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Pyramide de Kelsen

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La Pyramide de Kelsen (ou plus rarement pyramide des normes) est une représentation de la Hiérarchie des normes en droit, développée par le juriste autrichien Hans Kelsen.

Définition de la Pyramide de Kelsen

Représentation de la hiérarchie des normes dans la pyramide de Kelsen

La pyramide de Kelsen est un concept théorique qui représente la hiérarchie des normes juridiques dans une structure pyramidale. Cette théorie est largement utilisée en droit pour organiser les différentes sources du droit et déterminer leur priorité en cas de conflits.

La pyramide de Kelsen se compose de plusieurs niveaux, du sommet au bas de la pyramide, comme suit :

  • Norme fondamentale (Grundnorm) : Au sommet de la pyramide se trouve la norme fondamentale, également appelée la « norme suprême » ou la « norme fondatrice ». C'est la norme la plus élevée dans un système juridique donné et elle confère sa validité à toutes les autres normes. Cette norme établit la base de légitimité du système juridique dans son ensemble. Cependant, il est important de noter que la norme fondamentale est une hypothèse théorique et ne se trouve généralement pas dans le texte du droit positif.
  • Constitution : Directement en dessous de la norme fondamentale, on trouve la constitution d'un pays. La constitution établit la structure du gouvernement, les droits fondamentaux des citoyens et les principes fondamentaux du système juridique.
  • Lois et règlements : Le niveau suivant comprend les lois et règlements adoptés par le législateur, tels que les parlements ou les organismes gouvernementaux. Ces lois sont conformes à la constitution et ne peuvent pas être en conflit avec elle.
  • Actes administratifs et décrets : En dessous des lois se trouvent les actes administratifs et les décrets émis par les autorités administratives. Ils sont subordonnés aux lois et aux règlements.
  • Jurisprudence : Au bas de la pyramide se trouvent les décisions des tribunaux. La jurisprudence est le résultat de l'application et de l'interprétation des lois, de la constitution et des actes administratifs à des cas spécifiques. Les décisions des tribunaux sont contraignantes pour les affaires futures.

La pyramide de Kelsen est souvent utilisée pour résoudre les conflits juridiques en déterminant quelle norme prévaut lorsque plusieurs normes entrent en conflit. Selon cette théorie, les normes supérieures (comme la constitution) ont préséance sur les normes inférieures (comme les lois), et les normes inférieures ne peuvent pas être contraires aux normes supérieures. Cette hiérarchie des normes facilite la compréhension de la manière dont le droit est structuré et comment les décisions juridiques sont prises.

Application en France

En France, le système juridique suit une structure hiérarchique des normes, bien que la présentation puisse différer de la représentation classique de la pyramide de Kelsen. Voici comment cette hiérarchie se décline en France :

  • La Constitution : En France, la Constitution est le texte juridique suprême. Elle est située au sommet de la hiérarchie des normes et elle établit les principes fondamentaux du système juridique, la structure du gouvernement, les droits fondamentaux des citoyens, et les principes directeurs. Aucune loi ou acte administratif ne peut être en contradiction avec la Constitution.
  • Les lois : Les lois adoptées par le Parlement (Assemblée nationale et Sénat) sont le deuxième niveau de la hiérarchie. Les lois comprennent des lois constitutionnelles, des lois organiques et des lois ordinaires. Les lois organiques régissent l'organisation des pouvoirs publics, tandis que les lois ordinaires portent sur d'autres domaines.
  • Les ordonnances : Les ordonnances sont des actes pris par le Président de la République sur proposition du gouvernement. Elles ont force de loi dans certains domaines spécifiques et sont généralement temporaires, mais elles doivent être ratifiées par le Parlement pour rester en vigueur.
  • Les décrets : Les décrets sont pris par le Président de la République, le Premier ministre ou les ministres et sont subordonnés aux lois. Ils sont utilisés pour détailler et mettre en œuvre les lois, ainsi que pour réglementer divers domaines.
  • Les arrêtés : Les arrêtés sont pris par des autorités administratives, telles que les préfets, les maires, ou d'autres organes administratifs. Ils sont destinés à régir des questions spécifiques et sont également subordonnés aux lois et décrets.
  • La jurisprudence : La jurisprudence, ou les décisions des tribunaux, est en bas de la hiérarchie des normes. Cependant, la jurisprudence est un élément important de la hiérarchie normative, car les décisions des tribunaux interprètent et appliquent les lois, la Constitution et d'autres normes à des cas spécifiques. Les décisions des juridictions supérieures, telles que la Cour de cassation, ont une grande influence sur la jurisprudence.

En France, la hiérarchie des normes est un concept clé pour comprendre le système juridique, mais la présentation peut varier par rapport à la représentation traditionnelle de la pyramide de Kelsen. Le système juridique français est également influencé par le droit européen, en particulier en raison de l'appartenance de la France à l'Union européenne, ce qui ajoute une dimension supplémentaire à la hiérarchie des normes.

Limites et critiques

La pyramide de Kelsen est une théorie juridique importante pour la compréhension de la hiérarchie des normes dans un système juridique, mais elle présente également certaines limites et critiques, notamment :

  • Hypothèse de la norme fondamentale : La pyramide de Kelsen repose sur l'hypothèse de l'existence d'une norme fondamentale qui confère la validité à tout le système juridique. Cependant, il est difficile, voire impossible, de déterminer de manière empirique l'existence d'une telle norme dans la réalité, ou de se mettre d'accord sur son contenu. Pour les libéraux, c'est le droit naturel qui est au fondement
  • Simplification excessive : La pyramide de Kelsen simplifie souvent la réalité juridique en la réduisant à une hiérarchie linéaire de normes. En réalité, les systèmes juridiques sont souvent beaucoup plus complexes, avec des interactions entre différentes sources de droit, des influences mutuelles, et des zones grises.
  • Interactions complexes : Dans de nombreux systèmes juridiques, les relations entre les différentes sources de droit sont plus complexes que ce que la pyramide de Kelsen ne le suggère. Par exemple, la jurisprudence peut influencer la législation, et les traités internationaux peuvent avoir une incidence sur la constitution.

Perspective libérale

La hiérarchie des normes a permis d'expliquer et de favoriser l'émergence du Contrôle de constitutionnalité dans les pays occidentaux dans lesquels cette pratique était inconnue (notamment en Europe, les États-Unis pratiquant ce type de contrôle depuis le début du XIXe siècle, cf. Marbery V. Madison). En cela elle représente un progrès et une limitation de la capacité du législateur à voter « tout et n'importe quoi ».

Néanmoins, la pyramide de Kelsen a de nombreuses limites aux yeux des libéraux. La pyramide de Kelsen implique ainsi une concentration du pouvoir normatif entre les mains de l'État et de ses institutions. Les critiques libérales et libertariennes défendent généralement une décentralisation du pouvoir et une plus grande autonomie des individus et des communautés pour déterminer leurs propres normes et règles. Pour les anarcho-capitalistes, c'est incompatible avec leur vision de la création des lois dans l'anarcho-capitalisme.

La pyramide de Kelsen suppose également que les normes émises par l'État, telles que les lois, sont automatiquement valides. Les critiques libérales et libertariennes soulignent que toutes les lois ne sont pas nécessairement justes ou éthiques, et que les individus devraient avoir le droit de remettre en question et de contester des lois qui empiètent sur leurs droits fondamentaux. Kelsen lui-même ne niait pas cette limite, et écrivait ainsi : « Du point de vue de la science juridique, le droit sous le régime nazi était le droit. Nous pouvons le regretter, mais nous ne pouvons nier que ce fût le droit. »


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