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David Kelley
| David Kelley | |||||
| Philosophe | |||||
|---|---|---|---|---|---|
| Dates | 1949 - | ||||
| Tendance | Objectiviste | ||||
| Nationalité | |||||
| Articles internes | Autres articles sur David Kelley | ||||
| Citation | |||||
| Interwikis sur David Kelley | |||||
David Kelley, né le 23 juin 1949 à Cleveland, dans l'Ohio (USA), est un philosophe et écrivain américain. Il est surtout connu pour ses plaidoyers sur l'objectivisme. Il est le fondateur de l'Atlas Society (anciennement The Objectivist Center, et de l'Institut d'études objectivistes).
Biographie de David Kelley
David Kelley a obtenu ses diplômes (Master en philosophie) à la Brown University et son doctorat à l'Université Princeton. Il a enseigné la philosophie et les sciences cognitives pendant 7 ans au Vassar College avant de poursuivre par la logique durant un certain temps à la Brandeis University, tout en travaillant comme rédacteur pigiste au Barron's Magazine et pour d'autres publications. En 1989, il fonda l'Institut pour les études Objectivistes (IOS) pour fournir une alternative à l'Institut Objectiviste Ayn Rand géré par Leonard Peikoff.
David Kelley a parrainé des travaux d'érudition sur l'objectivisme et il a participé à des ateliers pour les universitaires et les étudiants de troisième cycle. En 1997, l'IOS a pris le nom de Centre Objectiviste pour faire connaitre l'objectivisme à un plus large public. Afin de poursuivre ses intérêts universitaires, David Kelley a démissionné de son poste de directeur exécutif du Centre Objectiviste en 2004. L'organisation fut administrée, pendant un temps, par l'ancien analyste des politiques de règlementation, Edward Hudgins et maintenant par Jennifer Grossman. Le Centre fut renommé The Atlas Society (TAS) et il a déménagé son siège de Poughkeepsie, dans l'État de New York, à Washington, DC. L'organisation continue de parrainer des travaux de recherche avec des conférences et des séminaires. Il dispose d'un site Web et d'un magazine culturel, The New individualist.
Activité intellectuelle
Les livres de David Kelley couvrent une variété de sujets relevant de la philosophie.
- The Evidence of the Senses (La preuve des sens), qui présente une forme épistémologique du réalisme direct de la perception
- Unrugged Individualism qui présente la bienveillance comme une vertu du point de vue éthique objectiviste
- The Art of Reasoning [L'art du raisonnement] qui est une présentation de la logique objectiviste
- A Life of One's Own [Une vie qui nous appartient] qui est une critique morale de l'État-providence
- The Legacy of Ayn Rand [Le legs de Ayn Rand] qui se concentre sur les schismes au sein du mouvement Objectiviste
Avec Roger Donway, il a co-écrit Laissez Parler: La liberté dans les médias électroniques, une critique sur la règlementation de la radiodiffusion.
Dans un article en 1994, il relie l'éthique objectiviste, la liberté et l'esprit enterpreneurial. Chaque personne est propriétaire d'elle-même. Aussi, la transition du socialisme vers le capitalisme ou la préservation du capitalisme lui-même exigent ce qu'il appelle l'esprit d'entreprise avec des perspectives continuelles sur la vie. L'esprit d'entreprise est pour l'être humain "un sentiment de propriété, une conviction que la vie lui appartient en exclusivité, pas quelque chose dont il doit répondre face à certaines puissances supérieures »[1].
Actuellement, David Kelley participe aussi activement comme consultant script et producteur pour la version cinématographique du roman d'Ayn Rand, Atlas Shrugged, qui devrait sortir des studios Baldwin Entertainment et Lions Gate en 2008, où la somptueuse Angelina Jolie est pressentie dans le rôle de l'héroïne Dagny Taggart.
L'objectivisme "ouvert"
La position prosélytique de David Kelley est différente de celle de Leonard Peikoff. Pour ce dernier, président de l'Ayn Rand Institute (ARI), l'objectivisme doit être un "système fermé", c'est-à-dire qu'il ne doit contenir que les principes philosophiques préconisés par Ayn Rand au cours de sa vie. En 1989, David Kelley a énoncé sa critique du mouvement objectiviste ARI dans une brochure intitulée "La vérité et la tolérance" (plus tard republiée dans une édition augmentée du livre sur le legs de Ayn Rand). David Kelley déclare l'objectivisme comme un "système ouvert" qui mérite des révisions. Il estime que l'erreur cognitive peut résulter de nombreux facteurs et qu'il n'a pas besoin d'impliquer une culpabilité morale. Cette critique a divisé le mouvement en deux factions.
La vie entrepreneuriale par l'appropriation de soi
Dans son essai « Life : Your Adventure in Entrepreneurship »[2] (La vie : votre aventure en entrepreneuriat), David Kelley a décrit ce qu'il appelle une attitude entrepreneuriale durant sa vie. Cette attitude repose sur plusieurs valeurs dont un sentiment d'appropriation de soi.
Le sentiment d'appropriation de soi est la conviction que notre vie nous appartient exclusivement. Elle n'a aucune justification ou d'autorisation à obtenir de la part d'une puissance supérieure. Elle repose sur la volonté de définir les termes de sa vie, de pouvoir former des convictions sincères et autonomes, de choisir ses propres objectifs, d'aligner son équilibre de vie sur des valeurs transcendantes et de demeurer libre de prendre des décisions qui nous concernent. La vie entrepreneuriale, nous dit David Kelley, nous permet d'avoir son propre jugement, sans dépendre des autres, en toute indépendance. Elle repose sur des valeurs comme l'esprit d'autonomie, d'initiative et de vigilance face aux opportunités. L'appropriation de soi, c'est la conviction que la vie devient ce que vous choisissez d'en faire. L'individu est le propriétaire métaphysique de sa propre personne. Il en devient le décideur ultime, donc l'entrepreneur est le décideur ultime sur le plan économique. C'est tout simplement incontournable. C'est sa décision dans chaque choix, et il doit en supporter les premières conséquences.
La vigilance à l'égard des opportunités est une vertu incontestable. Elle appartient à l'essence même de l'entrepreneur, et c'est aussi un élément essentiel du bien vivre. Le bonheur ne vient pas facilement aux humains ; et les opportunités de bonheur sont hélas beaucoup plus faciles à voir rétrospectivement que dans l'instant présent.
Critiques de la nécessité d'un Etat minimal
Dans son essai The Necessity of Government[3] (1974), David Kelley défend l’idée qu’un État minimal est indispensable, en particulier pour monopoliser l’usage légitime de la coercition et garantir le cadre du marché. Cette position repose sur une critique de l’anarchisme, qu’il accuse de circularité logique, de naïveté historique et d’impuissance pratique. Mais envisagée sous l’angle de l’anarchisme praxéologique adossée à la théorie des faisceaux de droits, cette démonstration apparaît fragile : elle confond l’analyse des incitations avec une justification morale du monopole, présuppose ce qu’elle veut prouver quant aux conditions du marché, et néglige les mécanismes contractuels et institutionnels capables d’encadrer l’usage de la force sans État centralisé.
A1. « La coercition est d’une nature telle qu’elle doit sortir du marché »
Thèse de Kelley. Selon David Kelley, la force défensive est un bien particulier : mal employée, elle entraîne une violation des droits. Pour cette raison, elle ne devrait pas dépendre des préférences fluctuantes du marché, mais être retirée de celui-ci et confiée à un monopole chargé de l’exercer de manière objective.
Réponse de l'anarchisme praxéologique. La praxéologie n’évalue pas les actions en fonction d’une essence morale prédéterminée, mais à partir des incitations et des contrats qui les structurent. La question pertinente n’est donc pas de savoir si la coercition est “spéciale” par nature, mais quels dispositifs institutionnels permettent d’en limiter les abus au moindre coût. Placer la protection dans le champ du marché ne revient pas à abandonner la justice à l’arbitraire des préférences individuelles ; cela signifie plutôt définir à l’avance, par des contrats, les protocoles d’usage de la force, les standards de preuve, les procédures de recours et les sanctions en cas d’abus.
Les agences d’assurance-protection sont, de ce point de vue, fortement incitées à réduire les erreurs et à éviter la violence inutile : chaque faute leur coûte directement en indemnisations, en hausse des primes, ou en perte de clientèle. La théorie des faisceaux de droits montre par ailleurs que les fonctions liées à la coercition (droit de se défendre, d’enquêter, de poursuivre) ne forment pas un bloc indivisible : elles sont dissociables, assurables et transférables à des tiers dans un cadre contractuel assorti de clauses de responsabilité, d’audit et d’arbitrage.
David Kelley suppose qu’un monopole territorial serait la seule manière d’assurer l’objectivité des règles. L'anarchisme praxéologique offre une alternative : une polycentricité où l’objectivation découle d’interopérabilités contractuelles (arbitrages partagés, normes d’enquête communes, barèmes d’indemnisation standardisés) et de garanties financières (cautions, réassurance, mécanismes de responsabilité).
Point clé de l'anarchisme praxéologique : le caractère particulier de la coercition ne justifie pas le monopole ; il milite au contraire en faveur de dispositifs spécialisés, assurés et audités dans un cadre concurrentiel, où les coûts des abus et des erreurs sont internalisés plutôt que supportés par la collectivité.
A2. « Le marché suppose l'État ; sans lui, pas de loi de l’offre et de la demande »
Thèse de Kelley. Pour David Kelley, les lois économiques ne peuvent fonctionner que si les échanges sont garantis comme volontaires. Cette garantie exige, selon lui, l’existence d’un arbitre extérieur au marché, l'État. Sans cette instance, “le coût de la force” ne serait pas infini et l’analyse économique s’effondrerait.
Réponse de l'anarchisme praxéologique. La praxéologie montre au contraire que les prix intègrent naturellement le risque de prédation et le coût de la protection. La sécurité et le règlement des litiges ne sont pas des conditions exogènes au marché, mais des intrants productifs, comparables à l’énergie ou à la logistique.
Affirmer que l’économie “suppose” un garant politique, c’est confondre deux niveaux distincts : d’un côté, les lois universelles de l’échange dans un monde de rareté ; de l’autre, l’ingénierie institutionnelle qui permet d’internaliser les externalités liées à la violence. Or, loin de nécessiter un monopole, cette ingénierie peut être assurée par des mécanismes contractuels.
Les faisceaux de droits permettent de préciser et de déléguer les usages légitimes de la force. À cela s’ajoutent les contrats d’adhésion aux règles établis par les clubs résidentiels, les plateformes ou les chambres d’arbitrage, renforcés par la réputation, l’assurance et l’exclusion. Ces dispositifs rendent la coercition prévisible, mesurable et donc disciplinée par le jeu des prix, sans recourir à un arbitre unique imposé de l’extérieur.
Point clé de l'anarchisme praxéologique : le marché n’a pas besoin d’attendre un garant étatique pour exister ; il génère ses propres arbitres, standards, assurances et sanctions non violentes, qui émergent et se renforcent par agrégation contractuelle.
A3. « L’anarchisme est circulaire : il suppose l’absence de coercition pour prouver son absence »
Thèse minarchiste de Kelley. Selon David Kelley, les anarchistes prétendent qu’une société sans État verrait la force disparaître. Mais pour soutenir cette affirmation, ils invoquent les lois du marché qui, par définition, reposent déjà sur des échanges volontaires. Le raisonnement serait donc circulaire : il suppose ce qu’il cherche à démontrer.
Réponse de l'anarchisme praxéologique. Cette objection perd sa force dès lors que l’on examine les dispositifs institutionnels concrets d’une société polycentrique. Chaque individu peut souscrire une police d’assurance-protection qui définit les standards probatoires, les procédures d’arbitrage et les modalités de sanction. Les assureurs, pour sécuriser leurs engagements, concluent des traités de réciprocité : une agence qui refuserait de coopérer s’expose à des pénalités financières, à l’exclusion des réseaux d’interopérabilité et, à terme, à la perte de ses clients.
Ainsi, la coercition n’est pas niée par hypothèse ; elle est rendue économiquement coûteuse et donc peu attrayante. Comme les assureurs doivent couvrir les indemnisations en cas de litige, ils ont un intérêt direct à privilégier la désescalade à la violence et à recourir d’abord à des sanctions non violentes : amendes contractuelles, saisie de dépôts de garantie, suspension ou exclusion d’accès à certains espaces. L’affrontement armé devient un dernier recours ruineux, non une option ordinaire.
Point clé de l’anarchisme praxéologique : loin de s’appuyer sur une pétition de principe, il met en place une architecture d’incitations qui décourage l’usage de la force en rendant son coût prohibitif et en ouvrant des voies de règlement alternatives plus attractives. Le marché, quant à lui, ne repose pas sur un cadre figé ex ante, mais sur un processus vivant d’opportunités en constante émergence, qu’il s’agisse de découvertes inattendues ou de créations portées par des entrepreneurs.
A4. « Les agences privées formeraient un monopole par la force »
Thèse minarchiste de Kelley. David Kelley redoute que, dans une société anarchiste, les agences de protection privées ne s’allient pour éliminer leurs concurrentes et instaurer un monopole armé, analogue au monde du crime organisé.
Réponse de l'anarchisme praxéologique. Un tel scénario méconnaît la fragilité structurelle d’un cartel sans fiscalité obligatoire pour le soutenir. Contrairement à l’État, une agence privée ne peut retenir ses clients par la contrainte : chacun garde la possibilité de se tourner vers un concurrent, ce qui rend toute entente instable.
En outre, les assureurs qui portent la charge financière des indemnisations n’ont aucun intérêt à l’escalade des conflits. Les affrontements ouverts font grimper les coûts et alourdissent les primes, ce qui incite au contraire à rechercher des accords d’arbitrage standardisés. Une agence trop agressive se retrouve rapidement sanctionnée : elle paie des primes plus élevées, perd son accès aux réseaux commerciaux et financiers, et finit marginalisée.
Dans la perspective des faisceaux de droits, ce sont précisément les droits d’accès, d’exclusion et de participation aux marchés qui servent de leviers disciplinaires. Ils permettent d’écarter les acteurs tentés par la coercition au profit de ceux qui privilégient la coopération.
Point clé de l’anarchisme praxéologique : un monopole armé se maintient bien plus aisément sous la forme étatique que dans un système polycentrique. Dans ce dernier, la contestabilité permanente des services et la possibilité de sortie constituent une barrière naturelle contre la concentration durable du pouvoir coercitif.
A5. « Historiquement, sans État, les gens en recréent un »
Thèse minarchiste de Kelley. David Kelley affirme que chaque expérience de société sans État débouche soit sur la guerre des gangs, soit sur la reconstitution d’un monopole étatique. Selon lui, l’histoire prouve ainsi l’impossibilité de l’anarchisme.
Réponse de l'anarchisme praxéologique. Cet argument repose sur un biais de sélection : les ordres polycentriques qui fonctionnent de manière stable laissent peu de traces spectaculaires dans les chroniques de l'histoire, alors que les guerres et les États victorieux saturent les récits historiques. La praxéologie, pour sa part, ne fonde pas ses normes sur ce que l’histoire a retenu, mais sur l’analyse des incitations et des mécanismes institutionnels.
Lorsque des sociétés centralisent le pouvoir, cela résulte généralement de circonstances particulières : une guerre extérieure qui exige une mobilisation forcée, une fiscalité subventionnant la bureaucratie, ou encore une innovation technologique facilitant la taxation et la surveillance. Ces trajectoires n’invalident en rien la viabilité d’ordres contractuels robustes ; elles soulignent plutôt l’importance de protéger les faisceaux de droits (exclusion, arbitrage, propriété) contre la capture politique et l’accaparement institutionnel.
Point clé de l’anarchisme praxéologique : l’histoire ne fournit pas des lois universelles mais des trajectoires contingentes. Ce qui compte, ce n’est pas ce que les sociétés ont fait sous des pressions particulières, mais l’architecture institutionnelle la plus cohérente avec la liberté contractuelle et la limitation des abus.
Informations complémentaires
Notes et références
- ↑ David kelley, 1994, The Entrepreneurial Life, lOS Journal, Vol 4, décembre, p4
- ↑ "Life : Your Adventure in Entrepreneurship", texte publié par David Kelley sur le site de l'Atlas Society, le 1er juin 2009
- ↑ David Kelley, 1974, “The Necessity of Government”, The Freeman, Vol 24, n°4, April, pp243–248 [lire en ligne]
Publications
- Pour une liste détaillée des œuvres de David Kelley, voir David Kelley (bibliographie)
Littérature secondaire
- 1987, R. Dipert, "David Kelley's Evidence of the Senses: A Realist Theory of Perception", Reason Papers, 12: 57–70
- 1989, David M. Brown, Commentaire du livre de David Kelley, "The art of reasoning", The Freeman, March, Vol 39, n°3, p128
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