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Géolibertarianisme

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Les géolibertariens considèrent que les ressources naturelles (dont le sol) sont limitées et que, par conséquent, il n'est pas juste que certains individus s'approprient des ressources en toute liberté au détriment des autres.

Définition

Le géolibertarianisme (ou géoanarchisme) est une philosophie politique qui affirme comme les autres formes de libertarianisme que tous les résultats du travail devraient être possédés et contrôlés de façon privée. Cependant, le géolibertarianisme diffère en considérant que la terre et les autres ressources naturelles (pétrole, charbon...) ne peuvent être appropriées. Les géolibertariens pensent que l'installation (homesteading) ne peut créer la propriété, le travail seul le pouvant.

Ils suivent la proviso (clause de réserve) de John Locke selon laquelle chacun ne peut avoir de propriété de terrain que dans la limite où « ce qui reste suffit aux autres, en qualité et en quantité » (clause non admise par les autres libertariens). Dans le cas contraire, le terrain accumule une valeur de rente. Les géolibertariens proposent généralement de distribuer cette rente via la Land Value Tax (LVT), comme proposé par Henry George et d'autres avant lui.

Fred E. Foldvary créa le mot géo-libertarianisme dans un article titré ainsi dans le journal Land and Liberty de mai/juin 1981, pp.53-55. Dans le cas du géolibertarianisme décrit par Folvary, la rente serait collectée par des associations privées avec la possibilité de faire sécession de la géocommunauté (et donc de ne plus bénéficier des services de cette-ci) si on le désire. Les géolibertariens sont généralement inspirés par le Georgisme, mais ces idées sont antérieures à Henry George et peuvent être trouvées sous différentes formes dans les écrits de John Locke, Thomas Jefferson, Adam Smith, Thomas Paine, David Ricardo et John Stuart Mill. Le meilleur résumé du géolibertarianisme est sans doute l'explication de Tom Paine : « Les hommes n'ont pas créé la Terre. C'est la seule valeur de leurs améliorations et non la Terre elle-même, qui est possédée individuellement. Chaque propriétaire doit à la communauté une rente pour le terrain qu'il conserve. »

Ce point de vue est partagé par certains économistes, tels Léon Walras, partisan d'une rente foncière qui remplacerait l'impôt. Un certain nombre d'anarchistes préconisent plutôt une auto-limitation :

La mesure de la terre à laquelle l’individu, le groupe familial ou la communauté d’amis ont naturellement droit, est embrassée par leur travail individuel ou collectif. Dès qu’un morceau de terre dépasse l’étendue de ce qu’ils peuvent cultiver, ils n’ont aucune raison naturelle de revendiquer ce lambeau ; l’usage en appartient à d’autres travailleurs. (Élisée Reclus, À mon frère le paysan, 1899)

Le point de vue géolibertarien est quelque peu marginal parmi les libertariens. Un de ses meilleurs représentants est Peter Vallentyne, qui se présente comme un libertarien de gauche.

Les droits de propriété

Les géolibertariens considèrent la Terre comme la propriété commune de toute l'humanité. Ils voient la propriété privée comme dérivée du droit de chacun au fruit de son travail. Étant donné que les terrains n'ont pas été créés par le travail de quelqu'un, il ne peuvent être possédés. Par conséquent, les géolibertariens reconnaissent un droit de posséder un terrain à la condition que toute la valeur de rente soit versée à la communauté. Selon eux, cela a l'effet d'une part de rendre la valeur qui appartient à la communauté et d'autre part d'encourager les propriétaires terriens à utiliser seulement la quantité de terrain dont ils ont besoin, en laissant beaucoup aux autres.

La définition stricte de la propriété comme le fruit du travail fait des géolibertariens des partisans du libre marché. Comme tous les libertariens, ils croient légitime tout contrat entre adultes consentants.

À propos de la pauvreté et de l'État-providence

Selon les géolibertariens, le principal paramètre guidant les salaires est appelé la marge de production. La marge de production est la quantité de monnaie qu'une personne peut gagner sur un terrain libre. Si quelqu'un choisit de travailler pour un autre plutôt que pour lui-même sur un terrain libre, c'est parce qu'il y gagne plus d'argent. Dans les conditions de marché libre, la marge de production représente donc un plancher absolu des salaires dans n'importe quelle société.

La différence entre les géolibertariens et les autres libertariens apparaît à ce moment. Les géolibertariens pensent que l'instauration de la règle de Droit, la protection de la propriété privée et la création de biens publics sont bénéfiques à tous mais que le gain va largement plus aux propriétaires terriens. De ce fait, il est possible à certains de conserver des terrains sans utilisation et d'obtenir tout de même des bénéfices de la hausse des prix. La terre s'oppose en cela aux autres formes de capital qui ne peuvent être rentables qu'en les mettant au service des autres. Par conséquent, le non usage (ou l'usage sous-optimal) fait que ceux qui désirent utiliser le terrain ne disposent que d'une qualité de moins en moins bonne. Cela pousse la marge de production vers le bas, entraînant de plus bas salaires.

L'élimination de cette incitation à conserver des terrains sans usage, allant avec un taux d'emploi plus élevé (car plus de terrains sont utilisés) et des taux d'intérêt plus bas (à cause des prix plus bas entraînant un moindre besoin de capital pour aller dans n'importe quel business) résultent en un plus haut niveau de prospérité et éliminent le besoin d'État-providence.

La Land Value Tax

Les géolibertariens défendent la land value tax pour plusieurs raisons. Comme expliqué plus haut, c'est un moyen de confirmer le droit égal à la terre. C'est aussi l'impôt le plus compatible avec le marché libre. Il n'affecte pas le prix des biens ni ne décourage la productivité car il n'influe pas le coût de production. En réalité, il fait même croître la productivité en abaissant la barrière à l'entrée sur le marché et en encourageant un usage plus efficace du terrain.

Les géolibertariens pensent que puisque les biens et les services publics augmentent la valeur de terrain, ils peuvent être financés principalement par la Land Value Tax. De ce point de vue, cet impôt peut financer les attributions du gouvernement tant que celles-ci apportent à la communauté. Certains géolibertariens estiment que tous les revenus dépassant le financement de ces attributions légitimes doivent aller à un revenu de citoyenneté, un paiement égal à chaque membre de la communauté. D'autre préferent que ce revenu de citoyenneté soit d'abord versé et qu'ensuite les gens puissent signer des contrats pour financer certains services.

Critiques

Le géolibertarianisme considère que la Terre est propriété commune de toute l'humanité, avec un égal droit d'accès pour chaque être humain. Cela suppose d'abord que l'on ait des droits à des biens du seul fait d'exister (idée communiste ou commoniste), alors que seule l'action humaine donne des droits (selon l'idée de John Locke). Une propriété collective de la terre (à supposer que ce terme ait un sens, car on ne sait pas par ailleurs où une telle propriété trouve son origine) n'a de sens que si chaque individu peut l'exercer en pratique, car une collectivité est constituée d'individus.

Un autre argument géolibertarien est que, si l'on admet que la propriété privée découle du travail humain et de la création de valeur, la terre ne peut être propriété privée puisqu'elle n'a pas été créée par le travail humain. Mais le travail humain lui non plus ne crée rien, il ne fait que transformer l'existant, et aucune valeur ne préexiste avant d'être évaluée subjectivement (subjectivité de la valeur). La propriété se justifie plus fondamentalement par la rareté plutôt que par le travail : c'est la rareté, et non le travail, qui engendre le droit à la propriété.

Une des critiques du géolibertarianisme est économique : l'analyse des terrains en jachère comme cause majeure de la pauvreté serait fausse. Les critiques avancent que beaucoup d'endroits ont de la pauvreté malgré beaucoup de terrains, par exemple l'Inde. Les économistes modernes ne considèrent pas la terre comme un facteur de production séparé mais plutôt comme un capital. Le géolibertarianisme est considéré comme anti-écologique par certains qui croient qu'il s'oppose aux réserves naturelles et aux jachères.

François Guillaumat critique la notion même de ressource naturelle ou de richesse naturelle, car aucune richesse ne préexiste nulle part avant que l'homme n'intervienne pour lui donner de la valeur, c'est-à-dire pour la transformer en un bien ou service recherché par d'autres hommes.

Citations

  • En fait, la clause de Locke (proviso) conduirait naturellement à interdire toute propriété privée du sol comme contraire au droit puisque l’on peut toujours soutenir que la réduction de l’espace disponible par un individu défavorise tous les autres, dont le domaine d’appropriation se trouve ainsi limité. En vérité, il n’y a aucun moyen de vérifier s’ils sont défavorisés ni de mesurer la chose. Et à supposer qu’ils le soient, je suggère que cela fait partie des risques que l’on doit naturellement assumer. Chacun doit avoir le droit d’approprier pour soi-même des terres ou d’autres ressources jusqu’alors non appropriées. Si les retardataires sont défavorisés, eh bien, cela fait partie des risques qu’ils doivent assumer dans ce monde de liberté et d’incertitude. (Murray Rothbard, Ethique de la Liberté, chap. 29)
  • Les libertariens de gauche soutiennent que les ressources naturelles appartiennent aux membres de la société d’une manière égalitaire. [...] Une conception adéquate des droits aux ressources naturelles devrait satisfaire les conditions suivantes: (1) Les agents doivent pouvoir utiliser, et même s’approprier, des ressources naturelles non encore appropriées sans perdre aucun droit de propriété de soi. (2) Ceux qui s’approprient des ressources naturelles doivent indemniser ceux qui sont désavantagés par cette appropriation en comparaison avec l’usage public. Ils doivent aussi verser au moins la valeur du loyer concurrentiel pour les droits réclamés, et peut-être aussi une taxe allant jusqu’à 100 % de la valeur des avantages d’appropriation. (3) L’empiétement sur les droits aux ressources naturelles et aux biens produits est permis quand cela profite à certains et que personne n’en pâtit. (4) Le fonds créé par les loyers concurrentiels et par les taxes sur les avantages doit servir à favoriser l'égalité des chances de bien-être. (Peter Vallentyne, Le libertarisme de gauche et la justice, [1])

Voir aussi

Liens externes


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