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Main invisible
La main invisible est une expression due à l'économiste écossais Adam Smith, employée dans son ouvrage le plus connu, Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations.
Explications de la formule
Il n'y a rien de magique dans cette expression : elle signifie qu'en œuvrant pour son propre intérêt, l'individu œuvre aussi pour celui de la société. Le boulanger ne cuit pas son pain par bonté d'âme pour ses clients, mais en vue d'un profit personnel - ce faisant, il permet à ses clients de se nourrir. La recherche de l'intérêt individuel est le plus sûr moyen d'accroître la richesse des nations.
Philippe Simonnot, dans son ouvrage 39 leçons d'économie contemporaine, souligne que Smith n'emploie l'expression « main invisible », appelée à devenir célèbre, qu'une seule fois dans La Richesse des nations, « au détour d'une phrase, presque par inadvertance » :
« Ce n'est que dans la vue d'un profit qu'un homme emploie son capital. Il tâchera toujours d'employer son capital dans le genre d'activité dont le produit lui permettra d'espérer gagner le plus d'argent. (...) A la vérité, son intention en général n'est pas en cela de servir l'intérêt public, et il ne sait même pas jusqu'à quel point il peut être utile à la société. En préférant le succès de l'industrie nationale à celui de l'industrie étrangère, il ne pense qu'à se donner personnellement une plus grande sûreté ; et en dirigeant cette industrie de manière que son produit ait le plus de valeur possible, il ne pense qu'à son propre gain ; en cela, il est conduit par une main invisible, à remplir une fin qui n'entre nullement dans ses intentions ; et ce n'est pas toujours ce qu'il y a de plus mal pour la société, que cette fin n'entre pour rien dans ses intentions. Tout en ne cherchant que son intérêt personnel, il travaille souvent d'une manière bien plus efficace pour l'intérêt de la société, que s'il avait réellement pour but d'y travailler. »
— Adam Smith, La Richesse des Nations
Philippe Simonnot souligne l'aspect révolutionnaire pour l'époque de cette formule : la métaphore de la main invisible, opposée à la « main trop visible » des princes et des gouvernants, signifie que la société est tout à fait capable de se conduire toute seule au bien commun. Déjà Bernard Mandeville exprimait une idée semblable dans sa Fable des abeilles (publiée en 1705) : la ruche n'est prospère que tant que les abeilles restent animées par l'amour des biens matériels, plutôt que par la vertu ou la considération d'un prétendu intérêt général. Friedrich Hayek reprendra l'idée de main invisible sous la forme de l'ordre spontané. Frédéric Bastiat parlait d'Harmonies économiques : « tous les intérêts légitimes sont harmoniques ».
La métaphore de la main invisible exprime simplement le fait évident selon lequel, grâce à la division du travail, chacun dépend du travail des autres, et que le bien général qui en découle n'est pas l'objet conscient mais plutôt le résultat « automatique » des volontés particulières. Il n'y a pas besoin, comme le voudraient les étatistes et les interventionnistes, de restreindre les libertés par une planification autoritaire ou par des ordres venus d'en-haut.
Un paradoxe : La main invisible comme étant un outil de la connaissance économique et humaine
Il convient, alors, de préciser que, dès lors que Adam Smith fait état de l'existence de la main invisible, cela signifie, précisément, qu'il faut en étudier les principes, les aspects méthodologiques et les conséquences en terme de connaissance. On pourrait, alors, dire, que, en vertu de la fonction même du langage, avant que l'on ne parlât de cette main invisible, celle-ci l'était de fait, puisque les interactions entre les acteurs de la vie économique n'étaient que " spontanées " ou du moins intuitives. En effet, Adam Smith, en constatant l'existence de la main invisible, semble vouloir exprimer le fait aussi que quelque chose, initialement singulier ou " mystérieux " dirige l'économie, la société, les structures, et les individus, sans que pour autant que l'on ait conscience ou connaissance de ce " quelque chose ". Dès lors que l'existence de cette main invisible est envisagée, voire, avérée, la dimension ou du moins l'aspect de la connaissance de cette notion, implique ce paradoxe, puisque le fonctionnement de l'économie et la sociéte seront alors révélés par des lois de plus en plus précises, par des études de plus en plus complexes dans les domaines économiques et techniques ( les acteurs, les projets, les processs de production ) et par des études d'évolution ( ou de variations ) d'impacts, de comportement et d'attitudes, en relation par rapport à ce qui précède, et en vue de répondre à des demandes de plus en plus précises et personnalisées de ce(s) marché(s).
Il a été dit que la main invisible ( en raison du fait de la spécialisation du travail et de la complexification des projets économiques, industriels, financiers et humains ) conduisait à une interdépendance entre les divers acteurs économiques, financiers, industriels et humains. En outre, cette main invisible implique donc que le bien général qui en découle n'est pas l'objet conscient mais plutôt le résultat « automatique » des volontés particulières. Il n'y a pas besoin, comme le voudraient les étatistes et les interventionnistes, de restreindre les libertés par une planification autoritaire ou par des ordres venus d'en-haut.
Or, partant ce qui précède, la connaissance des projets et des process économiques de plus en plus complexes, au sens large, s'établit par elle-même, puisque les intentions des acteurs de la vie économique sont de plus en plus connues. Il faut entendre que, dès lors que, des études économiques sont publiées, dans le domaine, ici, de l'exemple la fabrication du pain et de sa commercialisation, les mécanismes de la main invisible sont, alors, analysés, et ce, en vertu des lois économiques, comme, notamment, la Loi de l'offre et de la demande. De ce fait, l'aspect lié à la connaissance des intentions de ces acteurs, dans le contexte de la main invisible, devient très important. Ce qui est suceptible de créer des méthodologies évolutives et dynamiques. Autrement dit, on pourrait dire de cette façon : " Je commence à avoir des connaissances sur les acteurs économiques, d'une part, et sur les projets économiques, d'autre part, dans des secteurs bien particuliers de la vie économique. Mais, j'utiliserai cette connaissance, tôt ou tard, d'une certaine façon et donc ces acteurs pourront, alors, le savoir, à l'avenir, puisque, dans des circonstances bien précises, je m'adresserai à eux. Ce qui modifiera aussi la connaissance qu'ils se font du marché et ce qui entraînera de nouvelles réalisations suceptibles de répondre aux demande de ce marché ".
Autrement dit, la connaissance des mécanismes inhérents à cette main invisible, impliquera forcément des évolutions et un perfectionnement de méthodologie et desdits projets et process économiques, et surtout, un accroissement de cette connaissance, en terme d'interaction et de réaction mutuelles de plus en plus complexes entre lesdits acteurs. Ce qui impliquera, alors, des études au sujet des évolutions des attitudes et des comportements des acteurs, dans la perspective de ces projets économiques, devenus, alors de plus en plus complexes et dont la connaissance est elle-même de plus en plus répandue.
Citations
- « On peut et il faut réellement dire que le système de l’économie marche « tout seul ». Il en est ainsi parce que les agents adaptent leurs actes les uns aux autres, d’un bout à l’autre de l’océan de la grande société, et non pas aux décisions d’un agent planificateur central qui coordonnerait leurs actions. La coordination n’est pas réalisée centralement et par instructions hiérarchiques. Elle ne l’est pas non plus par le « conte de fées » d’une quelconque « harmonie préétablie », tant raillée par Marx et les marxistes. Elle l’est par les libres actions et décisions des agents, dès lors que ces actions sont guidées par le double système de communication du droit et des prix. Le système marche donc bien « tout seul ». Les pièces de l’échiquier se meuvent sans l’action visible d’une main visible, mais par la main invisible d’une information qui, bien que codée, suffit pour que l’acteur sache ce qu’il doit faire et ne pas faire s’il veut rester coordonné avec les autres agents. » (Philippe Nemo)
- « Et ma main invisible, tu la veux dans ta gueule? » (un blogueur, [1]) (humour)
Bibliographie
- 1971, Alec Macfie, ‘‘The Invisible Hand of Jupiter.’’ J. Hist. Ideas 32 (October–December): 595–99
- 1978, E. Ulmann-Margalit, Invisible Hand Explanations, Synthèse, vol 39, pp263-291
- 1979, Joseph Cropsey, ‘‘The Invisible Hand: Moral and Political Considerations.’’, In: Adam Smith and Modern Political Economy: Bicentennial Essays on the Wealth of Nations, Gerald O'Driscoll, Jr. Dir., Ames: Iowa State Univ. Press
- 1987, Bruna Ingrao et Giorgio Israel, La Mano Invisibile, Roma : G. Laterza & Figli
- Traduction en anglais en 1990 par Ian McGilvray, The Invisible Hand. Economic equilibrium in the history of science, Cambridge : MIT Press
- 1989,
- John Eatwell, Murray Milgate et Peter Newman, Dir., The Invisible Hand: The New Palgrave. London: Macmillan
- Joseph Persky, ‘‘Adam Smith’s Invisible Hands.’’ J. Econ. Perspectives 3 (Fall): 195–201
- 1993,
- Jerry Evensky, ‘‘Ethics and the Invisible Hand.’’ J. Econ. Perspectives 7, Spring, pp197–205
- Nils Karlson, "The State of State: Invisible Hands in Politics and Civil Society",
- Nouvelle édition en 2002, New Brunswick, N.J.: Transaction
- 1994, Leda Cosmides et John Tooby, ‘‘Better than Rational: Evolutionary Psychology and the Invisible Hand.’’ A.E.R. Papers and Proc. 84, May, pp327–332
- 1997, David L. Hull, What’s Wrong with Invisible-Hand Explanations?, Philosophy of Science, Vol. 64 (December Supplement, Part II) pp. S117-S126
Voir aussi
Liens externes
- (fr)Main invisible sur Wikipédia
- (fr)Le chaos et la main invisible
- (fr)Le génie scientifique de la main invisible contre l'incompétence du philosophe, par Sylvain Poirier
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