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Critères ESG

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Les Critères ESG (Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance) désignent des critères extra-financiers qui sont utilisés en finance pour évaluer les performances des entreprises en matière de durabilité et de responsabilité sociale. Gagnant en popularité depuis les années 2010, ils sont cependant régulièrement critiqués sur de nombreux aspects.

Définition des critères ESG : des critères qui restent flous

La subjectivité de ces critères est la limite la plus communément mise en avant : les critères ESG sont souvent basés sur des normes et des évaluations subjectives, ce qui rend difficile la comparaison entre les entreprises ou même la mesure objective dans une entreprise. Il n'existe pas de normes universellement acceptées, ce qui peut entraîner une confusion et un manque de transparence. Trois chercheurs du MIT en 2019 soulignait ainsi les divergences très fortes existant dans les critères des principales agences de notation, résultant en des notes variant fortement selon l'agence, pour une même entreprise[1], au point qu'il était justifié selon ces chercheurs de parler « d’agrégats de confusion » pour désigner les notes ESG.

Conséquence de cette confusion, ces critères sont très souvent détournés, et une opportunité de manipulation ou de « greenwashing » : les entreprises utilisent des mesures cosmétiques pour se présenter comme durables et responsables sans réellement adopter des pratiques significatives. Cela peut entraîner une désinformation des investisseurs et du public. De nombreux scandales ont ainsi souligné ces limites, par exemple les révélations sur les pratiques de la société de maisons de retraite Orpea, pourtant notée excellemment bien sur ses critères ESG. Michelle van Weeren, professeur à l'Université Paris Dauphine – PSL, écrit ainsi en 2022 que « l'affaire Orpea montre une fois de plus que les notations ESG, pourtant censées refléter la performance environnementale, sociale et de gouvernance des entreprises, n'arrivent pas à communiquer une information fiable qui permette d'identifier d'éventuels problèmes dans ces domaines »[2]. Cet exemple est loin d'être une exception, comme le notait l'enseignante : « BP était bien notée en termes de responsabilité sociale juste avant l'explosion de sa plate-forme pétrolière Deepwater Horizon en 2010, Volkswagen aussi avant que le scandale « Dieselgate » n'éclate en 2015, et en 2019, La Poste s'était vue décerner le meilleur score jamais attribué par l'agence de notation ESG Vigeo-Eiris, la même année où un reportage d'Envoyé Spécial dénonçait une vague de suicides ».

Quel impact des critères ESG sur la performance financière ?

Au fur et à mesure que les critères ESG ont gagné en popularité, en particulier chez les investisseurs particuliers, leurs limites comme outil de prédiction de la performance financière se sont révélés plus clair. La déconnexion de ces indicateurs avec la performance financière est largement pointée, par exemple avec la sous-performance financière chronique de la société Danone, jugée pourtant best in class sur les critères ESG : l'orientation quasi-exclusive de l'entreprise sur ces sujets de société ou moraux au lieu de la performance opérationnelle avait résulté avec les années en une rentabilité inférieure de plusieurs points à ses concurrents et des investissements faibles, par manque de rentabilité.

Par ailleurs, comme le souligne l'investisseur Warren Buffett, ces critères constituent bien souvent une source de distraction pour l'entreprise, venant nuire à sa performance par le temps élevé qu'ils nécessitent. Il réfute l'utilisation de l'entreprise comme vecteur politique ou de changement social et se refuse à tout exercice de ce genre au sein de son portefeuille d'entreprises, ce qui lui a valu des critiques à gauche[3] et le rapproche davantage de la vision de Milton Friedman de l'entreprise.

Enfin, comme toute régulation, imposée par l'état (indirectement dans ce cas avec des obligations de pourcentage minimum de fonds ISR dans les assurance-vie, PEE, etc.), cette surcouche administrative bénéficie aux grandes entreprises, qui sont les mieux outillées pour produire ce genre de reporting, et pénalise les plus petits acteurs qui n'ont pas forcément les moyens. Les critères ESG risquent ainsi d'accentuer la concentration de l'économie au profit des grandes entreprises,

En 2023, Larry Fink, à la tête du plus gros gestionnaire de fonds du monde (Blackrock), a indiqué que son fonds ne ferait plus explicitement référence à l'ESG qu'il considérait comme « mal utilisé par l’extrême droite et l’extrême gauche »[4]. Un cartel d'assureurs refusant d'assurer les énergies fossiles s'est par ailleurs désintégré en juin 2023, sur fonds d'enjeux politiques et de craintes de pertes importantes de revenus en se passant des revenus tirés de ces secteurs[5]. Ces deux exemples illustrent le coût (généralement coût d'opportunité) que les critères ESG peuvent induire pour les investisseurs.

Quel avis avoir sur l'impact des critères ESG sur les marchés boursiers ?

L'impact des critères ESG sur les marchés boursiers est réel, en particulier en fléchant, par la réglementation, de manière obligatoire des flux importants d'investissements vers un petit nombre de valeurs boursières. Ce phénomène est en particulier renforcé par le fait que les investisseurs achètent de manière indiscriminée, motivée plus par des considérations morales ou environnementales que financières, résultant en des bulles spéculatives néfastes. En 2021 en Europe, la Banque des Règlements Internationaux (BRI) a ainsi alerté sur ce risque réel[6], qui s'est rapidement matérialisé avec un effondrement des valeurs dites « vertes », poussant le journal économique Les Échos à parler d'« année noire » pour les fonds verts en 2022[7].

Quelle est la finalité d'une entreprise

Ces différentes objections soulèvent la question de la finalité d'une entreprise. Il est opportun de relire les écrits du Prix Nobel d'économie Milton Friedman, qui rappelait que la finalité d'une entreprise est de faire du profit[8]. Une entreprise, et ses dirigeants plus spécifiquement, répondent à ses actionnaires, i.e. propriétaires. Insérer des critères moraux dans cette relation économique est rarement fructueux, et les nombreuses limites des critères ESG le soulignent.

Notes et références

Liens externes


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