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Discours
Dans le contexte politique, le discours est souvent normatif et moralisateur. Par exemple, le discours répressif et moralisateur contre la prostitution (ou la pornographie, l'usage de drogues, etc.) est un interventionnisme de l'homme et de la femme politique qui conçoit la défense de la liberté par l'annonce d'un discours d’interdiction, faisant apparaître cette dernière comme l’unique solution pour protéger les prétendues "victimes". Durant les campagnes électorales, les personnages publics se complaisent à prononcer des termes vagues et quelquefois creux (veasel words) comme solidarité ou justice sociale, juste pour que leur énoncé endorme l'esprit de curiosité de leur auditoire.
Des alternatives méthodologiques d'analyses discursives
Dans le domaine de la sociologie, de la communication et de la théorie des organisations, l’analyse discursive des acteurs se fonde sur un riche éventail d'alternatives méthodologiques disponibles, y compris l'analyse de la conversation, l'ethnométhodologie, la déconstruction[1], l'analyse du récit, l'intertextualité, la sociolinguistique[2], l'analyse critique du discours[3], la narratologie[4], la méthode lexicométrique ou l'analyse de contenu[5].
- L'analyse conversationnelle est l'étude du "parler" dans l'interaction verbale et non verbale dans des situations de la vie quotidienne. Depuis la fin des années 1960 (par les sociologue Harvey Sacks, Emanuel Schegloff et Gail Jefferson), elle décrit l'ordre, la structure et les modes d'interaction séquentielle, dans un contexte institutionnel (à l'école, dans le cabinet d'un médecin, au tribunal de Justice ou ailleurs) ou simplement dans une conversation informelle.
- Le Storytelling[6] ou la narratologie[7] de management est l'étude des histoires pour mieux faire passer une idée aux parties prenantes de l'entreprise. La narratologie en management considère que l’entreprise n'est pas un lieu de lutte de classes, comme le présentait l'analyse marxiste mais un espace où s’affrontent récits et contre-récits. Les chercheurs montrent que les récits ou les histoires possèdent une formidable puissance fédératrice. L'image de l'entreprise est donc constituée par ces histoires en interne (bavardage concernant le moral des salariés, notes de la direction financière sur la performance économique) tout comme la réputation s'étoffe à l'extérieur de l'organisation par le positionnement ou l'opinion que l'étude de marché va renforcer. Un exemple notoire, illustrant la narratologie provient de l'anecdote sur une infirmière zambienne, qu'utilise Stephen Denning, alors responsable de la gestion de la connaissance (knowledge management) à la Banque mondiale. Il arrive à mobiliser toute son équipe sur les insuffisances de son institution par vexation d'incompétence. car, toutes les immenses ressources d'informations de la banque mondiale n'étaient pas accessibles à l'infirmière qui utilisa plus avantageusement un site médical sur internet plus pertinent pour soigner un patient de la malaria. La narratologie implique un leadership discursif et un leadership rhétorique pour savoir raconter des histoires dans différentes activités de management (publicité pour une marque, activité de conseil pour la gestion stratégique) pour tenter de mobiliser son auditoire. Loin d'être une méthode improvisée, l'histoire racontée utilise les ressorts de l'émotion de l'auditeur pour favoriser son transfert sur le personnage de la narration, beaucoup plus efficace que la froideur d'un graphique ou d'un transparent de powerpoint. Le récit est ainsi instrumentalisé pour jouer sur la subjectivité perceptive de l'auditeur posant des problèmes éthiques. Mais, dans la majorité des cas, le storytelling met en valeur des récits porteurs de sens.
- La méthode lexicométrique permet de détecter les univers lexicaux et de révéler l’importance du sens (cognitif) des mots, de leur direction (circulation) et de leur globalisation (partage entre acteurs) pour déceler leur finalité de "bon sens" (sens communs).
- L'analyse de contenu de communication examine essentiellement la présence, la signification et les relations de certains mots et / ou des phrases pour faire des inférences sur le message communiqué.
- La sociolinguistique interactionnelle (SI) est une forme d'analyse du discours qui est devenue populaire dans l'examen du discours dans le milieu du travail (John J. Gumperz[8], Janet Holmes[9]; Shari Kendall[10]. La SI s'appuie sur des informations socio-culturelles et contextuelles pour aider l'analyse du discours et elle examine la manière dont les interactants interprètent les énoncés les uns des autres. L'analyse contextuelle offerte par la SI contraste avec l'approche de l'analyse de conversation qui analyse le discours sur une base uniquement sur ce qui est contenu dans les limites de la conversation.
- La psycholinguistique que l'on retrouve principalement appliquée dans la programmation d’algorithme (Traitement informatisé du langage naturel utilisé pour les moteurs de recherche, les traductions automatisées ou les corrections orthographiques) par l'apport commun de la linguistique et de l'informatique. Elle vise à analyser sémantiquement des textes ou des bases de données non structurées par le contrôle d'apparitions d’ambiguïté de sens. Par exemple, La psycholinguistique s'intéresse aux marqueurs prosodiques (la vitesse de la parole[11], les divers accents phoniques, la tonalité de la voix, les silences, les mots sur la langue, etc.), aux marqueurs discursifs (les mots qui n'apportent pas d'informations mais qui s’intègrent au langage ou le parasite, par ex : "eh bien", "tout à fait", "mais alors", etc.), les marqueurs lexicaux, les marqueurs morphologiques, etc.
- La communication non verbale[12], repose surtout sur l'expressivité de l'acteur (expression du visage, gestes, comportement, etc.) en dehors du texte écrit ou des paroles prononcées.
L'analyse autrichienne des textes
Une approche analytique du discours est une étude systématique des textes qui permet de réfléchir sur l'« acteur » ou les acteurs, sur les récits et dans les histoires où ils se trouvent. Chaque texte contient des indices au sujet des objets de connaissance, des conceptions de soi, du statut et des relations sociales, et du pouvoir. L'analyse du discours est un mode de recherche universitaire qui étudie le « sens » à travers une « étude systématique des textes », et elle est considérée comme un moyen utile de donner un sens à la nature rapidement changeante du travail et de l'organisation. Un "texte" est quelque chose qui rapporte des phénomènes sociaux en tant qu'être, comprenant les comptes rendus verbaux et écrits, des représentations visuelles, des bâtiments, des vêtements, des objets culturels etc.
Des auteurs comme Keenoy et Oswick (2003), utilisant la métaphore du "landscape" (paysage) soutiennent que le sens d'un texte est intégré dans un « textscape », c'est à dire qu'il est acquis grâce à de continuelles références à d'autres textes (par l'intertextualité par exemple) - qui sont tous spatialement et temporellement situés. Par ailleurs, les textes sont « multi-fonctionnels » dans leur nature, car ils constituent des formes de connaissances, ils sont interpersonnels, en aidant les gens à développer leur concept de soi et d'identité sociale, et ils informent les relations sociales entre les différents acteurs.
L'analyse autrichienne des textes principalement défendue par Don Lavoie va plus loin dans la métaphore du "texte paysager". En s'appuyant sur la notion de structure de capital, la métaphore est évidente que le sens du texte ne se perçoit pas seulement en surface, comme une vision d'un paysage dans son horizon, mais également en profondeur. Les ressources du discours s'appuient également dans ses racines plus ou moins profondes. Par exemple, un texte sur la liberté exige de comprendre comment cette notion s'enracine dans les différents auteurs qui ont traité de ce thème dans l'histoire de la littérature. Les points de connexion ne s’effectuent pas uniquement en surface, avec des auteurs contemporains, mais également en référence à des textes plus anciens, dont la vérité est intacte. Les idées ont certes, des conséquences, selon la formule consacrée par le conservateur américain Richard Weaver, mais les idées aussi ont des racines qui nous permettent de les relier à d'autres racines plus ou moins profondes. Le sens des textes n'est pas toujours évident, d'où une recherche de sa significations par des recherches de sources alternatives et des comparaisons pour pouvoir les intégrer à son capital de savoir.
Actuellement, une nouvelle méthodologie d'analyse du discours se met en place, avec l'analyse autrichienne de la littérature. Aussi, plusieurs chercheurs, dont Paul Cantor et Stephen Cox, sont actuellement en train de faire émerger cette nouvelle discipline qui consiste à lire les textes avec les outils méthodologiques de l'école autrichienne : individualisme méthodologique, subjectivisme (des choix, temporels), acteur-entrepreneur, conséquences inattendues des actions humaines (ordre spontané) etc.
Notes et références
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- ↑ Influencées par l'école française de narratologie, les études américaines en sciences sociales ont commencé, dans les années 1980, sur les récits du monde du travail.
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- Mary Ellen Brown, 1985, “That Reminds Me of a Story: Speech Action in Organizational Socialization”, The Western Journal of Speech Communication: WJSC, Portland, n°49, pp27-42
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