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Raymond de Roover
Raymond de Roover | |||||
Historien | |||||
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Dates | 1904 - 1972 | ||||
Tendance | Histoire financière | ||||
Nationalité | Belgique, États-Unis | ||||
Articles internes | Autres articles sur Raymond de Roover | ||||
Citation | |||||
Interwikis sur Raymond de Roover | |||||
Raymond de Roover, né le 28 août 1904 et décédé le 18 mars 1972, était un historien économique américain d'origine belge, spécialiste de l'histoire bancaire et financière du bas Moyen Âge. Il fut en prises directes avec les documents originaux de la banque florentine des XIVe et XVe siècles, Il a été professeur au Wells college, Aurora-on-Cayugan, dans l'État de New York.
Dans le commentaire du livre de Carlo Cipolla, "Studi di Storia della Moneta", paru dans les Annales en 1951, Raymond de Roover montre comment la vie économique italienne du XIIIe au XVe siècle a évolué en fonction du système monétaire en place. Plus l'historien regarde dans le passé, plus il a des difficultés à trouver des statistiques, écrit-il. Il est d'autant plus rarissime de trouver des informations chiffrées sur le change interne des monnaies par rapport au change externe (échange avec un pays étranger). Il explique que la tâche est d'autant plus ardue pour l'historien que même les changes internes fluctuent à la différence des changes fixes comme par exemple, ce qui s'est passé en France après 1914 où existait un cours immuable pour le napoléon ou le louis qui valait toujours vingt francs. Au Moyen Âge, dans la plupart des États de l'Europe occidentale, l'unité de base était le denier en argent ; la livre et le sou n'étaient que des monnaies de compte.
La réglementation de l'usure capturée par les banquiers-marchands de Bruges pour écarter la concurrence
Spécialiste de l'économie médiévale et de Bruges, la place financière importante en Europe, Raymond de Roover note dans son ouvrage Money, Banking and Credit in Medieval Bruges (1948) que « les profanes qui violaient l'interdiction de l'usure étaient punis par les autorités civiles »[1]. 21 usuriers ont été condamnés à une amende en 1304, 19 en 1310 et 24 en 1311. L'usure était donc un phénomène relativement courant à Bruges du XIIIème au XIVe siècle[2]. Parfois, des usuriers de Bruges étaient conduits devant la Chambre des comptes de Lille où les amendes étaient beaucoup plus importantes. Toutefois, la loi contre l'usure n'empêchait pas la pratique[3].
Raymond de Roover affirme donc ("The scholastics, usury, and foreign exchange": 1967) que certains commerçants échappaient aux lois contre l'usure car le marché des changes à l'échelle européenne servait également de marché des capitaux. En effet, le moyen le plus précieux de contourner l'interdiction de l'usure était de transformer les opérations de crédit en opérations de change via une lettre de change. Ces marchands-banquiers avaient donc plutôt intérêt à soutenir l'interdiction des intérêts, même si elle leur imposait des coûts supplémentaires, car l'interdiction appliquait des coûts encore plus élevés à leurs concurrents. Cet argument suggère que l'interdiction de l'usure était susceptible d'être capturée par la réglementation, ce que George Stigler (1971)[4] a avancé dans sa théorie de la capture réglementaire[5].
Raymond de Roover a fait valoir (1974) que l'interdiction canonique de l'usure a permis le façonnement de nouvelles méthodes, de nouvelles formes d'organisation et de nouvelles attitudes commerciales tout au long de la période médiévale, en affectant les divers types de contrats employés par les marchands. Par exemple, Raymond de Roover indique dans The Medici Bank (1948) que les banquiers de Florence étaient organisés en une guilde, « l'Arte de Cambio », qui interdisait l'entrée dans leur activité des prêteurs sur gages et autres usuriers manifestes. L'interdiction de l'usure a imposé des coûts substantiels à l'économie médiévale. Les coûts d'opportunité de l'interdiction comprenaient non seulement toutes les transactions qui n'ont pas pu avoir lieu (Frédéric Bastiat dénomme ceci ce qui ne se voit pas) à cause de la réglementation, mais aussi les ressources investies pour l'éviter. Il en résulta, précisa Raymond de Roover (1948) des contrats et des documents délibérément rédigés dans un langage obscur et ambigu qui devinrent un terreau fertile pour des litiges coûteux.
Le commerce du change était un art, explique Raymond de Roover que les marchands-banquiers italiens maîtrisaient avec perfection. En remettant de l'argent au change, ils pouvaient ainsi prêter avec profit sans violer l'interdit de l'Église contre l'usure. Cependant, l'utilisation d'instruments de crédit sophistiqués tels que la lettre de change était coûteuse et tous les commerçants n'avaient pas les connaissances, les relations ou l'expérience pour les utiliser. Ils étaient obligés de se former toute leur vie pour s'assurer de la confiance de leurs clients.
Notes et références
- ↑ En droit canonique, tout intérêt sur un prêt (mutuum) au-delà du principal était interdit en tant qu'usure. La facturation des intérêts n'était pas condamnée pour des raisons instrumentales, mais parce qu'elle était considérée comme intrinsèquement pécheresse. L'usure était exclusivement associée aux contrats mutuum car il s'agissait de prêts de biens fongibles où il était possible pour l'emprunteur de restituer intégralement le principal au prêteur. En revanche, un contrat de commodatum ou un prêt impliquant des biens non fongibles comme une maison, par exemple, pouvait impliquer un rendement supérieur au principal car il s'agissait d'un prêt à usage et pouvait donc être considéré comme un loyer.
- ↑ À Bruges à partir des années 1280, les usuriers lombards opéraient manifestement dans la ville. Ailleurs, les prêteurs sur gages étaient tenus par des cahorsiens. Les premiers prêteurs sur gages autorisés à Bruges étaient les Lombards Jakemon de Calochs et Centurin de Montfaucon en 1281, et ils payaient des frais annuels à la ville. Bien que l'activité était illégale, une licence était nécessaire pour s'y engager. Cela ne constituait pas une légalisation de l'usure puisque les prêteurs sur gages n'étaient pas autorisés à suivre leur métier sans licence ou un permis spécial pour le faire. L'existence d'un petit nombre de prêteurs sur gages agréés dans certaines juridictions est compatible avec le modèle, car selon la théorie de la capture, l'octroi de licences aux prêteurs sur gages peut être considéré comme une tentative des autorités laïques de capter une partie des rentes générées par l'interdiction de l'usure. Les licences de prêt à intérêt étaient une source de revenus et les prêteurs étaient souvent soumis à une taxation arbitraire. Même ainsi pourvue, leur position restait précaire et était à bien des égards comparable à celle des Juifs. Les Lombards de Flandre comme d'ailleurs vivaient dans la crainte constante d'un retour brutal aux méthodes répressives et sous la menace permanente d'expulsion et de spoliation.
- ↑ Les dirigeants politiques d'Angleterre et de France ont autorisé et taxé les usuriers juifs tout au long du XIIIe siècle.
- ↑ George Stigler, 1971, "The theory of economic regulation", The Bell Journal of Economics and Management Science, Vol 2, n°1, pp3–21.
- ↑ George Stigler prouve que les réglementations qui ont pour objectif déclaré d'améliorer le bien-être social ont souvent pour effet de créer des rentes de monopole pour des groupes d'intérêts bien organisés. Dans la même approche, Fred S. McChesney, 1987, propose la théorie de la « prédation par les coûts » dans laquelle la réglementation nuit à certains producteurs de manière disproportionnée par rapport à d'autres et qu'elle crée ainsi des rentes pour certains producteurs.
- Fred McChesney, 1987, "Rent extraction and rent creation in the economic theory of regulation", The Journal of Legal Studies, 16 (1), pp101–118
Publications
- 1942, "The Commercial Revolution of the Thirteenth Century", Bulletin of The Business Historical Society, Vol XVI, pp34—39
- Repris en 1953, "The Commercial Revolution of the Thirteenth Century", In: Frederic C. Lane, Jelle C. Riemersma, dir., "Enterprise and Secular Change: Readings in Economic History", Homewood: Richard D. Irwin, pp80-85
- 1944, "What is dry exchange? A contribution to the study of English mercantilism", The Journal of Political Economy, 52 (3), pp250–266
- 1946, "The Medici bank financial and commercial operations", The Journal of Economic History, 6 (2), pp153–172
- 1948,
- a. "The Medici Bank", New York University Press, New York
- b. "Money, Banking and Credit in Medieval Bruges", The Medieval Academy of America, Cambridge, Massachusetts
- 1949, "Gresham on Foreign Exchange", Harvard University Press, Cambridge, M.A.
- 1951, "Le moyen âge face à l'histoire statistique. La tentative de Carlo M. Cipolla", Annale, Vol 6, n°1, pp31-36
- 1955, "Scholastic economics. Survival and lasting influence from the Sixteenth Century to Adam Smith", Quarterly Journal of Economics, Vol LXIX, mai, pp161-190
- Extrait en 1960, "Scholasticism and Mercantilism: A Contrast", In: Joseph Spengler, W. R. Allen, dir. "Essays in Economic Thought: Aristotle to Marshall", Chicago: Rand McNally, pp92-100
- Traduction en espagnol en 1983, "Economía Escolástica", Estudios Públicos, Vol 9, pp89-121
- 1957, “Joseph A. Schumpeter and Scholastic Economics”, Kyklos, Vol 2
- 1958, "The Concept of the Just Price: Theory and Economic Policy", Journal of Economic History, Vol 18, n°4, déc.
- 1963,
- a. "The Rise and Decline of the Medici Bank, 1397–1494", Harvard University Press, Cambridge, MA.
- b. "The scholastic attitude toward trade and entrepreneurship", Explorations in Entrepreneurial History, Vol 2, n°1, pp76-87
- 1967,
- a. "San Bernardino of Siena and Sant'Antonino of Florence: the two great economic thinkers of the Middle Ages", Boston Mass.: Baker Libr
- b. "The scholastics, usury, and foreign exchange", The Business History Review, Vol 41, pp257–271
- 1968, "L'Impôt dans le cadre de la ville Et de l'État", Speculum, Vol 43, n°4, pp732-733
- 1971, "La Pensée économique des scolastiques", Montréal: Institut d'études médiévales ; Paris: J. Vrin
- 1974, "Business, Banking, and Economic Thought in Late Medieval and Early Modern Europe", The University of Chicago Press, Chicago
- Nouvelle édition en 1976, Chicago, University of Chicago Press
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