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Élie Decazes
Élie Decazes | |||||
Homme politique | |||||
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Dates | 1780 - 1860 | ||||
Tendance | Libéral-conservateur | ||||
Nationalité | France | ||||
Articles internes | Autres articles sur Élie Decazes | ||||
Citation | |||||
Interwikis sur Élie Decazes | |||||
Élie Louis Decazes, né le 28 septembre 1780 à Saint-Martin-de-Laye et mort le 24 octobre 1860 à Paris, comte Decazes, puis 1er duc Decazes et duc de Glücksberg, est un homme politique français du XIXe siècle. Il a voulu « nationaliser la royauté et royaliser la France » sans y parvenir.
Biographie
Fils d'un notaire de Libourne, après des études militaires à l’école de Vendôme (1790-1799), il fait son droit et devient juge au tribunal civil de la Seine puis avocat-conseil à la cour d’appel de Paris. Il est nommé conseil de Louis Bonaparte, frère de l’Empereur, qui devient roi de Hollande.
Il se rallie à la Restauration et reste fidèle aux Bourbons pendant les Cent Jours. Aussi Louis XVIII le nomme-t-il préfet de police le 7 juillet 1815. C'est ainsi qu'il va gagner la faveur du Roi qui le considère comme son disciple, son fils spirituel, au point de lui envoyer des billets passionnés : « Mon Elie, je t'aime, je te bénis de toute mon âme, je te presse contre mon cœur. Viens y recevoir les plus tendres baisers de ton ami, de ton père, de ton Louis ! »
L’amabilité de ses manières, le charme de son esprit, ses idées hostiles à l’ultracisme vont le rendre indispensable. Chateaubriand, qui le déteste, évoquant le lien entre les deux hommes, écrit dans les Mémoires d’outre-Tombe : « Est-ce un penchant pour un esclave qui se donne corps et âme, devant lequel on ne se cache de rien, esclave qui devient un vêtement, un jouet, une idée fixe, liée à tous sentiments, à tous les goûts, à tous les caprices de celui qu'elle a soumis et qu'elle tient sous l'empire d'une fascination invincible ? ».
Député de la Seine en août 1815, puis ministre de la Police dans le ministère Richelieu, il convainc Louis XVIII de dissoudre la Chambre introuvable le 5 septembre 1816. Les élections renforcent les constitutionnels modérés, le groupe de Decazes. Il est la bête noire du parti royaliste. On rapporte la réplique faite par une grande dame. « Mais, avait dit le ministre, savez-vous de quel parti je suis et de quel parti vous êtes — Certainement, je suis du parti que l'on guillotine et vous êtes du parti que l'on pend. »
Après le retrait de Richelieu fin décembre 1818, ministre de l’Intérieur, il dirige de fait le gouvernement du faible Dessolles en 1818 : avec le baron Louis aux Finances, Gouvion Saint-Cyr à la Guerre et le comte de Serre, Garde des Sceaux, il mène une politique libérale. Comme le déclare le ministre de la Guerre : « Il faut rassurer la nation en lui prodiguant toutes les garanties qu'elle réclame, se lancer franchement dans le torrent libéral ». Ne pouvant compter que sur les centres, et avant tout le groupe des Doctrinaires, le gouvernement dépendait de la bonne volonté de la gauche antidynastique. En quelques jours, Decazes remplace 16 préfets et 40 sous-préfets et remanie le conseil d’État où les Ultras sont écartés au profit des Doctrinaires. D'anciens officiers généraux compromis aux Cent Jours retrouvent des commandements. Un certain nombre de régicides et d'autres exilés reçoivent l'autorisation de rentrer en France. Se heurtant à l'opposition de la Chambre des pairs, Decazes obtient du Roi d'en changer la majorité par la promotion de 59 nouveaux pairs, choisis parmi les amis du ministre.
Il peut ainsi faire voter les lois sur la presse préparées par une commission dominée par les Doctrinaires : Royer-Collard, Guizot, Prosper de Barante et Victor de Broglie. Désormais, les délits de presse relevaient du jury et non plus des tribunaux correctionnels. L'autorisation préalable et la censure étaient supprimées et remplacées par une déclaration préalable et un cautionnement.
Mais le ministère mécontente la droite sans satisfaire la gauche et suscite l'inquiétude des gouvernements étrangers. Pour l'ambassadeur de Russie « La France est livrée à la fois aux personnes, aux intérêts et à l'esprit de l'ancienne armée et à celui des doctrinaires, idéologues ou anarchiques ». Lors du renouvellement partiel, l'élection de l'ancien conventionnel et régicide, l'abbé Grégoire, qui bénéficie des voix conjuguées de la droite et de la gauche, paraît comme une insulte au trône.
Pour rassurer la droite, Decazes se sépare de Gouvion Saint-Cyr, Louis et Dessolles et accepte de prendre la tête du gouvernement : il est officiellement nommé en novembre 1819 chef du gouvernement, le plus jeune président de conseil que la France ait connu à ce jour. Il s’efforce de se concilier les Ultras. Grégoire est exclu de la Chambre. Les Doctrinaires ont rompu avec leur ancienne idole : « Avec Decazes, point de salut » déclare Royer-Collard. La droite préfère attendre avant de renverser le nouveau ministère.
Mais un événement inattendu va précipiter sa chute : l’assassinat du duc de Berry le 13 février 1820. Chateaubriand écrit dans le Journal des Débats du 19 février : « Ceux qui ont assassiné Mgr le duc de Berry sont ceux qui, depuis quatre ans, établissent dans la monarchie des lois démocratiques... ». Nodier dans le même journal : « J'ai vu le poignard de Louvel, c'était une idée libérale. »
Le Roi, après avoir refusé dans un premier temps de renvoyer Decazes, finit par céder non sans douleurs : « Viens voir le prince ingrat qui n'a pas su te défendre ; viens mêler tes larmes à celles de ton malheureux père. » Louis XVIII décide d'accumuler les honneurs sur sa tête : ministre d’État, duc et pair, ambassadeur à Londres. Le lendemain de son départ, il montre au comte de Saint-Aulaire le portrait de son favori : « Voilà tout ce qui me reste ; on a pu me l'arracher, mais non l'ôter de mon cœur. » Le roi Frédéric VI de Danemark en avait déjà fait un duc de Glücksberg suite à son second mariage en 1818 arrangé avec une riche héritière par Louis XVIII.
L'échec de Decazes était celui du centre qui avait cru pouvoir concilier les traditions monarchiques avec l'idéologie révolutionnaire. Il laissait désormais face à face royalistes et libéraux, incarnant deux peuples ennemis.
En décembre 1821, il entre à la Chambre des pairs, y défendant des positions libérales. Il se rallie à la Monarchie de Juillet.
En 1826, comme principal actionnaire, il avait développé une société métallurgique dans le Rouergue, la Compagnie des Houillères et Fonderies de l’Aveyron, contribuant à l’essor de Decazeville, érigée en commune en 1833 et qui compte 5000 habitants en 1846.
Il était un haut dignitaire de la franc-maçonnerie française.
Un portrait de Decazes par Mathieu Molé
- Le point le plus délicat à résoudre est de savoir si M. Decazes est sincère ou faux : si j'en crois mon impression et sa physionomie, il est le plus faux des hommes... Il fait consister la science du gouvernement dans celle de séduire... il gagnait les grands en s'adressant à leur bassesse, et les petits en les élevant jusqu'à lui... Il n'a ni connaissances ni idées générales, il n'a peut-être pas lu cinq cents pages dans toute sa vie. En fait d'histoire, il ne connait que la sienne ; ... sans doctrine comme sans principe, il ne gouverne que par expédients. Mais il ne se décourage ni ne s'effraie, et son art consiste à savoir toujours se tirer d'embarras... Son esprit semble vague et errant comme son regard semble avoir besoin de s'appuyer sur la distraction pour se fixer ; il fait toujours plusieurs choses à la fois ; il faut qu'il lise pendant qu'il parle, et qu'il parle pendant qu'il écrit ; à défaut d'autres ressources, il fait ses ongles ou considère ses mains qui sont fort belles et dont il est incessamment occupé. [...] C'est le seul exemple qu'offre l'histoire jusqu'ici d'un favori devenu populaire et cela chez un peuple qui passerait à ses rois vingt maîtresses plutôt qu'un favori.
Sources
- G. de Bertier de Sauvigny, La Restauration, Flammarion 1955
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