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Gustave de Molinari

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Gustave de Molinari
Économiste

Dates 1819 - 1912
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Tendance Anarcho-capitaliste
Nationalité Belgique Belgique
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Citation
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Gustave de Molinari (Liège, Belgique, 3 mars 1819 - Adinkerque, Belgique, 28 janvier 1912) était un économiste belge. Disciple de Frédéric Bastiat, il a poursuivi le combat en faveur du libre-échange non seulement à travers ses nombreux écrits (dont Les Soirées de la Rue St-Lazare), mais également en militant au sein de l'Association pour la liberté des échanges.

Très préoccupé par les problèmes sociaux, il fustigea notamment l'impact du protectionnisme sur les conditions de vie des ouvriers. A cet effet, loin d'accorder sa confiance aux politiques socialistes misant sur le travail obligatoire (cf. les Ateliers nationaux de la Seconde République), Molinari pensait que des bourses du travail - reflétant mieux l'offre et la demande d'emplois que ne le ferait jamais une administration autoritaire - constitueraient une solution plus juste.

Pour avoir théorisé la libre concurrence en matière de sécurité intérieure et extérieure, il est généralement considéré comme le précurseur de l'anarcho-capitalisme.

Biographie et pensée

Jeunesse

De nationalité belge, il était le fils du Baron de Molinari, officier de l’armée de Napoléon installé à Liège en qualité de médecin. Son enfance et son adolescence, sur lesquels nous disposons de très peu d’information, si ce n’est son goût marqué pour les lettres, se déroulent dans cette ville. Comme pour beaucoup de jeunes européens de cette époque, Paris constitue un centre artistique et culturel incontournable. Aussi en 1840, à 21 ans, il quitte sa famille et son pays pour s’installer dans la capitale française. Sa physionomie commune, sa taille moyenne, sa myopie et ses problèmes d’audition étaient compensés, et bien au-delà, par une énergie à toute épreuve et …un système capillaire abondant prolongé, comme il se doit à cette époque, par la moustache et l’impériale. Ce qui constituait probablement son projet le plus cher, devenir journaliste et exercer son activité dans le domaine de l’économie, allait vite prendre corps, probablement grâce d’une part à son exceptionnelle énergie, à sa capacité à convaincre et à une « plume » qui en fait encore un maître de la langue française par la justesse de l’expression, le sens de la formule et la clarté du mot.

Sa première « campagne » française (1840-1851)

En 1842 il se rapproche de la Société d'Économie politique et un an plus tard il publie son premier essai portant sur l’essor du chemin de fer et ses effets sur l’industrie en europe. Sa voie est trouvée et son goût pour l’économie politique ne le quittera plus. Il se rapproche de Frédéric Bastiat en devenant secrétaire adjoint de l’association pour la liberté des échanges et rédacteur du journal de cette dernière « Le libre-échange ».

Dans le même temps, il défend ses idées dans divers journaux parisiens dont le journal des économistes dont il deviendra l’une des figures les plus marquantes et publie ses premiers ouvrages d’économie politique.

Lors de la révolution de 1848, opposés à la propagande socialiste comme aux conservateurs, Molinari et ses amis du club de la liberté ne parviennent pas à faire émerger leurs idées. De la même manière, la tentative de rallier ses masses populaires à ces idées via le journal « Jacques Bonhomme » publié avec son ami le Dunkerquois Charles Coquelin fut un échec. Le seul point positif fut l’élection de Frédéric Bastiat comme député mais cela ne changea rien tant la radicalisation des positions à cette époque rendait inaudibles leurs conceptions sur la liberté du travail et celle des échanges. En 1851, le coup d’État de Louis Napoléon Bonaparte, le conduit à quitter la France pour retrouver son pays d’origine.

Le temps de l’analyse. (1851-1860)

Le retour en Belgique après la période créatrice qu’il venait de vivre et les échecs qui s’en étaient suivis furent l’occasion d’une triple démarche : -La poursuite de ses activités journalistiques en collaborant régulièrement avec le journal des économistes et en fondant en Belgique le journal « l’Économiste » en 1855.

-Un approfondissement dans divers ouvrages de concepts essentiels comme :

  • Les règles naturelles d’organisation du marché,
  • Les moyens pour les ouvriers d’agir sur la marché du travail (bourses),
  • Les sphères « non marchandes » comme la religion, l’éducation etc.
  • La place et le rôle de l’État, etc.

-L’enseignement : pendant cette période, outre le journalisme et l’écriture, il enseigne l’économie politique au Musée Royal de l’industrie à Bruxelles et à l’Institut Supérieur de commerce d’Anvers. Cette période, qui ressemble à certains égards à une « traversée du désert » est tout à fait essentielle car elle permit à Molinari, fort des expériences vécues, d’approfondir sa pensée et de la développer. Avant tout soucieux de comprendre et d’expliquer, il n’hésitera jamais à pousser sa logique dans ses limites extrêmes afin d’en déceler les ressorts fondamentaux et en tirer les enseignements nécessaires.

Cette méthode scientifique donnera à sa pensée une apparence radicale, qui explique probablement un classement trop rapide dans les « ultras » là où il fallait voir une recherche constante de rigueur et d’exhaustivité de nature à dégager des pistes de travail incontestables. Cette période intermédiaire, riche de réalisations mais surtout de promesses se termine en 1860, année où il reprend le chemin de Paris.

L’approfondissement de sa pensée (1860-1893)

Poursuivant sa collaboration au journal des économistes dont il devient rédacteur en chef en 1881, il participe également au journal des débats et rédige divers ouvrages. Toute sa démarche se développe autour de l’idée fondamentale d’une liberté réelle de chaque individu et d’un équilibre naturel des forces entre le capital et le travail. Lucide et peu enclin à l’angélisme, il se méfie autant des dérives que permet la détention du capital dans certaines situations que des risques inhérents à la collectivisation et à la domination de l’État. Ceci le conduit à s’opposer autant aux socialistes et communistes dont il estime certaines idées liberticides, qu’à la politique de Napoléon III qui ne permet pas la nécessaire liberté d’expression et d’action. Dans sa logique menée à son terme, la primauté de l’individu sur l’État, appelé à disparaître, s’impose comme le seul garant d’une liberté réelle et durable.

Dans un monde en pleine effervescence et même en opposition frontale lors de la commune de Paris, cette position forte de sa cohérence mais affaiblie par son caractère nécessairement évolutif, ne pouvait s’imposer. S’appuyant sur les faits, Molinari poursuit sa réflexion et son action en défendant avec ardeur trois points qu’il juge essentiels au développement harmonieux des relations entre les individus:

  • La liberté d’expression. À l’instar de Voltaire, il estime que toutes les opinions doivent pouvoir s’exprimer, et que le progrès des sciences en tous domaines est à ce prix.
  • Le droit d’association des travailleurs : pour lui, la possibilité d’association des individus est une des clefs fondamentales de l’équilibre des sociétés mais, dans ce cadre, celle des travailleurs, confrontés au pouvoir du capital, revêt une importance toute particulière. C’est le motif pour lequel il critique la position restrictive de Napoléon III sur ce point.
  • La nécessité de former les individus. Pour que la liberté puisse s’exprimer pleinement, il ne suffit pas de la décréter, encore faut-il que les individus soient capables d’assumer seuls et librement leurs propres affaires. Il est donc tout à fait essentiel de former progressivement les gens, d’où son intérêt marqué pour l’éducation.

Ces analyses devaient logiquement conduire Molinari à poursuivre et à développer ses travaux sur les bourses du travail et sur la nécessité absolue d’une morale dans le domaine économique.

Par ailleurs estimant que l’ « état de guerre » constitue la base de la privation de liberté des individus au profit de l’État, il préconise des systèmes d’alliances et de défense collectives permettant de supprimer progressivement les fondements de cette aliénation.

Le temps de concessions et la fin (1893-1912)

Les analyses de Molinari, séduisantes et rigoureuses, n’ont pas été comprises à leur juste valeur à l’époque où elles ont été développées. Plusieurs motifs peuvent être avancés pour tenter de comprendre cet état de fait.

  • Dans une situation économique extrêmement tendue, le fait de ne pas prendre partie pour les travailleurs contre le capital ou l’inverse constituait un courage peu porteur à court terme.
  • Conclure, par une analyse certes logique et cohérente, à la suppression totale de l’État avait peu de chance d’être admis. En effet, pour les uns et les autres, à tort ou à raison, cette entité suprême correspondait et correspond toujours (pour des motifs souvent opposés) à un recours ou une référence ultime et indispensable.
  • Hier comme aujourd’hui chacun est conceptuellement convaincu de la nécessité du libre libre-échange. Mais hier comme aujourd’hui cette liberté est vécue, au plan pratique, comme un risque majeur pour les plus faibles et donc comme « la liberté du plus fort ».
  • La pertinence des démonstrations n’implique pas nécessairement la réussite des concepts. Or parler d’une liberté totale des individus et de l’équilibre naturel qui s’en suivait pouvait apparaître au mieux comme un beau « pari » au pire comme une utopie. À l’inverse, le recours à l’État, peut-être moins séduisant, était vécu comme une véritable garantie.

Conscient du fait d’avoir poussé son analyse à son terme, comme il sied pour une analyse scientifique, Molinari mesura l’écart qui le séparait des individus de son époque, détenteurs de capitaux ou ouvriers, consommateurs ou producteurs. Sans rien changer à ses principes généraux, particulièrement dans le domaine économique, il accepta de modifier sa vision de l’État en admettant la nécessité d’un État gendarme, mais en lui déniant tout rôle dans la production des biens et des services. Il prit sa retraite à 90 ans.

Citations

A propos du "Livret ouvrier" et du "passeport intérieur" [1] alors en vigueur :

  • Grâce à la complicité de la loi, les entrepreneurs d'industrie acheteurs de travail parviennent ainsi, dans la plupart des foyers de production, à demeurer les maîtres absolus du marché, à dicter aux ouvriers les conditions du salaire. C'est un véritable monopole, dont ils sont investis, et le plus oppressif de tous ! Plus oppressif peut-être que l'esclavage même, car, au moins le maître est obligé de subvenir à l'entretien de son esclave, tandis que le monopoleur, qui se sert d'une loi inique pour empêcher le travailleur de tirer librement parti de ses facultés productives, n’a aucune obligation à remplir envers lui. C'est l'esclavage avec la responsabilité de moins et l'hypocrisie de plus ! Aussi quel est le résultat de ce régime ? C'est que le salaire, comprimé par le monopole, de connivence avec la loi, est tombé au niveau du minimum de subsistances nécessaires aux travailleurs, pendant que le taux des rentes et la masse des profits allaient croissants. (Gustave de Molinari, cité par Gérard MINART, p147, L'économiste Belge, [2]

Sur l’État et sa viabilité :

  • Il ne faut point s’exagérer d’ailleurs la puissance de cet ensemble d’institutions, pour la plupart surannées, qui constituent l’État moderne, et dont l’existence est purement artificielle. L’État moderne est un colosse, soit ! mais c’est un colosse aux pieds d’argile. Il suffit de jeter un simple coup d’œil sur les ressources qui alimentent ses moyens de subsistance et d’action pour s’assurer que ces ressources sont singulièrement précaires et qu’elles lui feront défaut aussitôt que l’opinion sera pleinement édifiée sur le vice de leur origine : elles consistent principalement, comme on sait, dans les impôts indirects, le papier-monnaie et les emprunts en rentes perpétuelles ou amortissables à long terme.

Informations complémentaires

Notes et références

Publications

B0.jpg Discussions sur le forum
> Molinari édité en français ..., mais pas chez nous ! (for)
  • 1846, Études économiques, L’organisation de la liberté industrielle et l’abolition de l’esclavage, Paris, Capelle
  • 1848,
    • a. Mélanges d’économie politique I, in « Collection des principaux économistes » tome 14,
      • Nouvelle édition en 1966, Osnabrück
    • b. "Mélanges d’économie politique II", in « Collection des principaux économistes » tome 15
      • Nouvelle édition en 1966, Osnabrück
  • 1852,
    • a. Les révolutions et le Despotisme, envisagés au point de vue des intérêts matériels, Bruxelles, Méline, Cans & Cie
    • b. "Propriété littéraire" In: Charles Coquelin, Gilbert Guillaumin, dir., "Dictionnaire de l’économie politique", Paris : Guillaumin, T II, pp473-478
    • c. "Notice biographique sur Charles Coquelin", Journal des Economistes, Septembre-Octobre, Vol 33, pp137–138, pp167–176
  • 1855,
    • a. "Cours d’économie politique",
      • 2nde édition révisée en 1863, Paris: Guillaumin
    • b. "De la propriété des inventions", Journal des économistes, 2ème série, T. 27, n°9, Septembre, pp410-430
  • 1857, "L’Abbé de Saint-pierre, sa vie et ses œuvres", Paris, Guillaumin & Cie
  • 1859,
    • a. "Introduction biographique" dans la seconde édition de l'ouvrage de Charles Coquelin, "Le crédit et les banques", Paris
    • b. "De l’Enseignement obligatoire". Discussion entre M. G. de Molinari et M. Frédéric Passy, Paris, Guillaumin & Cie, 1859
  • Lettres sur la Russie, Bruxelles, A Lacroix, Verboeckhoven & Cie, 1861
  • Napoléon III publiciste, Analyse et appréciation de ses œuvres, Bruxelles, A Lacroix, Van Menen & Cie, 1861
  • Questions d’Économie politique et de Droit public 2 vol, Bruxelles, A. Lacroix, Verboeckhoven et Cie, 1861
  • Cours d’économie politique fait au musée royal de l’industrie belge, A Lacroix, Verboeckhoven & Cie, 1863
  • Les clubs rouges pendant le siège de Paris, Garnier frères, 1863
  • Le mouvement socialiste et les réunions publiques avant la révolution du 4 septembre 1870 ;
  • La pacification des rapports du capital et du travail, A Lacroix, Verboeckhoven & Cie, 1872
  • La République tempérée, Garnier frères, 1873
  • Lettres sur les États-Unis et le Canada, adressées au Journal des Débats, à l’occasion de l’Exposition universelle de Philadelphie, Paris, Hachette & Cie, 1876
  • La Rue des Nations. Visites aux sections étrangères de l’Exposition universelle de 1878, Paris Maurice Dreyfus, 1878
  • L’Irlande, le Canada, Jersey. Lettres adressées au journal des débats, Dentu, 1881
  • L’Evolution économique du XIXe Siècle. Théorie du progrès, Paris, C. Reinwald, 1884
  • L’Evolution politique et la révolution, Paris, C. Reinwald, 1884
  • Au Canada et aux Montagnes Rocheuses. En Russie. En Corse. À l’exposition universelle d’Anvers, C. Reinwald, 1886
  • Conversations sur le Commerce des Grains et la Protection de l’Agriculture, Paris, Guillaumin & Cie, 1886
  • 1887, A Panama. L’isthme de Panama, la Martinique, Haïti, Paris, C. Reinwald & Cie
  • Les Lois naturelles de l’Économie politique, Paris, C. Reinwald & Cie, 1887
  • La morale économique, Paris, C. Reinwald & Cie, 1888
  • 1891, "Notions fondamentales d’économie politique et programme économique", Paris, Guillaumin & Cie
  • Religion, Paris, C. Reinwald & Cie,1892
  • Précis d’Économie politique et de morale, Paris, C. Reinwald & Cie, 1893
  • Les Bourses du Travail, Paris, Guillaumin & Cie, 1893
  • Science et Religion, Paris, Guillaumin & Cie, 1894
  • Comment se résoudra la question sociale, Paris, Guillaumin & Cie, 1896
  • La Viriculture. Ralentissement de la population, causes et remèdes, Paris, Guillaumin & Cie, 1897
  • Grandeur et Décadence de la Guerre, Paris, Guillaumin & Cie, 1898
  • Esquisse de l’organisation politique et économique de la société future. Paris, Guillaumin & Cie, 1899
  • Les problèmes du XXe siècle, Paris, Guillaumin & Cie, 1901
  • Questions économiques à l'ordre du jour, Paris, Guillaumin & Cie, 1906
  • Économie de l’histoire : théorie de l’évolution, Paris, F. Alcan, 1908
  • Ultima Verba : mon dernier ouvrage, Paris, Giard et Briève, 1911

Littérature secondaire

  • 1892, Charles A. Tuttle, commentaire du livre de Gustave de Molinari, "Notions fondamentales d'économie politique et programme économique", The Annals of the American Academy of Political and Social Science, vol 3, n°2: pp124-126
  • 1994, Carlo Lottieri, "Frédéric Bastiat - Gustave de Molinari, Contro lo statalismo", Liberilibri : Macerata, Italie
  • 1997, Jean-Michel Poughon, "Gustave de Molinari: une approche de la démocratie économique ", In: Alain Madelin, dir., "Aux sources du modèle libéral français", Paris: Perrin, pp167-186
  • 2009, Carlo Lottieri, Ciò che è vivo e ciò che è morto in Gustave de Molinari, In: Gustave de Molinari, Le serate di rue Saint-Lazare, Macerata, Italia: Liberilibri, ISBN 9788895481388, pp361-408 (it)

Voir aussi

Liens externes

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