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Déflation
La déflation est un phénomène de contraction monétaire ayant comme conséquence le déclin rapide des prix courants. Bien que la déflation produise les effets inverses de l'inflation, elle peut être élucidée selon et à partir de l'expansion inflationniste.
Définitions de la déflation
Dans l'opinion courante, la déflation est présentée comme une calamité économique qui provoque des crises et récessions. Elle nous enseigne la spirale vicieuse qu'une baisse générale des prix est premièrement bénéfique pour les consommateurs, mais ceux-ci sont tentés de reporter leurs décisions d’achats (thésaurisation) dans l'attente que les prix baissent à nouveau. La diminution de la consommation induit par conséquent une diminution de la production des entreprises. À cause des difficultés d'écoulement des stocks faute de demande, les salaires tendent à réduire c'est pourquoi cela entraine une hausse significative du chômage. Concernant l'endettement, les débiteurs auraient davantage de difficultés à rembourser leurs dettes ce qui les rendrait insolvables. La chute des profits et une augmentation des pertes débouchent sur un accroissement des dépôts de bilan et faillites.
La déflation est associée à la Grande Dépression des années 1930, mais aussi celle du Royaume-Uni des années 1920 suite à la surévaluation de la livre sterling.
Une première définition consiste à dire que la déflation est la baisse constante des prix monétaires des biens. À cette définition il peut encore se rajouter une autre, la déflation liée aux mesures ou volonté politique de vouloir baisser les prix ou de vouloir empêcher la hausse des prix, par le contrôle des prix, le contrôle sur les revenus et la fiscalité. Il est reconnu également que la déflation consiste dans la raréfaction voulue de la part des banques centrales de l'offre de monnaie et du crédit.
En général, la déflation est perçue comme un net ralentissement ou d'une baisse de la demande, associée à une période peu favorable à l'activité économique. Une des définitions de la déflation serait : la déflation est un mouvement persistant à la baisse, au fil du temps, du prix moyen des biens et des services, c'est-à-dire du coût de la vie.
La déflation ne doit pas être confondue avec la désinflation qui est un ralentissement de taux d'inflation, c'est-à-dire que le niveau général des prix augmente à un taux décroissant. Il ne s'agit pas simplement de la baisse du prix d'un bien ou même de celui d'un secteur d'activité économique, mais de l'ensemble des prix. En théorie, le niveau général des prix comprend les coûts du travail, des salaires, des biens et des services; donc les consommateurs peuvent acheter davantage de produits avec la même somme d'argent, mais ils ont aussi un plus faible salaire. Les consommateurs et les producteurs ayant des dettes souffrent aussi de la déflation, car leurs revenus diminuent alors que les créances demeurent constantes.
Les banques centrales s'inquiètent de la déflation parce que beaucoup d'outils de la politique monétaire deviennent dans ce cas inefficaces et la déflation peut conduire à une spirale déflationniste. Le thème a resurgi à l'occasion de la déflation observée au Japon depuis 1998 et de l'incapacité des économies occidentales à retrouver le chemin d'une croissance soutenue. L'économie mondiale s'est ralentie nettement depuis la mi-2000, phénomène aggravé suite aux attentats terroristes de septembre 2001. Dès lors, si la demande ne se fait pas plus pressante, il ne peut y avoir de tensions sur les prix et un risque de déflation peut apparaître.
La raison qui explique que l'aversion à la déflation soit générale est le surendettement général, causé principalement par l'importance de la dette publique : le surendetté doit rembourser les mêmes montants avec des revenus qui baissent, ce qui diminue son niveau de vie, l'oblige à trouver des ressources supplémentaires (fiscales) ailleurs ou à tailler dans les dépenses.
La déflation selon l'école autrichienne d'économie
Pour Ludwig von Mises[1] :
« Les notions d'inflation et de déflation ne sont pas des concepts praxéologiques. Ils n'ont pas été créés par des économistes, mais par le langage profane du public et des politiciens. Ils impliquaient l'illusion populaire, qu'il existe quelque chose comme une monnaie neutre, ou une monnaie à pouvoir d'achat constant, et que la monnaie doit être neutre et stable en pouvoir d'achat pour être saine. De ce point de vue, le terme d'inflation a été appliqué pour signifier les changements induits par encaisses, ayant pour résultat une baisse du pouvoir d'achat ; et le terme de déflation, pour signifier les changements induits par encaisses ayant pour résultat une hausse de pouvoir d'achat. »
Toutefois, au regard des tendances inflationnistes de la politique économique étatique et des banques centrales, la déflation contrecarre les politiques inflationnistes habituelles. Jörg Guido Hülsmann, dans son ouvrage Deflation and liberty (2008), souligne son rôle de "nettoyeuse économique" :
« La déflation est loin d'être intrinsèquement mauvaise, au contraire. Elle remplit une importance fonction sociale de nettoyage de l'économie et de la politique de toutes sortes de parasites qui ont prospéré sur l'inflation qui l'a précédée. En un mot : les dangers de la déflation sont chimériques, et ses charmes sont très réels. Il n'y a absolument aucune raison de s'inquiéter de ses effets économiques, à moins de mettre sur le même plan le bien-être de la nation et le bien-être de ses fausses élites. Il y a en revanche beaucoup de raisons de s'inquiéter des conséquences économiques et politiques de la seule solution alternative, la réflation, qui n'est bien sûr rien d'autre que de l'inflation pure et simple. »
De cette manière, la phobie déflationniste répandue par les élites politiques et économiques s'explique par le fait que le vent frais apporté par la déflation pourrait mettre un terme au système de privilèges dont ils bénéficient grâce au monopole monétaire inflationniste.
L'École autrichienne d'économie, à l'inverse des keynésiens ou des monétaristes, ne voit habituellement pas de danger particulier dans la déflation, qui ne serait que la contrepartie inévitable d'une inflation survenue auparavant.
Antal E. Fekete, qui définit la déflation comme "un accroissement de la productivité marginale du capital et du travail sans changement dans les facteurs de production ou du travail"[2], y voit une destruction de capital que seul l'étalon-or peut entraver.
De la même façon, Philipp Bagus réfute cinq préventions habituelles contre la déflation (l'arbitraire de la redistribution que la déflation opèrerait ; la baisse de la production ; l'instabilité des prix ; le chômage de masse ; la « trappe à liquidités »[3]) et affirme :
- On peut faire valoir que la déflation est un moyen rapide, direct, harmonieux et éthique en direction d'un système monétaire solide, en purgeant un système bancaire malsain et des investissements malsains.
Combattre la déflation ?
La déflation étant un processus naturel tendant à rétablir un équilibre compromis par des erreurs économiques, "combattre la déflation" revient à rajouter une erreur économique de plus au-dessus d'une pile d'erreurs économiques passées. Il suffit de voir les moyens employés pour ce faire par les banques centrales :
- baisse des taux d'intérêt : cette "répression financière" augmente l'endettement, crée de nouvelles bulles sur les marchés (par accès à l'"argent facile"), déstabilise les épargnants (notamment les fonds de pension chargés de verser les retraites), assèche le marché du crédit (les institutions financières préfèrent placer leurs liquidités dans les banques centrales) ;
- création monétaire exogène pour augmenter fortement la masse monétaire : une pratique ouvertement inflationniste par laquelle la banque centrale finance directement la dépense de l'État et accroît la dette publique : les dettes actuelles seront donc remboursées en "monnaie de singe" par décision politique. Cette création monétaire est généralement inopérante, car les banques centrales contrôlent une part de plus en plus réduite de la masse monétaire (moins de 5 %), ce qui limite l'efficacité de ce genre d'opérations. En outre, cette pratique ne touche jamais le "grand public" et ne profite qu'à une oligarchie financière.
Citations
- « Quant à la fameuse spirale déflationniste dont on nous rebat les oreilles, il suffit d’un peu de bon sens pour en montrer le caractère chimérique. Tirant argument de la théorie des anticipations rationnelles – tant décriée par ailleurs – on nous raconte que les consommateurs, anticipant la baisse des prix, vont reporter leurs achats, et que ce report par lui-même va provoquer une nouvelle baisse des prix qui, elle-même étant anticipée, se traduira par des reports supplémentaires de consommation, et ainsi de suite. Mais, tout « rationnel » qu’il soit, un consommateur ne peut différer longtemps de se nourrir, de se vêtir, de se transporter, de se divertir, de s’éduquer, de se loger. Que l’on sache, les émeutes de la faim n’ont jamais été provoquées par une baisse des prix alimentaires, mais bien par leur flambée. Si l’inflation est l’impôt le plus injuste parce qu’il frappe les plus pauvres, on ne peut évidemment en dire autant de son contraire, la déflation. On oublie d’autre part que si baisse de la consommation il y avait, elle se traduirait par une augmentation de l’épargne – chose excellente à une époque d’endettement généralisé ». (Philippe Simonnot, Vive la déflation !)
- « Ils luttent contre la déflation, c’est-à-dire qu’ils empêchent les prix de baisser, ils ne veulent pas qu’avec votre argent vous puissiez acheter plus, ils veulent vous priver des gains de productivité qui résultent de l’efficacité de plus en plus grande de votre travail et de vos innovations. Non, ces gains de productivité doivent être confisqués, empochés par d’autres, devinez qui ? » (Bruno Bertez[4])
Voir aussi
Notes et références
- ↑ Ludwig von Mises, L'Action humaine, Quatrième partie — La Catallactique ou économie de la société de marché - Chapitre XVII — L'échange indirect.
- ↑ Economic aspects of the pension problem (pdf)
- ↑ Situation dans laquelle toute création supplémentaire de monnaie ou de crédit n’entre plus dans l’économie réelle, mais reste dans les banques.
- ↑ Bruno Bertez, L'AGEFI, 1er décembre 2015
Bibliographie
- 2010, Steven Horwitz, "Deflation: The Good, the Bad, and the Ugly", The Freeman, January/February, Vol 60, n°1, pp30-34
- Jörg Guido Hülsmann, Deflation and Liberty (Auburn, AL : Ludwig von Mises Institute, 2008), ISBN 978-1-933550-35-0 [lire en ligne].
- Murray N. Rothbard, « Deflation, Free or Compulsory », chap. 68 de Making Economic Sense, 2nd ed. (Auburn, AL : Ludwig von Mises Institute, 2006), ISBN 0-945466-46-3 [lire en ligne].
- George A. Selgin, Less Than Zero : The Case for a Falling Price Level in a Growing Economy (London : Institute of Economic Affairs, 1997), ISBN 978-1-933550-77-0 [lire en ligne].
Voir aussi
Liens externes
- (fr) Jacques Garello, « Déflation », libres.org, 2 juin 2003.
- (fr) Guido Hülsmann, « Déflation et liberté », Institut Coppet, 15 août 2011.
- (fr)Faut-il avoir peur de la déflation ?, par Jörg Guido Hülsmann, Institut Turgot
- (en) Guido Hülsmann, Deflation: The Biggest Myths, June 11, 2003
- (en) Llewellyn H. Rockwell Jr., « The Blessings of Deflation », Mises Daily, May 30, 2003.
- (en) Philipp Bagus, Five Common Errors about Deflation, 2006
- (en) Philipp Bagus, Deflation: When Austrians become interventionists
- (en) Chris Casey, Deflating the Deflation Myth
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