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Ibn Khaldoun

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Ibn Khaldoun (ابن خلدون), né en 1332 et mort en 1406, est un historien, philosophe et homme politique d'Afrique du Nord, issu d'une famille andalouse d'origine arabe. Il a contribué à la pensée économique en découvrant, six siècles avant Arthur Laffer, la « courbe de Laffer ». Auteur du premier modèle de cycle politico-économique, parfois considéré comme un « précurseur de la sociologie moderne », Ibn Khaldun ou Ibn Khaldoun nous livre dès le quatorzième siècle des éléments de réflexion d'une étonnante modernité.

Biographie

Ibn Khaldoun est né le 27 mai 1332 à Tunis et mort le 17 mars 1406 au Caire. D'abord ambassadeur et homme d'État, Ibn Khaldoun mène entre Espagne et Maghreb une vie d'intrigues, de conciliations et d'arbitrages qui le place au service successif de dynasties concurrentes (hafsides, marinides et abdalwadides) pour lesquelles il occupe à l'occasion des postes importants de secrétaire d'état ou de premier ministre. J. E. Bencheikh (1995) estime que c'est de cette existence fluctuante qu'il sait réorienter sans guère de scrupules, qu'il retire une connaissance incomparable des mécanismes politiques qui régissent l'exercice du pouvoir. Il enseigne ensuite à Tunis puis au Caire où il occupe une chaire de droit et une charge de grand Cadi (il s'établit définitivement en Égypte qui jouit, sous le règne des mamelouks, d'une période de prospérité économique et culturelle). Il écrit de 1372 à 1376 la Muqaddima, prolégomènes à une volumineuse Histoire universelle, le Kitab al Ibar, qui est en fait une histoire des empires musulmans dans laquelle il s'essaie à formuler les théories susceptibles d'expliquer le déclin économique que connaît alors le monde musulman.

Un précurseur de l'analyse politico-économique

Ibn Khaldoun s'efforçait d'analyser les questions économiques objectivement, et s'intéressait aux conséquences nécessaires de différentes politiques. Préservant son approche historique des tentations utopistes des philosophes influencés par la Grèce et la « cité idéale », Ibn Khaldoun ironisait sur l'affirmation selon laquelle le gouvernement bénéficie nécessairement d'une inspiration divine ou le fait que les institutions sociales fussent conçues par des législateurs omniscients :

« La dignité du souverain est aussi noble qu'attrayante. Avec elle, on se procure les jouissances mondaines, tout ce qui peut satisfaire les sens et charmer l'esprit. Celui qui la possède est presque toujours un objet d'envie, et il s'en dessaisit rarement, à moins d'y être contraint par la force. » (traduction de Slane, 1934)

Portée par une appétence croissante pour le luxe, la dynastie s'affranchit progressivement de la simplicité bédouine de ses origines, elle étend bientôt ses pouvoirs de diverses manières pour essayer de maintenir sa politique de dépense exubérante. À part la manipulation de la masse monétaire, il y a le recours aux taxes. Arrive un stade où le niveau d'imposition commence à nuire à la productivité :

« Il faut savoir qu'au début d'une dynastie, l'impôt engendre des recettes importantes moyennant une petite assiette fiscale. À la fin de la dynastie, l'impôt ramène de petits revenus malgré une assiette large. » (Mécanisme des impôts, traduction Monteil, 1967)

La diminution du rendement de l'impôt est imputée à la désincitation à produire consécutive à l'attaque contre les droits de propriété :

« Il faut comprendre que les attaques contre la propriété privée éliminent l'incitation à l'acquérir [...] la stagnation des affaires sera générale, à cause de la disparition de toute incitation au travail. Au contraire, à de légères atteintes à la propriété privée correspondra un léger arrêt de travail. Car la civilisation, son bien-être et la prospérité publique dépendent de la productivité et des efforts que font les gens, en toutes directions, dans leur propre intérêt et pour leur profit. » (L'injustice détruit la civilisation, traduction Monteil, 1967)

Les régimes politiques ayant finalement perdu le soutien de la population, l'État s'appuie sur la force. Ibn Khaldoun apparaît donc comme le premier auteur à décrire une dynamique politico-économique et à expliquer l'évolution historique par la prise en compte des préférences des dirigeants politiques.

Informations complémentaires

Littérature secondaire

  • 1934, De Slane, M. (traduit par), Les Prolégomènes d'Ibn Khaldoun, Paris : Paul Geuthner (réédité en 1996)
  • 1964, Joseph Spengler, "Economic Thought of Islam: Ibn Khaldun", Comparative Studies in Society and History, 6(3), pp268-306
  • 1967,
    • Monteil, Vincent (traduit par), Discours sur l'Histoire universelle, Beyrouth : Sindbad thésaurus
    • M. M. Rabi, "The political theory of Ibn Khaldun", Leiden: Brill
  • 1971, J. D. C. Boulakia, Ibn Khaldun: A fourteenth-century economist, J. Political Econ., 79, pp105-118
  • 1988, I. M. Oweiss, "Ibn Khaldún, Father of Economics", In: I. M. Oweiss, G. N. Atiyeh, "Arab Civilization: Challenges and Responses", New York: State University of New York Press
  • 1997, Hussein M. Adam, "Hobbes, Locke, Burke, Ibn Khaldun, and Reflections on the Catastrophe in Somalia”, In: Hussein M. Adam et Richard Ford, dir., "Mending Rips in the Sky: Options for Somali Communities in the 21st Century", Lawrenceville, N.J.: The Red Sea Press
  • 2008, Yusuf M. Sidani, "Ibn Khaldun of North Africa: an AD 1377 theory of leadership", Journal of Management History, Vol 14 (1)
  • 2017, Munir Quddus, Salim Rashid, "The Ethics of Commerce in Islam: Ibn Khaldun’s Mugaddimah Revisited", In: Eugene Heath, Byron Kaldis, dir., "Wealth, commerce, and philosophy : foundational thinkers and business ethics", Chicago : The University of Chicago Press, pp115-134

Liens externes


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