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Ontologie
L'ontologie est la branche de la philosophie qui a pour objet l'étude des propriétés générales de l'être. L'ontologie (du grec ὤν, ὄντος « étant », participe présent du verbe εἰμί « être ») est, selon la définition proposée par Aristote, l'étude de l'être en tant qu'être ainsi que les attributs qui lui appartiennent de par sa nature propre, c'est-à-dire l'étude des propriétés générales de tout ce qui est.
Aristote, qui a défini l'ontologie en tant que « philosophie première », a marqué une avancée très importante dans le concept d'ontologie. Avant lui, l'ontologie consistait dans l'étude (métaphysique) de l'être en tant qu'être, c'est-à-dire dans l'étude de la nature de l'être. Avec Aristote, le concept d'ontologie s'élargit à l'étude de la représentation de la connaissance et du raisonnement (syllogismes avec les bonnes utilisations des règles d’inférence). L'ontologie d'Aristote, dans Métaphysiques (IV, 1), est une branche de la philosophie qui traite de la nature et de l'organisation de la réalité.
Le subjectivisme ontologique de l'école autrichienne
L'ontologie permet de comprendre pourquoi les choses sont ce qu'elles sont ou, formulé d'une autre manière, pourquoi elles appartiennent à telle catégorie. Jerry Fodor[1], avance que la généralité des sciences physiques implique que toute théorie économique a une description physique qui peut être englobée dans les lois de la physique. Dans cette logique, les lois économiques pourraient donc être rapportées aux lois physiques quand on peut faire état de leurs propriétés physiques. Le philosophe, John R. Searle[2], s'est absolument opposé à cette vision. Il n'existe pas de correspondance exacte (un rapport un pour un) entre des concepts mentaux et des événements physiques. La monnaie est de la monnaie parce que nous croyons qu'elle appartient à la catégorie monnaie. Il n'existe aucune identification physique qui puisse être réduite à ce phénomène social. C'est pourquoi il indique qu'il existe une discontinuité entre les sciences physiques et les sciences sociales. De la même manière, l'économiste de l'école autrichienne, Friedrich Hayek, indique dans son article « The Facts of the Social Sciences » que « la monnaie est la monnaie, un mot est un mot, un produit de beauté est un produit de beauté, si et parce que quelqu'un pense qu'ils le sont ». Dans les années 1940, il développait sa conception du subjectivisme dans les sciences sociales : « la plupart des objets dans l'action humaine ou sociale ne sont pas des faits objectifs ; ils ne peuvent en aucune manière se définir en termes physiques. Pour ce qui est de l'action humaine, les choses sont ce que les gens qui agissent pensent qu'elles sont. »[3]
Gloria L. Zuniga, dans un brillant article paru en 1998, rappelle combien l'apport de Carl Menger est révolutionnaire dans l'histoire de la pensée économique, en introduisant le subjectivisme ontologique et cognitif. Carl Menger affirme qu'une chose ne devient un bien qu'à partir du moment où quelqu'un en décide ainsi. Mais le bien n'appartient pas nécessairement toujours à une même catégorie. Imaginons convertir de la monnaie contre des devises étrangères. Cette devise a la qualité de la monnaie. Si nous nous apercevons qu'il s'agit de fausse monnaie, soit nous décidons d'être receleurs en transférant ce bien à quelqu'un d'autre, soit elle change d'appartenance de concept. Elle peut devenir un marque-page, par exemple. Ou elle peut très bien perdre sa qualité de bien, si nous la trouvons superflue et que nous décidons de la jeter à la poubelle, de la jeter par la fenêtre ou de la brûler dans la cheminée.
L'ontologie causale de la connaissance kantienne
Kant définit la connaissance sur un plan ontologique causal. La raison d'être d'une catégorie est indépendante de sa variance quantitative. Par exemple, les concepts monnaie et prix ne changent pas de nature du fait des événements qui se produisent dans l'économie. La monnaie et les prix resteront des catégories. Pourtant, il existe un principe de calcul sur la relation entre les concepts. Cette quantification est également réelle puisqu'on peut déterminer une relation de cause à effet entre concept, sans modifier la nature de ces concepts. Le plus et le moins sont des propriétés affectées à la relation. L'économiste s'interroge sur le plus ou le moins de la monnaie sur les prix, en étudiant la qualité de leurs propriétés causales.
Si on étudie la relation cause-effet entre la poudre et l'étincelle, ces deux concepts sont invariants ontologiquement. Leur connexion implique un certain nombre de couples (cause-effet) en fonction de leurs propriétés (puissance explosive, capacité ignifuge, etc). Ce sont ces attributs de liaison qui en font des phénomènes de causalité observables.
C'est ainsi que Ludwig von Mises affirme, dans une ontologie causale, que les propositions de la praxéologie, dans son ensemble et de l'économie, en particulier, sont des « déclarations sur des faits et des relations nécessaires », Si on échange le mot « fait » par « concept » ou « classe d'objets », l'épistémologie de Ludwig von Mises est alors une ontologie sur une réalité absolue et invariante (les catégories) reliées entre elles par des propriétés de causalité. Cependant, il ne s'agit pas pour le scientifique en sciences sociales d'étudier les instances (les exemples) appartenant à des classes d'objet (comme peut le faire l'historien ou le psychologue) mais d'étudier le bien-fondé apodictiquement vrai des catégories et du réalisme de leur propriété de causalité. Ludwig von Mises ne conclut pas à l'inutilité de la psychologie (thymologie) ou de l'histoire. Au contraire, il nous précise que ces disciplines ont une grande valeur abductive pour le scientifique [praxéologue et ontologue], en attirant sa curiosité épistémique vers certains problèmes, fertiles en découvertes, ou en l'éloignant d'autres sujets plus stériles, grâce à l'observation de certains exemples.
Une ontologie hiérarchique
L'ontologie de Ludwig von Mises repose sur une importance primordiale, l'être humain. Les individus agissent parce qu'ils appliquent des moyens rares pour atteindre des buts. L'action humaine et ses vicissitudes sont une réalité. Ludwig von Mises écrit dans L'Action humaine : « L'action est l'essence de sa nature et de son existence, ses moyens de préserver sa vie et de s'élever au-dessus du niveau des animaux et des plantes. »
L'ontologie au cœur du management moderne
L'ontologie se situe à notre époque au cœur des préoccupations de la science que ce soit en sciences sociales ou en science de l'information. Et la terminologie d'Aristote est encore présente comme les classes (Genus), les sous-classes (Species) et les attributs (Differentiae), c'est-à-dire les caractéristiques qui permettent de grouper ou de distinguer les objets les uns des autres.
Plusieurs avantages se détachent de l'utilisation de l'ontologie. Face à la gigantesque profusion de textes sur internet et l'incapacité pour un être humain de capter l'ensemble de l'information, l'ontologie, en système d'information, offre des améliorations dans la gestion de la connaissance (Knowledge Management):
- La méthode de recherche naturelle (requête sémantique)
- La capacité à retrouver l'information désirée (accessibilité et optimisation de la rapidité)
- La possibilité d'extraire
- l'information recherchée
- l'information produite
- par raisonnement latéral (similarité)
- par raisonnement hiérarchique inféré (par les nœuds de connexion)
- par raisonnement abductif (par sérendipité)
- par raisonnement déductif
- La conservation de la connaissance
- La communication de l'information (clarté et visibilité)
- La compréhension de l'information (complétude, cognition et apprentissage)
Dès lors, l'ontologie est une véritable approche pour la stratégie de l'entreprise, notamment en matière de gestion des ressources dont le management par la connaissance. Cependant, tout système d'information basé sur la réalité du monde ouvert est totalement modélisable si les informations sont rendues explicites par les acteurs et si ces informations sont partagées. Lorsque une partie de la connaissance est tacite et qu'elle dépend d'un contexte (lieu, temps) très précis, alors cela exige une interaction approfondie entre le producteur de l'ontologie et les acteurs-experts du domaine. L'ontologie gagne alors en granularité infinie, en affinant les modules de connaissances du domaine étudié.
Notes et références
- ↑ dans son article, (« The Special Sciences, or The Disunity of Science As a Working Hypothesis » Synthese 28 (1974): 97—115)
- ↑ dans son ouvrage de 1984, (Minds, Brains, and Science: Cambridge, Mass.: Harvard University Press, 71—85)
- ↑ Friedrich August von Hayek, Scientisme et sciences sociales, Agora, Plon, 1986, p.32
Voir aussi
Bibliographie
- 1989, Peter Koslowski, "The Categorical and Ontological Presuppositions of Austrian and Neoclassical Economics", In: A. Bosch, Peter Koslowski et R. Veit, dir., "General Equilibrium or Market Process", J.C.B Mohr, Tubingen
- 1998, Gloria L. Zuniga, Truth in Economic Subjectivism, Journal of Markets and Morality, 1, October, pp158-168
- 2000, G. Quiquerez, "La tension entre subjectivisme et libéralisme dans l'ontologie sociale hayekienne = The tension between subjectivism and liberalism in Hayek's social ontology", Cahiers d'économie politique, Vol 36, pp99-115
- 2003, D. Jilk, "What Are Entities?", Journal of Ayn Rand Studies, 5 (1), pp67–86
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