Vous pouvez contribuer simplement à Wikibéral. Pour cela, demandez un compte à adminwiki@liberaux.org. N'hésitez pas !


Restitution

De Wikiberal
Aller à la navigation Aller à la recherche

La restitution désigne une action par laquelle on rétablit, on remet une chose en son premier état. Dans le champ de la justice, en cas d'agression qui entraîne un dommage, la victime est en droit de demander une restitution des biens ou de la valeur de ceux-ci à l'agresseur.

La justice doit prévoir la réparation des dommages par une compensation ; celle-ci est établie par la fourniture d'une restitution aux parties lésées par l'agresseur ou les agresseurs et uniquement par lui, par elle ou par eux. Donc, la justice ne peut pas obliger la collectivité de se substituer à l'agresseur pour réparer le dommage subi. La pratique de la justice par restitution donne les résultats opposés au modèle de la punition contemporaine pour laquelle les contribuables sont tenus de payer les frais d'enquête, d'arrestation, de jugement, de condamnation, d'incarcération des délinquants voire d'expulsion hors du territoire.

La restitution est un thème principal dans la fondation de l'éthique de la justice proposée par les auteurs libertariens, notamment chez Randy Barnett, Bruce Benson, Peter Ferrara, Robert Nozick[1], Roger Pilon ou Murray Rothbard[2].

La théorie de la restitution chez Murray Rothbard

Selon Murray Rothbard, l'éthique de la justice est indissociable de la punition. Or, il déplore que l'État ait étendu peu à peu son monopole dans l'exhortation à la punition en oubliant le principe de la restitution. Si, par exemple, un vol se produit, l'agresseur est tenu de restituer au moins le montant ou les objets pris, soit par le retour des ressources, soit par l'asservissement jusqu'à ce que les ressources soient réparées. Pour certains types de délits, la restitution peut exiger davantage. En cas d'agression physique, par exemple, une restitution égale à la perte pécuniaire de la victime est insuffisante et la proportionnalité doit s'appliquer sous une autre forme. Tout d'abord, Murray Rothbard indique que le responsable délictuel doit perdre ses droits dans la même proportion qu'il les a acquis injustement. L'auteur libertarien avance une règle supplémentaire de la restitution qui serait plus que proportionnelle. Ainsi, le criminel devrait payer, selon les critères de Murray Rothbard, le double de la valeur du délit plus les autres coûts spécifiquement établis pour les éléments qui n'ont pas un caractère monétaire (par exemple, la peur, l'angoisse, etc.). De même, dans les cas d'agression physique, Murray Rothbard avance une idée d'une justice assez outrageante à première vue qui serait d'autoriser la victime de battre l'agresseur deux fois plus violemment, ou du moins « plus que la même proportion »[3]. Cependant, la victime serait libre aussi de choisir un acte de restitution moins sévère que la punition physique en parvenant à un accord contractuel de restitution avec l'agresseur.

Dans une conception large, une "discrimination" peut être considérée comme une agression selon les principes libertariens. Mais le demandeur doit être tenu de prouver qu'il subit un dommage pour lui-même, et non pour un un ancêtre décédé depuis longtemps. Bien sûr, la théorie libertarienne accepte le concept de la discrimination privée comme un dommage donnant lieu au droit à la restitution, mais le point doit être clairement articulé par la victime.

Les critiques libertariennes à la théorie de restitution de Murray Rothbard

Au cours de sa thèse, Larry Hall[4] émet des critiques sur la théorie de la restitution chez Murray Rothbard. Le premier problème, indique-t-il, concerne la nature plutôt arbitraire de son « principe de deux dents pour une dent ». De plus, il n'est pas clair quant à l'étendue appropriée de la restitution dans des cas spécifiques. Comme pour la définition de l'invasion physique qui définit le critère de l'agression, les rudiments du critère de proportionnalité manquent de clarté. Toutefois, Larry Hall reconnait que ce flou est compréhensible dans un cadre général. Cela ne constitue pas une lacune majeure du système libertarien de la théorie de la restitution. Car, les éléments cruciaux et incontournables sont préservés, comme le critère de la non nécessité d'intervention de l'État en matière de justice. En effet, la théorie de la restitution dans son caractère individualiste du délit et du châtiment promeut le droit de l'individu à préciser et à qualifier le niveau personnel de son droit au dommage sans que cette justice s'enferme dans une restitution vindicative, arbitraire et sans limite. Larry Hall se pose la question de savoir comment intégrer des tiers impartiaux dans le processus judiciaire. Dans la théorie de la restitution chez Murray Rothbard, les personnes peuvent facilement "prendre la loi en main".

Mais, dans un système de marché libre, de telles activités seraient gérées par ceux qui ont des avantages comparatifs dans ces domaines. Aussi, l'exécuteur de la peine doit être tenu directement responsable s'il envisage d'exagérer la peine ou pire, ou pire s'il se trompe sur l'identité de l'agresseur. Dans ces deux cas, il deviendrait lui-même un délinquant, susceptible de s'engager dans un acte de restitution. Le retrait de tiers comme la force de l'État pour appliquer la peine, peut dissuader certains individus peu courageux, effrayés ou intimidés d'être incapables de punir par eux-mêmes un agresseur. Car le système de restitution chez Murray Rothbard pose comme prémisse que si la victime ne se manifeste, c'est donc qu'aucun droit n'a été violé. Les droits de la victime indulgente ou pacifiste ne seraient pas endommagés. Certes, le système actuel avec la force de l'État n'exclut pas que des personnes timides ne soient pas défendues. Aussi, les autres victimes, selon Murray Rothbard, seraient libres d'engager à leur frais d'autres personnes pour obtenir justice.

Pour sa part, Peter Ferrara (1982) définit la position de Murray Rothbard comme une loi du tallion (lex talionis) par laquelle la victime a le droit de faire au délinquant exactement ce que celui-ci a fait à la victime. Il n'y voit pas d'alibi pour l'intervention de l'État mais il soutient cependant que le principe de la punition peut être supporté par un système de double peine avec une combinaison de restitution et de rétribution, sans que l'État ne soit non plus sollicité pour intervenir dans cet acte de justice.

Notes et références

  1. Robert Nozick, 1974, "Anarchy, State, and Utopia", New York: Basic Books, pp59-63);
  2. Murray Rothbard, 1980, "King on Punishment: A Comment", Journal of Libertarian Studies, Vol 4, Spring, pp167-172
  3. Murray Rothbard, 1982, "The Ethics of Liberty", Atlantic Highlands, NJ: Humanities Press, p88
  4. Larry M. Hall, 1990, "Anarcho-Capitalist Threads in Modern Libertarianism: The Social Thought of Murray Rothbard", PhD dissertation, University of Tennessee

Bibliographie

  • 1978, Roger Pilon, "Criminal Remedies: Restitution, Punishment, or Both?", Ethics, Vol 88, pp348–357


7684-efdur-Justice.png Accédez d'un seul coup d’œil au portail concernant le droit et la justice.


Philosophie.png Accédez d'un seul coup d’œil au portail philosophie et épistémologie du libéralisme.