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Loi Le Chapelier
La loi Le Chapelier est promulguée durant la période de l'Assemblée Constituante le 14 juin 1791. Du nom d'Isaac Le Chapelier, avocat breton et député jacobin, cette loi vise à interdire les coalitions dont les rassemblements de paysans et d'ouvriers, ou les syndicats, établissant ainsi la liberté d'entreprendre et de s'installer.
Contexte historique
Les premières tentatives de réforme : La vision de Turgot
Dès 1776, le ministre français Turgot cherche à libéraliser le commerce des grains et à abolir les guildes, qu'il considère comme des obstacles à la croissance économique, à l'innovation technique et à l'initiative individuelle.
Cette idée inspire des réformes apparaissant dans les cahiers de doléances de 1789, pendant la Révolution. Les ouvriers et les artisans, notamment les cordonniers, les perruquiers et les tailleurs, manifestent pour obtenir des salaires plus élevés. Malgré la répression répétée de l'Ancien Régime, les coalitions d'ouvriers - associations temporaires défendant des droits et des intérêts communs - se multiplient et s'affirment de plus en plus, soutenues par les associations permanentes et la tradition du compagnonnage.
Le décret d'Allarde
Le décret d'Allarde, défendu par le baron Pierre d'Allarde, est voté le 2 mars 1791. Reprenant les idées de l'édit de Turgot de 1776, il souligne que le droit au travail est un droit humain fondamental et abolit les guildes et leurs pratiques restrictives qui avait cours durant l'Ancien Régime. Cela ouvre la voie à des actions législatives ultérieures, notamment la loi Le Chapelier.
Contexte sociale : l'agitation du printemps 1791
La loi Le Chapelier a été promulguée dans un contexte d'agitation sociale généralisée, caractérisée par des révoltes paysannes et des grèves ouvrières. Au printemps 1791, l'agitation ouvrière atteint son paroxysme à Paris, avec des rassemblements réguliers de charpentiers et de forgerons réclamant des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail. Cette période d'agitation accrue démontre le pouvoir croissant et l'assurance des coalitions ouvrières, qui posent un défi important au contrôle du gouvernement révolutionnaire et à ses politiques économiques.
Dispositions clés et implications
Interdiction des associations professionnelles
La loi Le Chapelier complète le décret d'Allarde et a l'ambition de démanteler les anciennes structures économiques afin de promouvoir une économie de marché. La loi Chapelier s'étend même au-delà du démantèlement des corporations puisqu'elle interdit explicitement toute forme d'association professionnelle, qu'elle soit composée d'employeurs ou d'employés. Elle interdit notamment les coalitions de travailleurs et les grèves, s'attaquant ainsi directement aux excès corporatistes de l'Ancien Régime. Ce faisant, la loi vise à favoriser la liberté individuelle et la concurrence économique, conformément aux principes de la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen.
Impact sur les travailleurs et les syndicats
Bien qu'initialement accueillie comme une mesure visant à réduire les tendances monopolistiques des guildes et à promouvoir le développement professionnel, la loi Le Chapelier constitue une négation de la liberté d’association, en particulier des ouvriers. En parallèle des organismes professionnels se reforment dès l’Empire, , comme l’Ordre des avocats ou des médecins ou encore les chambres de commerce et d’industrie.
Au XIX ème siècle, il est devenu évident que la loi entravait considérablement la formation de syndicats et suscitait un mécontentement croissant au sein de la classe ouvrière, ce qui conduit logiquement à des appels à la réforme.
Abolition et héritage
Reconnaissant la nature restrictive de la loi Le Chapelier sur les droits des travailleurs, les députés de la Troisième République l'abolissent finalement le 21 mars 1884. Cette abolition a marqué le début d'une nouvelle ère pour les droits des travailleurs en France, et conduit à l'émergence du mouvement syndicaliste.