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Charles Auguste Louis Joseph duc de Morny

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Charles Auguste Louis Joseph duc de Morny
homme politique

Dates 1811-1865
Charles de Morny.jpeg
Tendance libéral conservateur
Nationalité France France
Articles internes Autres articles sur Charles Auguste Louis Joseph duc de Morny

Citation « La liberté politique est le couronnement de toute société civilisée »
Interwikis sur Charles Auguste Louis Joseph duc de Morny

Charles Auguste Louis Joseph comte puis duc de Morny, est un financier et homme politique français, né à Saint-Maurice (Suisse) le 17 septembre 1811 (sa naissance est déclarée le 22 octobre suivant à Paris sous le nom de Demorny) et mort à Paris le 10 mars 1865. Corrompu et paresseux, il possédait néanmoins une vive intelligence politique qu’il tenait peut-être de son grand-père naturel, Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, prince de Bénévent, évêque d'Autun. Venu de l'orléanisme il va passer au bonapartisme. Demi-frère de Napoléon III, il a joué un rôle important dans l’arrivée au pouvoir de ce dernier et a eu une grande influence pour le meilleur (la libéralisation du régime) et pour le pire (l’expédition du Mexique) sur le destin du Second Empire.

Les débuts

Sa mère était la reine Hortense (épouse de Louis Bonaparte) dont Louis-Napoléon Bonaparte, le futur Napoléon III, était le troisième fils et Morny le quatrième, issu de la liaison avec le général Charles de Flahaut, fils naturel de Talleyrand.

Il débute sa carrière sous la Monarchie de Juillet comme brillant officier engagé dans la conquête de l’Algérie. Bien en cour mais rapidement lassé de la vie militaire, il se lance dans la fabrication de sucre de betterave en rachetant une entreprise clermontoise qui lui sert simultanément de marche-pied pour s’engager politiquement en se faisant élire le 9 juillet 1842 député du Puy-de-Dôme. Il se voit futur ministre mais la révolution de 1848 ruine ses espérances.

Déçu par les Orléans, il tente de se rapprocher de son demi-frère qu’il ne connaît pas mais qui vient d'être élu président de la Seconde République. Lors de leur rencontre en janvier 1849, il trouve Louis-Napoléon « imbu de préjugés, de faux systèmes, de défiance. » Il juge sévèrement son entourage : « une collection de niais ayant passé leur vie dans l’opposition ou en prison. » Le président se méfie de son caractère envahissant. Mais dès le mois d’avril, Morny le voit tous les jours et va devenir son conseiller le plus écouté. Dès le début, il est favorable à un coup de force mais se heurte à l’apathie de Louis-Napoléon. Aux élections législatives de mai 1849, il est élu député du Puy-de-Dôme.


L’homme d’État du Second Empire

Morny est la cheville ouvrière du coup d'État du 2 décembre 1851 qui met fin à la Seconde République. Après tout, son grand-père avait été l’un des instigateurs du 18 brumaire (9 novembre 1799). Guizot devait féliciter Morny : « Nous n’avons pas su garder le gouvernement libre. Sachons supporter le pouvoir nécessaire. » Son demi-frère lui confie le poste de confiance de ministre de l'Intérieur (2 décembre 1851- 22 janvier 1852) qu’il abandonne cependant rapidement : il démissionne par opposition au décret sur la confiscation des biens de la famille d'Orléans mais aussi parce qu’il se trouve en disgrâce pour avoir trop fait valoir son rôle.

Il se fait néanmoins réélire député du Puy-de-Dôme. Nommé président du Corps législatif le 14 novembre 1854, il s’y montre habile, flattant les députés, et devait le rester jusqu'à sa mort en dépit de la méfiance jalouse de l’empereur. Il préside également le Conseil général du Puy-de-Dôme de 1852 à sa mort (1865). Élégant, amateur de tableaux et de chevaux, il donnait un certain prestige à ses fonctions.

En 1862, faute d’entrer dans la famille impériale il est fait duc de Morny. Il se marie à Saint-Pétersbourg le 7 janvier 1857 à Sophie princesse Troubetzkoy : quatre enfants naissent de cette union. Parmi la descendance de sa fille Charlotte, on compte notamment Michel Poniatowski, ministre de l'Intérieur de Valéry Giscard d'Estaing.

L’affairiste

Porte-parole des raffineurs de sucre auvergnats, il investit d'importants capitaux avec sa maîtresse attitrée, Fanny Le Hon - qui contribue aussi à financer son ascension politique -, dans la sucrerie de Bourdon à Aulnat. Il avait écrit à Fanny après le coup d’État : « Vous avez misé sur le bon cheval. Nous allons connaître vous et moi une prospérité dont vous ne soupçonnez pas l’ampleur. » Naturellement informé avant tous les autres spéculateurs, il achète immeubles et terrains où vont passer les boulevards tracés par le baron Haussmann et les revend ensuite très cher aux pouvoirs publics.

Il se montre favorable à la modernisation du système économique et favorise notamment la création des établissements de crédit. Morny est également partisan des compagnies puissantes et donc du grand capitalisme dans la conquête du réseau ferroviaire qui se constitue. Cette collusion avec la haute banque parisienne, notamment avec celle des frères Pereire, lui permet de réaliser quelques grandes opérations financières au nom du chemin de fer du Grand Central, dont il accepte la présidence en 1853. L'année précédente, le demi-frère de l'Empereur aurait ainsi réalisé six millions de francs de bénéfices.

Autour de l'influent homme d'affaires se constitue ainsi le groupe Morny, qui spécule sur toutes les affaires en cours. Il investit notamment dans l'exploitation des mines du Massif Central (Loire, Montluçon, Saint-Aubin...). Attiré par les forts profits réalisés à Carmaux, il vient également en aide au marquis de Solages, propriétaires des mines, afin d'accélérer l'extraction de la houille. En 1860, le comte de Morny devient le président de la Compagnie des Mines et chemins de fer de Carmaux-Toulouse. Lié aux intérêts du banquier suisse Jecker à qui il accorde son appui au prix d'une commission (un tiers des crédits du financier, soit environ deux millions de francs), le duc de Morny contribue à entraîner le gouvernement français dans la malheureuse expédition militaire au Mexique (1862-1867) qui devait contribuer au déclin du régime.

L’artisan de l’Empire libéral

Convaincu que l'Empire autoritaire ne peut être qu'un régime transitoire, mais qu'en même temps il est encore trop tôt pour accorder de véritables libertés politique, il se fait le défenseur de sa libéralisation auprès de l’Empereur. Au cours de ces années, par sa stature, sa prestance, le président du Corps législatif avait conféré aux débats parlementaires une certaine tenue. Sentant que l'esprit avait changé, il propose à l'Empereur une modification du règlement de la Chambre : le droit d’amendement et d’interpellation mais sans responsabilité ministérielle. Le 24 novembre 1860, un décret impérial accorde finalement le droit d'adresse aux parlementaires.

Distinguant libertés civiles et libertés politiques, il estime prudent de commencer par les premières. Ouvrant la session de 1861, il dit à la Chambre : « La liberté politique est le couronnement de toute société civilisée, elle grandit la nation et le citoyen, il est de notre honneur d’en favoriser la durée et le développement, mais elle ne s’implante définitivement qu’avec l’ordre et la sécurité. » En 1863, il déclare à la fin de la session : « Un gouvernement sans contrôle et sans critique est comme un navire sans lest. L’absence de contradiction aveugle, égare parfois le pouvoir et ne rassure pas le pays. Nos discussions ont plus affermi la sécurité que ne l’eût fait un silence trompeur. »

Rencontrant Émile Ollivier en 1861, il lui aurait assuré : « Nous marchons au gouvernement parlementaire, j’y pousse. » En effet, devenu suspect aux yeux des partisans de l’Empire autoritaire, il se tourne désormais vers le centre et la gauche. Les élections en 1863 ayant vu le retour de Thiers dans l’enceinte parlementaire, Morny ouvre la session par ces mots : « Les suffrages du peuple ont replacé parmi nous d’anciennes illustrations parlementaires ; j’ose dire, que, pour ma part, je m’en suis réjoui. » Les deux hommes se réconcilient mais l’empereur trouve le terme « réjoui » un peu excessif.

Finalement, Morny refuse d’entrer dans le gouvernement comme ministre d’État. En 1864, le duc adresse à l’Empereur une note importante : « Les élections n’ont laissé en présence que deux forces, l’Empereur et la démocratie. Les forces de la démocratie grandissent sans cesse, il est urgent de la satisfaire si on ne veut être emporté par elle. » Il considère l’adresse comme inadaptée et stérile et réclame pour la Chambre le droit de déposer des propositions de loi, le droit d’amendement, la venue des ministres au Corps législatif pour les discussions de leur ressort.

Morny obtient qu’Ollivier soit le rapporteur de la loi promulguée le 25 mai 1864 et autorisant les coalitions ouvrières et les grèves pacifiques. Début 1865, Morny reçoit encore Ollivier : « Il est temps de donner la liberté pour qu’on ne nous l’arrache pas. » Mais Ollivier se montre réticent à entrer dans un éventuel gouvernement Morny en l’absence d’une majorité libérale à l’Assemblée. Le duc rêvait d’un empire libéral dont il serait l’inspirateur, mais la mort le terrasse quelques mois plus tard. Une foule immense devait suivre son cercueil.

Citations

  • « J’ai un grand-père évêque, une mère reine, un frère empereur, et tout cela est bien naturel » (Selon Ximenès Doudan, Mélanges et lettres, 1876-1877)
  • « Ce pays est tellement fatigué des révolutions que tout ce qu’il demande aujourd’hui, c’est un beau despotisme. » (27 septembre 1852)


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