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Marginalisme

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En économie, le marginalisme est la théorie d'après laquelle la valeur économique résulte de « l'utilité marginale ». Cette théorie s'est développé autour de 1870 et a été considérée comme la « révolution néo-classique » ou « révolution marginale ».

Historique

La révolution marginale est souvent perçue comme l'un des meilleurs exemples de « découverte multiple » dans l'histoire de la science économique. En effet, simultanément mais indépendamment, trois penseurs européens — William Stanley Jevons, Carl Menger et Léon Walras — vont développer le concept d'utilité marginale. D'où trois écoles d'économie issues du marginalisme :

Les deux premières écoles vont fonder l'école néo-classique. L'école autrichienne, bien que se basant sur le marginalisme également n'en a pas la même application. Cette dernière accentue davantage sur le subjectivisme que les deux premières. En fait, le formalisme de Stanley Jevons et de Léon Walras avait bien plus en commun avec une tentative empiriste de mesurer et de calculer l'utilité qu'avec le subjectivisme au sens plein et propre du terme voulu par Carl Menger.

Dans la rationalité des choix, deux individus, dans un même environnement et à ressources équivalentes, n’effectuent pas les mêmes choix. Le choix marginal appartient à chaque individu et à lui seul. Pour l'approche néo-classique, chaque agent est un maximisateur et les choix sont homogènes d'un individu à un autre. Donc les choix marginaux sont homogènes également quel que soit l'individu. L'économiste autrichien considère que les choix de chaque être humain lui sont propres. Chacun d'entre nous subit l’incertitude lors de ses choix. Et chaque choix marginal est une action. Nous sommes donc susceptibles de nous tromper pour chaque cas même si les actes paraissent semblables et reproductibles du point de vue extérieur. Cependant, nous sommes rationnels car nous adaptons nos actions à nos objectifs. L'école néo-classique intègre la rationalité avant que les acteurs économiques ne choisissent, c'est pourquoi tout le monde a la même rationalité, et donc que les choix marginaux sont identiques. Le marginalisme n'a donc pas la même application pour les deux écoles.

Le développement du marginalisme a engendré un changement de paradigme. En effet, alors qu'Adam Smith, David Ricardo et les classiques définissent la valeur relative d'un bien comme la quantité de travail nécessaire pour le produire (valeur-travail), les marginalistes analysent cette notion via l'utilité marginale. Ainsi, on passe de l'économie classique à l'économie néoclassique ou à l'économie autrichienne.

Valeur marginale et utilité marginale

Le marginalisme met en évidence la valeur de la dernière unité détenue, dite valeur marginale. Au fur et à mesure que le niveau de détention ou de consommation d'un bien s'élève, les suppléments de satisfaction que l'individu retire d'une augmentation d'une unité de détention ou de consommation sont de plus en plus faibles. L'exemple canonique est celui de l'eau. « Comme il y a beaucoup d'eau, le dernier verre se vend très bon marché. Même si les premières gouttes valent autant que la vie elle-même, les quelques dernières gouttes ne servent qu'à arroser la pelouse ou laver la voiture. Nous constatons alors qu'une marchandise de très grande valeur telle que l'eau se vend pour presque rien parce que la dernière goutte ne vaut presque rien », écrit l'économiste Paul Samuelson.

La valeur économique d'un bien ou d'un service résulte donc de son « utilité marginale », utilité qu'un agent économique tire de la consommation d'une quantité supplémentaire de ce bien ou ce service (consommation "à la marge"). L'utilité marginale décroît avec la quantité de biens déjà consommée.

Quantification mathématique de l'utilité marginale

Si l'on suppose que l'utilité peut être quantifiée, le passage d'un état <math>S_1</math> à un état <math>S_2</math> donne un changement dans l'utilité qui est :

<math>\Delta U=U(S_2)-U(S_1)\,</math>.

Si de plus <math>S_1</math> et <math>S_2</math> sont caractérisés par une variable <math>g\,</math> elle-même quantifiable (par exemple une quantité de bien ou service), alors on peut parler du ratio de l'utilité marginale fonction de <math>g\,</math> par rapport à la variation de <math>g\,</math> :

<math>\left.\frac{\Delta U}{\Delta g}\right|_{c.p.}</math>

(c.p., ceteris paribus, indique que <math>g\,</math> est la seule variable indépendante qui change).

L'économie néoclassique part de l'idée que la limite

<math>\lim_{\Delta g\to 0}{\left.\frac{\Delta U}{\Delta g}\right|_{c.p.}}</math>

est définie, ce qui permet de définir l'utilité marginale comme la dérivée partielle

<math>\frac{\partial U}{\partial g}\approx\left.\frac{\Delta U}{\Delta g}\right|_{c.p.}</math>.

De cette façon, le principe de l'utilité marginale décroissante correspond à l'inégalité suivante :

<math>\frac{\partial^2 U}{\partial g^2}<0</math>.

L'augmentation de la variable <math>g\,</math> conduira donc à une augmentation moindre de l'utilité, qui finira par atteindre un maximum, puis diminuera.

Bibliographie

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Citations

  • L’idée est que lorsque les gens font des choix et des échanges, ils s’efforcent d’acquérir en premier tout ce qui répondra à leurs besoins les plus urgents. Après cela, ils s’occupent de leurs besoins de moins en moins urgents (ou de plus en plus « marginaux »). De même, s’ils doivent renoncer à quelque chose, ils abandonnent d’abord ce qui leur donne le moins de satisfaction, avant de renoncer à des choses qu’ils apprécient davantage. Autrement dit, les gens choisissent sur la base de l’utilité marginale que les différentes choses leur procurent. Ce principe nous permet de comprendre beaucoup de choses sur la façon dont se font les affaires économiques et sur le fonctionnement des marchés. (Eamonn Butler, Introduction à l’École autrichienne)
  • La loi de l’utilité marginale : chaque fois que la quantité d’un bien augmente d’une unité additionnelle, pourvu que chaque unité soit vue comme d’égale utilité par la personne, la valeur estimée de cette unité est moindre. Car cette unité additionnelle ne peut être employée que comme moyen d’atteindre un but jugé de moindre valeur que le but de moindre valeur satisfait par une unité de ce bien si la quantité était inférieure d’une unité. (...) Que l’utilité marginale des unités additionnelles de biens homogènes doive baisser découle de l’affirmation incontestable que toute personne agissant préfère toujours ce qui la satisfait davantage à ce qui la satisfait moins. (Hans-Hermann Hoppe, Economic Science and the Austrian Method)

Liens externes


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