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Colloque Walter Lippmann

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Le colloque Walter Lippmann est organisé en août 1938 sur l'initiative du journaliste américain Walter Lippmann et organisé par le français Louis Rougier. Il donne l’occasion de rassembler des universitaires libéraux hostiles au fascisme, au communisme et à toutes les formes d’interventionnisme économique de l’État. Le propos du colloque est de définir le libéralisme, d'élaborer sa doctrine, de considérer les conditions de réalisation et d'envisager les tâches futures.

Le colloque réunit vingt-six intervenants. Parmi les participants, sont présents Raymond Aron, Louis Baudin, Michael Heilperin, Ludwig von Mises, Jacques Rueff, Alfred Schütz, Auguste Detœuf et Friedrich Hayek, et d'autres personnalités moins connues comme Robert Marjolin.

Le colloque a permis de créer une association : le Centre international pour la rénovation du libéralisme, dont la première session s'est tenue à Paris en mars 1939. La seconde guerre mondiale mit prématurément fin à ses activités.

Loin d'avoir constitué un lieu de ralliement contre toutes formes d'intervention de l’État contre l'économie, il a été le lieu d'affrontements intellectuels entre deux branches du libéralisme. D'un côté, un "néo-libéralisme" visant à réhabiliter la doctrine libérale en expurgeant sa dimension laisser-fairiste et en considérant que le rôle de l’État était de fixer des règles juridiques assurant le bon fonctionnement du marché tout en assurant un filet social à la population. Ce néo-libéralisme était défendu par les représentants allemands (Röpke et Rüstow), les patrons technocrates français (Marlio, Auguste Detœuf) et la plupart des autres membres présents (Castijello). Seule la minorité incarnée par Rueff, Mises et Hayek restait attachée au libéralisme classique, imputant la responsabilité de la crise économique de 1929 à l'intervention de l’État, et souhaitant empêcher l’État d'intervenir sur le système de prix.

On présente parfois le Colloque Lippmann comme précurseur de la création de la Société du Mont-Pèlerin à partir de 1947, car des 26 participants au Colloque, 16 furent adhérents de la Société du Mont-Pèlerin. En fait, seule la moitié des membres du colloque seront invités par Hayek à Vevey en Suisse, car Hayek entendait défendre un libéralisme beaucoup plus classique que celui qu'avaient en tête la plupart des participants au Colloque.

En 1956, en Belgique, le Centre Paul Hymans - centre d'études dépendant du parti libéral belge - a tenu son premier colloque 1957 à Ostende dans une perspective proche du colloque de 1938. Plusieurs personnalités y participèrent : Jacques Rueff, Ludwig von Mises, Maurice Allais, Floyd A. Harper, Bruno Leoni, Daniel Villey et Louis Rougier.

Citations

  • « Le point de départ du colloque est fourni par le journaliste démocrate Walter Lippmann, fondateur de la revue de gauche New Republic, qui vient de publier La cité libre, un ouvrage qui dresse un bilan très noir du « laissez-faire » et met l’accent sur le besoin de lois sociales. L’idée selon laquelle le marché est capable de s’autoréguler est mise à mal par deux faits incontestables, l’émergence des monopoles et des trusts, d’une part, et l’augmentation de la pauvreté et du chômage dans le sillage de la Grande Dépression, d’autre part. Le colloque Lippmann montre, selon le professeur Alain Barrère dans les années 1950 (voir Le colloque Lippmann, aux origines du «néo-libéralisme», par Serge Audier, Ed. Le bord de l’eau, 2012), que « les néolibéraux conservent l’essentiel des positions du libéralisme individualiste, mais ils ne croient plus à son institution spontanée ». » (Emmanuel Garessus, Le Temps, 24 août 2018)
  • « Le libéralisme a connu de nombreuses crises au cours de son existence tumultueuse. Au sortir du krach de 1929, il a dû abandonner une vision trop radicale du laissez-faire et admettre la nécessité de la régulation. Ce fut toute l’œuvre du colloque Lippmann en 1938, qui devait nourrir très largement la pensée néolibérale de l’après-guerre. » (Gaspard Koenig, La fin de l'individu, 2019)
  • « S’il ressort du colloque de 1938 un penchant social prononcé, qu’on ne retrouvera effectivement pas après-guerre, au moment de la création de la Société du Mont-Pèlerin, et qu’aucun des auteurs présents en 1938 ne portera de manière prégnante sur la place publique (à l’exception de Röpke, quoiqu’on puisse en débattre, et bien qu’il ait été lui aussi président de la Société du Mont-Pèlerin), il ne faudrait pas pour autant caricaturer. L’aile libérale la plus orthodoxe, autrichienne ou américaine, reste une voie présente aussi bien dans les débats que dans le rapport final. À aucun moment, les néo-libéraux n’ont pris le pas sur les orthodoxes, pour dire les choses autrement. » (Fabrice Copeau, 29 octobre 2010)

Voir aussi

Bibliographie

  • 1939,
    • Travaux du centre international d’études pour la rénovation du libéralisme, Le colloque Lippmann, Paris, Librairie de Médicis
    • Gaëtan Pirou, Néo-libéralisme néo-corporatisme, néo-socialisme, Paris, Gallimard
  • 1950, Henry Steele Commager, The American Mind, New Haven, Yale University Press
  • 1967, Richard F. Kuisel, Ernest Mercier French Technocrat, University of California Press
  • 2001, François Denord, "Aux origines du néo-libéralisme en France : Louis Rougier et le Colloque Walter Lippmann de 1938", Le mouvement social, n°195, pp9-34, [lire en ligne].
  • 2003, Pierre Bilger, « La pensée néolibérale française et l’ordo-libéralisme allemand » in Commun Patricia (ed) (2003), L’ordo-libéralisme allemand, Cergy-Pontoise, CIRACC/CICC.
  • 2005, Francis U. Clavé, « Walter Lippmann et le néolibéralisme de la Cité Libre », Cahiers d’économie politique, n°48, pp79-110
  • 2008,
    • Serge Audier, Le Colloque Lippmann. Aux origines du néo-libéralisme, Latresne, Éditions Le Bord de l’Eau
    • Patrick Fridenson, commentaire du livre de Serge Audier, Le Colloque Lippmann. Aux origines du néo-libéralisme, Le Mouvement Social

Articles connexes

Liens externes


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