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Moraline

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La moraline est un terme inventé par Friedrich Nietzsche (das Moralin) pour désigner par dérision la morale bien-pensante.

Le suffixe -ine de moraline est accolé à morale pour suggérer une substance pharmaceutique désignant un produit imaginaire permettant de donner une bonne moralité.

Moraline-medicament.jpg

Définition de moraline

Nietzsche désigne ainsi une morale prétendument élevée, mais en réalité tendant au nihilisme, qu'il s'agisse de conservatisme religieux ou de conformisme bourgeois. Cette forme dégradée de la morale découle principalement du judéo-christianisme qui impose des règles formelles et un système culpabilisant au lieu de la responsabilité individuelle.

Aujourd'hui, le terme de moraline pourrait plutôt être utilisé pour désigner cette « gauche morale », éternelle donneuse de leçons et adepte d'une forme de terrorisme intellectuel[1].

Emploi dans l'œuvre de Nietzsche

Le terme satirique de moraline est assez peu utilisé par Friedrich Nietzsche dans son œuvre. On peut en recenser trois occurrences :

«  Qu’est-ce que le bonheur ? — Le sentiment que la puissance grandit — qu’une résistance est surmontée. Non le contentement, mais encore de la puissance, non la paix avant tout, mais la guerre ; non la vertu, mais la valeur (vertu, dans le style de la Renaissance, virtù, vertu dépourvue de moraline). »
    — Friedrich Nietzsche, L'Antéchrist

«  Un spectacle douloureux et épouvantable s’est élevé devant mes yeux : j’ai écarté le rideau de la corruption des hommes. Ce mot dans ma bouche est au moins à l’abri d’un soupçon, celui de contenir une accusation morale de l’homme. Je l’entends — il importe de le souligner encore une fois — dépourvu de moraline : et cela au point que je ressens cette corruption précisément aux endroits où, jusqu’à nos jours, on aspirait le plus consciencieusement à la « vertu », à la « nature divine ». J’entends corruption, on le devine déjà, au sens de décadence : je prétends que toutes les valeurs qui servent aujourd’hui aux hommes à résumer leurs plus hauts désirs sont des valeurs de décadence. »
    — Friedrich Nietzsche, L'Antéchrist

«  Comment faut-il que tu te nourrisses, toi, pour atteindre ton maximum de force, de virtu, dans le sens que la Renaissance donne à ce mot, de vertu, libre de moraline ? »
    — Friedrich Nietzsche, Ecce Homo - Pourquoi je suis si malin

A chaque occurrence, le terme est employé dans un sens négatif : moralinfrei (libre de moraline). Nietzsche ne donne aucune définition de ce qu'il entend signifier par ce terme, mais le contexte semble désigner une morale subjective, culpabilisante et décadente.

Citations

  • « La moraline (j'emprunte ce terme à Nietzsche) est la simplification et la rigidification éthique qui conduisent au manichéisme, et qui ignorent compréhension, magnanimité et pardon. (...) La moraline juge et condamne en vertu de critères extérieurs ou superficiels de moralité, la moraline s'approprie le Bien et transforme en opposition entre bien et mal ce qui est en réalité un conflit de valeurs. » (Edgar Morin[2]
  • « Des flots de moraline coulent dans la presse et il est temps de procéder à un grand nettoyage de vos bibliothèques. Le rôle de l’écrivain n’est plus d’être déplaisant mais anxiolytique, d’abord et avant tout. » (Roland Jaccard, Causeur, 25 juin 2017[3])
  • « [Nietzsche] critique sans arrêt la moraline. Je sais de quoi je parle. On me verse au moins trois verres de moraline par jour. Sans que les gens en soient forcément conscients. C’est instinctif, une seconde nature. Tout est jaugé, jugé, apprécié, en fonction de la morale, « la faiblesse de la cervelle » comme dit Rimbaud magnifiquement. C’est-à-dire, aussi, l’hypocrisie même. Car nous possédons un corps, il y a de la jouissance, c’est cela que rappelle Nietzsche constamment, la morale restreint le corps, la morale parle du corps, la morale se déguise... Son livre Par-delà bien et mal a toujours été mal interprété. Cela ne veut pas dire que le bien est négligeable, ou qu’il veut faire du mal un bien. Cela signifie qu’il existe une position philosophique évitant d’être sans cesse dans un type d’évaluation morale, moralisante, ou calculatrice... » (Philippe Sollers, 30 juin 2011[4])
  • « La moraline est la morale des gens sans morale, la petite vertu des gens sans vertu. On peut préférer chercher à comprendre comme Socrate qui sait que nul n’est méchant volontairement plutôt qu’à juger comme Savonarole dont les bûchers ravissaient les narines des chiens qui chassent en meute. » (Michel Onfray[5])

Notes et références


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