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Hans-Georg Gadamer

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Hans-Georg Gadamer était un philosophe allemand du XXe siècle, reconnu pour sa contribution significative à la tradition philosophique continentale. Né le 11 février 1900 à Marburg, en Allemagne, et décédé le 13 mars 2002 à Heidelberg, il a vécu une vie longue et influente marquée par son engagement dans la philosophie herméneutique. Gadamer était le fils de Johannes Gadamer, professeur de chimie pharmaceutique à l'Université de Marburg, ce qui lui a offert un environnement intellectuel dès son plus jeune âge.

Bien que Hans-Georg Gadamer ait initialement envisagé de suivre une carrière dans les sciences naturelles, il a rapidement développé un vif intérêt pour les sciences humaines et la philosophie. Sa formation académique, notamment à l'Université de Breslau, lui a permis de se plonger dans les études classiques et la philosophie, jetant ainsi les bases de son cheminement intellectuel ultérieur.

Les premières années du philosophe

Jeunesse et Éducation

Les influences familiales ont joué un rôle important dans la vie de Gadamer. Son père, Johannes Gadamer, était un professeur de chimie pharmaceutique à l'Université de Marburg et a également occupé le poste de recteur de cette université. Johannes Gadamer était un homme de sciences, ce qui a initialement poussé son fils vers une carrière dans les sciences naturelles. Cette influence paternelle a marqué le jeune Hans-Georg, mais il s'est finalement orienté vers un chemin différent, celui des sciences humaines.

La mère de Gadamer, Emma Karoline Johanna Geiese, a également eu un impact significatif sur sa vie. Malheureusement, elle est décédée de diabète alors qu'il n'avait que quatre ans. Cette perte précoce de sa mère pourrait avoir contribué à son choix ultérieur de ne pas poursuivre des études scientifiques, trouvant en elle une figure maternelle poétique et religieuse qui contrastait avec la rigueur scientifique de son père. Cette dualité parentale a probablement contribué à la formation de sa sensibilité philosophique.

Hans-Georg Gadamer a manifesté très tôt un intérêt pour les domaines intellectuels et académiques. Il a suivi une éducation initiale qui a jeté les bases de ses futurs développements intellectuels. Sa fascination pour la philosophie et les sciences humaines s'est progressivement renforcée, l'incitant à explorer ces domaines plus en profondeur.

Bien que son père ait encouragé Gadamer à suivre une carrière dans les sciences naturelles, il a finalement pris la décision de s'éloigner de cette voie. Son choix de se tourner vers les sciences humaines et la philosophie a été influencé par plusieurs facteurs, notamment la perte de sa mère et le désir de poursuivre une voie plus orientée vers la réflexion et la compréhension des aspects fondamentaux de l'existence humaine. Cette décision a finalement conduit Gadamer à entreprendre des études en philosophie et à se plonger dans le monde de la pensée philosophique, où il allait devenir une figure majeure de la philosophie du XXe siècle.

Formation Universitaire

Après avoir pris la décision de se détourner des sciences naturelles au profit des sciences humaines et de la philosophie, Hans-Georg Gadamer a entamé ses études universitaires à l'Université de Breslau. Là, il a eu l'occasion de plonger dans les domaines de la philosophie et des humanités, élargissant ainsi ses horizons intellectuels. Cette période d'études à Breslau a constitué un premier pas essentiel dans son parcours académique.

Après un certain temps passé à l'Université de Breslau, Gadamer est retourné à l'Université de Marburg, marquant un retour aux sources dans la ville de sa naissance. À Marburg, il a continué à approfondir ses études en philosophie, sous la direction de philosophes notables de l'époque, notamment Paul Natorp et Nicolai Hartmann. Ces influences académiques ont contribué à forger sa pensée philosophique et à le préparer à des recherches plus approfondies.

Hans-Georg Gadamer a entrepris des recherches approfondies dans le cadre de sa thèse de doctorat, qui a été supervisée par Paul Natorp, un philosophe néo-kantien éminent. Sa thèse, intitulée "The Essence of Pleasure in Plato's Dialogues" (Das Wesen der Lust nach den Platonischen Dialogen), a été achevée en 1922. Cette thèse a jeté les bases de ses futures explorations philosophiques, notamment en mettant en lumière l'importance de la compréhension et de l'interprétation dans l'analyse des textes philosophiques.

L'une des étapes cruciales de la formation de Gadamer a été sa rencontre avec Martin Heidegger, un philosophe prometteur à l'époque, alors qu'il était à Marburg. Heidegger exerça une profonde influence sur Gadamer et devint son mentor intellectuel. Cette rencontre a marqué un tournant dans la carrière de Gadamer, l'incitant à approfondir ses recherches philosophiques et à développer sa propre perspective herméneutique.

Suite à sa rencontre avec Heidegger, Gadamer a choisi de transférer ses études à l'Université de Freiburg, où Heidegger enseignait à l'époque. Cette décision a renforcé leur relation et a permis à Gadamer de travailler de plus près avec l'une des figures les plus influentes de la philosophie du XXe siècle. Cette période à l'Université de Freiburg a grandement contribué à façonner la pensée de Gadamer et à préparer le terrain pour ses futurs développements philosophiques, notamment dans le domaine de la philosophie herméneutique.

Philosophie de la compréhension

Hans-Georg Gadamer a consacré une grande partie de sa carrière à développer la philosophie herméneutique, une approche philosophique axée sur la compréhension. Bien que l'herméneutique soit un domaine déjà exploré par d'autres penseurs, Gadamer a apporté des contributions significatives en élaborant davantage cette perspective. Pour lui, l'herméneutique consiste à comprendre comment nous interagissons avec le monde et les textes, en reconnaissant que la compréhension est un processus dynamique et profondément enraciné dans notre expérience humaine.

Brève mention de son œuvre majeure, "Truth and Method" (Vérité et Méthode)

L'œuvre majeure de Hans-Georg Gadamer est "Truth and Method" (Wahrheit und Methode), publiée en 1960. Ce livre a eu un impact considérable sur le domaine de la philosophie herméneutique et a contribué à définir cette discipline. "Truth and Method" explore en profondeur la question de l'interprétation et de la compréhension dans le contexte de la philosophie, de la culture et des sciences humaines. Gadamer y développe sa théorie herméneutique, qui met l'accent sur la fusion des horizons entre le lecteur/interprète et le texte ou l'objet étudié. Selon lui, la compréhension authentique ne peut être atteinte que par le dialogue et la mise en perspective des préjugés de l'interprète avec ceux du texte, conduisant à une interprétation enrichie et plus profonde.

"Truth and Method" a été salué comme l'une des œuvres philosophiques les plus importantes du XXe siècle et a contribué à raviver l'intérêt pour la philosophie herméneutique en tant que discipline philosophique à part entière. L'influence de cette œuvre s'est étendue bien au-delà de la philosophie, touchant des domaines tels que la littérature, la théologie, la sociologie, les sciences économiques et la critique culturelle. Elle a également joué un rôle crucial dans la discussion contemporaine sur la nature de la vérité, de la compréhension et de l'interprétation, ce qui fait de Gadamer une figure majeure de la philosophie du XXe siècle.

L'un des aspects les plus marquants de la philosophie de Gadamer, exposé dans son ouvrage majeur "Truth and Method" (Vérité et Méthode), est la manière dont il envisage la relation entre la vérité et la méthode. Gadamer soutient que la vérité et la méthode ne sont pas nécessairement compatibles, voire qu'elles sont en contradiction. Il avance que la méthode scientifique, qui vise une objectivité totale, peut s'opposer à la découverte de vérités profondes, notamment dans le domaine des sciences humaines. Selon Gadamer, la compréhension authentique ne peut pas être réduite à une simple méthode, car elle nécessite un engagement actif et une interaction herméneutique avec le sujet étudié.

Critique des approches modernes et traditionnelles des sciences humaines

Hans-Georg Gadamer a également formulé une critique perspicace des approches modernes et traditionnelles des sciences humaines. D'une part, il s'est opposé aux méthodes modernes qui cherchent à appliquer le modèle des sciences naturelles aux sciences humaines, en considérant les textes et les œuvres d'art comme des objets à observer et à analyser de manière objective. Gadamer a remis en question cette approche en soulignant que la compréhension humaine ne peut pas être réduite à une simple observation externe.

D'autre part, il a également critiqué les approches traditionnelles, notamment celles de philosophes tels que Friedrich Schleiermacher et Wilhelm Dilthey. Ces penseurs croyaient que la signification était contenue dans le texte lui-même ou dans la situation qui a donné naissance à une œuvre. Gadamer a contesté cette vision en affirmant que la signification et la compréhension ne sont pas des objets à trouver par une méthode particulière, mais sont plutôt des phénomènes inévitables liés à notre existence humaine.

En résumé, la philosophie de la compréhension de Gadamer se distingue par son emphase sur l'herméneutique comme moyen essentiel de comprendre le monde et les textes. Il a critiqué les approches modernes et traditionnelles des sciences humaines, tout en explorant la relation complexe entre la vérité et la méthode. Cette perspective a eu un impact significatif sur la philosophie contemporaine de la compréhension et de l'interprétation.

Fusion des horizons et dialogue herméneutique

La notion centrale de la "fusion des horizons" est un élément essentiel de la philosophie herméneutique de Hans-Georg Gadamer. Elle exprime la manière dont la compréhension se produit dans le processus herméneutique. La fusion des horizons se produit lorsque l'interprète (celui qui cherche à comprendre) et l'objet d'interprétation (comme un texte, une œuvre d'art ou une expérience) se rencontrent et interagissent.

Gadamer soutient que chaque participant à l'acte d'interprétation apporte son propre horizon, c'est-à-dire sa propre perspective, sa culture, ses préjugés, et son histoire. Ces horizons individuels ne sont pas figés, mais ils sont en constante évolution. Lorsque l'interprète s'engage dans un dialogue herméneutique avec l'objet d'interprétation, une "fusion" ou un croisement des horizons a lieu. Les horizons individuels ne disparaissent pas, mais ils s'enrichissent mutuellement. La compréhension émerge de cette interaction dynamique entre les horizons de l'interprète et de l'objet.

La langue et l'histoire jouent un rôle crucial dans le processus herméneutique, selon Gadamer. La langue est le véhicule par lequel la compréhension est possible. Les mots et les symboles dans une langue portent une signification qui est profondément enracinée dans la culture et l'histoire d'une société donnée. Par conséquent, lorsque nous interprétons un texte ou une œuvre d'art, nous le faisons à travers le filtre de la langue dans laquelle il est exprimé, ainsi que de la tradition culturelle et historique à laquelle il appartient.

De plus, Gadamer insiste sur le fait que la compréhension est toujours située dans un contexte historique. Chaque acte d'interprétation est façonné par l'histoire et la culture dans lesquelles il se déroule. C'est pourquoi il considère la conscience historiquement effectuée comme fondamentale pour la compréhension. L'interprétation n'est pas une activité atemporelle, mais elle est ancrée dans le flux de l'histoire et de la culture.

La philosophie herméneutique de Gadamer peut être comprise comme un dialogue constant entre l'interprète et l'objet d'interprétation, entre les horizons individuels et culturels en jeu. Ce dialogue est un processus dynamique et interactif où la compréhension émerge de la rencontre entre différentes perspectives.

Gadamer insiste sur le caractère dialogique de la compréhension. Il encourage les interprètes à être ouverts à d'autres horizons et à être prêts à remettre en question leurs propres préjugés. Ce dialogue herméneutique ne vise pas à atteindre une compréhension définitive ou une vérité objective, mais plutôt à favoriser une compréhension plus approfondie et nuancée.

La Praxis Herméneutique de Hans-Georg Gadamer : Comprendre, Agir, et Méditer sur l'Histoire

Pour Hans-Georg Gadamer, l'art d'interpréter le sens d'un texte s'inscrit dans l'identité de l'être qui agit (praxis) dans les situations où l'exige la vie sociale [et économique]. L'individu cherche à atteindre ce qui est juste par l'intermédiaire d'une sagesse pratique (phronesis selon le terme d'Aristote) . Cette ontologisation de la phronesis remonte à une première étude faite en 1930 intitulée "Le savoir pratique". L'herméneutique gadamérienne concerne aussi bien la compréhension du sens d'un texte que la compréhension de ce que l'autre veut me dire dans une conversation. Chez Hans-Georg Gadamer (1975), il y a une relation intime entre l'herméneutique et la praxis. L'interprétation et la compréhension non seulement partagent l'espace herméneutique avec la pratique, mais elles en sont inséparables. Interpréter le monde, comprendre le monde, est inextricablement lié à l'obligation d'agir sur le monde de manière transformatrice sur l'espace et sur le temps.

Ainsi, l'histoire ne doit pas renier la réflexion, elle ne doit pas être une prison de nos cerveaux. Au contraire, entre les mains de Hans-Georg Gadamer, l'herméneutique exige une participation à l'histoire, qui serait plus une méditation sur celle-ci plutôt qu'une reconstruction de la compréhension des faits et gestes des acteurs du passé. L'herméneutique, de son point de vue, libère la lecture de l'histoire comme s'il s'agissait d'un horizon de possibilités. Donc, pratiquer l'histoire, c'est avoir un engagement critique avec le passé, en nous délaissant de nos préjugés mais en s'équipant d'un nouvel éclairage de notre expérience. Le véritable pouvoir de la conscience herméneutique, indique Hans-Georg Gadamer, c'est notre capacité à voir ce qui est discutable et de le remettre en question pour nous placer en dehors du déterminisme, et hors d'atteinte d'une objectivité illusoire, hors de l'historicisme et pouvoir se projeter dans le courant de l'histoire.

L'herméneutique comme ontologie de la compréhension

Concept de la conscience historiquement effectuée

Au cœur de la philosophie herméneutique de Hans-Georg Gadamer se trouve le concept de la "conscience historiquement effectuée" (wirkungsgeschichtliches Bewußtsein). Gadamer soutient que les individus sont profondément ancrés dans la culture et l'histoire qui les ont façonnés. Cette conscience historiquement effectuée signifie que notre compréhension du monde est inextricablement liée à notre contexte culturel, à notre éducation et à notre héritage intellectuel. En d'autres termes, nous ne pouvons pas nous extraire complètement de notre histoire pour parvenir à une compréhension objective, car cette histoire est ce qui définit notre identité et notre perspective.

Gadamer insiste sur le fait que nous sommes immergés dans la culture et l'histoire qui nous entourent, et que cette immersion influence profondément notre manière de percevoir et de comprendre le monde. Chaque individu naît dans un certain contexte culturel et linguistique, ce qui détermine en grande partie sa manière de penser, de parler et de comprendre. Cette immersion culturelle est un aspect fondamental de notre condition humaine, et elle est essentielle pour la philosophie herméneutique de Gadamer.

Dans cette perspective, la compréhension n'est pas une activité isolée et purement intellectuelle, mais plutôt une expérience enracinée dans notre culture et notre histoire. L'herméneutique de Gadamer reconnaît que chaque individu apporte un bagage culturel et historique unique à son interprétation du monde, ce qui rend chaque acte d'interprétation personnel et contextuel.

Préjugés et rôle des préjugés dans l'interprétation

Pour Gadamer, les "préjugés" jouent un rôle central dans le processus d'interprétation. Contrairement à la connotation négative habituellement associée au terme "préjugé", Gadamer les considère comme des éléments essentiels de la compréhension. Les préjugés sont les filtres à travers lesquels nous percevons le monde et les textes. Ils sont les produits de notre histoire et de notre culture, et ils contribuent à orienter notre compréhension.

Gadamer soutient que les préjugés ne sont pas des obstacles à la compréhension, mais plutôt les fondements mêmes de celle-ci. Ils sont les points de départ à partir desquels nous entamons le processus d'interprétation. Cependant, Gadamer met en garde contre une vision étroite des préjugés qui pourraient nous enfermer dans une perspective trop limitée. Il encourage plutôt un dialogue herméneutique dans lequel nos préjugés entrent en interaction avec d'autres perspectives, permettant ainsi une compréhension plus riche et nuancée.

Les connexions entre certaines économistes de l'école autrichienne et Hans-Georg Gadamer

Certains auteurs de l'école autrichienne, comme Ludwig Lachmann et Don Lavoie, ont cherché à intégrer des concepts herméneutiques dans leur approche économique. Ils ont été influencés par des philosophes herméneutiques tels que Hans-Georg Gadamer. Cette influence a conduit à une branche distincte de la tradition autrichienne qui s'est intéressée à la réinterprétation de l'économie à la lumière de l'herméneutique.

L'un des points centraux de l'herméneutique, comme le souligne Gadamer, est la reconnaissance que la compréhension dépend de la perspective et du contexte de l'observateur. Les auteurs de l'école autrichienne ont adopté cette idée en mettant l'accent sur la compréhension des actions économiques du point de vue des acteurs eux-mêmes. Cela les a amenés à considérer l'importance de la subjectivité et de la compréhension contextuelle dans l'analyse économique.

Les relations indirectes entre Murray Rothbard et Hans-Georg Gadamer

Cependant, tous les membres de l'école autrichienne n'ont pas accueilli favorablement l'incorporation de l'herméneutique dans leur approche. Murray Rothbard, l'un des principaux représentants de l'école, a exprimé des réserves importantes quant à cette démarche. Il a critiqué l'idée d'un "interpretive turn" (tournant interprétatif) dans l'économie et a préféré maintenir une approche orthodoxe basée sur la praxéologie. Il a averti que l'herméneutique pourrait conduire à la confusion et au relativisme épistémologique.

Les relations indirectes entre Murray Rothbard et Hans-Georg Gadamer se trouvent situées principalement dans le contexte de l'influence philosophique et intellectuelle que Gadamer a exercée sur l'herméneutique, une approche qui a été discutée et débattue par des intellectuels aux États-Unis, y compris par Murray Rothbard.

1. Hans-Georg Gadamer et l'herméneutique : Hans-Georg Gadamer est largement reconnu comme l'un des principaux penseurs de l'herméneutique au XXe siècle. Son ouvrage majeur, "Vérité et méthode" (1960), a joué un rôle central dans le développement de l'herméneutique philosophique en Europe. Bien que Gadamer ne soit pas directement impliqué dans les débats aux États-Unis, ses idées ont exercé une influence significative sur les intellectuels et les philosophes américains qui se sont intéressés à l'herméneutique.

2. Diffusion de l'herméneutique aux États-Unis : Les idées de l'herméneutique ont commencé à se répandre aux États-Unis dans les années 1960 et 1970, principalement par l'intermédiaire de la littérature comparée et de la philosophie continentale. Les universités américaines ont commencé à explorer les concepts herméneutiques, y compris ceux de Gadamer, en relation avec l'interprétation des textes et la compréhension de la signification.

3. Réaction de Rothbard et d'autres intellectuels : Murray Rothbard, en tant qu'intellectuel américain, a réagi à l'essor de l'herméneutique aux États-Unis, notamment dans le contexte de la philosophie et des sciences sociales. Murray Rothbard a perçu l'herméneutique comme une approche relativiste et a exprimé des inquiétudes quant à ses implications pour la pensée libérale classique et l'économie. Alors que la praxéologie de Ludwig von Mises est basée sur des axiomes déductifs, l'herméneutique met l'accent sur la construction collective du sens de l'action à travers l'interprétation. Rothbard s'oppose à cette vision alternative de l'action, qu'il considère comme conduisant au collectivisme. Rothbard considère que l'herméneutique implique une conversation sempiternelle et une interprétation infinie, ce qui, selon lui, est problématique. Il préfère la déduction apriorique comme une mesure salvatrice pour éviter l'indétermination de la conversation herméneutique.

Les relations indirectes entre Ludwig Lachmann et Hans-Georg Gadamer

Les relations indirectes entre Ludwig Lachmann et Hans-Georg Gadamer résident principalement dans l'approche interprétative de la compréhension humaine et de l'application de ces concepts herméneutiques à la pensée économique. Bien que Lachmann et Gadamer n'aient pas eu de contact direct ou de collaboration, leurs travaux ont des points de convergence qui ont influencé la manière dont certains économistes autrichiens, comme Lachmann, ont envisagé l'économie.

1. Herméneutique et compréhension : Hans-Georg Gadamer était un philosophe majeur de l'herméneutique, une approche philosophique qui se concentre sur l'interprétation des textes et la compréhension des significations. L'herméneutique met l'accent sur le rôle de l'interprète (le lecteur, le spectateur, etc.) dans la compréhension d'une œuvre ou d'un phénomène. Cette approche favorise une compréhension contextuelle et interprétative plutôt qu'une analyse stricte basée sur des règles préétablies.

2. Lachmann et la pensée économique herméneutique : Ludwig Lachmann, en tant qu'économiste de l'école autrichienne, était connu pour son intérêt pour l'herméneutique et son application à l'économie. Il a adopté une approche qui mettait l'accent sur la compréhension des processus économiques en tenant compte du contexte et de la signification des actions humaines. Cette approche s'opposait à l'économie mathématique et statique qui prédominait à l'époque.

3. Convergence dans l'importance de la compréhension : Bien que Lachmann ne se soit pas directement référé à Gadamer dans son travail, il partageait avec lui un intérêt commun pour la compréhension et l'interprétation. Lachmann cherchait à comprendre les processus économiques en examinant le contexte et les motivations des acteurs économiques, ce qui correspondait aux principes herméneutiques de Gadamer.

4. Application à la pensée économique : Lachmann a tenté d'appliquer ces idées herméneutiques à la pensée économique en explorant des concepts tels que l'incertitude, l'entrepreneuriat et le changement économique. Il croyait que l'économie ne pouvait pas être complètement comprise à travers des modèles mathématiques ou des équations, mais nécessitait une approche interprétative qui tenait compte de la complexité de l'action humaine.

En résumé, bien que Ludwig Lachmann et Hans-Georg Gadamer n'aient pas eu de relations directes, leurs travaux partageaient des points de convergence dans leur intérêt pour la compréhension, l'interprétation et l'importance du contexte dans leurs domaines respectifs de la pensée économique et de la philosophie herméneutique. Ces convergences ont influencé la manière dont certains économistes autrichiens, comme Lachmann, ont abordé la compréhension des phénomènes économiques.

Les relations indirectes entre Don Lavoie et Hans-Georg Gadamer

Don Lavoie, économiste de l'école autrichienne, a été influencé de manière indirecte par les idées de Hans-Georg Gadamer en ce qui concerne l'herméneutique. Bien que Gadamer ne soit pas un économiste, ses travaux en philosophie herméneutique ont eu un impact sur la façon dont Lavoie a abordé certains aspects de l'économie, en particulier en ce qui concerne la compréhension et l'interprétation des actions humaines en économie.

Don Lavoie était un défenseur de l'introduction de l'herméneutique dans l'analyse économique, et il a travaillé sur des projets de recherche visant à explorer comment les principes de l'herméneutique pouvaient être appliqués à l'économie. Il croyait que l'herméneutique pouvait offrir de nouvelles perspectives pour comprendre les motivations subjectives des acteurs économiques et pour interpréter les actions économiques dans leur contexte.

Dans l'avant-propos du livre "Economics and Hermeneutics", Don Lavoie cite Hans-Georg Gadamer qui déclare : "Il suffit de dire qu'on comprend de manière différente pour peu qu'on comprenne quelque chose" pour que la discussion sur ces positions soit rouverte. Cette citation de Gadamer met en lumière le point central de l'herméneutique, qui est la reconnaissance que notre compréhension est toujours influencée par notre propre perspective, notre horizon d'attente, et le contexte dans lequel nous nous trouvons. Don Lavoie utilise cette citation pour souligner que la compréhension est une activité complexe qui varie d'une personne à l'autre en fonction de son expérience, de ses croyances, et du contexte culturel.

Don Lavoie souhaite ainsi réouvrir la discussion sur la manière dont l'herméneutique peut être appliquée à l'économie, en mettant en avant la notion que la compréhension des actions économiques peut être différente selon les perspectives et les méthodes d'analyse utilisées. Il suggère que les économistes autrichiens et d'autres chercheurs en économie devraient s'ouvrir à l'herméneutique comme une approche complémentaire qui peut enrichir leur compréhension de l'action économique.

Cependant, cette perspective d'ouverture à l'herméneutique est critiquée par Murray Rothbard, qui craint que cela n'entraîne une confusion et une dérive vers le relativisme. Rothbard s'oppose à l'idée de faire prendre à l'École autrichienne un "interpretive turn" (tournant interprétatif) et préfère maintenir une approche orthodoxe basée sur la praxéologie.

La Convergence de la Compréhension Contextuelle : L'Approche Herméneutique de Gadamer et l'École Autrichienne en Économie

L'approche herméneutique de Hans-Georg Gadamer, telle qu'elle est exposée dans son ouvrage "Vérité et méthode," met en avant la compréhension contextuelle et la subjectivité dans le processus d'interprétation. Pour Gadamer, la compréhension d'un texte, d'une œuvre d'art ou même d'une action humaine doit se faire en tenant compte du contexte dans lequel ils s'inscrivent, ainsi que des préjugés et des perspectives du lecteur ou de l'observateur. Il rejette l'idée d'une compréhension objective et universelle au profit d'une approche plus nuancée qui reconnaît la diversité des expériences individuelles et des horizons culturels.

1. Reconnaissance de la subjectivité : Gadamer souligne l'importance de la subjectivité dans la compréhension, reconnaissant que chaque individu a sa propre perspective et interprétation. De même, les économistes autrichiens mettent en avant la subjectivité des acteurs économiques, affirmant que les préférences individuelles et les choix sont au cœur de l'analyse économique.

Les économistes de l'école autrichienne partagent une vision similaire en ce qui concerne la compréhension des actions individuelles en économie. Ils mettent l'accent sur le rôle crucial de la subjectivité dans les décisions et les actions des individus. Selon leur perspective, l'économie ne peut pas être réduite à des modèles mathématiques ou à des agrégats statistiques, car ces approches ne capturent pas la complexité des motivations, des préférences et des informations individuelles qui influencent les choix économiques.

Les économistes autrichiens, comme Friedrich Hayek, insistent sur le fait que la connaissance est dispersée et que chaque individu a une perspective unique sur le monde. Par conséquent, la compréhension des actions économiques doit tenir compte de cette subjectivité et de la manière dont les individus interprètent leur environnement et prennent des décisions en fonction de leurs propres objectifs.

2. Compréhension contextuelle : Gadamer insiste sur la nécessité de comprendre un texte ou une situation dans leur contexte global. De manière similaire, les économistes autrichiens mettent l'accent sur la compréhension des actions individuelles dans leur contexte économique et social, plutôt que de se fier à des modèles abstraits déconnectés de la réalité.

3. Interprétation des actions : L'herméneutique de Gadamer implique une analyse interprétative pour comprendre le sens derrière les actions. De même, les économistes autrichiens s'efforcent de comprendre les motifs et les intentions qui sous-tendent les choix des individus dans leurs interactions économiques.

4. Rejet de l'agrégation abstraite : Gadamer met en garde contre la simplification excessive et l'agrégation abstraite qui peuvent conduire à une compréhension superficielle. Les économistes autrichiens partagent cette préoccupation et rejettent souvent les modèles agrégés au profit d'une analyse approfondie des actions individuelles.

L'approche herméneutique de Gadamer, mettant l'accent sur la compréhension contextuelle et la subjectivité, peut être liée aux idées de l'École autrichienne en économie, qui insiste également sur l'importance de comprendre les actions individuelles plutôt que de se concentrer sur des agrégats abstraits.

5. Défense de la liberté individuelle : Gadamer, bien qu'il se concentre sur l'herméneutique, valorise également implicitement la liberté individuelle de pensée et d'interprétation. Les économistes autrichiens partagent cette préoccupation pour la liberté individuelle, en particulier dans le contexte économique, où les choix individuels sont cruciaux.

En résumé, bien que Gadamer soit principalement associé à la philosophie herméneutique et les économistes autrichiens à l'économie, il existe des points de convergence dans leur approche de la compréhension de l'action individuelle. Tous accordent une grande importance à la subjectivité, à la compréhension contextuelle, à l'interprétation des actions individuelles et à la défense de la liberté individuelle, autant d'éléments qui contribuent à une compréhension plus profonde et nuancée des phénomènes sociaux et économiques.

Ainsi, bien que Gadamer et les économistes autrichiens n'aient pas directement collaboré ou discuté de ces idées, il existe des parallèles conceptuels entre leurs approches respectives. Ces similitudes soulignent l'importance de prendre en compte la complexité de la pensée humaine et de l'action individuelle dans l'étude de divers domaines, qu'il s'agisse de la philosophie ou de l'économie.

Informations complémentaires

Publications

  • 1975, "Truth and Method", Journal of Aesthetics and Art Criticism, 36 (4), pp487-490
  • 1981, "Reason in the Age of Science", Cambridge, Mass.: MIT Press (traduction en anglais par Frederick G. Lawrence)
  • 1984, "Truth and Method", New York: Crossroad
    • Traduction en français en 1990, "Vérité et méthode", Paris: Seuil
  • 1986, "The Relevance of the Beautiful and Other Essays", Cambridge University Press
  • 2000, "Towards a phenomenology of ritual and language", In: Lawrence Kennedy Schmidt, dir., "Language and Linguisticality in Gadamer's Hermeneutics", Lexington Books

Littérature secondaire

  • 1969, Richard Palmer, "Hermeneutics: Interpretation Theory in Schleiermacher, Dilthey, Heidegger, and Gadamer", Evanston, IL: Northwestern University Press
  • 1976, David E. Linge, "Editor's Introduction", In: "Hans-Georg Gadamer. Philosophical Hermeneutics", Berkeley: University of California Press
  • 1977, F. M. Kirkland, "Gadamer and Ricoeur: The Paradigm of the Text", Graduate Faculty of Philosophy Journal, Vol 6, pp131-144
  • 1978, James Hans, "Hans-Georg Gadamer and Hermeneutic Phenomenology", Philosophy Today, Vol 22, pp3–19
  • 1986,
    • Jonathan Barnes, "Hermeneutical Integrity - a Review of Gadamer's Philosophical Apprenticeships and The Idea of the Good in Platonic-Aristotelian Philosophy", London Review of Books, November 6
      • Repris en 1987, Hermeneutical integrity, commentaire du livre de Hans georg Gadamer, "Philosophical apprenticeships and the idea of the good in Platonic-Aristotelian philosophy", Ausrian Economic Newsletter, vol 8, n°2, summer, pp5-7 et p12
  • 1987,
    • Tom G. Palmer, "Gadamer’s Hermeneutics", Critical Review, Vol 1, n°3, pp91-108
    • Georgia Warnke, "Gadamer: Hermeneutics, Tradition and Reason", Cambridge: Polity Press
  • 1991,
    • G. E. Aylesworth, "Dialogue, Text, Narrative: Confronting Gadamer and Ricoeur", In: H. J. Silverman, dir., "Gadamer and hermeneutics. Science, Culture. Literature. Plato. Heidegger, Barthes, Ricoeur. Habermas. Derrida", New-York, London, Routledge, pp63-81
    • L. Lawlor, "The Dialectical Unity of Hermeneutics: On Ricoeur and Gadarner", In: H. J. Silverman, dir., "Gadamer and hermeneutics. Science, Culture. Literature. Plato. Heidegger, Barthes, Ricoeur. Habermas. Derrida", New-York, London, Routledge, pp82-93
    • Gary B. Madison, "Getting Beyond Objectivism: The Philosophical Hermeneutics of Gadamer and Ricoeur", In: Don Lavoie, dir., "Economics and Hermeneutics", London, New-York, Routledge, pp34-58
    • Gary Madison, "Beyond Seriousness and Frivolity: A Gadamerian Response to Deconstruction", In: H. J. Silverman, dir.,"Gadamer and Hermeneutics", New York, NY: Routledge
    • Tom G. Palmer, "The hermeneutical view of freedom: implications of Gadamerian understanding for economic policy", In: Don Lavoie, dir., "Economics and Hermeneutics", London: Routledge, pp299-316
  • 1994, Gary B. Madison, "Hermeneutics: Gadamer and Ricoeur", Routledge History of Philosophy, vol VIII, London and New York, Routledge, pp290-349
  • 1995, Teresa Orozco, "Platonische Gewalt: Gadamers politische Hermeneutik der NS-Zeit", (« Violence platonicienne : l'herméneutique politique de Gadamer à l'époque nazie »), Hamburg; Berlin: Argument Verlag.
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  • 2002, Robert Dostal, "The Cambridge Companion to Gadamer", Cambridge University Press
  • 2003, Jean Grondin, "Hans-Georg Gadamer: A Biography", New Haven, CT: Yale University Press (traduction en anglais par Joel Weinsheimer)
  • 2006, Francisco J. Gonzales, "Dialectic and Dialogue in the Hermeneutics of Paul Ricoeur and H-G. Gadamer", Continental Philosophy Review, Vol 39, n°1, pp313–345
  • 2007, Cesare Di Donatella, "Gadamer: A Philosophical Portrait", traduit en anglais par Niall Keane, Bloomington, IN: Indiana University Press
  • 2012, Pierluigi Barotta, "Dario Antiseri visto da Friedrich von Hayek (e da Gadamer)" ("Dario Antiseri vu par Friedrich von Hayek (et Gadamer)"), In: Raffaele De Mucci, Kurt R. Leube, "Un austriaco in Italia = An Austrian in Italy : festschrift in honour of professor Dario Antiseri", Soveria Mannelli: Rubbettino, pp13-26
  • 2018, Nathanael Blake, "Between Rationalism and Relativism: Gadamer and MacIntyre on Truth and Finitude", In: Gene Callahan, Lee Trepanier, dir., "Tradition v. Rationalism: Voegelin, Oakeshott, Hayek, and Others", Lexington Books
  • 2020, Ryan R. Holston, "Anti-rationalism, Relativism, and the Metaphysical Tradition: Situating Gadamer’s Philosophical Hermeneutics", In: Gene Callahan, Kenneth McIntyre, dir., "Critics of Enlightenment Rationalism", London: Palgrave Macmillan, pp193-210