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Yoram Barzel

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Yoram Barzel
économiste

Dates (19312022)
Tendance
Nationalité Israël Israël
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Citation
Interwikis sur Yoram Barzel

Yoram Barzel (19312022). Après des études en Israël et un travail d'économiste pour le gouvernement israélien, Yoram Barzel a soutenu sa thèse en 1961 à l'université de Chicago. Il a ensuite réalisé toute sa carrière à l'université de Washington.

L'approche de Yoram Barzel sur les droits de propriété au sein de l'entreprise

L'approche de Yoram Barzel (2003) met en lumière l'importance des droits de propriété dans la formation de la structure organisationnelle des entreprises. Il remet en question le modèle néoclassique traditionnel de l'entreprise, notamment en ce qui concerne la détermination de la taille et de la portée d'une entreprise. Il met l'accent sur le rôle du capital propre dans la définition des limites de l'entreprise.

Analyse critique du modèle néoclassique

  • . Remise en question du modèle néoclassique. Dans le monde walrasien, le coût de production est déterminé par la fonction de production et la courbe de coût, en forme de U, reflète les caractéristiques de cette fonction, en particulier l'échelle de l'équipement en capital. Yoram Barzel soutient que le modèle néoclassique, enraciné dans l'économie walrasienne, est insuffisant pour expliquer les observations du monde réel et présente des incohérences internes.
  • . Importance des droits de propriété. Yoram Barzel commence par souligner que les droits de propriété, même une fois établis, ne sont pas indépendants des transactions avec autrui. Il met en avant l'importance du cadre organisationnel dans lequel les actifs sont exploités, notamment dans le contexte des entreprises. Dans le modèle néoclassique, l'entreprise est présentée comme une entité qui transforme des entrées en sorties grâce à une fonction de production, en supposant des droits de propriété bien définis et appliqués sans coût.
  • . Limitations du modèle walrasien. Yoram Barzel critique ce modèle, soulignant ses limites pour expliquer la taille et la portée des entreprises. Il explore la critique historique initiée par Ronald Coase dans La nature de la firme (1937) et reconnaît les modèles ultérieurs qui comblent les lacunes laissées par le travail original de Coase. Barzel discute également de la critique de Steven Cheung (1983), remettant en question la distinction entre les transactions intervenant au sein de l'entreprise et celles sur les marchés.

Repenser les fondements de la dualité entre la fonction de coût et la fonction de production dans l'entreprise

Yoram Barzel souligne la dualité entre la fonction de coût et la fonction de production, notant que l'une ne peut être comprise sans l'autre. Selon le modèle néoclassique, la concurrence pousse le prix de chaque bien vers le coût moyen minimum. Cependant, l'approche walrasienne ne tient pas pleinement compte de la nature des biens de capital, qui produisent des services au fil du temps.

Dans le modèle de Barzel, les biens de capital peuvent être détenus par différentes parties, et les services qu'ils produisent peuvent être transférés indépendamment des actifs eux-mêmes. Il remet en question l'importance de la propriété directe des actifs de capital par l'entreprise, suggérant que l'efficacité peut être atteinte, même sans cette propriété formelle. Selon lui, la fonction de production ne spécifie pas nécessairement quels inputs de capital seront détenus par une entreprise, laissant ainsi la taille et la portée optimales de l'entreprise indéterminées.

Barzel soulève également des préoccupations à propos de la main-d'œuvre. Alors que la fonction de production implique une demande dérivée de services de travail en unités d'efficacité, la fonction de coût ne prend en compte que le salaire horaire, ce qui peut ne pas refléter efficacement la contribution réelle à la production.

Il met en avant la nécessité d'inclure des hypothèses plus complexes dans le modèle néo-classique pour comprendre les limites de l'entreprise, notamment en ce qui concerne l'information sur les prix et la qualité, ainsi que le statut de propriété des actifs. Il souligne que le simple fait de posséder ou de ne pas posséder un actif ne suffit pas à définir les contours de l'entreprise.

Approche transactionnelle de l'entreprise

L'approche transactionnelle de l'entreprise, initiée par Ronald Coase dans La nature de la firme, constitue une transition importante dans la vision de l'entreprise. Coase déplace l'analyse de la quantité d'un bien produite par une entreprise vers le nombre de transactions effectuées à l'intérieur de celle-ci. Cette transition vers l'analyse des coûts de transaction devient fondamentale.

  • . Modèle transactionnel de Coase. Pour Coase, la décision de produire un bien à l'intérieur de l'entreprise ou de l'acheter sur le marché dépend des coûts. Contrairement au monde walrasien, où les coûts sont supposés être connus sans frais, Coase reconnaît que les gestionnaires doivent dépenser des ressources pour effectuer des transactions sur le marché. Ces coûts, combinés aux coûts de gestion interne de la production, déterminent l'efficacité de la production. L'approche transactionnelle de Barzel et Coase offre un cadre qui prend en compte des facteurs tels que les coûts comptables et juridiques, les coûts d'agence, le temps passé à surveiller les travailleurs et les dépenses liées à la vérification des caractéristiques des biens achetés auprès d'autres entreprises. Elle permet de définir de manière logique les limites de l'entreprise en fonction des coûts de transaction et des coûts de gestion.
  • . Définition des limites de l'entreprise. Barzel soulève également des questions sur la définition précise des coûts de transaction dans le modèle de Coase. Il met en évidence la nécessité d'approfondir notre compréhension des natures spécifiques de ces coûts pour affiner davantage la détermination des limites de l'entreprise. En outre, d'autres auteurs, comme Alchian et Demsetz, ont contribué à cette discussion en proposant des modèles alternatifs basés sur la production en équipe pour expliquer les choix entre les marchés et la production interne.

Yoram Barzel affirme finalement que les limites de l'entreprise sont définies par des considérations de droits de propriété, en particulier le rôle du capital propre garantissant les actions des propriétaires d'actifs au sein de l'entreprise. Il suggère que la taille et la portée de l'entreprise sont déterminées par ces droits de propriété, s'éloignant de l'hypothèse néoclassique selon laquelle les individus peuvent effectuer des activités similaires à celles de l'entreprise au même coût. Son approche sur les droits de propriété dans l'entreprise élargit la perspective néoclassique en intégrant les coûts de transaction et de gestion dans la définition des limites de l'entreprise, contribuant ainsi à une compréhension plus réaliste de son fonctionnement.

Une analyse positive des droits de propriété

Dans son article fondateur Property Rights and Economic Theory[1], Yoram Barzel propose une approche résolument positive des droits de propriété. Plutôt que de les réduire à de simples créations légales, il les définit comme des droits économiques effectivement exercés, c’est-à-dire la capacité concrète à contrôler, utiliser ou transférer une ressource. Cette perspective met en évidence que les droits de propriété ne sont ni absolus, ni figés : ils forment des faisceaux divisibles, incomplets et imparfaits, dont la configuration dépend de la capacité des individus à réduire les coûts de transaction liés à leur protection et à leur transfert.

Si Barzel reste dans une posture analytique et descriptive, ses concepts trouvent une résonance particulière lorsqu’on les confronte à l’anarchisme praxéologique. Là où Barzel décrit la réalité économique des droits, l’anarchisme en tire une lecture normative : puisque les droits effectifs émergent de l’action humaine et des interactions volontaires, pourquoi les subordonner à un monopole étatique ? L’étude des convergences et divergences entre ces deux approches permet ainsi d’éclairer la tension entre une science positive des institutions et un projet politique visant leur émancipation hors de l’État.

Les convergences implicites entre Yoram Barzel et l’anarchisme praxéologique

  • Primauté des droits économiques

L’un des apports majeurs de Yoram Barzel est la distinction entre des droits légaux et des droits économiques. Les premiers sont garantis par une autorité publique, inscrits dans la loi et protégés par les tribunaux. Les seconds, en revanche, désignent la capacité effective d’un individu à contrôler et utiliser une ressource. Ainsi, un squatteur peut détenir un droit économique sur un logement, même s’il n’a aucun titre légal, dès lors qu’il peut y vivre et en exclure autrui. Barzel souligne que ce sont ces droits effectifs, et non les proclamations juridiques, qui structurent la vie économique réelle. C’est exactement ce que l’anarchisme praxéologique retient : l’action humaine repose sur ce que les individus peuvent réellement faire, pas sur des abstractions imposées par l’État.

  • Plasticité des faisceaux de droits

Yoram Barzel rompt avec l’idée de propriété comme un « tout indivisible » pour la concevoir comme un faisceau de droits (bundle of rights). Il insiste sur le fait que ces faisceaux sont divisibles, incomplets et imparfaits.

  • Divisibles : plusieurs personnes peuvent détenir des droits partiels sur un même bien (usufruit, bail, servitude).
  • Incomplets : toutes les dimensions d’un bien ne sont pas couvertes par des droits exclusifs (par ex., l’air ou le bruit ambiant).
  • Imparfaits : aucun droit n’est absolument garanti, car il peut être contesté, violé ou limité.

En parallèle, l’anarchisme praxéologique retrouve ici l'intuition de Yoram Barzel : les droits ne sont pas figés dans un code étatique, mais sans cesse négociés, adaptés et reconnus par les interactions sociales.

  • Rôle central des coûts de transaction

Enfin, Yoram Barzel accorde une place essentielle aux coûts de transaction dans l’organisation des droits. Définis comme les coûts nécessaires pour établir, protéger et transférer les droits de propriété, ils déterminent la forme institutionnelle que prend un système économique. Lorsque les coûts de protection privée sont trop élevés, les individus cherchent des mécanismes alternatifs pour sécuriser leurs droits : contrats, arbitrage, réputation, ou recours à des tiers.

Dans une perspective anarchiste, cette logique rejoint celle de l’ordre spontané : sans État, ce sont les institutions émergentes (coutumes, accords contractuels, tribunaux privés, normes communautaires) qui réduisent ces coûts et permettent aux faisceaux de droits de se stabiliser.

Distances et réserves

  • Absence de rejet explicite de l’État

Contrairement aux penseurs anarchistes, Yoram Barzel ne cherche pas à abolir l’État. Il constate que certaines protections de droits sont coûteuses à maintenir individuellement, et que dans certains cas l’intervention publique peut réduire ces coûts. Par exemple, la police ou les tribunaux peuvent assurer une protection plus large que celle qu’un individu pourrait financer seul. Autrement dit, l’État est vu non comme un intrus inutile, mais comme une institution parmi d’autres qui peut, dans certains contextes, améliorer l’allocation des droits.

  • Une approche positive plutôt que normative

Barzel insiste sur la vocation descriptive de son travail : son objectif est de comprendre et d’expliquer comment les droits de propriété émergent, se distribuent et se transforment dans la pratique. Dans Economic Analysis of Property Rights[2], il se démarque clairement des approches normatives : « la théorie des droits de propriété n’est pas une prescription mais une méthode pour analyser l’action ». Cela l’éloigne de l’anarchisme praxéologique, qui mobilise l’analyse des droits pour défendre une vision normative de la société sans État, fondée sur la coopération volontaire.

  • La maximisation de la richesse comme critère d’évaluation

Un autre point de distance réside dans l’hypothèse de maximisation. Pour Barzel, la distribution des droits tend vers celle qui maximise la richesse nette (net wealth), entendue comme la valeur totale générée une fois soustraits les coûts de transaction. Il s’agit d’une hypothèse fonctionnelle : elle explique pourquoi certaines institutions persistent et d’autres disparaissent. Mais Barzel ne pousse pas cette idée vers une conclusion politique, ni vers une orientation anarchiste. L’anarchisme praxéologique, au contraire, prend appui sur cette hypothèse pour affirmer que l’État est une source de coûts supplémentaires et de distorsions, et que la coopération libre produirait une allocation plus efficace des droits.

Positionnement global

  • Barzel, analyste positif des droits

Yoram Barzel se situe dans une démarche d’analyse positive : il cherche à expliquer comment les droits de propriété fonctionnent réellement dans l’économie. Sa contribution majeure est d’avoir montré que la propriété n’est pas un titre abstrait inscrit dans le droit, mais un ensemble de droits économiques dont la portée dépend des capacités effectives de contrôle, de protection et d’échange. En mettant l’accent sur les faisceaux de droits, leur divisibilité, leur incomplétude et leur imperfection, il offre une grille de lecture dynamique et pragmatique des institutions.

  • L’anarchisme praxéologique, un projet normatif

À l’inverse, l’anarchisme praxéologique ne se contente pas d’observer : il propose une orientation normative. Il part du même constat, les droits réels sont ceux que les individus peuvent effectivement exercer, mais en tire la conclusion que l’État est superflu, voire nuisible. Puisque les faisceaux de droits se forment et se stabilisent à travers les interactions volontaires, il n’est pas nécessaire de les placer sous un monopole centralisé. L’horizon devient celui d’une société sans État, régie par des accords contractuels, des arbitrages privés et des institutions communautaires.

  • Une complémentarité asymétrique

On pourrait dire que Yoram Barzel fournit la boîte à outils analytique, et que l’anarchisme praxéologique en propose une lecture politique radicale. Les concepts de droits économiques, de faisceaux divisibles, de coûts de transaction et de maximisation de la richesse servent de fondations théoriques. Mais là où Barzel s’arrête à la description et à l’évaluation pragmatique des institutions (y compris l’État), l’anarchisme franchit le pas vers une vision normative qui conteste toute légitimité au monopole étatique.

En somme, Yoram Barzel est un théoricien de l’ordre spontané des droits sans aller jusqu’à en tirer un projet anarchiste. L’anarchisme praxéologique, de son côté, prolonge son analyse en un manifeste : puisque les droits sont toujours négociés et imparfaits, mieux vaut les laisser évoluer librement, hors de la tutelle de l’État.

Informations complémentaires

Notes et références

  1. Yoram Barzel, 1989, "Property Rights and Economic Theory, Journal of Economic Literature, Vol 27, n°4, pp1389–1428
  2. Yoram Barzel, Douglas W. Allen, 2023. Economic Analysis of Property Rights, Cambridge University Press (3rd ed.), chap. 2-3

Publications

Pour une liste détaillée des œuvres de Yoram Barzel, voir Yoram Barzel (bibliographie)
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