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Subventions russes aux mouvements écologistes
Les Subventions russes aux mouvements écologistes sont les subventions et aides, souvent cachées, accordées directement ou indirectement par Moscou à des associations écologistes, au moins européennes et américaines, afin d'avancer les intérêts financiers de la Russie. Elles nourrissent la polémique sur l'objectivité de l'opposition des principaux écologistes à l'énergie nucléaire ou au gaz de schiste, alors que ceux-ci représentent une menace grave pour les ressources en devises de l'économie russe dont la principale exportation est le pétrole et le gaz.
Des aides russes nombreuses aux mouvements écologistes
En Europe
Dès 2011, Moscou a versé des montants élevés à des associations présentées comme écologistes : « Alors que le premier gazoduc, NordStream 1, était en construction, l’entreprise russe a apporté dix millions d’euros à la Naturschutzstiftung Deutsche Ostsee, dans les instances de laquelle on retrouvait des membres d’associations écologistes comme le WWF et BUND, la fédération pour l’environnement et la conservation de la nature en Allemagne » rapporte le quotidien français L'Opinion[1].
En 2014, le secrétaire général de l'OTAN et ancien Premier ministre danois, Anders Fogh Rasmussen, dévoilait déjà : « J’ai rencontré des alliés qui peuvent rapporter que la Russie, dans le cadre de ses opérations sophistiquées d’information et de désinformation, s’est engagée activement auprès de soi-disant organisations non gouvernementales – des organisations environnementales travaillant contre le gaz de schiste – pour maintenir la dépendance européenne vis-à-vis du gaz russe importé. »[2]. Il refuse alors de fournir des détails, dans cette déclaration faite au think tank Chatham House.
L'intellectuel Drieu Godefridi lit ces accusations à l'aune des intérêts financiers russes : « Le sol européen regorge de gaz de roche-mère, qu’on appelle aussi gaz de schiste. La mise en exploitation de ces réserves de gaz européen aurait mécaniquement diminué les achats et la dépendance de l’Europe à l’égard du gaz russe, en particulier son géant gazier Gazprom. Il en va de même du nucléaire, qui offre aux Occidentaux une source d’énergie abondante non émettrice de CO2 et alternative au gaz russe. D’où l’intérêt, pour le gouvernement russe, de monter une vaste campagne de désinformation contre le gaz de schiste et contre le nucléaire civil en Occident, en finançant massivement les groupes les mieux susceptibles de s’y opposer naturellement : des organisations écologistes. »[3]
En 2022, le journal allemand Die Welt révèle que l’entreprise NordStream 2 AG, filiale de Gazprom, gazier russe détenu majoritairement par l’État, a versé 192 millions d’euros à une fondation écologiste (Stiftung Klima- und Umweltschutz MV) entre février et novembre 2021, pour accélérer la construction du gazoduc Nordstream 2, lui permettant d'exporter davantage de gaz vers l'Europe[4]. Cette fondation avait été mise en place entre autre par Manuela Schwesig (SPD, gauche), Première ministre du land de Mecklembourg-Poméranie-Occidentale. Elle est personnellement mise en cause lorsque des documents sont révélés par la presse allemande, montrant qu'il y a eu « collusion de Manuela Schwesig avec les Russes sur le pipeline gazier » Nordstream2[5] Les fonds russes ont été dirigés vers l’entité à vocation commerciale créée au sein de la Fondation pour la protection du climat et de l’environnement, afin notamment de contourner les sanctions américaines selon Die Welt[6]. Cette fois-ci, les associations qui avaient bénéficié des subventions russes en 2011 avaient refusé des versements dix ans plus tard à la fondation créée en 2022, « la dénonçant comme un paravent et une contrefaçon. Parlant, sans doute, en connaissance de cause... » selon L'Opinion[1].
Aux États-Unis
En 2016, c'est la candidate démocrate à la Maison Blanche Hillary Clinton qui révèle, en privé, que la Russie financerait des groupes environnementalistes aux États-Unis pour avancer ses intérêts : « Nous étions confrontés à de faux groupes environnementaux, et je suis une grande écologiste, mais ceux-ci étaient financés par les Russes… »[7]
Selon deux parlementaires américains un an plus tard, ce sont environ 10 millions de dollars par an qui ont transité par les Bermudes et une association écran pour venir subventionner plusieurs associations environnementalistes américaines parmi les plus importantes[8]
Des soupçons d'ingérence russe qui vont jusqu'à la politique
Les soupçons d'ingérence russe via des financements ont touché également les politiques, comme Gerhard Schröder. L'ancien chancelier allemand, qui avait décidé de sortir l'Allemagne du nucléaire, était devenu, une fois revenu dans le civil, président du conseil de surveillance de Gazprom, avec une rémunération de 250 000 euros par an[9].
Une ministre autrichienne des Affaires étrangères, Karin Kneissl, en première ligne dans les relations de l'Autriche avec la Russie entre 2017 et 2019, a quant à elle quitté l'Europe en 2023 pour s'installer en Russie avec la présidence d'un groupe de réflexion à la clef. Dès 2021, elle avait accepté un poste au conseil d’administration du géant pétrolier russe Rosneft, avant de le quitter en mai 2022 après des mois de pression et d'interrogation sur l'ingérence russe dans la politique autrichienne[10].
À noter, sur son propre sol, la Russie s'en prend plutôt aux associations écologistes, n'hésitant pas ainsi en 2008 à s'en prendre à une association écologiste russe Planeta Nadejd, usant de considérations fiscales pour tenter de la forcer à fermer[11]. En 2012, un projet de loi russe visait à considérer deux tiers des ONG écologistes russes comme des « agents de l'étranger »[12].
Conséquences économiques et stratégiques
Ces subventions massives nourrissent un doute sur les motivations réelles des organisations écologistes quand elles s'opposent au nucléaire par exemple. Comme l'exprime Drieu Godefridi dans Atlantico : « Quand le gouvernement russe finance des organisations écologistes, il n’est pas désintéressé. Quand des organisations écologistes acceptent des financements du gouvernement russe, elles entrent du fait même dans une forme de docilité à l’égard de ce gouvernement autocratique, de ses intérêts économiques et de ses positions géopolitiques. [..] L’horreur des exactions perpétrées par la Russie en Ukraine exige de faire la lumière sur le financement d’organisations écologistes en Occident par le gouvernement de la Fédération de Russie. L’obligation n’est-elle pas morale autant que de sécurité nationale ? Ne devons-nous pas à l’histoire, au peuple ukrainien et à nos enfants la vérité sur cette complicité objective ? »[13].
Avec ou sans lien avec ces subventions aux écologistes européens, lors des débats sur le gaz de schiste, la majorité de l'Europe s'engagera contre ceux-ci, résultant en une perte massive de souveraineté énergétique et une dépendance accrue vis-à-vis de la Russie. Sous la pression des écologistes locaux, l'Allemagne a progressivement fermé ses centrales nucléaires, résultant en une dépendance accrue envers les importations de gaz, de charbon et de pétrole russe, faiblesse révélée au grand jour à l'occasion de la guerre en Ukraine où Vladimir Poutine utilisa ce levier comme moyen de pression géopolitique. Comble de l'absurde, les écologistes allemands se sont prononcés pour le développement du charbon, seule alternative crédible restant après la fermeture des centrales nucléaires pendant l'invasion de l'Ukraine par la Russie[14].
Perspective libérale
Ces ingérences politiques, réelles, exagérées ou fantasmées, sont une des raisons à ces prises de positions écologistes incompréhensibles d'un point de vue environnemental. Il est illusoire de croire que les hommes politiques poursuivent un hypothétique intérêt général. Le meilleur moyen de réduire la corruption consiste à réduire le rôle de l’État, dont l'ingérence dans de trop nombreux aspects de la vie de chacun est rarement fait avec de bonnes intentions.
Notes et références
- ↑ 1,0 et 1,1 NordStream: l’embarrassant cadeau de Gazprom à une fondation pour le climat allemande, L'Opinion, 19 août 2022
- ↑ Russia 'secretly working with environmentalists to oppose fracking', The Guardian, 19 juin 2014
- ↑ Des écologistes ont-ils été financés par le gouvernement russe ?, Contrepoints, 4 mars 2022
- ↑ Fast 200 Millionen Euro – so üppig stattete Gazprom die Klimastiftung aus, Die Welt, 14 août 2022
- ↑ German state leader Manuela Schwesig ‘colluded with Russians on gas pipeline’, The Times, 18 avril 2022
- ↑ Schwesig verliert wegen früherem Russland-Kurs an Popularität
- ↑ Investigate Russia’s covert funding of US anti-fossil fuel groups, The Hill, 1er mars 2022
- ↑ Smith, Weber Letter To Mnuchin Re Russia and Green Groups
- ↑ « Des subventions russes qui sentent le gaz », Le Canard Enchaîné, 24 août 2022
- ↑ L’ancienne ministre autrichienne des Affaires étrangères émigre en Russie pour diriger un groupe de réflexion, Euractiv, 13 septembre 2023
- ↑ RUSSIE. Moscou s'en prend aux écologistes , Courrier International
- ↑ Russie : un projet de loi propose de considérer des ONG comme "agents de l'étranger", Challenges
- ↑ L’Europe dépendante du gaz russe ? Voilà pourquoi il est plus que temps de faire la transparence sur le financement de mouvements écologistes par la Russie
- ↑ L’Europe écologiste finance Poutine, Contrepoints, 19 mars 2022
Liens externes
- (fr)Des écologistes ont-ils été financés par le gouvernement russe ?, 4 mars 2022
- (fr)L’Europe dépendante du gaz russe ? Voilà pourquoi il est plus que temps de faire la transparence sur le financement de mouvements écologistes par la Russie,
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