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Produit dérivé climatique
Un produit dérivé climatique est un instrument financier (produit dérivé) qui peut être utilisé pour se prémunir contre des risques liés aux phénomènes climatiques. L'actif sous-jacent peut ainsi être la température, la quantité de neige tombée ou les précipitations. A la différence des dérivés classiques, l'actif sous-jacent n'a donc aucune valeur.
La gestion des risques climatiques
Gérer des risques est, pour une entreprise, une forme quotidienne d'actions. Certaines sociétés exportatrices se protègent contre les risques de change, d'autres contre le risque de taux d'intérêt ou celui du prix des matières premières. Cependant, que peut faire un entrepreneur face aux catastrophes naturelles ? (tempête, inondations, tremblement de terre...) Le marché a déjà pris en charge ces éventualités extrêmes avec l'assurance-dommage. Le paiement du sinistre est conditionné par l'existence prouvée d'un préjudice.
De façon différente, la couverture du risque climatique repose sur le franchissement d'un niveau concernant un indice de référence choisi par le preneur de risque. De façon générale, un produit dérivé est un contrat financier dont les flux (pay off) dépendent d'un autre actif (cours de l'action, taux d'intérêt, cours des matières premières...), appelé actif sous-jacent du contrat. L'actif sous-jacent d'un produit dérivé climatique (weather derivative) est mesuré par les conditions météorologiques (températures, enneigement, pluie, vent...) dans une certaine zone géographique.
Cette technique devient de plus en plus précise et triviale, grâce à des entrepreneurs spécialistes de ce secteur en plein développement (gestion alternative ou hedge fund en anglais, assureurs). C'est une méthode de couverture plus efficace pour la rapidité de remboursement, l'anticipation des risques et l'adaptation aux fluctuations d'activités.
La variabilité des précipitations, de la nivosité, de la force du vent ou de la température est très importante pour de nombreuses entreprises. Aux États-Unis, 80 % des entreprises sont soumises au risque météorologique. Le marché a donc vu éclore depuis 1998, des produits dérivés climatiques. Il s'agit d'une évidence que l'aversion aux risques peut très bien être traitée par le marché, et pas nécessairement par l'État.
Les raisons de se couvrir
Selon Valérie Delarce (2006), il existe cinq raisons pour une entreprise de se couvrir contre les aléas climatiques :
- Se protéger contre une baisse du volume des ventes : été trop frais pour un fabriquant de glaces
- Couvrir une opération de promotion ou une stratégie de différenciation produit : le voyagiste qui rembourse son client en cas de jours de pluie durant son séjour
- Se protéger contre une hausse des coûts de production : viticulteur et précipitations excessives
- Se protéger contre une baisse d'activité : vents trop faibles pour les éoliennes, sécheresse des rivières pour les barrages hydrauliques
- Protéger un actif non couvert par les assurances dommages : un électricien couvre ses lignes aériennes contre la tempête
Exemples d'industries affectées dans leur chiffre d'affaires
- Le prêt à porter : automne doux (corrélation négative) et printemps chaud (corrélation positive forte)
- Les compagnies d'énergie : baisse de la consommation de chauffage l'hiver et baisse de la climatisation l'été
- Les sociétés de jardinerie ou les organisateurs de spectacle en plein air sont influencés par les jours de pluie
- Dans l'alimentation, les ventes de bière augmentent de 7 % dans le sud de la France pour tout petit degré au-dessus de 25°C. Le chocolat est de plus en plus consommé jusqu'à 9°C puis sa consommation décline avec l'augmentation de la chaleur. Les variations s'observent également pour des produits sensibles à la chaleur comme l'eau minérale, les glaces ou les chips.
- Les laveries automatiques de véhicules se couvrent contre une pluviométrie trop forte.
Les outils des assureurs de l'aléa climatique
Le risque est dépendant de la sensibilité et de la volatilité du facteur de risque. Pour une bonne couverture du risque climatique, il est primordial que l'activité de l'entreprise soit corrélée avec un indice prédéfini, c'est-à-dire qu'elle soit sensible à ce facteur de risque. D'où l'utilisation des statistiques fournies par les opérateurs de mesures météorologiques (Météo France, pour la France). En fonction des demandes, ces sociétés affinent localement leurs statistiques et diversifient leurs indices et leurs services (diagnostic climatique, prévisions météorologiques, production d'indices). L'important est de connaître le seuil de déclenchement de la couverture du risque. La volatilité des indices météorologiques est comparable à celle des actifs financiers :
- 10 % pour la température, proche de celle de l'euro-dollar ;
- 80 % pour les précipitations, similaires au niveau de la volatilité du pétrole en période de turbulence géopolitique.
Sensibilité et volatilité sont traitées statistiquement pour chaque entreprise. Sur une base historique, on obtient une analyse de régression statistique permettant de déterminer l'assiette du risque avec les indices climatiques.
- Variation de l'assiette = a * variation de l'indice climatique + b
Par exemple, on déduit une baisse de 5,4 % des ventes lorsque la température s'élève grâce au résultat suivant :
- ventes = - 0,054 * variation de la température (°C)
La bourse d'échange des dérivés climatiques
Comme tout marché de couverture, le marché des dérivés climatiques fonctionne sur l'anticipation des entrepreneurs face au risque climatique. S'il estime que son activité va subir des fluctuations d'activités, alors le chef d'entreprise achète une option durant une période définie. En fonction de l'actif sous-jacent choisi et de son niveau, il fait jouer ou non son option. Pour ceci, il est nécessaire que d'autres opérateurs prennent le pari inverse. Les dérivés climatiques sont des instruments financiers négociables à tout moment même si le climat n'est pas en lui-même un produit stockable ou transportable. Ce sont des contrats définis en termes de sous-jacent, d'échéance et de montant nominal. Aux États-Unis, les dérivés climatiques se négocient sur le Chicago Mercantile Exchange (CME) depuis 1998. En Europe, Euronext a lancé sa filiale Euronext Liffe. En France, Powernext exerce cette fonction. S'y échangent des contrats standards et des marchés de gré à gré.
Exemple :
Les marchés sont cotés 100 + température en fonction d'une zone géographique (Paris, Londres, Berlin). Par exemple, Un contrat « Paris juillet 122 » signifie donc que la température cotée est de 22°, à Paris pour le mois de juillet. Dans ce cas de figure, une entrepreneur doit réfléchir sur les risques encourus. S'il estime aujourd'hui (mai) que son chiffre d'affaires va connaître des pertes/gains en fonction de cet indice, alors il achètera des contrats de telle sorte que les gains/pertes réalisés sur le marché à terme en cas de hausse/baisse de la température compensent strictement les pertes/gains de chiffre d'affaires.
Si le degré température sur le marché est de 2700 euros et la sensibilité de 5,4 % par degré, la couverture d'un chiffre d'affaires de un million d'euros en juillet impliquera un achat de 20 contrats (1 000 000 x 5,4 %/2700).
Si la température moyenne observée ex post en juillet est finalement de 24°, l'entreprise revendra ses contrats en réalisant un gain de 108 000 euros (20 x 2° x 2700 euros).
Extension possible de la couverture des risques
Le marché des dérivés climatiques montre qu'il existe des domaines encore non explorés de la couverture des risques. Ce marché n'est pas d'ordre étatique mais repose sur les anticipations des acteurs économiques, en fonction de circonstances de temps et de lieu. Les conditions climatiques font parties des aléas que connaissent beaucoup d'entreprises.
Toutefois, on peut imaginer un développement d'autres couvertures de risques pour les particuliers. Notamment, le choix du parcours professionnel d'un individu est un risque important. Soit, on demande à l'État de couvrir ce risque avec les résultats que l'on connait dans la formation et le traitement du chômage, soit on laisse les opérateurs spécialisés se coordonner pour analyser les risques pour chacun des contractants en fonction de la période déterminée avec des actifs sous-jacents adéquats pour chacun.
Le marché des aléas climatiques a permis des partenariats commerciaux entre fournisseurs et détaillants. Par exemple, certains fabricants se couvrent contre les aléas climatiques en remboursant les détaillants, en fonction de certains indices, en échange de promesses de maintien de commandes d'un certain pourcentage. Ceci montre, que la couverture des risques peut mener à une meilleure intégration des acteurs sur le marché, à la condition qu'ils soient laissés libres de leur coopération. En fait, les domaines d'application de la couverture des risques sont loin d'être limités dans une économie ouverte et libre.
Bibliographie
- Valérie Delarce, Couverture tous temps, Enjeux les Echos, N°224, mai 2006, pp92-95
- Dominique Pialot, Les enjeux économiques liés au risque climatique
- Pauline Barrieu et Nicole El Karoui, Présentation générale des dérivés climatiques , 29 janvier 2004
- Site de Powernext weather, Powernext weather
Voir aussi
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