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FAQ Nature humaine
"Une société anarcho-capitaliste ne fonctionnerait qu'avec des hommes naturellement bons et pacifiques."
Certains reprochent aux anarcho-capitalistes leur irénisme, leur foi un peu aveugle en l'homme qui leur ferait imaginer une société fondée uniquement sur la concurrence, le contrat et le droit naturel. Le reproche est en réalité le plus souvent adressé à tous les anarchistes. Par exemple Ludwig von Mises écrit :
- Une école de philosophes sociaux qui est superficielle, celle des anarchistes, a choisi d'ignorer la question [du problème de la protection contre la violence] en suggérant une organisation de l'humanité dépourvue d’État. Ils ont simplement laissé de côté le fait que les hommes ne sont pas des anges. (The Ultimate Foundation of Economic Science)
D'abord, les anarcho-capitalistes répliquent qu'au contraire, leur vision d'une société de liberté ne leur fait pas fermer les yeux sur la nature humaine : police privée et tribunaux (privés) existeraient aussi en anarcapie, le droit au port d'armes y serait libre, et la justice y serait certainement beaucoup plus sévère que dans les sociétés actuelles où les fonctionnaires sont quasiment irresponsables. Ce n'est pas le pouvoir qui est contesté, c'est sa monopolisation par l’État sous sa forme actuelle (monopole de la violence). Les anarcho-capitalistes préconisent sa privatisation, par exemple sous la forme de la panarchie.
Ensuite, à l'argument de la méchanceté foncière de l'homme, il est aisé de répondre à la manière de Benjamin Constant :
« Il existe une notion bizarre selon laquelle l'on prétend que, parce que les hommes sont corrompus, il est nécessaire d'accorder à certains d'entre eux d'autant plus de pouvoir. Au contraire, il faut leur donner moins de pouvoir. »
« Si la méchanceté des hommes est un argument contre la liberté, elle en est un plus fort encore contre la puissance. Car le despotisme n'est autre chose que la liberté d'un seul ou de quelques uns contre tous. »
De même, Ludwig von Mises :
« Si l'on rejette le laissez-faire en raison de la faillibilité et de la faiblesse morale de l'être humain, alors on doit également rejeter, pour la même raison, toute espèce d'action gouvernementale. »
Et Léon Tolstoï :
« Est-il prouvé que ces gouvernants soient dignes par leurs qualités singulières de diriger l'humanité ? Le fait même qu'ils s'autorisent à user de violence envers leurs semblables démontre au contraire que leur raison est inférieure à celle des hommes qui leur sont soumis. Et il arrive en effet qu'au pouvoir parviennent toujours les hommes les moins consciencieux et les plus dépourvus de moralité. »
Et Jeffrey Tucker :
« On dit que les anarchistes ne tiennent pas compte des exigences de la nature humaine, mais c’est l'inverse. Si les gens sont faillibles, la vie chaotique, et le mal toujours tapi, la pire des solutions possibles est d'attribuer un monopole du pouvoir et de la violence à un groupe d'élite, de lui donner le pouvoir de faire des lois, d’obliger tout le monde à respecter leur législation, de rendre cette élite quasi impossible à déloger et de rendre ce système impossible à changer. Encore pire est de permettre à n'importe qui de pouvoir faire partie de ce mécanisme élitiste de l'Etat et de profiter de l'occasion pour imposer sa volonté à autrui. Cette approche instaure et institutionnalise les erreurs, les désordres et la malveillance, accentuant ainsi les tendances mêmes que la société s’efforce toujours d’éliminer, pour en faire les caractéristiques dominantes du système social lui-même. Les systèmes non-anarchistes de gestion sociale et politique extraient le pire de la nature humaine pour lui conférer le statut juridique le plus élevé possible. »
Si on pense que les hommes se conduiront mal s'ils sont libres, pourquoi penser qu'un gouvernement composé d'hommes se conduise mieux ?
La vie dans une société donnée résulte du comportement de chaque individu qui la compose. Si 51 % de la population est composée de voleurs et d'assassins, que ce soit une société étatisée ou anarcho-capitaliste ne changera rien au fait qu'une telle société produira de la misère et s'acheminera vers sa disparition. Dans une société "normale", plus les individus sont libres, et plus la société est prospère et vivable. Il n'y a pas besoin que 100 % des personnes soient "bonnes et pacifiques".
De plus, chacun est obligé d'adopter, dans les rapports qu'il entretient couramment avec ses semblables (commerce, contrats...), l'hypothèse que par défaut notre partenaire n'a pas de mauvaise intention. Cela n'implique pas pour autant que l'on estime la "nature humaine" entièrement bonne (Rousseau) ou entièrement mauvaise (Saint Jean), hypothèse métaphysique que le libéralisme s'abstient de formuler.
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Citations
- C'est un malentendu commun de penser que les anarchistes estiment que « la nature humaine est bonne » et qu'on peut donc faire confiance aux gens pour administrer la société. Au lieu de cela, nous sommes généralement plutôt pessimistes. Nous ne devons pas trop faire confiance aux gens, c'est pourquoi nous devons éviter la concentration du pouvoir. Et les gens au pouvoir sont, en particulier, frappés de stupidité faute d'être en contact direct avec la réalité concrète ; ils ne font que interférer avec les initiatives des autres, ce qui rend également ces derniers stupides et anxieux. Imaginez ce que cela signifie pour le caractère d'une personne d'être déifié comme Mao Tse Tong ou Kim Il-sung. Ou être habitué à penser à l'impensable, comme les hommes du Pentagone. (Paul Goodman, 1972)
- Le libertarisme est-il utopique ? Le libertarisme est souvent critiqué pour avoir une vision naïvement optimiste de la nature humaine. En fait, c'est le libéral moderne qui a une conception utopique de la perfectibilité humaine, tandis que le conservateur moderne penche vers une conception quasi calviniste de notre nature pécheresse inhérente et radicale. Le libertarien n'est engagé dans aucun de ces extrêmes. Certaines personnes sont bonnes ; certains ne le sont pas. Certaines bonnes personnes se comportent parfois mal ; certaines mauvaises personnes se comportent parfois bien. Bien que les libertariens ne fassent preuve ni d'optimisme ni de pessimisme à l'égard de la nature humaine, ils sont attachés à la proposition que la coercition en matière de pratique sociale, d'habitudes sexuelles, de croyance religieuse et d'allégeance politique, viole la nature humaine. (...) Le libertarisme est compatible avec toute théorie de la nature humaine qui ne nie ni explicitement ni implicitement l'importance de la liberté humaine. (Gerard Casey, Against the Criminal State: A Defence of Libertarian Anarchy)
Bibliographie
- 1974, C. L. Stevenson, "Seven Theories of Human Nature", Oxford, Oxford University Press
- 1991, Paul Helm, "Human nature", In: Nigel Ashford, Steve Davies, dir., "A Dictionary of Conservative and Libertarian Thought", New York: Routledge, pp126-131
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