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Consentement

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Le consentement est le fait de se prononcer en faveur de l'accomplissement d'un projet ou d'un acte. Du point de vue moral, c'est l'acte, supposé non contraint, par lequel on s'engage entièrement à accepter ou à accomplir quelque chose.

Ce concept peut être envisagé aux plans juridique, politique, ou éthique.

Aspect juridique

En droit français, le consentement est le fait de se prononcer en faveur d'un acte juridique, au sens large, et particulièrement, de toute convention, de tout contrat. Le consentement est l'élément fondamental dégagé par la doctrine de l'autonomie de la volonté : celui qui s'oblige, qui se rend débiteur d'une obligation, doit y avoir préalablement consenti : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » (article 1134 du code Civil). Le contrat est tout particulièrement empreint de cette idée, et reste, dans l'idéal, un instrument juridique consensuel grâce à la place déterminante laissée au consentement.

En droit de Common Law, le consentement est vu comme un principe de responsabilité, selon la maxime volenti non fit injuria (celui qui a consenti à l’acte ne peut prétendre en être victime). Celui qui a consenti à courir un risque en connaissance de cause ne peut en rejeter la responsabilité sur quelqu'un d'autre. Le consentement est parfois difficile à établir (est-il implicite ? exprimé ? écrit ? ou seulement oral ?).

Aspect politique

Le concept de consentement est central dans les théories politiques libérales. Locke introduit le concept de gouvernement par consentement comme moyen d’instituer la liberté et de limiter l’autorité du gouvernement (résistance à l'oppression). Pour Kant, le consentement est un principe essentiel du gouvernement, les citoyens étant alors traités comme des personnes, et non comme des instruments. Le consentement prend la forme du contrat social et de la démocratie libérale. La contrepartie du consentement est l'obligation politique de respecter les règles imposées et le gouvernement qui les impose.

Pour les libertariens, attachés à la liberté de contrat, le consentement politique au travers du contrat social ne peut exister que s'il est personnel et unanime, et que si l'objet de ce consentement est clairement défini et délimité dans le temps, conditions jamais remplies en pratique, même dans le cas de l'état minimal, obligé comme tout état de vivre de l'impôt.

Pour Nozick, l'état minimal "veilleur de nuit", qui assure la sécurité du citoyen (à l'exclusion de toute autre fonction), est légitime indépendamment du consentement de ceux qu'il gouverne. En revanche, toute extension de ses pouvoirs au-delà de ses fonctions de sécurité n'est légitime que si le consentement de tous lui est acquis.

Pour les libéraux utilitaristes, l'Etat n'a pas besoin de consentement : il est légitime dès qu'il maximise la quantité de bien-être de la société comparativement à d'autres organisations sociales.

Aspect éthique et philosophique

Le consentement est un concept central de la philosophie libérale, puisqu'il sert à déterminer la légitimité d'un acte (tel qu'un échange, ou un contrat) ou son absence de légitimité (une agression). Murray Rothbard définit ainsi une agression :

Ce que signifie une agression violente est qu’une personne prend le contrôle de ce qui appartient à une autre sans son consentement. L’ingérence peut atteindre la propriété d’un homme sur sa propre personne (le cas d’une agression corporelle) ou sa propriété sur les choses comme dans le cas du vol ou de la violation de domicile. Dans un cas comme dans l’autre, l’agresseur impose sa volonté contre la propriété naturelle d’un autre, il prive sa victime de sa liberté d’action et du plein exercice de sa propriété naturelle de soi-même. (Ethique de la Liberté, chap. 8)

Les théoriciens libéraux affirment que toutes les relations entre personnes consentantes sont légitimes du moment qu'elles ne nuisent pas à des tiers (ou seulement de façon indirecte). La difficulté est souvent d'apprécier ce consentement. La réalité du consentement est souvent mise en doute pour des raisons sociologiques (contrainte économique et sociale, pseudo-théorie collectiviste de l'échange "inégal") ou psychologiques (influence, fascination). Le travailleur pauvre consent-il vraiment à son sort ? La prostituée ne ferait-elle pas un autre métier si elle le pouvait ? Les électeurs auraient-ils voté pour ce candidat s'il avait mené sa campagne autrement ou fait des promesses différentes ? Y a-t-il eu viol, ou la plaignante était-elle consentante ?

Il est facile de sombrer dans le sophisme en montrant tantôt que le consentement existe toujours (si l'esclave ne se suicide pas, c'est bien qu'il consent à son sort), tantôt qu'il n'existe jamais (nous sommes toujours plus ou moins contraints dans nos choix, et nous ne pouvons consentir nécessairement à toutes leurs conséquences faute de les connaître).

On s'accorde en général à reconnaître l'authenticité du consentement à partir de critères subjectifs (intention préalable, action intentionnelle) et comportementaux (engagement explicite), en écartant les arguments pseudo-rationnels fallacieux ("une personne normale ferait ou ne ferait pas cela").

Le consentement doit évidemment se faire en connaissance de cause, les risques étant évalués en fonction des connaissances dont on dispose au moment de la prise de décision (on parle en médecine de "consentement éclairé"), sachant qu'il y a toujours des impondérables dans toute action humaine.

Le consentement peut ne pas être moralement requis quand il s'agit d'assister une personne dans son propre intérêt de façon flagrante (si elle est en danger immédiat, victime d'un accident...), consentement qui vraisemblablement aurait été accordé si la personne avait eu la capacité de le faire (l'exception étant le cas du suicide).

Ruwen Ogien énonce trois écueils à éviter dans le choix des critères de consentement :

  1. ils ne doivent pas être exigeants au point d'anéantir la possibilité de consentement (par exemple, le vote est valide une fois le bulletin glissé dans l'urne - on ne le remet pas en cause sous prétexte que l'électeur a été influencé par sa famille, son milieu, la beauté du candidat, etc.)
  2. ils ne doivent pas être contradictoires (exemple des féministes qui militent pour le renforcement de la répression des agressions sexuelles : un refus de la part d'une femme est un refus, en revanche un consentement n'en est jamais un, même si le comportement est explicite)
  3. ils ne doivent pas être arbitraires, à la discrétion d'un pouvoir coercitif : pour garantir la sécurité juridique des personnes, ces critères doivent être publics et stables.

Notons qu'il n'est pas nécessaire de donner une valeur absolue à l'idée de consentement ou de la rattacher à des concepts métaphysiques ("libre-arbitre", liberté métaphysique) qui sont toujours matière à débat philosophique. D'un point de vue normatif, on peut accorder une valeur relative au consentement dès lors que les critères de consentement respectent les principes généraux du libéralisme (non-nuisance, non agression) et évitent un paternalisme qui méprise l'opinion personnelle de l'individu.

Les conservateurs de droite et de gauche remettent en cause par idéologie l'authenticité du consentement en utilisant une stratégie contradictoire :

  1. le consentement n'existe pas (dans la pornographie, la prostitution, le travail "mal payé", la vente d'organes, etc.) ;
  2. si le consentement existe, c'est alors une circonstance aggravante, car cette action (pornographie, prostitution, travail "mal payé", vente d'organes, etc.) est immorale et contraire à la "dignité humaine".

Une autre variante étant la suivante :

  1. ce n'est pas bien parce que ce n'est pas gratuit (sexe, don d'organes...) ;
  2. même si c'était gratuit, ce ne serait pas bien, car cela porte atteinte à la "dignité humaine".

Ruwen Ogien remarque :

Il se pourrait que l'argument de la "nécessité de protéger la dignité humaine" soit plus politique que conceptuel ou éthique. Ce serait un de ces mots pompeux qu'on jette à la face du public pour l'impressionner, sans souci de cohérence ou de justification. (L'éthique aujourd'hui, chap . 10)

La négation idéologique de la notion de consentement relève ainsi d'un conservatisme qui cherche à s'imposer politiquement et d'un paternalisme moral qui prétend se substituer aux choix des individus.

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