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Emma Goldman

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Emma Goldman (née en 1869 à Kovno, en Lituanie - décédée en 1940) était une anarchiste influente et militante sociale d'origine lituanienne. Exilée aux États-Unis, elle s'est rapidement radicalisée par l'observation des conditions de travail oppressantes et par la tragédie anarchiste de Haymarket. Elle est devenue une figure charismatique de l'anarchisme international, prônant des idées anti-étatistes et féministes. Elle a critiqué vivement le mariage, la monogamie et les normes sexuelles oppressives, et a soutenu la liberté sexuelle et les droits des homosexuels. Après avoir été déportée en Russie, elle a critiqué le régime bolchevique et s'est retirée pour écrire son autobiographie, "Living My Life".

Enfance et Adolescence

  • . Influence de l'antisémitisme et des mouvements révolutionnaires en Russie. Emma Goldman est née en Lituanie, alors sous domination russe. Elle grandit dans une famille juive petite-bourgeoise qui subit les rigueurs de l'antisémitisme institutionnel. Son père, Abraham Goldman, est un homme autoritaire, tandis que sa mère, Taube Bienowitch, tente de protéger ses enfants de la rigueur paternelle. Les Juifs de l'Empire russe vivaient sous des lois restrictives et étaient souvent victimes de pogroms. Ce climat hostile a imprégné la jeunesse de Goldman, la sensibilisant à la nécessité d'un changement politique plus juste. L'agitation politique en Russie, avec l'émergence des mouvements révolutionnaires contre le tsarisme, l'a également influencée. Elle fut témoin des premiers soulèvements et des discussions politiques qui agitaient la société russe de l'époque.
  • . Éducation. À l'adolescence, Emma Goldman est envoyée à Königsberg (aujourd'hui Kaliningrad) pour vivre chez sa tante et poursuivre son éducation. Elle y découvre la littérature et les idées révolutionnaires, qui nourrissent son esprit critique. Elle passe ensuite une période à Saint-Pétersbourg, où elle est exposée aux cercles intellectuels et aux idées radicales. La ville était un foyer de pensée révolutionnaire, et c'est là qu'elle a développé un intérêt marqué pour les écrits anarchistes et socialistes.

Émigration aux États-Unis

  • . Départ pour l'Amérique. En 1885, à l'âge de 16 ans, Emma Goldman émigra aux États-Unis avec sa demi-sœur Helena, rejoignant ainsi d'autres membres de leur famille à Rochester, New York. Le départ pour l'Amérique est motivé par la recherche de meilleures opportunités et la fuite de l'antisémitisme et des difficultés économiques en Russie. À Rochester, elle a travaillé dans une usine de vêtements, où elle fut confrontée aux dures conditions de travail de l'industrie textile. Cette expérience a joué un rôle crucial dans sa prise de conscience politique et sociale.
  • . Radicalisation politique. Les longues heures de travail, les bas salaires et les conditions dangereuses qu'elle a enduré dans les usines américaines ont provoqué une radicalisation politique chez Emma Goldman. Elle a vu de près ma difficulté des travailleurs à subvenir à leurs besoins. Elle condamne alors ce qu'elle appelle alors la brutalité du capitalisme industriel. En 1886, l'exécution de plusieurs anarchistes suite à l'attentat à la bombe lors de la manifestation de Haymarket à Chicago marque profondément Emma Goldman. Cet événement, qui voit des anarchistes accusés à tort et condamnés sans preuves solides, renforce son engagement envers la cause anarchiste. La répression violente des mouvements ouvriers par l'État devient un tournant dans sa vie politique. Inspirée par ces événements, Emma Goldman s'immerge dans la littérature anarchiste et socialiste. Elle commence à participer à des réunions politiques et à se connecter avec d'autres militants, jetant les bases de son futur rôle de leader dans le mouvement anarchiste international.

Émergence comme Activiste Anarchiste

Emma Goldman a émergé sur la scène politique au début du XXe siècle avec une détermination et un élan remarquables. Son parcours vers le militantisme anarchiste est marqué par des événements et des influences clés qui ont façonné ses convictions anarchistes.

  • . Début de l'activisme. L'attentat manqué par Alexander Berkman contre Henry Clay Frick en 1892 a profondément influencé Emma Goldman. Considérant étrangement cet acte comme une réponse légitime à l'oppression capitaliste, elle a soutenu Berkman et a vu en lui un symbole de résistance contre les puissants de ce monde. Cet événement a renforcé son engagement envers l'anarchisme et l'a propulsée sur le devant de la scène militante. Développant rapidement un profil public, Emma Goldman est devenue une conférencière charismatique et respectée. À travers des tournées de conférences annuelles à travers les États-Unis, elle a partagé ses idées anarchistes avec passion et éloquence, attirant l'attention des médias et du public. Son éloquence et sa capacité à articuler les idéaux anarchistes ont fait d'elle l'une des voix les plus influentes de l'anarchisme international.
  • . Philosophie Anarchiste. L'anarchisme de Goldman était imprégné des idées de plusieurs penseurs radicaux. Elle a assimilé les enseignements de Petr Kropotkin sur la coopération et la solidarité, le nihilisme individualiste de Nietzsche et Stirner, ainsi que les thèmes de liberté individuelle explorés par des dramaturges comme Ibsen. De plus, elle a été influencée par les "free lovers" américains, tels que Ezra et Angela Heywood, qui prônaient la liberté sexuelle et l'autonomie dans les relations de couple. Sa philosophie anarchiste, anti-étatiste, anti-parlementaire et décentralisée, rejetait l'autorité de l'État et prônait une société sans gouvernement, où les individus s'organisent de manière autonome et coopérative. Elle critiquait également le système parlementaire bourgeois, considérant qu'il perpétuait les inégalités et ne représentait pas véritablement les intérêts des travailleurs. Pour Emma Goldman, l'anarchisme était synonyme de décentralisation du pouvoir et de structures sociales horizontales et démocratiques.

Contributions et Œuvres Majeures

  • . Publications et Conférences. Emma Goldman a compilé ses idées et analyses dans deux collections de conférences majeures. Dans *Anarchism and Other Essays*, elle explore les principes fondamentaux de l'anarchisme ainsi que ses implications sociales, politiques et philosophiques. *The Social Significance of the Modern Drama* examine le rôle du théâtre dans la société moderne, mettant en lumière ses aspects révolutionnaires et subversifs dans la dramaturgie. En 1906, elle fonde et édite *Mother Earth* (1906-1918), un magazine mensuel radical qui devient un important organe de diffusion des idées anarchistes et féministes. Le magazine aborde une variété de sujets, y compris la politique, la littérature, l'art et la sexualité, et offre une plateforme pour les voix dissidentes et marginales de l'époque.
  • . Critique Sociale et Féministe. Emma Goldman s'est attaquée vigoureusement aux institutions sociales traditionnelles, dénonçant le mariage qu'elle considérait comme une institution oppressante qui aliène les individus et qui les soumet à des normes oppressives de monogamie et de moralité sexuelle. Elle a plaidé pour une forme de relations plus libres et égalitaires, remettant en question les normes de genre et l'abolition de la hiérarchie dans les relations interpersonnelles. Elle a été une défenseuse précoce du contrôle des naissances, plaidant pour l'accès des femmes à des moyens de contraception sûrs et efficaces. Elle a également milité pour les droits des homosexuels, défiant les normes sociales conservatrices de son époque en prônant la liberté sexuelle et l'acceptation de la diversité sexuelle.

Engagements avec d'Autres Mouvements Sociaux

  • . Soutien aux syndicats. Emma Goldman a apporté un soutien actif aux "Industrial Workers of the World" (IWW), un syndicat radical connu pour son militantisme ouvrier et sa lutte pour les droits des travailleurs. Elle a participé à plusieurs grèves et luttes pour la liberté d'expression aux côtés de l'IWW, défendant les droits des travailleurs et militant pour des conditions de travail justes et humaines.
  • . Déportation en Union Soviétique. En 1919, Emma Goldman et Alexander Berkman ont été déportés en Union soviétique par les autorités américaines par sanction en raison de leurs activités anarchistes. Cependant, leur enthousiasme initial pour la révolution bolchevique a rapidement cédé la place à la désillusion. Ils ont critiqué le régime soviétique bolchevique pour sa répression de la dissidence politique, sa centralisation du pouvoir et son autoritarisme croissant. Déçus par la direction que prenait le pays, Goldman et Berkman ont finalement choisi de quitter le pays en 1921 pour devenir des ardents critiques du régime bolchevique. Leur expérience a renforcé leur conviction envers les idéaux anarchistes et leur engagement en faveur de la liberté individuelle et de la démocratie directe.

Évolution de ses Convictions

Après ses expériences décevantes en Union soviétiques et ses critiques acerbes du régime bolchevique, Emma Goldman a commencé à réévaluer ses méthodes de militantisme. Sa confrontation avec la réalité du régime bolchevique ont profondément influencé son évolution idéologique. Désenchantée par l'autoritarisme et la répression que le régime soviétique imposait, Goldman a conclu que même une révolution socialiste pouvait conduire à de nouvelles formes d'oppression si elle n'était pas guidée par des principes libertaires et anti-autoritaires.

  • . Passage d'une foi révolutionnaire à une approche gradualiste. Initialement fervente défenseuse d'une révolution immédiate et totale, Goldman a progressivement adopté une perspective plus gradualiste après ses désillusions. Elle en est venue à croire que la transformation sociale profonde nécessitait un changement progressif, principalement par l'éducation et l'éveil des consciences. Cette réorientation ne signifiait pas un abandon de ses idéaux anarchistes, mais plutôt une reconnaissance de la complexité du changement social et de la nécessité d'une base solide de soutien populaire éclairé.
  • . Conscientisation et éducation individuelle. Goldman a mis un accent renouvelé sur la conscientisation individuelle comme clé de la transformation sociale. Elle soutenait que pour créer une société véritablement libre et égalitaire, il était essentiel que les individus soient éveillés aux injustices et aux mécanismes d'oppression. Selon elle, une société anarchiste ne pourrait se maintenir que si ses membres étaient conscients et engagés, capables de penser de manière critique et d'agir de manière autonome.
  • . Promotion par des conférences, publications et rencontres. Goldman a continué à promouvoir ses idées anarchistes à travers divers moyens :
. Conférences. Elle a parcouru les États-Unis et l'Europe, donnant des conférences passionnées et inspirantes. Ces discours visaient à éduquer le public sur les principes de l'anarchisme, la critique sociale et les droits des individus.
. Publications. Elle a écrit de nombreux essais et articles qui ont été publiés dans divers journaux et magazines, ainsi que dans ses propres ouvrages comme *Anarchism and Other Essays*. Ces écrits exploraient des thèmes allant de la critique du mariage et de la monogamie à la défense des droits des femmes et des minorités sexuelles.
. Rencontres. Goldman a participé à de nombreuses rencontres avec des groupes militants, des cercles intellectuels et des individus partageant les mêmes idées. Ces échanges ont permis de renforcer les réseaux de soutien et de diffuser les idées anarchistes de manière plus informelle mais tout aussi efficace.
  • . Transformation progressive de la société. Pour Goldman, la transformation progressive de la société par l'éducation et l'éveil individuel était une stratégie essentielle pour éviter les pièges du pouvoir centralisé et de l'autoritarisme. Elle croyait qu'une révolution authentique devait commencer dans l'esprit des individus, car seuls des citoyens informés et autonomes pouvaient bâtir et maintenir une société véritablement libre et égalitaire.

Engagement durant la Guerre Civile Espagnole

  • . Soutien aux Anarcho-Syndicalistes Espagnols. Lorsque la Guerre Civile Espagnole éclate en 1936, Emma Goldman voit dans ce conflit une opportunité de revitaliser les idéaux anarchistes. Elle se lance corps et âme dans le soutien aux anarcho-syndicalistes espagnols, notamment la CNT-FAI (Confédération nationale du travail - Fédération anarchiste ibérique), qui jouent un rôle central dans la résistance contre les forces fascistes de Franco. Goldman devient une figure publique importante pour la cause espagnole, utilisant sa notoriété et ses talents de conférencière pour rallier le soutien international. Elle agit en tant qu'agent et journaliste, organisant des conférences et des collectes de fonds, et écrivant des articles pour attirer l'attention sur la lutte des anarchistes espagnols.
  • . Blâme des Communistes pour la Défaite des Anarchistes. La défaite des anarchistes et des autres forces républicaines en Espagne fut un coup dur pour Goldman. Elle attribua en grande partie cette défaite aux communistes, qu'elle accusa de trahison et de répression des mouvements anarchistes. Selon elle, les communistes ont saboté l'effort révolutionnaire en Espagne par leur désir de centraliser le pouvoir et de contrôler la révolution selon les lignes directrices de Moscou. Elle critiqua vivement la stratégie des communistes, les accusant d'avoir compromis les idéaux révolutionnaires pour des gains politiques à court terme. Sa correspondance et ses écrits de l'époque témoignent de sa colère et de sa déception face à ce qu'elle considèrait comme une trahison des principes révolutionnaires par les communistes.

Fin de Vie et Héritage

  • . Dernières Années. Dans les dernières années de sa vie, Emma Goldman restait active et engagée malgré les nombreux défis. En 1939, elle se rend à Toronto pour organiser une collecte de fonds destinée à soutenir les réfugiés de la guerre civile espagnole et d'autres victimes du fascisme. Elle décède le 14 mai 1940 à Toronto, des suites d’un accident vasculaire cérébral. En reconnaissance de sa contribution et de son engagement envers le mouvement anarchiste, elle est enterrée près des martyrs de Haymarket à Chicago. Cet emplacement symbolique renforce son lien avec la lutte pour les droits des travailleurs et les idéaux anarchistes.
  • . Synthèse et Héritage. Tout au long de sa vie, Emme Goldman a su intégrer diverses influences pour créer une philosophie cohérente et radicale. Elle a développé une critique extensive de la domination et de l'oppression dans de nombreux aspects de la société. Elle dénonçait les écoles et les églises pour leur rôle dans l'endoctrinement et la perpétuation des structures de pouvoir. Elle critiquait le système carcéral pour son inhumanité et son inefficacité. Elle s'opposait également à la prostitution forcée et au patriarcat familial, qu'elle voyait comme des manifestations de la domination masculine et des injustices sociales. Ses analyses ont offert une perspective globale sur les multiples facettes de l'oppression.

Informations complémentaires

Publications

  • 1914, "The Social Significance of the Modern Drama", New York: Applause Theatre
  • 1931, "Living my Life", New York: Da Capo Press

Littérature secondaire

  • 1961, Richard Drinnon, "Rebel in Paradise: A Biography of Emma Goldman", New York: Bantam
  • 1975, Richard Drinnon, "Nowhere at Home: Letters from Exile of Emma Goldman and Alexander Berkman", New York: Bantam
  • 1983, David Porter, "Vision on Fire: Emma Goldman on the Spanish Revolution", New Paltz, N.Y.: Commonground Press
  • 1984, Alice Wexler, "Emma Goldman in America", Boston, Mass.: Beacon Press
  • 1989, Alice Wexler, "Emma Goldman in Exile", New York: Bantam