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Épicurisme

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L'Épicurisme, connu sous le nom d'école du Jardin, est la doctrine philosophique enseignée par Épicure et ses disciples. Elle remonte à l'Antiquité grecque du IIIe siècle avant J.-C. et a étendu son influence jusqu'à l'Égypte et Rome.

En concurrence avec l'autre grande pensée de l'époque, le stoïcisme, sa philosophie est principalement axée sur la recherche du bonheur, de la sagesse, le refus du hasard et de la fatalité. Pour les épicuriens, les dieux existent mais ne s'occupent absolument pas des Hommes, l'important n'est pas d'offrir des sacrifices mais de cultiver la sagesse. L'ataraxie, ou l'esprit libéré des craintes et troubles, est un état de bonheur stable, ne s'acquiert que grâce à la connaissance et contrôle des passions. L'épicurisme est considéré comme une doctrine matérialiste et atomiste, car pour Épicure l'âme est constituée d'atomes.

Son héritage a été revendiqué par le matérialisme moderne, notamment Karl Marx, mais est aussi considéré comme une des sources du libéralisme.

Doctrine philosophique

L'essentiel de ce que nous connaissons des écrits d’Épicure sont trois lettres transmises par Diogène Laërce, Lettre à Hérodote, Lettre à Pythoclès et Lettre à Ménécée. Dans Lettre à Hérodote, Épicure s'inspire de la théorie des atomes de Démocrite ; toutefois il trouva inacceptable l'idée de ce dernier selon lequel toutes choses dans le monde se produisent « par nécessité ». Épicure conteste en effet l'idée que tout soit soumis aux lois de la nécessité, pour lui le mouvement libre et autonome des atomes doit exister de fait.

L'hédonisme épicurien a été inspiré par l’École cyrénaïque et notamment par un disciple de Socrate, Aristippe de Cyrène. Selon la doctrine cyrénaïque, les deux affects, plaisir et douleur, sont compris comme deux mouvements, l'un lisse et doux et l'autre rugueux.

La pensée épicurienne est aussi illustrée dans le poème du philosophe latin Lucrèce De rerum natura, traduit en français par De la nature des choses. Lucrèce décrit ainsi l'épicurisme : « Vivre selon la nature, jouir dans la mesure de ses forces, rechercher avant tout ce calme, ce bien-être que procure la paix du cœur, unie aux lumières de l’intelligence, telle était en substance la doctrine d’Épicure. On sait combien sa morale a été depuis indignement méconnue et honteusement défigurée ».

La liberté épicurienne

« La théorie de la liberté d’Épicure mérite attention non pas seulement à cause de sa place dans la philosophie hellénistique, mais à cause de la façon dont elle a formé notre façon de concevoir aujourd’hui la question du libre arbitre »[1].

La doctrine épicurienne soutient l'idée que la liberté et le déterminisme sont incompatibles. En effet, Épicure fût un des premiers philosophes à réfléchir sur la question du libre arbitre. Contrairement à certaines conceptions contemporaines, l'épicurisme ne fonde pas la liberté selon une approche politique, elle est plutôt attachée à l'idée de maîtrise de soi-même grâce à une connaissance juste de soi-même et des choses, elle se concrétise avant tout dans la vie morale et la recherche de sagesse.

Citations

  • Si vous rejetez tous les sens, vous n’aurez aucun moyen de discerner la vérité d’avec le mensonge. (Épicure)
  • Chaque plaisir et chaque douleur doivent être appréciés par une comparaison des avantages et des inconvénients à attendre. (Épicure, Lettre à Ménécée)
  • Le fruit le plus important de la suffisance à soi est la liberté. (Épicure, Sentence Vaticane 77)
  • Les écoles théologiques, mystiques et autres fondées sur une éthique hétéronome n'ont pas ébranlé le fondement essentiel de l'épicurisme, car elles n'ont pu lui opposer d'autre objection que d'avoir négligé les plaisirs dits « plus élevés » et « plus nobles ». (Ludwig von Mises, L'Action humaine, Chapitre I - L'homme en action)
  • C’est une philosophie qui vise l’atteinte de la tranquillité d’esprit (et pas la jouissance effrénée, comme on le croit souvent à tort) dans un monde rationnel que l’on cherche à comprendre de la façon la plus scientifique possible. Épicure a popularisé la thèse atomiste, c’est-à-dire selon laquelle tout l’univers est fait d’atomes agencés de diverses façons. Selon lui, il n’y a pas de réalité surnaturelle et les dieux, s’ils existent, ne se préoccupent pas des Hommes. Il explique également que l’univers et la vie évoluent d’une façon qui ressemble beaucoup à la théorie darwinienne. C’est une philosophie extrêmement moderne, encore tout à fait pertinente aujourd’hui. Et en plus, l’épicurisme est d’une certaine façon la première philosophie libertarienne de l’histoire. La société juste est fondée sur une entente de n’agresser personne et de collaborer avec tous pour viser le bonheur. L’État ne joue aucun rôle dans le monde idéal d’Épicure. Tout revient aux désirs et à l’action individuels. L’épicurisme a influencé de nombreux auteurs libéraux classiques, et devrait figurer à mon avis comme l’une des philosophies les plus importantes dans le développement de la civilisation occidentale, même si elle est aujourd’hui considérée comme plutôt marginale. (Martin Masse, [1])
  • Bizarrement, l’épicurisme rejoint le stoïcisme : dans les deux systèmes, on propose de se soustraire aux impulsions et à l’irrationnel, en organisant une sorte d’autosuffisance. Les stoïciens cherchent l’« autarcie », notion centrale à leurs yeux. Les épicuriens préfèrent parler d’« ataraxie » : une absence totale de trouble intérieur – qui peut parfois faire penser aux exercices bouddhiques. Quand l’âme se maîtrise et méprise les contingences, elle atteint une félicité et un calme qui donnent le vrai bonheur, le seul durable. Car une volupté donnera sans doute un moment de joie, mais elle sera passagère et son manque recréera une souffrance. Il faut donc éviter ces « plaisirs négatifs » et éphémères, pour privilégier l’absence de douleur. On le voit, il s’agit d’une véritable discipline de vie, afin d’atteindre à une inaltérable quiétude qui, selon une maxime d’Épicure, « rend semblables aux dieux de l’Olympe ». (Xavier Darcos, Dictionnaire amoureux de la Rome antique, 2011)
  • Épicure enseigne qu’il faut enfreindre les lois et se moquer de l’opinion publique, tant qu’on peut le faire impunément. Il raille ceux qui prétendent modifier l’organisation de la cité, « ces nouveaux Lycurgues, ces nouveaux Solons ». Plutarque, brave et respectueux platonicien, s’étrangle d’indignation en rapportant de pareils propos. Cher Plutarque ! « Lorsque les épicuriens écrivent sur le gouvernement, ce n’est que pour demander sa suppression », se lamente-t-il. Et de donner comme exemple la façon dont Épicure se moque des conquêtes d’Épaminondas, une gloire nationale. « Quel besoin avait Epaminondas d’envahir le Péloponnèse ? Pourquoi ne restait-il pas tranquillement chez lui, à soigner son ventre ? » Ces paradoxes scandalisent Plutarque, et ils en ont au cours des siècles scandalisé bien d’autres, qui ont fait à Épicure une méchante réputation. Mais aujourd’hui ce sont les idées enthousiastes d’un Platon ou d’un Plutarque sur l’État, sur la politique, sur les lois, sur les conquêtes militaires, qui nous semblent caduques ; et c’est la pessimiste lucidité d’Épicure qui nous paraît au contraire n’avoir rien perdu de sa justesse, et de sa force. (Gabriel Matzneff, Le taureau de Phalaris, 1994)

Références

  1. Tim O'Keefe, Epicurus on Freedom, 2005

Liens externes


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