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Agression
Le terme d'agression désigne pour les libéraux le fait d'initier directement une violence (ou de menacer de le faire) à l'encontre d'un individu en visant soit son intégrité physique soit sa propriété, sans se préoccuper de son consentement. C'est donc le critère du consentement (relativement à un périmètre limité à notre propre corps et aux biens qui sont notre propriété personnelle) qui détermine s'il y a ou non agression.
Agression du point de vue libertarien
Pour les libertariens, la notion d'agression est très restrictive. Ne sont pas des agressions et donc ne donnent lieu à aucune violation du droit :
- les insultes, la calomnie, la diffamation (conformité à la liberté d'expression, aucune violence physique ni atteinte à la propriété[1])
- la rupture unilatérale d'un contrat (liberté d'action totale, moyennant des compensations prévues auparavant dans le contrat)
- un échange de biens ou de services n'est pas une agression (les théories antilibérales de "l'échange inégal" sont absurdes : un échange a lieu parce que chacune des parties y trouve avantage, avantage qui n'est pas mesurable, car subjectif)
- le plus souvent, le non-respect de la propriété intellectuelle n'est pas vu comme une agression ni un vol (hors contrat impliquant la personne concernée)
- le licenciement d'un employé, le travail prétendument "mal payé", la concurrence "sauvage", le port d'armes, etc.
- la publicité n'est pas une agression tant qu'elle n'impacte pas la propriété des personnes qu'elle cible et n'est pas trompeuse.
- toute "agression" envers soi-même n'est jamais une agression au sens du droit, puisqu'il y a consentement (masochisme, suicide, don ou vente d'organes, grève de la faim, consommation de drogues, euthanasie...)
- la négligence n'est pas une agression, bien qu'elle puisse engager la responsabilité des acteurs concernés (quand elle implique leur propriété)
- se défendre contre une agression n'est pas une agression (légitime défense)
Pour la plupart des libertariens, un grand nombre d'actions autorisées légalement, et qui sont uniquement le fait de l’État, sont en réalité des agressions :
- la perception de l'impôt, la conscription, l'expropriation, la censure (absence de consentement, atteinte à la liberté)
- l'interventionnisme, le protectionnisme, le capitalisme de connivence, etc. sont sources d'agressions, puisqu'ils donnent par la force des avantages indus à certains aux dépens d'autres
- tous les faux droits octroyés par le droit positif : droit de grève, privilèges, monopoles légaux, "acquis sociaux", etc., puisqu'ils résultent du recel d'impôt par l’État et non de la liberté de contracter.
Agression et domination
Le concept de "domination", fréquemment rencontré dans les théories sociales modernes, est jugé beaucoup trop vague pour être rattaché à celui d'agression. Il est trop imprécis et subjectif, qu'il s'agisse de rapports sociaux (autorité, charisme, ostracisme, favoritisme...) ou de relations économiques ("abus de position dominante"). Un "rapport de domination" n'est pas une agression tant qu'il n'y a pas de coercition ni de violence. Le libertarisme est avant tout une philosophie du droit, pas un subjectivisme psychologique. Si les partisans du concept de "domination" veulent lutter contre ce qu'ils considèrent être une domination, grand bien leur fasse, à condition qu'ils ne tombent pas dans l'agression, mais restent dans le champ du débat d'idées et usent de moyens légitimes pour faire avancer leur point de vue (propagande, persuasion, boycott,...).
Subjectivité et objectivité de l'agression
En accord avec le subjectivisme libéral (et en désaccord généralement avec le droit positif), une agression est seulement ce que la personne agressée définit comme "agression" (aspect subjectif), quand sa personne ou ses biens sont impactés par l'action d'autrui (c'est là l'aspect objectif). En effet, certaines actions jugées violentes ou dommageables par les uns (sado-masochisme, duel, travail "mal payé", euthanasie, etc.) peuvent être acceptées par ceux qui en sont apparemment les "victimes" : une condition nécessaire (mais non suffisante) à l'agression est l'absence de consentement.
La liste des conditions qui déterminent une agression peut donc s'établir ainsi :
- absence de consentement de la part de l’agressé (pas d’agression s’il y a consentement)
- impact dommageable démontrable sur la personne ou sur ses biens propres (l'agression ne doit pas être imaginaire ou subjective)
- existence d’un agresseur (la « nature », la « société » ou le « système capitaliste » ne sont pas des agresseurs)
- action factuelle de cet agresseur sur la personne ou sur ses biens propres (pas d’agression par inaction, par concurrence, par usage de la liberté d’expression, etc.)
On doit aussi prendre en compte, comme préalable à une agression, ce qui constitue une menace d'agression. Ainsi, pointer une arme à feu en direction de quelqu'un ne viole pas directement son intégrité physique ni sa propriété, mais peut en constituer un préalable, selon les circonstances et l'interprétation des circonstances qui peut en être faite. Cependant il peut y avoir des différences d'appréciation : l'agression est aussi un concept praxéologique qui peut prêter parfois à interprétation (verständnis) dans certaines situations limites[2].
Agression psychologique
Si le terme d'agression psychologique peut avoir un sens en psychologie, il n'entre pas dans le champ du concept d'agression au sens libertarien (prise de contrôle de la propriété d'autrui sans son consentement), en raison de son caractère subjectif. Le caractère subjectif des éléments constituant cette "infraction" fait obstacle à une qualification juridique objective (bien qu'en France ait été inventé en 2010 un délit de "violence psychologique"). La "justice" rendue en la matière ne peut donc être qu'arbitraire et contraire à la loi naturelle, même si elle part d'une bonne intention. Le droit positif comme la jurisprudence semblent évoluer constamment vers toujours plus de subjectivisme : ainsi en France un "préjudice d'anxiété" a été introduit par les juges à propos des affaires liées à l'amiante, rendant possible l'indemnisation d'une "victime" même en l'absence de préjudice. Certains psychologues parlent aussi de "microagression" (microaggression) : une action non agressive factuellement, mais supposée être agressive inconsciemment. Le droit ne peut tomber dans l'émotionnel, sauf à disparaître entièrement :
- Les plaintes de personnes et de groupes dont les "sentiments ont été blessés", dont la "dignité a été atteinte", se multiplient. [...] Or l'idée d'étendre le principe de non-nuisance à toutes les souffrances émotionnelles est contestable. Admettre que ces souffrances sont des préjudices authentiques risque de nous entraîner beaucoup trop loin à différents égards. Pourquoi ? Parce que ces souffrances dites "émotionnelles" sont vagues, qu'elles peuvent être ressenties sans qu'il y ait eu intention de nuire, qu'elles pourraient être infinies et conduire au moralisme généralisé. (Ruwen Ogien, 2007)
Quand le législateur cherche via le droit positif à protéger les individus contre des agressions de nature psychologique (calomnie, insulte, harcèlement...), on n'aboutit qu'à un paternalisme d’État et à une réduction des libertés. Le processus catallactique de la société libre est bien plus protecteur des individus qu'une limitation autoritaire de la liberté d'expression ou la création de délits pénaux arbitraires.
Concernant l'enfant, celui-ci n'est ni une "marchandise" ni la propriété de ses parents. Ces derniers n'ont donc comme seule obligation à son égard de ne pas l'agresser physiquement. L'enfant dispose du droit de s'enfuir, de trouver d'autres parents, ou de vivre de façon autonome.
Notes et références
- ↑ Ce qui n'interdit pas cependant de répliquer à ce type d'agression en usant de sa propre liberté d'expression.
- ↑ Voir The Possibility of Thick Libertarianism (Billy Christmas, 11/01/2016).
Citations
- Ce que signifie une agression violente est qu’une personne prend le contrôle de ce qui appartient à une autre sans son consentement. L’ingérence peut atteindre la propriété d’un homme sur sa propre personne (le cas d’une agression corporelle) ou sa propriété sur les choses comme dans le cas du vol ou de la violation de domicile. Dans un cas comme dans l’autre, l’agresseur impose sa volonté contre la propriété naturelle d’un autre, il prive sa victime de sa liberté d’action et du plein exercice de sa propriété naturelle de soi-même. (Murray Rothbard, L'Éthique de la liberté, chap. 8)
Voir aussi
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