Hans Kohn

Hans Kohn, né à Prague le 15 septembre 1891 et décédé à Philadelphie le 16 mars 1971 est un philosophe et historien américain d'origine austro-hongroise.

Biographie

Il naît à Prague, alors dans l'Empire austro-hongrois. Il a entamé son chemin académique au Gymnasium (lycée en 1909). Il a étudié la philosophie, les sciences politiques et le droit à la partie allemande de l'université Charles-Ferdinand de Prague où il est diplômé en 1914. Il a poursuivi ses études jusqu'à son doctorat en droit à l'université de Prague, qu'il a obtenu avec succès en 1923. Ces années formatrices ont jeté les bases de ses futures recherches savantes et de son vif intérêt pour les questions historiques et sociopolitiques.

Pendant la période tumultueuse de la Première Guerre mondiale, la vie de Kohn a pris un tournant dramatique. Peu de temps après l'obtention de son diplôme, à la fin de 1914, il fut appelé dans l'infanterie de l'armée austro-hongroise. Après une formation militaire rapide, il est envoyé sur le front de l'Est dans les Carpates, face à l'armée impériale russe. Il est capturé en 1915 et emmené par les Russes dans un camp de prisonniers en Asie centrale (dans l'actuel Turkménistan). Pendant la guerre civile qui a suivi la révolution bolchevique en Russie, en 2017, les légions tchécoslovaques pro-occidentales sont entrées en Asie centrale et il a pu être libéré. Avec eux, il a voyagé plus à l'est (appelé par les Tchèques l'Anabase sibérienne), jusqu'à s'arrêter à Irkoutsk. La situation politique plus paisible lui permet alors de retourner en Europe, en 1920. En 1921, il est à Paris.

Son expérience malheureuse et périlleuse en tant que prisonnier a sans aucun doute façonné ses perspectives sur la politique mondiale et les relations internationales. Son exposition à des cultures et idéologies diverses pendant cette période a enrichi sa compréhension des dynamiques humaines et des subtilités des sociétés sous tension.

Le voyage de Hans Kohn à travers les continents l'a finalement conduit aux États-Unis. En 1933, il a occupé le poste de maître de conférences à la New School for Social Research à New York. Cette position l'a non seulement exposé à l'atmosphère intellectuelle vibrante de la ville, mais a également ouvert la voie à ses futures contributions à l'académie.

En 1934, la maîtrise académique de Kohn a été reconnue avec sa nomination en tant que professeur d'histoire moderne au Smith College à Northampton, dans le Massachusetts. Il va occuper ce poste pendant 7 ans ; de 1941 à 1949, la prestigieuse chaire Clark Parsons en histoire au même établissement, consolidant davantage sa réputation en tant qu'historien et éducateur respecté. En 1949, Hans Kohn est devenu professeur d'histoire moderne et contemporaine au City College of New York, où il a continué à inspirer et à éduquer des générations d'étudiants.

Nationalisme et recherche historique

Les recherches académiques de Hans Kohn tournaient souvent autour du thème du nationalisme. Ses recherches approfondies et son leadership intellectuel ont abouti à plusieurs œuvres notables. Sa publication de 1948, Propheten ihrer Volker, Mill, Michelet, Mazzini, Treitschke, Dostoievski, a exploré la vie et les idéologies de personnalités influentes de diverses nations. Ce travail a mis en lumière sa capacité à analyser l'interaction complexe entre les individus et leur impact sur le paysage sociopolitique plus large.

Dans Das Zwanzigste Jahrhundert, eine Zwischenbilanz der westlichen Welt (1950), Kohn a offert une évaluation globale du monde occidental au XX^e siècle, capturant l'essence de sa trajectoire historique, ses défis et ses réalisations. Son exploration des origines et de l'évolution du nationalisme jusqu'à la Révolution française dans Die Idee des Nationalismus, Ursprung und Geschichte bis zur Französischen Revolution (1950) a démontré sa maîtrise du sujet.

Il était membre de la Société du Mont-Pèlerin.

Travaux

Dans le paysage académique, Hans Kohn se distingue comme un véritable pionnier de l'étude du nationalisme. À une époque où cette idéologie n'était que partiellement explorée, il a entrepris de plonger dans ses profondeurs. Sa détermination à comprendre les racines, les manifestations et les retombées du nationalisme a jeté les bases d'une exploration exhaustive de ce phénomène.

Ses recherches méticuleuses et ses analyses critiques ont abouti à une compréhension nuancée du nationalisme. L'ampleur de son travail a contribué à remodeler le paysage intellectuel, en introduisant un cadre rigoureux pour l'étude de ce concept multifacette. Par ses écrits accomplis, Hans Kohn a fourni aux chercheurs et aux étudiants une précieuse boîte à outils pour démêler les motivations, les aspirations et les tensions sous-jacentes à cette force majeure qui a laissé une empreinte profonde sur l'histoire et la dynamique des sociétés du monde entier.

Ce qui distingue Hans Kohn, c'est sa capacité à rendre accessibles des concepts complexes. Son style d'écriture a éclairé des questions cruciales, comme les liens souvent entremêlés entre nationalisme et religion, les mouvements de libération nationale, et les ramifications du nationalisme dans le contexte des relations internationales. Sa manière de démystifier ces thèmes ardus a permis aux lecteurs de s'engager pleinement dans la réflexion sur ces questions vitales.

L'héritage laissé par Hans Kohn transcende les limites temporelles de son époque. Ses idées toujours pertinentes continuent d'illuminer les débats contemporains sur le nationalisme et ses implications. Sa quête insatiable de la vérité historique et sa volonté de remettre en question les préconceptions ont servi d'inspiration à de nouvelles générations de chercheurs. Ces héritiers intellectuels explorent désormais ce domaine complexe sous des perspectives diverses, enrichissant davantage l'étude du nationalisme.

Ainsi, l'impact d'Hans Kohn s'étend bien au-delà de son rôle initial de pionnier. Sa contribution significative a enraciné la compréhension du nationalisme dans les sciences humaines, apportant des éclairages essentiels sur un thème central de l'histoire et de la société. Hans Kohn demeure une autorité incontestée dans ce domaine, une source d'inspiration intemporelle pour tous ceux qui aspirent à approfondir leur compréhension des forces qui ont façonné le destin des peuples et des nations.

Une exploration en profondeur des complexités du nationalisme à l'Est

L'ouvrage Histoire du Nationalisme à l'Est, écrit en 1929, plonge au cœur des dynamiques complexes du nationalisme dans la région orientale du monde. À travers une série de chapitres riches en détails et en analyses, l'auteur offre une vision globale des évolutions historiques, politiques et culturelles qui ont sculpté les contours du nationalisme dans des contextes variés.

D'emblée, l'auteur établit un cadre global qui a donné naissance à pléthore de formes de nationalisme à l'Est. Les retombées de la Première Guerre mondiale se sont traduites par l'émergence de trois communautés d'intérêt distinctes : l'Europe continentale en mutation, les nations anglo-saxonnes confrontées à l'Orient, et l'énigmatique Empire soviétique. Cette toile de fond fournit la base nécessaire pour une exploration en profondeur dans les chapitres qui suivent.

Les chapitres initiaux du livre plongent dans l'histoire de l'Islam, capturant la renaissance intellectuelle et culturelle qui a animé le contexte islamique. L'auteur décortique également le panislamisme, une idéologie émergente qui s'est propagée dans ce paysage complexe. Ces chapitres mettent en évidence la manière dont la religion a façonné les aspirations nationales et les mouvements de solidarité au sein de la communauté musulmane.

L'attention se tourne ensuite vers l'Inde, où un mouvement de renouveau religieux a émergé. L'influence britannique en Inde est disséquée, soulignant les tensions inhérentes à la quête de l'autonomie nationale face à une domination coloniale persistante. La relation complexe entre le nationalisme indien et la présence britannique est examinée sous toutes ses facettes.

Un chapitre se penche sur les conséquences de la Révolution russe sur les pays orientaux. L'impact de cet événement majeur sur les mouvements nationalistes et les aspirations à l'indépendance dans les régions orientales est minutieusement analysé. Les implications de cette révolution sur les relations internationales viennent également éclairer le tableau.

Les mouvements nationalistes en Égypte, en Turquie et en Arabie sont minutieusement explorés. L'auteur détaille comment ces mouvements ont été façonnés par des facteurs régionaux et internationaux, ainsi que par des luttes intérieures. La montée du nationalisme dans le monde arabe et son impact sur la redéfinition des frontières et des identités font l'objet d'une étude approfondie.

Les chapitres suivants se focalisent sur les transformations en Perse, en Afghanistan et en Inde. Les changements politiques, sociaux et culturels qui ont contribué à la formation des mouvements nationalistes dans ces régions sont décortiqués. L'importance vitale de ces mouvements dans la construction de l'identité nationale est clairement mise en évidence.

Enfin, la conclusion synthétise les développements et les idées explorés tout au long du livre. Elle incite les lecteurs à méditer sur l'évolution du nationalisme dans la région orientale et sur son impact sur les relations internationales, la politique et la société. Elle ouvre également la voie à une réflexion plus ample sur les enjeux du nationalisme dans le panorama mondial.

Informations complémentaires

Publications

• 1929, "A History of Nationalism in the East"

• 1932,
  • a. "Nationalism and Imperialism in the Hither East"
  • b. "Nationalism in the Soviet Union",

• 1936, "Western Civilization in the Near East"

• 1938, "Force Or Reason: Issues of the Twentieth Century"

• 1944, "The Idea of Nationalism: A Study in Its Origins and Background",

• 1948, "Propheten ihrer Volker, Mill, Michelet, Mazzini, Treitschke, Dostoievski", ("Prophètes de leur peuple, Mill, Michelet, Mazzini, Treitschke, Dostoievski"), Bern

• 1950,
  • a. "Das Zwanzigste Jahrhundert, eine Zwischenbilanz der westlichen Welt", ("The Twentieth Century: A Midway Account of the Western World"), ("Le XXe siècle, un bilan provisoire du monde occidental"), Zürich
  • b. "Die Idee des Nationalismus, Ursprung und Geschichte bis zur Franzdsischen Revolution", ("L'idée de nationalisme, origine et histoire jusqu'à la Révolution française"), Heidelberg

• 1953,
  • a. "Pan-Slavism: Its History and Ideology",
  • b. "African Nationalism in the Twentieth Century",

• 1955, "Der Schweizerische Nationalgedanke", ("L'idée nationale suisse"), Zürich

• 1956, "Nationalism and Liberty: The Swiss Example", London: George Allen and Unwin

• 1957,
  • a. "American Nationalism: An Interpretative Essay", New York: Macmillan
  • b. "Is the Liberal West in Decline?", Pall Mall Press

• 1958, "Zion and the Jewish National Idea", Menorah

• 1959, "Heinrich Heine: The Man and the Myth", New York: Leo Baeck Institute

• 1960, "The Mind of Germany", Charles Scribner's Sons
  • Nouvelle édition en 1965, Harper Torchbooks

• 1961,
  • a. "The Habsburg Empire, 1804–1918",
  • b. "The Decline and Fall of the Free World?", In: Albert Hunold, dir., "Freedom and Serfdom. An Anthology of Western Thought", Dordrecht: D. Reidel Publishing Company, pp49-58

• 1964, "Living in a World Revolution: My Encounters with History", New York: Simon and Schuster

• 1965,
  • a. "Nationalism: Its Meaning & History"
    • Nouvelle édition révisée en 1982
  • b. "A History of the European Century, vol 1: Absolutism and Democracy 1814–1852", Princeton, New Jersey: D. Van Nostrand

• 1967, "Prelude to Nation-States: The French and German Experiences, 1789–1815", Princeton, New Jersey: D. Van Nostrand

Littérature secondaire

• 1976, Ken Wolf, "Hans Kohn's liberal nationalism: the historian as prophet", Journal of the History of Ideas, Vol 37, n°4, pp651–672

• 2006,
  • Andre Liebich, "Searching for the perfect nation: the itinerary of Hans Kohn (1891–1971)", Nations and Nationalism, Vol 12, n°4, pp579–596
  • Christian Wiese, "The Janus Face of Nationalism: The Ambivalence of Zionist Identity in Robert Weltsch and Hans Kohn", The Leo Baeck Institute Year Book, Vol 51, n°1, January, pp103–130

• 2010,
  • Adi Gordon, "The Ideological Convert and the “Mythology of Coherence”: The Contradictory Hans Kohn and his Multiple Metamorphoses", The Leo Baeck Institute Year Book, Vol 55, n°1, pp273–293
  • Zohar Maor, "Hans Kohn and the Dialectics of Colonialism: Insights on Nationalism and Colonialism from Within", The Leo Baeck Institute Year Book, Vol 55, n°1, pp255–271
  • Noam Pianko, "Did Kohn Believe in the “Kohn Dichotomy”? Reconsidering Kohn's Journey from The Political Idea of Judaism to the Idea of Nationalism", The Leo Baeck Institute Year Book, Vol 55, n°1, pp295–311
  • Christian Wiese, "Introduction: The Legacy of Hans Kohn", The Leo Baeck Institute Year Book, Vol 55, n°1, pp251–254

• 2011, Adi Gordon, "The Need for West: Hans Kohn and the North Atlantic Community", Journal of Contemporary History, Vol 46, n+1, pp33–57

• 2017, Adi Gordon, "Towards Nationalism's End: An Intellectual Biography of Hans Kohn", Brandeis

• 2018, Zohar Maor, "Kohn’s Buber, Buber’s Kohn: Hans Kohn's Biography of Martin Buber Revisited", The Leo Baeck Institute Year Book, Vol 63, n°1, pp255–272

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