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Crise économique

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Une crise économique est une dégradation brutale de la situation économique et des perspectives économiques d'un secteur ou d'un pays donné.

Les crises économiques du XVIII et XIX siècle

Alain Touraine dans La voix et le regard affirmait que la société est une production conflictuelle d'elle-même. L'auteur estime que ce qui donne du sens à l'activité humaine est cet état de conflit et de concurrence permanent, qui permet à l'individu de progresser, d'élaborer des nouvelles stratégies et par conséquent de s'orienter vers des nouvelles perspectives. Dans ce sens, la vie de l'Homme est faite de haut et de bas, de rencontres, de découvertes, de déceptions et de bonheurs. Or, ce qui s'observe sur le plan microsociologique peut également être projeté à l'ensemble de l'activité économique. En effet, la vie économique est composée de phases de croissance et de récession (la récession désigne la phase de ralentissement du rythme de la croissance alors que la dépression stipule une diminution, en valeur absolue de la production). Ainsi par crise, les économistes désignent généralement le moment du retournement de la conjoncture. C'est l'instant où apparait ce que Joseph Schumpeter nommait un "incident pathologique dans un processus physiologique".

Cet article a comme but, en se référant exclusivement aux faits, d'analyser les différentes formes qu'ont pris les crises économiques du XVIII et XIX siècle.

Les crises d'Ancien Régime économique

On désigne généralement par crise "d'ancien régime économique" les crises traditionnelles, celles des sociétés basées sur l'agriculture. Dans ces sociétés, comme la nourriture du peuple était pratiquement exclusivement composée de pain, les mauvaises récoltes produisaient des crises de cherté car elles provoquaient la diminution de l'offre des produits alimentaires et donc une augmentation des prix. Prenons l'exemple de la France des années 1788-1789. À cette époque, malgré l'enseignement des physiocrates, le gouvernement pratiquait un contrôle économique très strict : il contraignait les paysans à approvisionner les marchés, fixait le prix du pain et interdisait en général l'exportation du blé. Parallèlement les nobles imposaient l'application des droits féodaux. C'est dans ces conditions que les mauvaises récoltes de blé de 1788 amenèrent la grande peur de juillet 1789. Les paysans affamés pillaient les convois de blé et refusaient de payer les droits féodaux. Ainsi, à cause de cet état de peur généralisé, la constituante décide le 4 août de supprimer les droits féodaux et les privilèges. C'est donc bien cet état de misère qui est à l'origine de la Révolution française, des changements sociaux de l'époque. La même analyse peut être utilisée pour expliquer l'effondrement du régime tsariste de Nicolas II, en Russie, en 1917. La famine subie par les soldats et les paysans produit un peuple qui a soif de changement, qui est prêt au sacrifice suprême. D'ailleurs une des premières mesures de Lénine était de promettre du pain au peuple... La condition matérielle est donc un puissant facteur de changement social, de révolution.

C'est essentiellement l'amélioration des moyens de production qui est à l'origine de l'apparition d'un nouveau type de crise. Ce sont les crises mixtes associant des aspects anciens (disette, cherté...) et d'autres plus contemporains (spéculation, crise boursière...). Ces crises mixtes s'observent entre 1800 et 1870.

Les crises mixtes

Fondamentalement ce qui différencie les crises d'Ancien Régime des crises mixtes c'est que ces dernières sont caractérisées par une diminution des prix et par la surproduction des valeurs d'échange. Prenons l'exemple de la crise qui frappe les pays européens en 1846 et en 1847. En effet, c'est tout d'abord une maladie de la pomme de terre qui entraîne la misère de la population. En même temps la sècheresse et la chaleur détruisent les récoltes de grains. Dans la sphère industrielle les excès de spéculation, qui touchent plus particulièrement le domaine de la construction des chemins de fer, provoquent la faillite de nombreuses entreprises. Ainsi, une trop forte production industrielle avait accumulé des stocks qui ne s'écoulèrent pas du fait des difficultés financières de l'agriculture. Dans ces conditions, les banques sont obligées d'arrêter les crédits et un peu partout en Europe on observe des grèves et des revendications violentes. D'une manière générale les historiens des faits économiques insistent sur la transmission monétaire de la conjoncture agricole. En effet les mauvaises récoltes obligent à importer du blé, ce qui dans le système monétaire du XIXe siècle conduit à exporter de l'or ce qui engendre une pression à la baisse de la masse monétaire disponible. Dans ce sens on peut découper la période 1850-1914 en trois phases. Tout d'abord la grande expansion de la période 1850-1875 caractérisée par la découverte de mines d'or en Californie et en Australie. Ces découvertes entraînent un gonflement du stock de monnaie dont l'Europe dispose, d'où un crédit à moindre prix. Sur le plan du commerce extérieur cette période marque le triomphe du libéralisme économique fortement défendu par les penseurs anglais et notamment par David Ricardo (abolition des corn laws, le peel act...).

La période 1875-1895 est moins heureuse. En effet, du fait de l'absence de nouveaux apports d'or, l'argent devient plus cher car moins abondant. Cette période est également caractérisée par une croissance excessive des valeurs d'échange. Les grandes quantités de denrées alimentaires, notamment le blé, sont arrivées des pays neufs et grâce au libre-échange ont pu pénétrer les marchés nationaux. Ainsi l'agriculture européenne peine à écouler ses produits. Cette situation engendre un climat morose qui provoque une abolition du libre-échange. En France par exemple le protectionnisme est renforcé en 1892 par les tarifs Melin. Néanmoins, l'évolution la plus marquante de cette période reste sans doute la concentration capitalistique de plus en plus approfondie, les entreprises concluant des ententes afin de maintenir les prix et se partager le marché. Ainsi, des véritables monopoles se forment dans tel ou tel secteur de l'économie permettant aux entreprises d'imposer leur loi aux consommateurs. Pour Hayek la formation des monopoles est surtout le résultat des politiques protectionnistes des gouvernements qui empêchent la concurrence internationale de jouer pleinement.

Enfin la période 1895-1914 est caractérisée par une nouvelle situation d'expansion. Tout d'abord de nouvelles mines d'or sont mises en exploitation en Australie, en Alaska et en Afrique du sud. Les pays neufs commencent également à s'équiper d'où des nouveaux débouchés pour les industriels européens. La course aux armements provoque une reprise de l'emploi et donc un accroissement de la masse salariale ce qui engendre une croissance de la demande des biens de consommation et des produits alimentaires.

Après la grande guerre les économies européennes subissent de nombreux bouleversements : l'hyperinflation allemande, le krach de 1929 (le lecteur interessé pourra consulter notamment l'article concernant les cycles qui tente d'expliquer les phénomènes qui engendrent les crises boursières). Les causes qui ont engendré cette rupture dans la progression de la croissance observée depuis la fin des trente glorieuses sont également au coeur de la réflexion des économistes (voir le texte rupture de 1973)... Néanmoins les économies européennes du XXe siècle sont profondèment différentes de celles du XIXe siècle, notamment sur le plan monétaire (fin du système étalon-or) de sorte que les explications ne peuvent pas être les mêmes.

Citations

  • « Dès le XIXe siècle, des gens comme Charles Coquelin, dans son livre Le Crédit et les banques, ou Frédéric Bastiat, avaient compris que c'était au privilège d'émission des billets de banque par les banques centrales que l'on devait l'instabilité financière. Ce privilège rendait possible une émission excessive de monnaie qui baissait artificiellement les taux d'intérêt, faisant croire que certaines entreprises étaient plus rentables à long terme qu'elles ne l'étaient réellement. A la longue, ces entreprises finissaient par ne plus pouvoir honorer leurs engagements, et les pertes qui apparaissaient brutalement se traduisaient par des effondrements périodiques du système financier. Ce privilège de la banque centrale détruisait en fait une information essentielle pour la régulation du marché financier : l'information permettant de savoir ce que l'on doit produire comme monnaie, et en quelle quantité. Là encore, rendre le capitalisme coupable de ce genre de phénomènes, c'est passer complètement à côté de la question. » (François Guillaumat)


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