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Quatrième République
La Quatrième République, née en 1946, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, meurt en 1958 de la crise algérienne. En 1944-1945, la France est un pays en ruine, où règne une certaine anarchie créée par l’effondrement du régime de Vichy succédant à la Troisième République. Mais le GPRF (Gouvernement Provisoire de la République Française) s’impose rapidement : autour du général de Gaulle, il représente tous les partis politiques entrés dans la résistance. C’est le retour à la démocratie avec une innovation, le vote des femmes. Les Français refusent le rétablissement de la Troisième République, donc l’Assemblée élue en 1945 est constituante : elle doit mettre en place une nouvelle constitution pour une Quatrième République. Mais ce régime va très vite révéler sa faiblesse : la république va durer douze ans.
Un régime parlementaire instable
Une naissance difficile
Une assemblée dominée par trois partis formant le tripartisme : deux partis marxistes et un nouveau venu. Le PCF se présente comme le « parti des fusillés » et bénéficie de l'image glorieuse d'une URSS qui a vaincu le nazisme tandis que la SFIO (marxiste en théorie mais réformiste en pratique) de Léon Blum exclut ceux qui ont voté les pleins pouvoirs à Pétain le 10 juillet 1940. Le MRP (Mouvement Républicain Populaire) animé par G. Bidault et R. Schuman réunit les résistants d’inspiration chrétienne et tentent la greffe de la démocratie chrétienne qui n’a jamais pris en France. Il se réclame du général.
Au centre, le vieux parti radical sort exsangue de la guerre car il est trop associé à la IIIe république ; seules quelques individualité émergent tel Pierre Mendès-France. La droite est presque hors-jeu car accusée d’avoir collaboré.
Par double référendum du 21 octobre 1945, les Français confèrent à l'Assemblée le caractère constituant, mais lui dénient les pleins pouvoirs et la soumettent à la loi constitutionnelle annexée au référendum. Cette limitation est un échec pour les communistes.
Très vite, un conflit éclate entre le général de Gaulle et l’Assemblée élue en octobre 1945. De Gaulle démissionne en janvier 1946. La constitution (d’inspiration communiste) est rejetée par le peuple en mai 1946 d’où l'élection d’une deuxième assemblée qui voit un recul des partis marxistes. Le deuxième projet est accepté par lassitude en octobre 1946. Seuls 53 % des votants ont voté oui (mais il y a plus de 30 % d’abstentions). Pourquoi cette abstention, ce faible enthousiasme et l’opposition du général ? La Constitution du 27 octobre 1946 entérine le retour au système de la IIIe république.
Le fonctionnement du régime parlementaire
Le régime va connaître 22 gouvernements en 12 ans : du gouvernement Queuille en 1950 qui tient 2 jours au gouvernement Guy Mollet (1956-1957), le plus long, un peu plus d’un an. Les présidents du conseil sont souvent centristes.
Cette instabilité n'est pas compensée par le fait que souvent les mêmes hommes restent aux mêmes postes ! Schuman a été ministre des Affaires étrangères dans les 11 gouvernements de 1948 à 1952 ; François Mitterrand a été 4 fois ministre de l’Intérieur ; 2 fois Garde des Sceaux ; 3 fois ministre des Anciens Combattants : en tout 12 fois ministre !
Sous Vincent Auriol, le président de la République a sollicité 59 hommes politiques ; 24 se sont présentés devant l’Assemblée ; 12 ont été investis. Pour réussir, il faut être prudent, modéré et avoir des amis dans de nombreux partis comme le président Queuille, un radical, qui se maintient plus d’un an (1948-1949) dans son premier gouvernement en ne faisant rien.
Un gouvernement ne peut se constituer que par une entente de partis : les majorités sont fragiles car chaque groupe peut espérer obtenir plus de portefeuilles dans un autre gouvernement. Si les promesses ne sont pas tenues c’est la faute des autres partis. Ainsi les partis sous la IVe cherchent les avantages du pouvoir et de l’opposition ! Certains députés soutiennent tous les gouvernements ; d’autres s’opposent à tous. Les partis peuvent pratiquer la participation sans soutien ou le soutien sans participation. Le président du conseil est le « plomb qui saute » (Paul Reynaud). Renverser le gouvernement, c’est avoir une chance d’obtenir un portefeuille. On remet à plus tard les mesures nécessaires mais impopulaires, car c’est le successeur qui en tirerait bénéfice.
Un régime fragilisé par la guerre froide
La Guerre froide provoque l’éclatement du tripartisme. Le PCF entre dans l’opposition étant hostile à la guerre d’Indochine et au plan Marshall. Des grèves très violentes, de type insurrectionnel, soutenues par les communistes, éclatent en 1947 puis en 1948. D’autre part, général de Gaulle décide de créer un parti politique : le RPF (Rassemblement du Peuple Français) à la fois contre le régime des partis et contre le communisme. Cela explique le rôle important des centristes au Parlement : radicaux et UDSR sont les partenaires nécessaires de toute majorité. La troisième force réunit ainsi tous les partis modérés.
Les élections de 1951 voient un net recul du parti communiste qui est isolé et l'entrée du RPF. Le MRP décline, victime de sa rupture avec de Gaulle. La Troisième force doit donc s’appuyer davantage sur la droite. Mais les majorités deviennent aussi nécessairement fragiles. L'appui des 19 députés de centre-gauche est d'autant plus indispensable.
Mais la nomination d’un homme de droite, Antoine Pinay en 1952, marque l'échec de la stratégie gaullienne : le président du conseil ne peut avoir une majorité qu’avec l’appui d’une partie des gaullistes. Ce qui provoque la fureur du général qui va dissoudre le RPF en 1953.
La lente désagrégation de la IVe République
Un régime impuissant face aux crises
La IVe république est à l’origine de la construction européenne avec le plan Schuman créant la C.E.C.A. (1950) : le MRP et la SFIO y sont favorables. La C.E.D. (plan Pleven) imagine d'intégrer des contingents allemands dans un système de défense européen. Idée d'origine française, la question de la CED mine la vie politique en raison de la division du monde politique sur le sujet et de l'hostilité bien sûr du PCF et du RPF. Les gouvernements successifs évitent de s'engager.
L’élection de René Coty en décembre 1953 symbolise aux yeux de l'opinion internationale l'enlisement du système : il faut treize tours de scrutin pour choisir un inconnu amené à remplir des fonctions essentiellement symboliques.
Dans le même temps, la guerre d’Indochine tourne mal pour la France, tandis que des troubles éclatent en Tunisie et au Maroc.
L’expérience Mendès-France
La défaite de Dien Bien Phu (juin 1954) rend nécessaire une solution au problème indochinois et l'arrivée au pouvoir d'un homme de caractère. Pierre Mendès-France était un radical mais marginal dans le parti, un homme réputé pour sa rigueur morale et sa compétence mais froid (buveur de lait et adversaire des lobbies de l’alcool). Ancien ministre de Léon Blum en 1938 et de De Gaulle en 1945, il refuse les voix communistes et exige d’avoir une majorité de voix non communistes. Son gouvernement va durer sept mois et rassemble plusieurs talents du monde politique.
Il refuse aussi de consulter les partis pour composer son gouvernement qui ne compte que 4 ministres du gouvernement précédent. Il était composé de radicaux et d’anciens gaullistes avec quelques centristes et soutenu par la SFIO et le PCF. Il demande donc l’investiture pour lui seul et refuse que l’Assemblée intervienne dans le choix des ministres : ce qui était conforme au texte de la Constitution mais non à la pratique de ses prédécesseurs.
Il se donne 4 semaines pour régler la question indochinoise : investi le 18 juin, il signe les accords de Genève dans la nuit du 20 au 21 juillet 1954. A la fin du mois, il part en Tunisie et enclenche le processus de décolonisation : la Tunisie deviendra indépendante en 1956. C’est la première décolonisation française sans violence.
Il ose enfin présenter le texte de la CED devant l’Assemblée mais en refusant d’engager la responsabilité du gouvernement. La CED est rejeté mais il réussit cependant à faire approuver par l’Assemblée le réarmement allemand : Foster Dulles, secrétaire d’État américain, le surnomme alors « superman ».
L’échec de la CED va cependant favoriser la chute de son gouvernement. Il est renversé en février 1955 par l’alliance de la droite et du PCF à l’initiative du MRP sur la question de la Tunisie. Il faut 18 jours pour constituer un nouveau gouvernement : le radical Edgar Faure lui succède.
La guerre d’Algérie provoque la chute de la IVe république
Depuis novembre 1954, la guerre d’Algérie a commencé. Edgar Faure qui souhaite trouver une solution négociée au Maroc, est renversé par l’Assemblée mais il demande au président de la République la dissolution : les élections de 1956 vont être très disputées.
Le Front républicain réunit socialistes et radicaux mais la fragmentation politique se poursuit. Les élections révèlent l’exaspération des Français avec la montée du PCF et le succès des poujadistes dont le slogan est : Sortez les sortants.
Guy Mollet devient président du conseil. C’est l’homme de la 3e semaine de congés payés et de la signature du Traité de Rome. La création de la CEE devait être le dernier acte de la IVe.
Mais c’est aussi l’homme de Suez et celui qui envoie le contingent en Algérie : Mendès-France préfère démissionner d'un gouvernement qui perd le contrôle de ce qui se passe en Algérie. Comme Mollet n’a pas de majorité très solide, il est renversé lorsqu’il essaie de négocier avec le FLN. Ses deux successeurs, des radicaux, n'arrivent pas à s'imposer
Le 13 mai 1958, l’armée qui redoute que le nouveau président du conseil Pfimlin négocie et abandonne l’Algérie, fait un coup de force militaire, soutenu par les Pieds-noirs. Le général Massu réclame le retour du général de Gaulle. Le président de la République fait pression sur l'Assemblée pour qu'elle investisse Charles de Gaulle qui n'accepte de devenir président du Conseil que pour mieux achever le régime et rédiger une nouvelle constitution. Il est investi avec les pleins pouvoirs le 1er juin 1958.
Sources
- Philip Williams, La vie politique sous la IVe République, A. Colin 1971, 866 p.
- Serge Bernstein, Michel Winock (dir.), La République recommencée, de 1914 à nos jours in Histoire de la France politique, 4, Points Histoire, Le Seuil 2004, éd. mise à jour 2008, 740 p.
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