qui garantit à tous les membres de la société les moyens d'exister ; toutes les autres sont subordonnéees à celle-là. Sa définition très restrictive de la propriété est rousseauiste et en opposition avec le définition qu'en donne la Déclaration des droits de l'homme de 1789 : la propriété est le droit qu'à chaque citoyen de jouir et de disposer de la portion de biens qui lui est garantie par la loi. Ceci dit, le peuple a ses yeux descend dans la rue pour exiger la tête des conspirateurs et jamais pour demander du pain : il ignore tout du peuple réel.

Apogée et chute de l'Incorruptible

La fête de l'Être suprême (8 juin 1794) marque son apogée. Hostile aux déchristianisateurs et aux athées, Robespierre avait déclaré le 7 mai 1794 : L'athéisme est immoral et aristocratique ; l'idée de l'être suprême et de l'immortalité de l'âme est un rappel continuel à la justice ; elle est donc sociale et républicaine. Robespierre préside la fête comme président de la Convention, les choeurs de l'Opéra entonnant l'hymne composé par Gossec, Père de l'Univers. Loin d'annoncer la fin de la Révolution comme l'espèrent les contemporains, le nouveau culte civique redonne à la Terreur un fondement moral et une légitimité mises en cause par l'amélioration de la situation intérieure et extérieure. L'Incorruptible apparaît aux yeux de beaucoup comme un dictateur en puissance.

Une coalition se forme contre lui, rassemblant les mécontents des comités (Billaud-Varenne Collot d'Herbois, Carnot, Cambon) et les représentants en mission rappelés (Fouché, Barras, Tallien). Le 8 thermidor, de retour à la Convention après un temps d'éloignement en partie lié à des problèmes de santé, Robespierre attaque tous les corrompus qui à ses yeux discréditent la Révolution.

« Disons qu'il existe une conspiration contre la liberté publique ; qu'elle doit sa force à une coalition criminelle qui intrigue au sein même de la Convention, que des membres du Comité entrent dans ce complot, que la coalition ainsi formée cherche à perdre les patriotes et la patrie. Quel est le remède à ce mal ? Punir les traîtres, renouveler les bureaux du Comité de sûreté générale, épurer ce comité et le subordonner au comité de Salut public, épurer le comité de salut public lui-même ; constituer l'unité du gouvernement sous l'autorité suprême de la Convention ; écraser ainsi toutes les factions du poids de l'autorité nationale, pour élever sur leurs ruines la puissance de la justice et de la liberté. »

Inquiets, les deux comités et les députés décident de réagir. Le 9 thermidor, Robespierre ne peut prendre la parole à la Convention et se trouve décrété d'accusation avec ses amis Saint-Just, Couthon et Lebas. La municipalité parisienne le libère de force, ce qui le faisait entrer dans l'illégalité, mais les troupes fidèles à la Convention investissent l'Hôtel de ville dans la nuit. Dans des circonstances obscures, suicide ou initiative d'un gendarme, Robespierre a la mâchoire fracassée par un coup de feu. Il est guillotiné le lendemain sans procès avec ses partisans, dans l'indifférence de la population. La Révolution n'est pas terminée mais elle n'ira pas plus loin.

Robespierre à l'écran

Il apparaît dans de nombreux films ou téléfilms et rarement sous un jour sympathique. Il est à noter que ses deux plus notables interprètes au cinéma ont été des Polonais : Wojciech Pszoniak dans le Danton (1983) de Wajda d'une part et Andrzej Seweryn dans le film du bicentenaire, La Révolution Française (1989) d'autre part.

Littérature secondaire

  • 1987, J. Tulard, J.F. Fayard, A. Fierro, Histoire et dictionnaire de la Révolution française, R. Laffont coll. Bouquins
  • 1992, Patrice Gueniffey « Robespierre » in François Furet, Mona Ozouf (dir.), Dictionnaire critique de la Révolution française volume Acteurs, Champs Flammarion, pp247-271
  • 2002, Philippe Nemo, Histoire des idées politiques aux temps modernes et contemporains, PUF, pp846-847

Citations sur Robespierre

  • Maximilien Robespierre ne fut rien d'autre que la main de Jean-Jacques Rousseau, cette main ensanglantée qui a extrait de la matrice du temps le corps dont Rousseau avait créé l'âme. (Heinrich Heine, 1834[1])
  • Le sujet le plus tragique que l'histoire nous offre, c'est certainement Robespierre. Mais c'est aussi le plus comique. Shakespeare n'a rien de pareil. (...) Il est sûr que tout élément du vrai Tartufe politique y était. Ses moralités banales, ses appels à la vertu, ses attendrissements calculés, de fréquents retours pleureurs sur lui-même, enfin les formes bâtardes d'un faux Rousseau, prêtaient[2] fort, surtout lorsque dans cette rhétorique discordait de façon criante tel brusque élan de fureur. (Jules Michelet, Histoire de la Révolution française)
  • Avec lui se terminait le premier essai de dictature révolutionnaire qu’ait connu la France. A l’étranger, on ne s’y était pas trompé : on disait la flotte de Robespierre, les armées de Robespierre. Il apparaissait comme l’incarnation révolutionnaire de son pays, le chef né de l’émeute. Il l’était bien en effet. Mais son cas est significatif parce qu’il nous montre un homme parfaitement identifié avec la Révolution, et cependant obligé, par l’insurmontable nature des choses, de composer avec la réalité, ce qui lui fait une figure assez singulière de théoricien abstrait et parfois d’homme d’État. Sans Robespierre, Napoléon Bonaparte n’eût peut-être pas été possible. (Jacques Bainville, Les dictateurs, 1935)

Notes et références

  1. Cité par Isaiah Berlin dans Deux Concepts de Liberté
  2. Dans ce mode intransitif d'emploi rare, "prêter" signifie "fournir des développements brillants".

Articles connexes

Liens externes


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