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École à la maison

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L'enseignement à domicile ou l'éducation parentale désigne l'administration d'un programme d'éducation offert à la maison plutôt que dans une école publique ou privée. Dans cette situation d'enseignement, les enfants apprennent à la maison plutôt que dans des écoles conventionnelles. Les parents, les proches ou des tuteurs assument alors la responsabilité directe de l'éducation des enfants. Le phénomène, est encore assez mineur. Cependant, la pandémie de la COVID-19 lui donne des dimensions encore plus importantes. En constante croissance au niveau mondial, le gouvernement français a cependant affaibli son développement au prétexte fumeux de la lutte contre l'islamisme et le séparatisme. De plus, la liberté de choix normalement assurée dans une démocratie libérale, connait en France une restriction dans le parcours scolaire depuis quelques années (par exemple, le système Parcoursup). Pendant longtemps, l'éducation fut considérée comme une institution obligatoire chargée d'exercer une contrainte bénéfique sur l'apprenti citoyen et n'a été que rarement envisagée comme un service mis à la disposition de l'enfant. Les élèves sont alors devenus la possession partielle de l'État[1], autorité ultime sur les parents administrés et subalternes. Mais, il semble cependant que le mouvement de l'enseignement à domicile offre une critique de l'éducation traditionnelle, ce que n'apprécie pas de bon cœur les pouvoirs publics en place.

L'école à la maison : une aspiration à une plus grande liberté sur l'avenir de ses enfants

Le homeschooling offre aujourd'hui plus de libertés outre-atlantique qu'en France. Ce terme définit les familles qui ont l'intention de laisser leurs enfants libres de décider quoi apprendre, où le faire et comment, si possible, en éludant les obligations des évaluations notées qui sont rendues obligatoires de fait en France. Parmi les "homeschoolers", il y a les parents qui suivent le socle de compétences du ministère de l'éducation et ceux qui pratiquent le "unschooling"[2]. Afin d'éviter de se retrouver isolés, certains parents se sont interconnectés en réseau sous l'égide bien souvent d'une entreprise de la société civile (association de parents très motivés et convaincus, groupes religieux, etc.). Aux États-Unis, les groupes religieux, grâce à une bonne organisation et à une puissance économique, ont supplanté numériquement les groupes de parents libertaires[3] et progressistes qui, dans le sillage des mouvements contestataires des années 1960, avaient commencé à scolariser leurs enfants en dehors des circuits scolaires traditionnels. Certains parents proposent à leurs enfants un récit alternatif de leur culture, en favorisant une plus grande sensibilisation à leur propre identité linguistique et plus largement, sur leur contexte culturel. Une variété d'approches éducatives existent dans ce créneau qui reflètent la diversité culturelle des personnes qui la transmettent.

Lorsque l'autorité parentale s'exerce sur l'éducation d'un enfant avec confiance et certitude, l'école à la maison symbolise alors l'acte ultime de la liberté. Les parents éprouvent une sensation de liberté lorsqu'ils ont la possibilité d'exprimer leurs préférences en matière d'éducation. En grande partie, ce choix remet en question la concurrence que l'État affirme vouloir assumer, de façon péremptoire et symboliquement parricide, lorsqu'il prétend jouer un rôle paternaliste et bienveillant dans l'éducation des enfants[4]. La peur de la folie de l'État, comme l'estimait Michel Foucault[5], n'est pas injustifiée quand le Mammouth vient arracher les liens forts d'intimité et d'amour entre les parents et leurs enfants. Les parents revendiquent le droit de décider[6] ce qui est vraiment le mieux pour leurs enfants en remplaçant le paternalisme infantilisant[7] de l'État par le paternalisme véritable et naturel de la famille. Le caractère constructiviste de l'État et de ses émanations du système éducatif implique peu à peu, avec l'avancée des études, une dépersonnalisation de la personne adulte ou enfant. L'intervention de l'État dès l'enseignement élémentaire n'est pas anodine car elle a un effet individuel ainsi qu'un effet d'externalité sur le voisinage de l'apprenant. Ceci fut explicitement reconnu par Milton Friedman[8], qui met particulièrement l'accent sur le fait que l'éducation de l'individu a des effets indirects sur l'ensemble de la société. Mais, il n'y a pas lieu d'être horripilé, comme le sont de nombreux éducateurs thuriféraires de l'enseignement public, pour que ce service soit rendu à des consommateurs[9] et non à des serviteurs serviles de la société en perpétuelle reconstruction.

Les motivations des parents de sortir du système public de l'éducation nationale

Les motivations des parents de sortir du système public sont multiples. Elle vont de la statophobie[10], au puérocentrisme[11] jusqu'à la défense des valeurs libertariennes de la liberté. Aux Etats-Unis, Milton Gaither (2008) note que le homeschooling contemporain est caractérisé par un mouvement qui rejette la dimension coercitive des institutions et non, comme par le passé, par une option éducative alternative parmi d'autres. Les parents revendiquent à leur droit de pouvoir sur l'éducation de leur enfant, droit qui s'est perdu au fur et à mesure de l'évolution de l'idée d'un monopole nécessaire dans l'éducation[12]. L'enfant n'appartient à personne, ni à sa famille[13], ni à l'école, et surtout moins à l'État.

Le renoncement complet à l'école traditionnelle est une réaction saine des parents contre les mesures des écoles publiques mises en place à l'échelle nationale. Le Ministère de l'éducation croit que l'amélioration de l'éducation passe par une bureaucratisation, par une standardisation de la formation et par une normalisation des contenus scolaires qui mortifie l'autonomie et la créativité de l'enfant. Aussi, il est tout à fait normal qu'un nombre croissant de familles choisisse de quitter ce système déliquescent et liberticide en estimant que c'est le contraire auquel ils aspirent. Les inspecteurs pédagogiques connaissent la salle de classe que lors des contrôles des professeurs. Ils n'en saisissent pas la réalité profonde, évolutive et complexe. Les parents souhaitent la flexibilité dans la carte scolaire et moins de contraintes pratiques qui les affectent directement[14]. Ils désirent plus de liberté administrative et plus de liberté d'expression pour leurs enfants. Ceci ne veut pas dire une production sans limite de la parole ou sans règle de communication. Au contraire, ils refusent une école qui les étouffent souvent dans les modes de styles et de techniques d'expression. L'école du nivellement pas le bas n'est pas selon eux le meilleur endroit pour que leurs enfants entrent en contact avec leurs semblables. Elles limitent l'espace de découverte et la profondeur des passions naissantes des enfants. Certains parents trouvent que certaines règles d'obéissance et de contraintes dans les écoles traditionnelles sont plus adaptées au bon fonctionnement du système bureaucratique de l'éducation en lui-même qu'il n'est un apport à la croissance mentale de l'enfant. L'école traditionnelle est, par exemple, en retard sur la formation des enfants en ce qui concerne les nouvelles technologies. La liberté d'expression à l'école passe par un véritable parcours individualisé qui soit calé sur les besoins et les capacités de l'apprenant.

Les parents veulent des enseignants dont le profil n'est pas formaté comme du copier-coller dans un coin de l'esprit technocratique des inspecteurs pédagogiques. Les enseignants ont une qualification de plus en plus élevée, qui est similaire au cadre du secteur privé (hors enseignement) mais ils sont traités comme de vulgaires ouvriers de l'apprentissage. Ils sont suivis obligatoirement tout au long de leur carrière, ce qui apparaît un système obsolète et fonctionnarisé de la reconnaissance de leurs compétences. La peur d'être mal notés et donc, d'être mal payés, les conduit à se conformer comme les moutons de Panurge. Ils suivent la masse. Ceux qui régimbent sont écartés. Enfin, les parents souhaitent des passerelles entre l'enseignement privé et public mais ne veulent pas du conformisme de la pensée de leurs enfants qui serait calé sur celui de l'école publique. La diversité des méthodes et des styles d'enseignement, généralement provenant de la richesse d'expériences de l'enseignant, est l'atout nécessaire et attractif pour les parents qui souhaitent donner une bonne éducation à leurs enfants.

Informations complémentaires

Notes et références

  1. Blair Adams, "Who Owns the Children?: Compulsory Education and the Dilemma of Ultimate Authority", Waco, TX: Truth Forum, 5ème édition en 1991
  2. Ce terme fut inventé dans les années 1980 par John Holt, un enseignant américain, qui l'a utilisé dans sa newsletter "Growing without schooling" pour indiquer la possibilité d'apprendre sans aller à l'école.
  3. Le libertarisme, le libéralisme et le libertarianisme sont les principaux mouvements qui ont attaché de l'importance aux principes et pratiques pédagogiques.
    • 1966, L. I. Krimerman, L. Perry, "Patterns of Anarchy. A Collection of Writings on the Anarchist Tradition", Anchor Books, pp405 et suiv.
  4. Les hommes et les femmes de l'État considèrent paradoxalement que la restriction de la liberté parentale est nécessaire pour éviter qu'elle n'entrave celles de leurs enfants ou que leurs intérêts ne soient négligés.
  5. Michel Foucault, 2007, "The birth of bio-politics", London: Macmillan Palgrave
  6. John E. Coons, Stephen D. Sugarman, 1978, "Education by Choice: The Case for Family Control", Berkeley: U of CA Press
  7. Mathieu Laine, 2021, "Infantilisation", Paris: La Cité
  8. Milton Friedman, 1955, "The Role of Government in Education", In: R. A. Solo, dir., "Economics and the Public Interest", Rutgers University Press, New Brunswick, N.J., pp123-144
  9. Robert Ballion, 1982, "Les consommateurs d'école: Stratégies éducatives des familles", Paris: Stock
  10. Michel Foucault est l'un des premiers intellectuels à parler de la peur de l'État. Il exprime l'idée de la crainte farouche de certains individus que la logique de gouvernance mise en place par l'État envahisse l'esprit de l'humanité dans son individualité. Dans l'histoire, elle s'est manifestée par la peur du trop-plein d’État dans les régies politiques tels que le soviétisme, le nazisme, despotisme et sur le terrain économique : la planification, la régulation, l’interventionnisme. Les phobiques de l’État furent des exilés politiques qui exportèrent leurs valeurs de liberté individuelle sur d’autres terres et les diffusèrent avec une farouche détermination. La phobie d’État est l’un des signes révélateurs qui explique la crise de la gouvernementalité. Michel Foucault rappelle que dans l'histoire, la phobie de la monarchie absolue amena à la révolution française. La dissidence politique issue du siècle passé par certains mouvements libertaires de 1968 ont diffusé une culture anti-étatiste qui met en lumière la crise contemporaine du refus par les gens des pratiques gouvernementales et de la montée de l'abstentionnisme.
    • 1984, Michel Foucault, « La phobie d’Etat » (extrait du cours du 31 janvier 1979 au Collège de France), Libération, n°967, 30/31 juin 1984, p21
  11. Le puérocentrisme place l'enfant et ses intérêts au centre du projet éducatif, suivant les théories pédagogiques de l'école moderne née au début du XXème siècle : John Dewey, Maria Montessori, Célestin Freinet.
  12. Antony Flew, 1987, "Power to the Parents: Reversing Educational Decline", London: Sherwood Press. Indirectement et sans le dire explicitement, l'auteur s'appuie sur la hiérarchie des besoins pour condamner le monopole public sur l'éducation. Que ce soit Abraham Maslow dans sa théorie des besoins ou l'approche de Carl Menger dans la théorie des choix, toute personne recherche à satisfaire en premier ses besoins urgents. Par conséquent, l'approvisionnement en nourriture est certainement encore plus important que l'offre de services d'enseignement. Pourtant, il n'y a pas de monopole sur l'offre de nourriture et les pays socialistes qui ont osé tenter une planification dans ce domaine ont abouti au mieux à un rationnement et au pire à des famines mortelles. Il apparaît donc comme illogique de vouloir imposer un monopole sur l'éducation qui aboutit au même résultat que l'ancienne planification soviétique.
  13. Jean Marie Lustiger : "L'enfant n'appartient à personne et surtout pas à l'État. Il est donné par Dieu à des parents qui n'en sont pas les propriétaires, et qui en sont les responsables comme d'un don confié. Pour que cet enfant devienne ce qu'il est ; libre, à l'image de Dieu libre, il faut que ses parents, premiers responsables, l'initient à cette liberté ! D'où la nécessité de la famille éducative. Tous les psychologues savent bien que l'enfant naît à la conscience de soi devant ses parents. Tous les régimes totalitaires, du nazisme à toutes les formes de bolchevisme, savent aussi qu'ils doivent soustraire l'enfant le plus tôt possible à sa famille s'ils veulent le transformer en « l'homme nouveau ». Citation récupéré le 9 août 2022 sur le site Learn in Freedom provenant du livre de Gérard Leclerc, 1985, "La Bataille de L'école: 15 siècles d'histoire 3 ans de combat", Paris: Denoël
  14. Par exemple, les promenades hors de l'école doivent être gérées d'une certaine façon réglementée.

Bibliographie

  • 1991, Mary Anne Pitman, Jane Van Galen, dir., "Home Schooling: Political, Historical, and Pedagogical Perspectives", Social and Policy Issues in Education: The University of Cincinnati Series, Ablex PublishingCorp
  • 2007, Eric Isenberg, "What Have We Learned About Homeschooling?", Peabody Journal of Education, Vol 82, n°2-3, pp387-409
  • 2008, Milton Gaither, "Homeschool: An American History", Palgrave Mc Millan, New York
  • 2010,
    • S. Karstein, M. S. Merry, "Restricted Liberty, Parental Choice and Homeschooling", Journal of Philosophy of Education, Vol 44, n°4, pp497-514
    • Robert Kunzman, "Homeschooling and religious fundamentalism", International Electronic Journal of Elementary Education, Vol 3, n°1, October
    • R. Morton, "Home Education: Constructions of Choice", International Electronic Journal of Elementary Education, Vol 3, n°1, October
    • Carl Watner, dir., "Homeschooling: A Hope for America", The Voluntaryists
  • 2016, A. Mazama, "African American homeschooling practices: Empirical evidence", Theory and Research in Education, Vol 14, n°1, pp26-44
  • 2017,
    • Erika Di Martino, "Homeschooling. L’educazione parentale in Italia", ("École à la maison. L'éducation parentale en Italie"), Educazione Parentale
    • R. Portela de Oliveira, L. Muniz Ribeiro Barbosa, "Neoliberalism as one of the Foundation of Home schooling, Pro-Posições, Vol 28, n°2, pp193-221
  • 2018, A. Watson, "Is homeschool cool? Current trends in American homeschooling", Journal of School Choice, Vol 12, n°3, pp401-425
  • 2020, Milton Gaither, Robert Kunzman, "Homeschooling: An Updated Comprehensive Survey of the Research", Other education, Vol 9, n°1
  • 2021, Jean-Baptiste Maillard, Marie Maillard, "L'école à la maison : une liberté fondamentale", Artege