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Un cinéma d'inspiration libérale
Un cinéma d’inspiration libérale ?
Il a existé un cinéma fasciste, un cinéma nazi, un cinéma d’inspiration marxiste (ce dernier n’ayant pas disparu). Peut-il exister un cinéma libéral, dans la mesure où le libéralisme est d’une certaine façon une anti-idéologie qui refuse d’enrégimenter la culture ?
Le problème de la lecture des œuvres
Tout œuvre peut faire l’objet de lectures diverses et certaines œuvres se prêtent particulièrement à des interprétations contradictoires. Par exemple Le Seigneur des Anneaux est répertorié par Wikibéral comme roman libéral, alors que le message explicitement délivré par son auteur est réactionnaire, hostile au progrès industriel assimilé aux forces maléfiques (Saroumane cesse d’être un bon magicien lorsqu’il cède à l’hybris technique), mais un libéral peut y voir une allégorie du pouvoir corrupteur incarné par l’anneau diabolique.
Ceci dit, un film de propagande peut difficilement faire l’objet de diverses lectures : La Terre de Dovjenko est admirable plastiquement mais le message délivré est d’une clarté abjecte, il masque la réalité criminelle de la collectivisation en montrant un gentil communiste assassiné par un triste koulak. Le Juif Süss n’a pas les charmes esthétiques de La Terre et ne peut guère apparaître pour autre chose qu’un film antisémite. Certains films peuvent aussi être des films de propagande masqués : 1900, pseudo-fresque historique de Bertolucci en est un exemple avec le fils du peuple sain et viril qui s’oppose au fils de bourgeois faible et décadent, le film se concluant sur le triomphe annoncé de la Révolution, le fascisme n’ayant été que l’ultime sursaut d’une société bourgeoise agonisante.
Un libéral peut aimer une œuvre cinématographique non libérale, et c’est peut-être une expression de son libéralisme (esprit d’ouverture) : les films d’Eisenstein, qui sont tous des films de propagande, sont généralement appréciés des cinéphiles en dépit de leur contenu mais en raison de leurs qualités formelles. Le Trou de Jacques Becker est un des plus remarquables films sur l’univers carcéral jamais réalisés. En dépit cependant de ses apparences réalistes (inspiré d’un récit authentique, présence dans le casting d’un des ex-prisonniers dans son propre rôle, attachement aux détails et aux petits gestes quotidiens, absence de musique), il s’agit d’un récit qui délivre un message marxiste : il exalte l’unité de gens du peuple victimes d’un système social injuste, leur ingéniosité manuelle et leur volonté de s’évader, le seul bourgeois du groupe est un oisif et va finir par les trahir. Cette utopie s’inscrit logiquement dans le cadre d’une prison.
En dehors du Rebelle de King Vidor, il n’existe aucun film délivrant un message explicitement et univoquement libéral. Cependant, le cinéma américain, qui véhicule les valeurs américaines, est très souvent d’inspiration libérale par son exaltation (jugée parfois excessive) de l’individualisme et de la liberté, d’où le grand nombre de films hollywoodiens figurant dans la liste. Un genre comme le western apparaît comme particulièrement susceptible de véhiculer des idées libérales. Le cinéma de pur divertissement n’existe guère, un film renvoie nécessairement à des valeurs acceptées par le spectateur moyen et le critique de cinéma progressiste voit dans Hollywood une dangereuse machine de propagande, d’autant plus dangereuse que le message est enrobé et non asséné.
Des critères de choix
Aussi Wikibéral n’a pas vocation à accueillir n’importe quelle œuvre pouvant être appréciée par des libéraux en dépit de son contenu anti-libéral : les films soviétiques, nazis et fascistes sont prohibés d’office. Un film d’inspiration libérale répond donc à certains critères. Il peut délivrer un message qui inclut des valeurs libérales :
- un message anti-totalitaire, le bonheur individuel placé au-dessus du bien commun : Ninotchka, 1984, Bienvenue à Gattaca, Le Dictateur, Matrix, Minority Report.
- une critique politique plus (Juarez, New York 1997) ou moins (Gangs of New York) subtile
- un message pacifiste, montrant l’écrasement de l’individu : À l'Ouest rien de nouveau, Les Chemins de la gloire, ou dans un registre plus complexe, Josey Wales hors la loi.
- un message de tolérance dénonçant la justice expéditive (L'Étrange Incident, Vers sa destinée) ou les préjugés collectifs à l’égard de la différence individuelle (L'Extravagant Monsieur Deeds, Maurice, On murmure dans la ville)
Un film d’inspiration libérale est un film d’inspiration individualiste, qui peut aussi bien présenter de façon positive la réussite dans les affaires (Aviator, Le Pacte, Rothschild, Tucker) ou le besoin d'indépendance (Les Irréductibles, Le Rebelle, Libertopia, Le Prisonnier), qui peut exprimer une méfiance à l’égard du pouvoir politique en particulier (Soupe au canard (la)) mais aussi des pouvoirs établis en général, qui considère que chacun est libre de vivre comme il l’entend dans la mesure où il ne porte pas atteinte à la liberté d’autrui (Compagnons de la marguerite (Les), Larry Flynt). Le libéralisme englobant aussi bien ce qui relève de l’économie, de la politique ou des questions de société, le choix des films souligne cette diversité. Il renvoie à trois sens du mot libéral :
- qui est d'esprit ouvert et tolérant, qui s'abstient d'exercer toute contrainte, tout autoritarisme ;
- qui est favorable aux libertés civiles et politiques, qui les favorise ;
- relatif au libéralisme économique, système économique libéral fondé sur la libre entreprise, qui laisse fonctionner librement le marché.
Reste que les choix culturels sont toujours subjectifs : tel film est-il libéral ou est-ce notre lecture qui le fait tel ?
Enfin se pose la question de la qualité du film : un mauvais film même d’inspiration libérale n’a pas sa place dans cette sélection.
Liens externes
- (fr)Le libéralisme ne doit pas être une culture (sur liberaux.org)
- (fr)Œuvres audiovisuelles libérales (sur liberaux.org)
- (fr)La liberté sur grand écran : les meilleurs films libéraux (David Boaz, sur Contrepoints)
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