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Répression financière

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La répression financière (financial repression) désigne un interventionnisme étatique dans le système financier au bénéfice du système bancaire ou de l’État.

Le terme a été inventé en 1973 par Edward S. Shaw et Ronald Mc Kinnon, mais cette pratique étatique remonte au ministre de l'Économie des nazis, Schacht, et au New Deal américain de Roosevelt.

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Finalité

Les buts de la répression financière sont les suivants :

  • attirer vers l’État ou les banques, ou les empêcher au contraire de partir, des capitaux qui pourraient prendre d’autres directions ;
  • opérer un transfert furtif entre épargnants et débiteurs, pour favoriser l'endettement des derniers aux dépens des premiers, ou diminuer le fardeau de l'endettement ;
  • protéger un système bancaire indispensable pour écouler la dette publique.

Moyens utilisés

La répression financière se traduit par « un arsenal de mesures qui permettent aux États de réduire le coût de leurs dettes en manipulant les marchés et leurs citoyens » (Simone Wapler).

Les deux leviers principaux de la répression financière sont l'inflation monétaire (planche à billets, monnaie fiscale, etc.) et, quand cette dernière ne survient pas, la fixation de taux d'intérêt anormalement bas, notamment plus bas que le taux de croissance de l'économie, voire négatifs (NIRP : Negative interest Rate policy) :

La répression financière implique habituellement de conserver les taux d’intérêt en deçà des niveaux normaux du marché, au profit des emprunteurs et aux frais des épargnants. Les emprunteurs sont souvent des gouvernements, et dans de nombreuses économies émergentes, l’État finance ses extravagances en payant les déposants bancaires à des taux d’intérêt dérisoires. (Howard Davies, L'AGEFI, 30/06/2015)
Les stimulations monétaires sont considérées comme sans limite dans l’idéologie actuelle puisque l’on peut rendre les taux de plus en plus négatifs et que l’on peut augmenter la taille du bilan des banques centrales jusqu’au ciel. En résumé, on peut pratiquer l’avilissement de la monnaie, du crédit et l’inflationnisme monétaire ad nauseam. (Bruno Bertez, L'AGEFI, 19/02/2016)
Des taux négatifs signifient que [...] les gouvernements peuvent continuer à rouler leur dette et à financer leurs promesses puisque les intérêts ne leur coûtent rien ; que ceux qui doivent de l'argent sont avantagés par rapport à ceux qui ont de l'argent disponible. (Simone Wapler, 19/06/2017)

La répression financière aboutit en général à un ensemble de mesures qui s'attaquent à la liberté et à la propriété des individus :

  • limitation des paiements en espèces (guerre contre le cash), sous prétexte de réduire la criminalité, l'évasion fiscale ou même l'immigration clandestine[1] ; parfois, suppression autoritaire des coupures les plus utilisées[2]
  • interdictions de retraits des comptes bancaires
  • interdiction de détenir des quantités de cash dans les coffres
  • interdiction de rémunérer les avoirs bancaires
  • interdiction de détenir de l’or (pays socialistes, États-Unis de 1933 à 1974)
  • contrôle des mouvements de capitaux
  • lois ou règlementations incitant à acheter des obligations souveraines, ou y obligeant (règles de solvabilité ; les obligations souveraines sont considérées comptablement comme sans risque)
  • taux d'intérêt négatifs ou artificiellement bas (en dessous de ceux qui résulteraient de la loi de l’offre et de la demande)
  • mesures permettant de ponctionner les dépôts en cas de défaillance de la banque (« chypriotisation » des comptes)
  • nationalisation complète du financement, « stade ultime de la répression financière » (selon Jean-Jacques Rosa)

Point de vue libéral

La répression financière est un des nombreux procédés du capitalisme de connivence, au même titre que le too big to fail, ou le lobbying et la corruption politique.

La connivence est telle que l'intérêt de l’État devient inséparable de celui du système financier qui lui permet de survivre. Les hommes politiques pratiquent en public une schizophrénie verbale qui les amène à critiquer le système financier et ses avantages exorbitants (guerre contre la finance) alors qu'ils en sont étroitement dépendants et sont les premiers à soutenir, sous divers prétextes, une répression financière aux dépens des petits épargnants et des plus faibles.

En pratique, la banque centrale, par sa politique de taux d'intérêt, incite les banques commerciales à acheter de la dette étatique et à la conserver aux dépens d'autres actifs. Des taux négatifs constituent une taxe prélevée sur les banques qui doivent s’en acquitter dès lors qu’elles placent leurs liquidités auprès de la banque centrale. Les banques encaissent une perte ou répercutent cette taxation sur leurs clients. Les banques gardent en otage les dépôts de leurs clients, aidées par la réglementation étatique qui empêche ces mêmes clients de fuir vers le liquide ou vers des placements sûrs.

Selon Bruno Bertez, les limites à la répression financière sont les suivantes :

  • le rendement décroissant des stimulations monétaires
  • la montée de l’instabilité financière, les bulles
  • la destruction du business model des banques
  • l’accumulation des créances douteuses chez les emprunteurs pourris
  • la fuite des détenteurs de monnaie bancaire et leur préférence pour le cash
  • la hausse de l’or face aux menaces sur les banques, sur les dépôts et sur le cash
  • l’instabilité du marché des changes

Bibliographie

Citations

  • La répression financière est l'arsenal monétaire et réglementaire qui permet aux élites de prolonger le créditisme, ce système conduisant au surendettement mondial. La répression financière a pour but de maintenir les taux d'intérêt artificiellement bas et de permettre de pratiquer la taxation arbitraire d'urgence. (Simone Wapler, 16/12/2016)
  • Une épargne mal rémunérée s'atrophie et restreint les possibilités de financement. Un financement étroit étouffe à son tour le dynamisme de l'économie. L'expansion est inflationniste et précaire, la croissance accidentée. Les efforts des gouvernements pour sortir de cette situation en comprimant à la baisse les taux d'intérêt ne font qu'aggraver le mal. Celui-ci porte un nom : la répression financière. (Jean-Jacques Rosa)
  • La fragilité produit des tas de conséquences monétaires. Ainsi par exemple la fonction de la monnaie en tant que réserve de valeur disparaît, elle sera d’ailleurs anéantie un jour prochain. La fragilité produit des tas de conséquences politiques et sociales : la monnaie ne devient plus qu’un moyen d’échange, ce qui est une disparition de liberté et une atteinte à la propriété. Nous nous enfonçons dans un monde de dirigisme, de contrôle. De surveillance. De traçage. [...] Le Système devient tellement fragile, il est tellement menacé que tout devient menace. Même le libre discours. Tout le monde devient terroriste potentiel. (Bruno Bertez, L'AGEFI, 23/12/2015)
  • En réalité, il s’agit d’une obligation politique, imposée par les banques centrales, elles-mêmes sous la pression des gouvernements. La raison invoquée est bien simple : la pratique financière doit être soumise aux impératifs macro-économiques, « intelligemment » fixés par les gouvernants. [...] La cigale gouvernementale publique cherche à emprunter au meilleur compte auprès de la fourmi. (Jacques Garello, Contrepoints, 03/03/2016)
  • La répression financière, cela signifie qu'on a choisi de pénaliser délibérément les 99 % du corps social, qui vivent du fruit de leur travail, au profit des 1 % dont l'essentiel du revenu provient du capital. (Philippe Béchade)
  • Pour accumuler plus et ne pas courir le risque de la fragilité exacerbée, il faut que les dettes coûtent de moins en moins cher. Il faut en produire un maximum et pouvoir les rouler, les renouveler, sans qu'elles deviennent exigibles. Quand la baisse des taux ne suffit plus, il faut les mettre à zéro, puis quand on est à zéro, il faut inventer les taux négatifs ; c'est ce que l'on appelle la répression financière. (Bruno Bertez, juillet 2019)

Notes et références

  1. Voir The Curse of Cash, Kenneth Rogoff, Princeton University Press, 2016.
  2. En avril 1982, la Banque d’Algérie annonce le retrait de la circulation du billet de 500 dinars (pour prétendument lutter contre les trafics). En novembre 2016, le Premier ministre indien, Narendra Modi, supprime les coupures de 500 et 1000 roupies (ces billets représentent 86 % de la monnaie en circulation). En décembre 2016, le président du Venezuela Nicolas Maduro retire de la circulation la plus grosse coupure (100 bolivars).

Liens externes


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