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Jane Jacobs

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Jane Jacobs
Urbaniste

Dates 1916 - 2006
Jane Jacobs
Tendance
Nationalité États-Unis États-Unis
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Citation
Interwikis sur Jane Jacobs

Jane Jacobs, née Jane Isabel Butzner en 1916 à Scranton (en Pennsylvanie) et décédée le 25 avril 2006, a réussi à travers ses livres à changer radicalement le regard des chercheurs et des universitaires se penchant sur le sujet du paysage urbain. Rédactrice en chef de la revue, "Architectural Forum", elle a observé de nombreux projets de reconstruction et d'aménagement urbain d'où elle a tiré des critiques sur l'urbanisme et la politique urbaine de rénovation des villes.

Le développement et le déclin des villes en raison de l'existence ou non d'un ordre spontané

Jane Jacobs a acquis une large reconnaissance publique en 1961 avec la publication de son premier ouvrage, "La mort et la vie des grandes villes américaines" qui correspond à l'apogée de la rénovation urbaine aux États-Unis. Elle a réussi à introduire de nouveaux principes d'urbanisme et de rénovation, différents et même opposés à ceux qui étaient enseignés dans toutes les écoles d'architecture et des centres universitaires dédiés à la planification urbaine. Son intérêt pour la question découlait de l'observation de la stagnation de villes américaines autrefois florissantes telles que Detroit et Pittsburgh, dont les problèmes se sont aggravés plus vite qu'ils ne pouvaient être résolus.

Son explication du fonctionnement des villes et des civilisations urbaines s'appuie, dès son point de départ, sur une approche humaniste des sciences sociales puisque sa perspective était d'observer des humains constitués de chair et de sang et non des êtres déshumanisés déposés dans un modèle abstrait et rigide. À partir de personnes ordinaires, elle entrevoyait des liens sociaux émergeant qui favorisent la sécurité, la confiance et, en fin de compte, le développement économique et le changement social.

Les contacts occasionnels et informels dans les espaces publics, en particulier entre des personnes qui ne se connaissent pas sont, dans la vision de Jane Jacobs, les éléments infimes mais puissants à partir desquels se construit la richesse d'une ville. Elle affirmait que les quartiers densément peuplés incarnent une grande diversité de compétences et de goûts. Ils sont les incubateurs d'un développement social dynamique et de découvertes d'opportunités entrepreneuriales. De la diversité de la ville vivante jaillissent l'expérimentation, la créativité et la surprise potentielle. Robert Lucas "Sur la mécanique du développement économique" (1988) et Edward Glaeser[1] et alii, sont les rares membres parmi la profession des économistes à s'appuyer sur son travail pour l'étude des externalités de la connaissance.

Les villes sont des cas de systèmes complexes auto-organisés

Jane Jacobs défendait l'ordre spontané sous-jacent des villes constituées de millions d'éléments qui en forment l'animation et la vitalité. Dans les communautés, il y a un nombre important de facteurs qui sont interdépendants les uns des autres, qui interagissent simultanément et qui forment un tout organique. L'énergie innovante au sein des villes vient de petits entrepreneurs indépendants et dynamiques qui, par effet, d'engrenage, explique-t-elle, font tourner les grandes roues de la vie économique. La myriade d'individus qui poursuivent chacun leur propre intérêt, qui exécutent leurs propres plans et qui suivent des règles de conduite acceptées par tous; encourage la coopération pacifique plutôt que l'agression violente.

Pour appuyer sa thèse, Jane Jacobs (1969) prend l'exemple de l'Angleterre en comparant les villes de Manchester et de Birmingham. Dans les années 1840, écrit-elle, Manchester se caractérisait par une mono-industrie du textile dominante. En revanche, à Birmingham, une multitude de petites entreprises fabriquaient activement des selles, des harnais, des outils, des boutons, des fusils, des bijoux, des plateaux en papier mâché, etc. Lorsque d'autres villes ont commencé à produire leurs propres textiles, l'activité économique de Manchester s'est effondrée. Cependant, à l'inverse, la diversité des activités économiques de Birmingham lui a permise de s'adapter de manière créative à l'évolution des technologies et des marchés. Jane Jacobs était persuadée que le défi majeur posé par les problèmes des villes offre des perspectives fiables pour de futurs progrès économiques en s'appuyant sur les moteurs puissants des activités individuelles et diversifiées.

L'illusion rationaliste des planificateurs urbains

Jane Jacobs (1961) s'inscrivait en faux contre le mythe des milliards à dépenser pour se débarrasser des bidonvilles[2] pour renverser la tendance à la décadence dans les grandes ceintures péri-urbaines grises et ternes qu'étaient les banlieues d'hier et d'avant-hier et peut-être même de résoudre le problème de la circulation. Au fil du temps, l'argent publique gonflant la prétention des ingénieurs sociaux, s'est déversé dans les pires quartiers de délinquance où règnent le vandalisme et le désespoir social. Les cités HLM sont devenues de véritables merveilles de monotonie et d'embrigadement de trafiquants. Les ensembles immobiliers de luxe qui devraient atténuer l'inanité de leur entourage, ou tenter de le faire, sont, écrit-elle d'une vulgarité insipide.

Elle ajoute que les planificateurs urbains ont construit des centres culturels qui sont incapables de faire vivre une modeste librairie et de chérir les petits commerces qui assurent l'intimité d'un quartier. Des centres civiques sont évités par tout le monde sauf par les clochards, qui y trouvent des lieux de flânerie plus que les autres. L'engouement des planificateurs pour la construction de parcs autant que possible, aboutit souvent à les transformer en zones désertes propices au crime et à la décadence. Et, elle finit par accuser les voies express qui éviscèrent les grandes villes. Une large rue traversant le cœur d'un quartier peut le détruire en créant un vide frontalier, écartant la vie et finalement le rendant dangereux par le manque de personnes qui ose s'y aventurer. En tant que militante, elle a réussi dans les années 1960 à arrêter un projet financé par le gouvernement fédéral visant à raser tout un quartier pour construire une autoroute alors que celui-ci est aujourd'hui l'un des quartiers les plus dynamiques du "Lower Manhattan" à New York City.

Le défaut principal de la planification, avance Jane Jacobs, provient du fait qu'elle ne prend pas en compte les subtilités des connaissances que seuls possèdent les individus sur la scène locale. Sans citer Friedrich Hayek, qui dès 1945, dans son article "L'utilisation de la connaissance" avait raisonné de la même façon en s'appuyant sur l'information individuelle idiosyncratique, Jane Jacobs invente le terme de « connaissance de la localité ». Bien avant James Coleman, elle est une des premières à utiliser le terme de "capital social" en 1961. Les réseaux de confiance et les normes de réciprocité qui se sont construits au fil du temps entre les gens favorisent le processus d'échange volontaire, ce que les projets d'envergure des urbanistes urbains risquent de faire disparaître.

Les villes ont précédé et donc, elles n'ont pas suivi le développement rural

Dans un chapitre de son livre écrit en 1961, Jana Jacobs délivre une intuition remarquable. Elle renverse l'hypothèse traditionnelle selon laquelle les premières villes sont nées de communautés agricoles. Elle affirme que les premières villes ont été fondées sur le commerce et elles ont en fait contribué à créer une agriculture et un élevage organisés. Durant la période paléolithique, indique-t-elle, l'intensification du commerce dans les premières villes a ouvert la voie au développement de l'agriculture et de l'élevage. Par conséquent, elle fait de l'action humaine et des échanges urbains, la primauté du déclenchement sur le développement de l'agriculture et de l'élevage.

Informations complémentaires

Notes et références

  1. Edward Glaeser, Hedi Kallal, Jose Scheinkman, Andrei Shleifer, 1992, "Growth in Cities", Journal of Political Economy, Vol 100, n°6, pp1126–1152.
  2. Dans la même ligne d'analyse, Edward Banfield de l'Université de Harvard, écrit dans son livre "The Unheavenly City" que les programmes gouvernementaux destinés à aider les pauvres ont plutôt aggravé les malheurs des infortunés.

Publications

  • 1958, "Downtown is for People", Fortune, April
    • Repris en 1958, In: The Editors of Fortune, dir., "The Exploding Metropolis by ", New York: Doubleday & Company, pp157–184
  • 1961, "The Death and Life of Great American Cities", New York: Vintage Books
    • Nouvelle édition en 1993, New York: Modern Library
  • 1969,
    • a. "The Economy of Cities", New York: Random House
    • b. "Strategies for Helping Cities", American Economic Review, septembre, Vol 59, n°4, pp652–656
  • 1980, "The Question of Separatism: Quebec and the Struggle over Sovereignty", New York: Random House
  • 1984, "Cities and the Wealth of Nations: Principles of Economic Life", New York: Random House
    • Nouvelle édition en 1985, Vintage Books.
  • 1992, "Systems of Survival: A Dialogue on the Moral Foundations of Commerce and Politics", New York: Random House
  • 1993,
    • a. "Foreword", In: John Sewell, "The Shape of the City: Toronto Struggles with Modern Planning", Toronto: University of Toronto Press, ppix–xii
    • b. "Systems of Survival: A Dialogue on the Moral Foundations of Commerce and Politics", New York: Vintage Books
  • 1995, "A Schoolteacher in Old Alaska: The Story of Hannah Breece", New York: Random House
  • 2000, "The Nature of Economies", New York: The Modern Library
    • Nouvelle édition en 2002, New York: Vintage.
  • 2004, "Dark Age Ahead", Toronto: Random House of Canada
    • Nouvelle édition en 2005, Vintage Canada.
    • Nouvelle édition en 2007, New York: Vintage

Littérature secondaire

  • 1969, Anonyme, "The City of Man", commentaire du livre de Jane Jacobs, "The Economy of Cities", Time, n°39 (13 juin), p104
  • 1985, Peter Bauer, "City Lights", commentaire du livre de Jane Jacobs, "Cities and the Wealth of Nations", New York Review of Books, Vol 32, n°17 (7 novembre)
  • 1989,
    • A. Cichello, "In Defense of Jane Jacobs: An Appreciative Overview", In: F. Lawrence, dir., "Ethics in Making a Living. The Jane Jacobs Conference", Atlanta: Scholars Press, pp99-168
    • Richard Carroll Keeley, "An Interview with Jane Jacobs", In: F. Lawrence, dir., "Ethics in Making a Living. The Jane Jacobs Conference", Atlanta: Scholars Press, pp1–28
  • 1997, M. Allen, dir., "Ideas that Matter. The Worlds of Jane Jacobs", Owen Sound: The Ginger Press, Inc.
  • 2000, Amrita Daniere, "Canadian Urbanism and Jane Jacobs", Journal of Urban Affairs, Vol 22, n°4, pp459–461
  • 2004, David Ellerman, "Jane Jacobs on Development", Oxford Development Studies, Vol 32, pp507–521
  • 2005,
    • David Ellerman, "How Do We Grow? Jane Jacobs on Diversification and Specialization", Challenge, Vol 48, pp50–83
    • Peter L. Laurence, "Dark Age Ahead? Jane Jacobs’s Latest Book in Context", Journal of the Society of Architectural Historians, Vol 64, n°1, pp126–128
  • 2006,
    • David Halle, "Who Wears Jane Jacobs’s Mantle in Today’s New York City?”, City & Community, Vol 5, n°3, pp237–241
    • Gert-Jan Hospers, "Jane Jacobs: her life and work", European Planning Studies, Vol 14, n°6, July
    • Peter L. Laurence, “The Death and Life of Urban Design: Jane Jacobs, the Rockefeller Foundation and the New Research in Urbanism, 1955–1965", Journal of Urban Design, Vol 11, n°2, pp145–172
    • Sheldon Richman, "Jane Jacobs (1916-2006). A Hero against the Pretensions of Social Engineering", The Freeman, Vol 56, n°5, June, pp4-5 [lire en ligne]
    • Peter Taylor, "Jane Jacobs (1916–2006): An Appreciation", Environment and Planning, A 38 (11), pp1981–1992
    • Barry Wellman, "Jane Jacobs, the Torontonian", City & Community, Vol 5, n°3, pp217–222
  • 2007,
    • Pierre Desrochers, "The Death and Life of a Reluctant Urban Icon", commentaire du livre d'Alice Sparberg Alexiou, "Jane Jacobs: Urban Visionary", Journal of Libertarian Studies, Vol 21, n°3, pp115-136
    • Christopher Klemek, "Placing Jane Jacobs within the Transatlantic Urban Conversation", Journal of the American Planning Association, Vol 73, n°1, pp49–67
    • Peter L. Laurence, commentaire du livre d'Alice Sparberg Alexiou, "Jane Jacobs: Urban Visionary", Journal of Architectural Education, Vol 60, n°3, pp52–54
  • 2010, R. Brandes Gratz, "The Battle for Gotham: Living in the Shadow of Robert Moses and Jane Jacobs", Philadelphia: Nation Books
  • 2011, J. Creed Rowan, "The Literary Craft of Jane Jacobs", In: M. Page, T. Mennel, dir., "Reconsidering Jane Jacobs", Chicago: APA Planners Press, pp43-56
  • 2012, J. Barnett, "Jane Jacobs and Designing Cities as Organized Complexity", In: S. Hirt, dir., "The Urban Wisdom of Jane Jacobs", London: Routledge, pp245-256
  • 2019,
    • Claudia Basta, Thomas Hartmann, Stefano Moroni, "People making cities – Cities making justice. The ethical relevance of Jane Jacobs' work", Cities, Vol 91, August, pp1-3
    • Edwin Buitelaar, Stefano Cozzolino, "The (ir)relevance of economic segregation. Jane Jacobs and the empirical and moral implications of an unequal spatial distribution of wealth", Cities, Vol 91, August, pp23-28
    • James J.T. Connolly, "From Jacobs to the Just City: A foundation for challenging the green planning orthodoxy", Cities, Vol 91, August, pp64-70
    • Laura Humm Delgado, Justin P. Steil, "Limits of diversity: Jane Jacobs, the Just City, and anti-subordination", Cities, Vol 91, August, pp39-48
    • Andrew Kirby, "Jane Jacobs and the limits to experience", Cities, Vol 91, August, pp17-22
    • Peter L. Laurence, "Jane Jacobs's urban ethics", Cities, Vol 91, August, pp29-38
    • Camilla Perrone, "‘Downtown Is for People’: The street-level approach in Jane Jacobs' legacy and its resonance in the planning debate within the complexity theory of cities", Cities, Vol 91, August, pp10-16
    • Dirk Schubert, "Jane Jacobs, cities, urban planning, ethics and value systems", Cities, Vol 91, August, pp4-9

Textes en ligne

Vidéos

  • "Citizen Jane: Battle for the City. [Film"], réalisé par Matt Tyrnauer, en 2016, produit par Altimeter Films. Documentaire sur la vie de Jane Jacobs, illustrant son combat contre les architectes urbains, planificateurs de la ville tels que Lecorbusier ou Moses, visible sur la chaîne Youtube. Durée: 1h29:43