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Rite

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Le mot rite vient du latin ritus[1]. Le rite est une action accomplie conformément à des règles et faisant partie d'un cérémonial (exemple : rites de la remise d'une décoration). Il s'agit d'une manière d'agir propre à un groupe social ou à quelqu'un, qui obéit à une règle et qui revêt un caractère invariable ("Ses journées se déroulaient selon un rite immuable").

Le rite individuel consiste en gestes, en paroles ou en attitudes. Il se manifeste collectivement par des chants, des danses ou des cérémonies souvent complexes. Dans certaines sociétés, il s'agit d'une cérémonie magique, à caractère répétitif, ayant pour objet d'orienter une force occulte vers une action déterminée.

Dans certaines sociétés, le rite est indispensable du maintien de l'ordre. Par exemple, dans les pays influencés par l'hindouisme, les brahmanes sont seuls capables de maintenir l'ordre du monde par le rite.

Les apports sociologiques de la théorie du rite

Émile Durkheim lie les rites à la religion. Pour lui, la pensée religieuse intègre les croyances et les rites. Les rites sont des règles de conduite qui prescrivent comment l'homme doit se comporter avec les choses sacrées. Émile Durkheim établit un classement des rites qui organisent les temps sociaux dans leur double rythme, faisant alterner les temps profanes et les temps sacrés.

Les rites sont aussi liés aux cultes. Les cultes dits négatifs s'accompagnent de rites d'évitement (par exemple, l'abstinence sexuelle ou alimentaire) ou de sacrifices. Les cultes positifs sont liés à des rites festifs périodiques. Certains rites sont piaculaires. Ils sont relatifs à une expiation qui inspirent un sentiment d'angoisse. Les rites de deuil appartiennent à cette catégorie. Les sévices qui sont quelquefois pratiqués par ces rites sont considérés comme des moyens de guérir de la maladie.

Lorsqu'un individu ou la société évite un rituel, cela peut être considéré comme un manquement rituel menaçant toute la collectivité.

Les rites ont pour objectif de rattacher le présent et le passé, l'individu à la communauté. Les rites, in fine, sont des pratiques par lesquelles le groupe social se construit et se reconstruit périodiquement.

Chez le sociologue Marcel Mauss, le rite se situe dans l'acte de croire à son effet, à travers des pratiques de symbolisation.

Pour l'anthropologue Mary Douglas, le terme rite est synonyme de symbole. Le rite existe là où se produit du sens. La sociologue ouvre le champ du rituel en y regroupant tout ce qu'elle dénomme des actes symboliques. Le rite est caractérisé par une configuration spatio-temporelle spécifique avec le recours d'objets, par l'intermédiaire de systèmes de comportements et de langage spécifiques, par des signes emblématiques dont le sens codé constitue le rattachement des membres d'un groupe. Le rituel est le fruit d'un apprentissage. Il implique de la continuité de générations en générations. Le rite est une scène de théâtre qui fait apparaître une forme spectaculaire et visuelle. Le rite révèle les acteurs sur ce qu'ils sont et de la façon dont ils participent au groupe et sur ce qu'ils désirent transmettre.

L'ethnologue Arnold van Gennep a étudié les rituels africains. Dans les rites de passage, chaque nouvelle étape du cycle biologique de l'homme est séquencé et ordonné dans un enchaînement d'actes. Un épisode rituel se compose de trois stades : séparation, marge, agrégation. La forme et la durée du premier et du troisième stade varient en fonction de la chose célébrée. Ainsi, les rites de séparation sont plus marqués dans les cérémonies funéraires, ceux d'agrégation le sont davantage pour le mariage. La stade de "marge" est un stade intermédiaire qui représente un stade d'autonomie comme par exemple les fiançailles.

Les rituels funéraires avec leurs protocoles

L'organisation des funérailles a pour but, entre autres, de servir de reconnaissance officielle d'une mort sociale. Le protocole[2] funéraire communique cette réalité à tous, sans que la famille n'ait besoin d'assumer la tâche difficile d’informer elle-même les autres du décès. En retour, la famille reçoit le soutien des proches et du voisinage. Auparavant, le décès était communiqué à la communauté par la cloche d'agonie et la cloche de trépas. On utilisait des placards de décès, c'est à dire, des avis d'inhumation que l'on affichait ou que l'on placardait sur les murs des églises et dans les rues pour aviser les amis et les voisins de l'identité d'une personne décédée et du lieu de l'inhumation.

Les funérailles ont aussi comme objectifs d'alléger le processus de la douleur lors des phases de mise en bière et de fermeture du cercueil. Enlever le corps peu après le décès peut nuire à la capacité de la famille de s’adapter à la perte en voyant une dernière fois leur proche. Les médecins sont rarement à disposition pour fournir aux membres de la famille des informations concrètes et factuelles sur ce qui s’est passé et pourquoi. Ils remplissent le certificat de décès et s'en vont. D'où l'importance de savoir traiter de la psychologie du deuil[3].

Le rituel de la levée du corps[4] a une importance cruciale dans le processus de deuil. C’est la première phase marquant la séparation physique avec le défunt.

Les fleurs jouent un rôle important dans le rite funéraire en fonction des cultures et des religions. Dans le bouddhisme, la fleur de lotus est souvent utilisée comme emblème du rite funéraire. Dans la culture occidentale, des fleurs, symbole de vie, accompagnent le défunt. Quelquefois elles sont déposées dans le cercueil avant la fermeture.

La dernière phase d'adieu s’opère par le rite du convoi funéraire[5].

La terre a une pouvoir symbolique et rituel très fort chez certaines personnes. Lorsque La Fayette rentre des États-Unis en leader héroïque, le 17 juin 1782, il rapporte un peu de la terre américaine de Bunker Hill. Cette terre sera conservée plus d'un demi-siècle afin de recouvrir sa sépulture lors de son enterrement, le 20 mai 1834. La terre, sous forme de poussière ou de sable, en poignées ou par pelletées, sert de lien rituel au corps mort et de notre destinée commune.

Dans les religions chrétiennes, les rites permettent d'accompagner l'âme dans la phase transitoire vers l'autre monde.

Dans de nombreux pays asiatiques, les billets funéraires (ou billets de banque funéraires) sont brûlés lors de rites funéraires afin de fournir aux défunts de l'argent pour l'au-delà. Ces billets sont des imitations de billets de banque, aux montants souvent mirobolants (on trouve des billets de 10 milliards de dollars à Singapour),

Au cours de ces cinquante dernières années, la mort a quitté la sphère privée de la famille pour occuper l'espace hospitalier et des maisons de repos[6]. Il y a de plus en plus de personnes qui décèdent en dehors de leur domicile et pour la plupart, en situation de veuvage[7]. La mort est cachée. Les véhicules funéraires ne sont plus autorisés à emprunter l'allée principale des hôpitaux gériatriques ou des maisons de retraites, ils sont relégués à l'entrée discrète des fournisseurs annexes et au trajet commun de celui des éboueurs[8]. En même temps, la mort est devenue presque invisible aux yeux des citadins du fait de la diminution de la ritualisation "ostentatoire" des obsèques.

Références

  1. La racine indo-européenne est rta : droit, correct (en sont dérivés probablement les mots art en français, right en anglais)
  2. Le protocole est l'ordre prescrit dans une cérémonie. Il définit des rôles à tenir, des actions à mener, selon une signification qui tient compte :
    • d'un environnement
    • d'une histoire
    • d'un évènement
    • d'un message à partager
  3. Le concept de psychologie du deuil fut transféré dans les sciences organisationnelles, où la notion de deuil est largement utilisée pour interpréter les réactions émotionnelles de certains acteurs confrontés à des changements profonds de leur contexte d’action.
  4. La levée du corps se déroule après la mise en bière. Il commence avec la fermeture définitive du cercueil et se poursuit avec le portage et la pose du cercueil dans le corbillard. L’étape de la levée du corps est un moment de recueillement important pour les proches du défunt, qui se réunissent une dernière fois autour de lui. C’est aussi l’occasion pour la famille et les amis de réunir divers objets en son souvenir. Des fleurs mais aussi des lettres (de moins en moins de bijoux) sont habituellement déposés auprès du corps de la personne disparue.
  5. Le rite du convoi funéraire diffère selon la religion du défunt. Ainsi, par exemple, dans la religion juive, la cérémonie est présidée par le rabbin qui lit différents psaumes en présence de la famille. Au cimetière, le cercueil est escorté en marquant des temps d’arrêt. A ce moment précis sonne le « Shofar », en signe de résurrection des morts. Chez les catholiques, le prêtre asperge le défunt d’eau bénite. Puis, après avoir récité et chanté les psaumes traditionnels, la dépouille est conduite en procession au cimetière (le prêtre accompagne de moins en moins la famille au cimetière). Chez les protestants, le pasteur lit un dernier psaume au cimetière alors que le cercueil est directement inhumé. Des poignées de sable sont versées dans la fosse, par les participants, en symbole de "poussière nous sommes, poussière nous deviendrons".
  6. Près de 75% des décès, en France, ont lieu en milieu médical et en maison de retraite
  7. Les pays occidentaux se distinguent par la grande fréquence du veuvage. Il existe environ 4 millions de veufs en France. Il s'agit d'une population âgée (plus de 85 % ont plus de 60 ans), dont le sexe-ratio femmes/hommes (5/1 en moyenne) augmente avec l'âge.
  8. Dans de nombreuses villes, la déchetterie des ordures ménagères se trouve à proximité du cimetière. Quelle entreprise privée oserait un tel paradoxe commercial déshumanisé envers les familles et les amis des défunts ? Est-ce du cynisme ou de l'indifférence de la part de la gestion publique ?


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