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Responsabilité

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La notion de Responsabilité est polysémique et peut faire l'objet de différentes approches. Elle est le plus souvent évoquée pour des actions, pour des relations entre individus et aussi des comportements qui justifient des obligations, par exemple, celle de réparer suite à un dommage causé. La responsabilité joue donc un rôle régulateur des actions et relations mutuelles. En droit, la responsabilité est retenue comme une condition pour attribuer une sanction suite à une faute.

Définition

La responsabilité est d’abord une notion centrale en éthique qui découle du fait que nos actions et décisions peuvent avoir des conséquences, pour nous-mêmes ou pour autrui. Cela signifie qu'un acte nous engage, qu'il existe un devoir de réponse à nos actes. Frédéric Bastiat a écrit que la responsabilité est l'enchaînement naturel qui existe, relativement à l'être agissant, entre l'acte et ses conséquences. La notion de responsabilité renvoie aussi au concept d'obligation morale, certains attribuent à cette notion le même synonyme que condamnation et/ou culpabilité morale.

Les valeurs libérales de la liberté et la propriété sont inséparables de la responsabilité : dans la mesure où tous les individus en interaction prennent des décisions et sont en principe capables de former des intentions. Ils sont également les acteurs directs ou indirects de ces mêmes interactions. Par conséquent, est responsable tout agent ayant la capacité à se déterminer en rapport à lui-même mais aussi à l'égard des autres agents.

D'un point de vue juridique, la notion de responsabilité est évidemment établie selon les critères définis par le droit. Un tribunal est le lieu désigné pour déterminer une responsabilité. Lorsqu'une affaire judiciaire ne dépend pas d'une autorité politique, le tribunal arbitral juge les responsabilités des parties. Par défaut, chaque personne bénéficie d'une présomption d'innocence jusqu'à ce que la responsabilité soit établie, et une fois déterminée, le principe d'obligation de réparation du dommage doit être engagé.

Responsabilité en droit positif

En droit positif la notion de responsabilité peut être de nature civile, pénale ou administrative.

D'un point de vue de la responsabilité civile, on peut distinguer deux types de responsabilité :

  • le principe de la responsabilité ex post (par ex. les articles 1382 et 1383 du Code civil français) : dans le cadre de la responsabilité civile, consiste le plus souvent à mettre en pratique, en cas de délit, une mécanique de compensation ou réparation envers la victime. Agissant de façon rétroactive, la question de la responsabilité ne se pose qu'une fois que le dommage s'est produit : il y a eu intention, faute ou négligence de la part de l'auteur de l'acte dommageable ;
  • le principe de la responsabilité ex ante : les règles établissant les situations et le(s) comportement(s) à risque, incluant les cas engageant des obligations, sont définies d'avance. C'est le cas de l'assurance : les conditions de responsabilité naissent d'un contrat volontaire où l'assuré est incité à adopter un comportement responsable et peut être indemnisé à l'hauteur du préjudice réellement subi.

La responsabilité ex ante requiert que les conditions de la responsabilité soient bien précisées, et ne soient pas rendues floues par une législation fluctuante qui tend à invalider le contrat.

La protection sociale, notamment le système d'organisation béveridgien, au travers des assurances sociales obligatoires, implique la redistribution et socialisation des risques. Ce système, loin d'assurer une responsabilité ex ante comme dans le cas d'une assurance classique, détruit toute notion de responsabilité : l'assuré social, contraint de cotiser pour un système qui ne lui laisse que peu de choix, n'a pas d'accès complet à l'information sur le coût réel des dépenses, s'expose au risque de surconsommation des soins sans avoir la moindre incitation à adopter des comportements responsables.

On distingue aussi la responsabilité subjective, fondée sur la faute prouvée et la responsabilité objective, fondée sur la causalité prouvée.

On distingue également la responsabilité contractuelle (respect des obligations auxquelles on s'est engagé) et la responsabilité extra-contractuelle ou aquilienne, qui consiste à réparer un dommage causé à autrui.

La responsabilité morale

L'usage de la notion de responsabilité dans le vocabulaire juridique est très courant. Une autre caractéristique fondamentale est la considération de la responsabilité en tant que valeur morale ou éthique. Dans les discussions sur la responsabilité, il est courant d'affirmer qu'une personne est responsable lors de nos jugements sur les différentes sortes de devoirs et obligations, mais aussi sur la reconnaissance de l'existence ou absence du choix volontaire ou involontaire dans l'acte de l'agent.

Le débat autour de la question de la responsabilité morale débouche sur plusieurs positions et arguments : savoir si nos actes sont responsables s'ils sont contraints ou déterminés par les circonstances, savoir si nos actes sont indéterminés, librement volontaires et si nous avons accès aux diverses possibilités de choix etc. En bref, savoir non seulement si nous sommes ou non responsables, mais aussi si nous sommes vraiment responsables des conséquences de nos actes.

Afin d'apprécier la responsabilité de l'agent il est important de connaître les conditions qui permettent d'évaluer l'action. Certaines actions justifient le blâme ou l'imputation, pour d'autres, certaines raisons peuvent être avancées pour excuser ou décharger, comme par exemple l'ignorance de l'agent, l'absence de contrôle sur l'action, la contrainte ou encore la manipulation.

La responsabilité se rapporte à une certaine déontique ou obligation morale. Sur ce sujet, Kant s'est exprimé à propos de ce « souci des conséquences » de la manière suivante : « Il est tout différent d'être véridique par obligation et de l'être par souci des conséquences désavantageuses »[1]. et il ajoute : « Dans le premier cas, le concept de l'action contient déjà en lui-même une loi pour moi, alors que dans le second il faudrait avant tout considérer quels effets pour moi pourraient bien se trouver associés à cette action ». Nous pouvons traduire le raisonnement de Kant : Je suis toujours responsable des conséquences prévisibles de mon action, qu'il faut nécessairement prendre en considération ; mais en ce qui concerne les conséquences imprévues ou fortuites, elles me sont imputables lorsque je viole sciemment un principe « absolument impératif », mais ne le sont pas si je le respecte.

Il s'ensuit que la responsabilité suppose d'une part une connaissance de cause, une conscience, et d'autre part, pour celui qui agit, un pouvoir de délibération parmi différents choix possibles d'action, ou d'un Libre arbitre.

Par ailleurs, sur quoi est fondé le devoir des Hommes envers les autres ? qu'est ce qui est conforme à ce devoir ? sommes-nous dans l'obligation de tenir des promesses ? suffit-il d'exprimer des intentions pour que l'action soit conforme à l'obligation ? La responsabilité morale éveille toutes ces questions et suppose une réponse.

Supposons, à titre d'exemple, la situation suivante : un homme qui refuse de donner de l'argent aux pauvres peut être la cible de réprobation et jugé comme faisant preuve d’irresponsabilité envers eux. Beaucoup de gens peuvent estimer que ne rien donner revient à laisser mourir de faim, que c'est un acte aussi grave que tuer volontairement, même s'il n'existe aucun devoir légal obligeant de secourir les plus pauvres - aucune loi en effet l'impose -, mais il se trouve aussi qu'il existe des Hommes pour qui l'altruisme exige un devoir de charité absolu. Dans cette situation, pouvons-nous rendre responsable celui qui refuse un don d'argent aux plus nécessiteux ? sauf à prouver que son geste soit la cause réelle contribuant à cette lamentable situation, il sera de fait extrêmement difficile de soutenir sa responsabilité entière. Même si nous considérons que laisser mourir de faim est quelque chose de mal, ce que la plupart des gens pensent, il est très difficile de soutenir l'idée que refuser de donner de l'argent aux pauvres est un acte criminel méritant condamnation et châtiment. Bien entendu, nous pouvons invoquer la négligence ou l'indifférence lorsque nous pointons les différentes causes de la pauvreté dans le monde, mais cette imputation ne revient pas à la responsabilité d'une seule personne dans ces cas isolés. De même, nous pouvons citer l'exemple d'une femme qui accouche sous X. Même si elle peut rester anonyme, beaucoup estimeront que son action est immorale et irresponsable, malgré que l'abandon soit moralement douloureux, la mère n'a aucun devoir absolu de garder le bébé. C'est aussi une pratique qui permet d'éviter l'infanticide.

De façon générale, la distinction ou démarcation entre droit et éthique peut être sujette à de nombreux débats ou désaccords parmi les libéraux, notamment sur des sujets tels que l'avortement, la liberté d'expression, etc. Selon le point de vue kantien de la morale du devoir, il existe une distinction entre les actes accomplis conformément au devoir et des actes accomplis par devoir. Les premiers ne naissent pas d'une inclination directe et sont motivés par un but intéressé, même si conformes au devoir d’honnêteté par exemple. Les seconds sont déterminés par une inclination immédiate avec un vrai contenu moral, indépendamment de tout dessein ou effet attendu, ici l'effet ou la conséquence n'est pas la fin de l'action.

Pour Kant, bien que les devoirs puissent avoir une expression extérieure, la législation éthique se distingue de la législation juridique : ce qui est conforme ou non-conforme avec la loi, sa légalité, ne peut être exprimée que par des devoirs extérieurs, elle ne contient pas le mobile intérieur de l'action, l'idée du devoir. La législation éthique n'exclut pas pour autant les actions extérieures, elle porte en fait sur tout ce qui est devoir en général[2].

Selon l'éthique de la responsabilité kantienne, nous sommes moralement responsables dans la mesure de notre capacité à agir de façon autonome.

« Personne ne fait le mal intentionnellement » ?
« Je ne fais pas le bien que je voudrais, mais je commets le mal que je ne voudrais pas ». - Épître de Saint Paul apôtre aux Romains, Chapitre 7, 19

La faiblesse de la volonté, ce que Aristote désignait akrasia, est comprise comme l'action intentionnelle contraire au meilleur jugement, tout bien considéré. Autrement dit, nous pouvons concevoir ce qui est pour nous un devoir, ce que nous devons faire dans telle ou telle autre situation, mais il se trouve que notre volonté ne soit pas aussi forte pour que nos actions soient conduites selon nos meilleurs jugements. La faiblesse de la volonté est aussi perçue comme une faiblesse de caractère, une défaillance de la rationalité de l'acteur car elle met en jeu les raisons d’agir de l'individu face à sa propre évaluation de l'action. Est ce que l'acrasie, l'incontinence ou intempérance, est due à l'ignorance ou à une perte de contrôle sur l'action ? Aristote estime que nous pouvons tenir quelqu'un pour responsable de son ignorance, par exemple en cas de mauvaise conduite en état d'ébriété, car celui qui est en état d'ivresse avait préalablement la connaissance et la capacité d'éviter de boire. Si les actions dépendent de nous elles sont donc volontaires, mais il existe aussi des actions s'accompagnant d'ignorance, elles sont non-volontaires si exercées par un acte forcé dont nous n'avons pas la maîtrise complète des circonstances.


Une éthique de la responsabilité suppose non seulement la qualité morale de nos comportements et actions envers les autres, mais elle comprend aussi la prise de conscience que nos actions peuvent porter préjudice aux autres, et le cas échéant savoir répondre ouvertement tout en reconnaissant nos rapports d'interdépendance et le souci de l’autre. La prise en charge sérieuse de cette éthique de la responsabilité constitue une solide alternative à toute forme de « solidarisme imposé », la responsabilité envisage les relations humaines dans leur grande variété sans négliger les aspects et conditions de la fragilité des personnes. Si la responsabilité regarde notre rapport au monde, à l'autre et à soi, représentant un intérêt majeur dans les réflexions sur notre condition et liberté, elle est aussi un champ riche et vaste où peuvent s'épanouir des chemins divers liés à la philosophie morale, philosophie politique, philosophie et psychologie de l’action, connaissance pratique et juridique voir la simple curiosité.

La question de la responsabilité sociale des entreprises

Par responsabilité sociale des entreprises la commission européenne définit « un concept qui désigne l’intégration volontaire, par les entreprises, de préoccupations sociales et environnementales à leurs activités commerciales et leurs relations avec leurs parties prenantes ». [3]

Formulée en 1953 par Howard Bowen, économiste américain, Social Responsibilities of the Businessman est l'ouvrage fondateur où Bowen, inspiré très certainement par la philanthropie corporatiste, définit la responsabilité sociale de l’entrepreneur dès le début de l’ouvrage : « elle renvoie aux obligations de l’homme d’affaire de poursuivre telles politiques, de prendre telles décisions ou de suivre telles lignes d’action qui sont désirables en fonction des objectifs et des valeurs de notre société ». Il s'agit, à la base, d'intégrer les valeurs collectives de la société, en général, au sein des préoccupations et actions des entreprises ; l’audit social selon Bowen est de placer un groupe d'intérêts collectif au sein de l'entreprise (stakeholders) afin d'exercer une certaine pression sur les actions managériales. Dans les domaines de la gestion de l'entreprise, les parties prenantes jouent un rôle de dimension normative dans les enjeux de l’entreprise.

La RSE est devenue de nos jours une des formules magiques de la planification économique jouant à la fois avec la baguette (ou le bâton) et la carotte, incitant l'univers entrepreneurial à adopter des certifications justificatives de la bonne marche de l'entreprise. Ainsi, l'idée d'une transparence éthique affichée par l'entreprise serait une sorte d'antidote contre un supposé mauvais sort jeté par un maléfique marché. L'image négative, voire exagérée, des conséquences de la mondialisation, des firmes multinationales, de l'actionnariat et l'émergence de la notion de développement durable ont contribué à la sensibilisation sur la question de la responsabilité sociale des entreprises. La régulation mondiale des entreprises par la soft law (droit flou) a donné lieu à une multitude de normes et labels, constituée de l’ensemble des processus, des réglementations, des lois et des institutions qui influent la manière dont l’entreprise est dirigée, administrée et contrôlée.

D'une façon générale, les libéraux sont critiques à l'égard de la doctrine de la responsabilité sociale des entreprises, ceci pour plusieurs raisons. Premièrement, une entreprise n'est responsable que devant ses clients et actionnaires, et non devant l'ensemble de la société. Que les entreprises intègrent un mode de gestion répondant aux préoccupations sociales signifie qu'elles tirent des conséquences de ses expériences, cela va de soi. Ce n'est pas leur rôle de s'occuper des questions sociales suite aux répercussions politiques ou économiques menées par les gouvernements. L'entreprise est une forme d'organisation où la responsabilité joue un rôle indispensable, dans sa forme interne comme dans ses relations externes, sans qu'il y ait besoin d'ajouter le poids des réglementations arbitraires et des obligations contraignantes et nuisibles à son activité. De fait, l'économie participe au bien commun. La concurrence est à même de susciter une responsabilité sociale et le principe de non-agression donne un cadre suffisant pour délimiter l'action légitime d'une entreprise. Si les consommateurs jugent qu'une entreprise manque à ses responsabilités, ils disposent d'un moyen efficace de la pénaliser : le boycott.

Quand l'État s'en mêle...

Dans les social-démocraties on assiste à une accélération industrieuse de la judiciarisation de la morale par l’État : panacée de la morale des groupes d'intérêts gravitant autour de la machine gouvernementale, de nombreuses lois sont votées afin de favoriser (ou réprimer) tel ou tel comportement jugé souhaitable (ou non souhaitable). Dans une logique de conciliation entre intérêts étatiques ou utilitaires avec la morale des groupes d'intérêts, qu'il s'agisse, par exemple, de lutte contre les discriminations, l'obésité, l'insécurité routière ou encore les accidents domestiques, etc. Le résultat tangible de cette judiciarisation est l’affaiblissement du sens éthique des individus, l'accroissement de l'irresponsabilité. Au lieu d'une éthique de la responsabilité nous assistons à une morale de la dénonciation publique.

D'autres aberrations contemporaines telles que le principe de précaution visent à déplacer les responsabilités. L'intervention publique, quelle qu'elle soit, a ceci de nocif qu'elle collectivise la responsabilité et les risques tout en privatisant les bénéfices.

Irresponsabilité institutionnelle

Sur quoi repose la croyance selon laquelle les hommes politiques seraient les mieux placés pour résoudre les problèmes dits de société ? Sur quoi est fondée cette prétention ?

L'irresponsabilité institutionnelle est la situation privilégiée dans laquelle se trouvent les hommes de l'État, « personnes qui agissent avec un grand pouvoir et une faible responsabilité » (Ambrose Bierce) : ils peuvent forcer les autres à subir à leur place les conséquences de leurs décisions :

« Ce qu’on nomme l’État [...] fait retomber la responsabilité des actions sur ceux à qui elle ne revient pas, en sorte que, peu à peu, la notion du juste et de l’injuste s’efface ; il engage la nation, par sa diplomatie, dans toutes les querelles du monde, et puis il y fait intervenir la marine et l’armée ; il fausse autant qu’il est en lui l’intelligence des masses sur les questions économiques, car il a besoin de leur faire croire que ses folles dépenses, ses injustes agressions, ses conquêtes, ses colonies, sont pour elles une source de richesses. » (Frédéric Bastiat)

Dire que les hommes de l'État sont responsables de l'exécution des lois, lois dont les auteurs sont les seuls arbitres, n'est qu'une façon d'éluder la question de la responsabilité. Lorsque les décideurs politiques feignent de défendre les intérêts du « plus grand nombre », car ils savent que la réputation dépendra d'un nombre de voix, ils n'agissent pas comme s'ils devaient subir les conséquences de leurs actes. Ils agissent selon la croyance totémique à une toute-puissante intervention politique qui s'empare de la prise de décision et apporte un sentiment de supériorité. Souvent par ignorance, mais aussi par avidité, les hommes de l'État s'aveuglent, se débarrassant de toute responsabilité, car en réalité les « calamités de l'étatisme », l'autre nom pour désigner les problèmes de société, ne sont que le résultat conséquent de leurs actions.

Cela explique entre autres toutes les décisions politiques absurdes, ainsi que l'accroissement indéfini de la dette publique en démocratie :

« C'est la nature même des actions menées par les hommes de l’État que de faire en sorte que le coût des actions des individus ne soit pas supporté par eux mais par d'autres, et que les gains de ces actions soient appropriés par d'autres que ceux qui ont à en supporter les coûts. C'est parce qu'il y a cette séparation, ou externalisation, entre ceux qui paient et ceux qui bénéficient que règne une irresponsabilité générale des actions étatiques. On peut reprocher aux économistes d'hier et d'aujourd'hui d'être silencieux sur ce fait essentiel qui distingue une dette privée d'une dette publique. »
    — Bertrand Lemennicier

« Les hommes politiques sont évidemment une classe artificiellement privilégiée et protégée ; plus privilégiée et plus protégée que n'importe quelle aristocratie du passé. Un aristocrate se voyait quelquefois raccourci d'une tête par le bourreau sur ordre de l'autorité publique. Un gentilhomme se faisait parfois transpercer le corps par un autre gentilhomme dans une affaire privée d'honneur. Du fait que notre politique ne se soucie ni d'honneur privé ni d'autorité publique, l'homme politique est probablement le premier gouvernant de l'histoire qui ne court aucun risque du fait de gouverner. »
    — G. K. Chesterton, New Witness, 24 juin 1921

« Les gouvernements ne rendent pas seulement des services, ils commettent aussi des fautes : ils engagent la responsabilité nationale tout entière et à perpétuité, de sorte que dans presque tous les pays une grande partie des impôts est consacrée à solder les intérêts de dettes qui ont été contractées non seulement pour des dépenses futiles, mais même pour des dépenses nuisibles. L’État est un être moral qui agit au nom de tous les citoyens et des actions duquel tous les citoyens sont responsables. Le principe de la solidarité de tous les habitants d'une même nation et des générations successives de chaque nation légitime l'établissement de taxes qui ne sont pas le prix d'un service social correspondant, mais bien le rachat ou l'expiation de fautes collectives antérieures. »
    — Paul Leroy-Beaulieu, Traité de la science des finances

Il convient de rappeler qu'agir sous la contrainte en subissant les conséquences d'une décision prise par une autorité ou au nom d'une autorité, ne fonde pas l'imputation de responsabilité à celui qui agit, mais plutôt à celui qui a rendu obligatoire par la force l'exécution de l'action. Il est tout différent de décider, selon certains désirs ou motifs, comment doivent agir d'autres sujets, comme dans le fait de commander ou décréter, que d'agir en s'impliquant personnellement dans le processus de l'action.

De ce fait, l'étatiste, tout en étant convaincu que son action est la meilleure pour la communauté, au nom d'une prétendue « volonté générale », oblige les individus à subir les conséquences de décisions qu'ils n'ont pas prises (par exemple l'assurance maladie à la française depuis 1945 : la cotisation est obligatoire, et on exige de plus de l'assujetti qu'il se « responsabilise » en ne surconsommant pas). Le critère libéral du consentement de l'individu est remplacé par l'esclavage collectif. L'exemple le plus typique est celui de la guerre, où le politicien, bien à l'abri dans son palais, décide d'envoyer au feu des contingents de conscrits sous des motifs politiques presque toujours injustifiés. L'exemple le plus courant est cependant celui du service public, monopole imposé par l'État.

Citations

  • Le fait d'agir pour le compte d'un groupe semble libérer les hommes de maintes entraves morales qui interviendraient s'ils agissaient d'une façon individuelle, à l'intérieur du groupe. (Friedrich Hayek, La Route de la servitude)
  • La liberté implique la responsabilité, c'est pour cela que les gens en ont peur. (George Bernard Shaw)
  • Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité. Être libre, rien n’est plus grave ; la liberté est pesante, et toutes les chaînes qu’elle ôte au corps, elle les ajoute à la conscience. (Victor Hugo)
  • Qu'est-ce que la liberté ? C'est avoir la volonté de répondre de soi. (Friedrich Nietzsche)
  • La liberté ne signifie pas seulement que l'individu a à la fois l'occasion et le poids du choix ; elle signifie aussi qu'il doit supporter les conséquences de ses actions et qu'il recevra estime ou blâme pour elles. La liberté et la responsabilité sont inséparables. (Friedrich Hayek, La Constitution de la liberté)
  • Déclarer que quelqu’un est responsable de ce qu’il fait tend à rendre ses actions différentes de ce qu’elles seraient s’il ne croyait pas l’être réellement. Nous assignons à un homme de la responsabilité, non pour dire que tel qu’il était il aurait pu agir autrement, mais afin de le rendre différent. (Friedrich Hayek, La Constitution de la liberté)
  • Être responsable, c’est subir soi-même les conséquences de ses actes. Pour savoir dans quelle mesure on crée des dommages à autrui, il faut préalablement que le droit des uns et des autres ait été défini. C’est pourquoi la responsabilité ne peut pas se définir indépendamment de la propriété. (Pascal Salin)
  • Dire qu'une société est une société libre c'est dire que tout individu agit en tant qu'être libre et donc en fonction d'objectifs et d'informations qui lui sont propres. Et parce que sa volonté est autonome dans l'action, il est bien « responsable » des conséquences de son action : on peut et on doit légitimement lui imputer toutes les conséquences de son action ; sinon, précisément, il ne serait pas libre : on lui ferait supporter par des mesures coercitives les conséquences des actes d'autrui. Ainsi, à partir du moment où l'homme est libre, il peut être considéré comme responsable. (Pascal Salin)
  • La vraie vertu morale est d'abord la responsabilité de soi. Qui ne voit à quel point la société marcherait mieux si les gens se sentaient responsables d'eux-mêmes ! La véritable morale consiste à supporter soi-même les conséquences de ses actes, et à ne pas imposer aux autres de porter le fardeau de ses inconséquences. Au fond, seul celui qui est responsable de soi est vraiment solidaire des autres. (Alain Laurent)
  • Responsabilité : fardeau portatif aisément transférable sur les épaules de Dieu, du Destin, de la Fortune, de la Chance ou du voisin. Quand l'astrologie était florissante, il était de bon ton d'en charger une étoile. (Ambrose Bierce)(humour)
  • Que celui qui agit bien, avec ses propres ressources, soit récompensé par la valeur propre de ses travaux et la reconnaissance volontaire d'autrui, voilà un cercle vertueux, celui du comportement économique. Que celui qui n'est pas tenu comptable de ses actes sur ses ressources propres soit récompensé pour son talent à accaparer les ressources d'autrui - voilà un cercle vicieux, celui du comportement politique : vol, violence, contrainte. (Faré, Le mythe du "public" et du "privé", Libres !!)
  • Ministre : personne qui agit avec un grand pouvoir et une faible responsabilité. (Ambrose Bierce)
  • Avons-nous atteint le stade ultime de l'absurdité où certaines personnes sont tenues responsables de choses qui se sont produites avant leur naissance, alors que d'autres personnes ne sont pas tenues responsables de ce qu'elles font elles-mêmes aujourd'hui ? (Thomas Sowell)

Notes et références

  1. Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs
  2. Emmanuel Kant, Métaphysique des moeurs
  3. Responsabilité sociale des entreprises (RSE)

Bibliographie

  • 2012,
    • Jean-Philippe Feldman, "Responsabilité", In: Mathieu Laine, dir., "Dictionnaire du libéralisme", Paris: Larousse, pp526-529
    • Marica Spalletta, "Credibilità dell'informazione : una questione di controllabilità e di responsabilità" ("La crédibilité de l'information : une question de contrôle et de responsabilité"), In: Raffaele De Mucci, Kurt R. Leube, "Un austriaco in Italia - An Austrian in Italy : festschrift in honour of professor Dario Antiseri", Soveria Mannelli: Rubbettino, pp433-456

Voir aussi

Liens externes

B0.jpg Discussions sur le forum
La Responsabilité Du Criminel (for)
Déterminisme Inconscient Et Responsabilité (for)
Responsabilité de l'individu (for)
René Girard Ou Le Mécanisme Victimaire (for)

Laurens, Paris, 1998, pp. 215 à 230.


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