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Psychologie économique
La psychologie économique étudie le comportement réellement observable des individus. Elle regroupe les différents chercheurs (économistes, psychologues cognitifs et sociaux), qui s’interrogent sur la façon dont le processus de décision s’opère.
Les défauts psychologiques de l'homo-oeconomicus de l'école néo-classique
Pour la plupart des économistes du courant dominant, le cerveau est une "boîte noire" inaccessible. La théorie contemporaine s’est ainsi limitée à un a priori méthodologique avec l'hypothèse de comportements des individus qui sont censés correspondre à la satisfaction de leurs préférences. Les êtres humains agissent "comme s'ils" raisonnaient de la façon dont le modèle de comportement, quelquefois compliqué, leur demande d'agir (le comportement de l'optimisation sous contrainte est un exemple).
L'essor de l'économie comportementale et expérimentale
Peu satisfaits par le "dictat" de la rationalité de l'homo-oeconomicus, les théoriciens de la psychologie économique ont mis en place de nouvelles méthodes d'investigation (enquêtes, études de terrain, expérimentation, modélisation, etc.) basées sur l'observation expérimentale en laboratoire. Les résultats expérimentaux montrent que les comportements observés en laboratoire ne confirment pas l'hypothèse de la rationalité ni l'égoïsme des individus et en appellent à une remise en cause de ces hypothèses.
Les principaux résultats de la psychologie économique s'observent dans le domaine du comportement économique individuel (processus de décision, aversion au risque et à l’ambiguïté, prise en compte des heuristiques ou des processus affectifs...) et dans le cas des interactions sociales (coopération, négociation, confiance, etc.).
Dès la fin du 19e siècle, des auteurs comme le français Gabriel Tarde[1], puis George Katona aux Etats-Unis au début du XXème siècle, ont souligné le rôle clef que pouvait jouer la psychologie économique. C'est grâce aux travaux lancés par Herbert Simon, puis par Daniel Kahneman et Vernon L. Smith, que la psychologie économique prend véritablement son essor à partir du milieu du 20e siècle. Les travaux des psychologues Daniel Kahneman et Amos Tversky ont été particulièrement utiles pour porter l'économie comportementale à l'attention des économistes. Leur essai pionnier, en 1973[2], sur les expériences psychologiques se sont révélées utiles pour tester le postulat de la rationalité en économie. Leur essai sur la "psychologie de la prédiction", démontre que les êtres humains sont de pauvres Bayésiens. Leurs études empiriques ont découvert de nombreuses violations du principe de domination et d'invariance concernant l'axiome de l'utilité. Ils ont démontré des biais systématiques dans les situations à risque. Par conséquent, ils ont rejeté le modèle standard de l'utilité subjective espérée, et ils ont proposé la théorie des perspectives[3] pour son remplacement.
Des traces autrichiennes de la psychologie économique
Avant l'avènement du marginalisme mathématique prôné par Léon Walras et Stanley Jevons, la science économique disposait déjà d'une véritable tradition de psychologie économique. Au 17e jusqu'au 19e siècle, on trouve de nombreux auteurs érudits qui sont tout à la fois des philosophes, des historiens, des économistes, des politistes et des juristes. Les économistes classiques comme Jeremy Bentham ou Adam Smith sondaient attentivement les motivations humaines à l'origine des comportements économiques. Carl Menger, fondateur de l'école autrichienne, se différenciant des autres économistes marginalistes, est l'exemple le plus représentatif d'une préoccupation des fondations psychologiques des besoins des êtres humains et de leurs répercussions en économie.
Selon les auteurs de l'école autrichienne, les modèles économiques, dérivés de l'homo œconomicus, sous-tendent un certain nombre de calculs rationnels qui présupposent une relation spécifique entre les moyens et les fins. Pour cela, l'économie politique ne repose pas sur des hypothèses correctes, mais sur des hypothèses partiellement vraies. En créant l'idée de l'homme économique, John Stuart Mill a donc déformé l'idée conceptuelle de la nature humaine.
À son tour, l'économiste de l'école autrichienne, Israel Kirzner, en 1973, critiqua les caractéristiques typiques de la rationalité instrumentale de l'homo œconomicus. L'hypothèse selon laquelle l'action humaine puisse être expliquée uniquement en référence aux catégories de la science économique, selon le point de vue de l'école néo-classique, à savoir la maximisation du profit ou l'efficacité dans l'action est insuffisante. En effet, précise Israel Kirzner, toute action humaine exige du "temps" et toute action humaine s'effectue toujours sous la condition des limites de la connaissance. Cette limitation, donc, du point de vue autrichien, n'est pas similaire à celle d'Herbert Simon, qui la conçoit comme une limitation des capacités du cerveau humain. Cette limitation de la connaissance, du point de vue autrichien est inhérente à l'écoulement irréversible du temps et à l'inextricabilité des actions humaines dans un monde ouvert avec des marchés de plus en plus complexes.
Les théoriciens de la psychologie économique ont effectué des découvertes surprenantes et intéressantes. Dans notre activité quotidienne, nos jugements sont influencés par notre humeur et pas seulement par un calcul économique froid comme pourrait le faire un ordinateur. Nos décisions reflètent à la fois le poids de la raison que celui de l'émotion. Elles sont souvent le fruit d'un processus cognitif incomplet et imparfait. De nombreux biais cognitifs de ce type ont ainsi été découverts : l'aversion à la perte, la tendance au statu quo, l'excès d'optimisme, l'influence sociale ou la conformisme. D'autres travaux montrent également l'aptitude des individus à adopter, contre toute attente dans un contexte économique, des comportements pro sociaux, comme la coopération, le sens de l'équité, la confiance ou même l'altruisme.
Annexes
Notes et références
- ↑ Gabriel Tarde, "La Psychologie économique", 1902, cours professé au Collège de France, 1901-1902, Alcan éditeur, Paris
- ↑ Daniel Kahneman, Amos Tversky, 1973, "On the Psychology of prediction", Psychological Review, July, Vol 1, pp237–251
- ↑ Daniel Kahneman, Amos Tversky, 1979, "Prospect theory: an analysis of decision under risk. Econometrica", 47 (6), pp263–291
Bibliographie
- 1918, J. M. Clark, "Economics and modern psychology", Journal of Political Economy, Vol 26, pp1–30
- 1920, Maurice Roche-Agussol, "La psychologie économique chez Cournot", Revue d'histoire économique et sociale, Vol 8, n°2, pp179-198
- 1946, George Katona, "Psychological Analysis of Business Decisions and Expectations", The American Economic Review, Vol 36, n°1, Mar., pp44-62
- 1951, George Katona, "Psychological Analysis of Economic Behavior", New York: McGrow-Hill
- 1962, Paul Albou, "Initiation a la Psychologie Économique", Bulletin de Psychologie, 211(XVI)
- 1964, Pierre Louis Reynaud, "La Psychologie économique", Presses universitaires de France, collection Que sais-je, Paris
- 1974,
- Paul Albou, "La Psychologie Économique", In: M. Reuchlin, dir., "Traité de Psychologie Appliquée", vol. 10, PUF, Paris
- Pierre Louis Reynaud, "Précis de Psychologie Économique", PUF, Paris
- 1975, George Katona, "Psychological economics", Elsevier Scientific Pub. Co.
- 1980, O. G. Pereira, "Psicologia Económica: Disciplina do Futuro", UNL, Lisboa
- 1982, B. Gilad et S. Kaish, "A note on the past and future of psychoeconomics", Journal of Behavioral Economics, Vol XI (Part 2), pp132–163
- 1994, L. L. Lopes, "Psychology and economics: Perspectives on risk, cooperation, and the marketplace", Annual Review of Psychology, Vol 45, pp197–227
- 2005,
- J. C. De Pablo, "Después de Kahneman y Tversky: ¿Qué queda de la teoría económica?", Revista de Economía y Estadística, Vol 43, n°1, pp55-98
- M. J. J. Handgraaf et W. F. van Raaij, "Fear and loathing no more: the emergence of collaboration between economists and psychologists", The Tilburg Symposium on Psychology and Economics: Games and Decisions, Journal of Economic Psychology, Vol 26, pp387-391
- 2006, E. Kirchler et E. Hölzl, "Twenty-five years of the Journal of Economic Psychology (1981 – 2005): A report on the development of an interdisciplinary field of research", Journal of Economic Psychology, Vol 27, pp793-804
- 2007, Bruno S. Frey et A. Stutzer, dir., "Psychology and Economics: A Promising New Cross-Disciplinary Field" (CESifo Seminar Series), The MIT Press, Cambridge
- 2008,
- A. Lewis, "The Cambridge Handbook of Psychology and Economic Behaviour", Cambridge, UK: Cambridge University Press
- K. E. Wärneryd, "The psychological underpinning of economics: Economic psychology according to Gabriel Tarde", Journal of Socio-Economics, 37, pp1685-1702
- 2014, Martín Simonetta, “Psicoeconomía. Economía de los sentimientos humanos” ("L'économie psychologique. L'économie des sentiments humains"), Fundación Foro
- 2016, Silvia Alemán Menduiña, "Algunos postulados neoclásicos y austríacos para la comprensión de la toma de decisiones en el campo de la psicología" ("Quelques postulats néoclassiques et autrichiens pour comprendre la prise de décision dans le domaine de la psychologie »), Laissez-Faire, n°44-45, mars-septembre, pp80-88
Liens externes
- "Psychology and Economics rather than Psychology versus Economics: Cultural differences but no barriers!", article écrit en 2009 par Hermann Brandstätter, Herner Güth et Hartmut Kliemt, Jena Economic Research Papers, Working paper n°017
Liens videos
- Conversación con Martin Simonetta sobre su libro “Psicoeconomía”, (Entretien avec Martin Simonetta à propos de son livre "Psycho-économie"), Interview de Luis Figueroa (directeur des relations publiques) avec Martin Simonetta, à l'université Francisco Marroquin, au Guatemala, le 7 mars 2014. Durée : 6'46. (es)
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