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Financement des syndicats

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Le financement des syndicats de salariés en France est une question récurrente dans le syndicalisme français en raison de l'opacité qui prévaut sur les comptes des organisations. Une réforme de ce financement a été envisagée à de nombreuses reprises mais n'a jamais débouché.

Historique

Une absence d'obligation de publication de comptes

La Loi Waldeck-Rousseau, du nom du ministre de l'intérieur libéral Pierre Waldeck-Rousseau qui la fit voter, est la loi française votée le 21 mars 1884 qui autorise les syndicats en France. Elle est la première à autoriser les syndicats en France, en abrogeant la Loi Le Chapelier. Ce texte visant tous les groupements professionnels et non les seuls syndicats de salariés n'impose aucune obligation de publication de comptes[1].

L'historien Jacques Marseille rapporte qu'en juin 1936, Alfred Lambert-Ribot, délégué général de l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM), rencontra grâce à Léon Blum les représentants des syndicats. De ces rencontres découla un « modèle où l'État, le patronat de la grande entreprise industrielle et le syndicalisme alors ouvrier s'entendirent pour « fluidifier » au mieux le dialogue social tout en jouant, pour la galerie, le spectacle de l'accord arraché »[2].

Cet état de fait n'a pas été modifié depuis malgré des critiques nombreuses;

Une réglementation critiquée

La situation actuelle du financement des syndicats a été régulièrement critiquée par plusieurs rapports ou organisations, en raison des dérives qu'elle est susceptible d'entrainer. Le rapport Hadas-Lebel[3] présenté au premier ministre par le conseiller d’État Raphaël Hadas-Lebel en mai 2006 regrette une situation opaque qui « tranche avec celle constatée à l'étranger » et qu'il attribue à:

  • L'absence d'obligation de publication de comptes ;
  • l'émiettement des subventions publiques et parapubliques qui empêche une évaluation de l'utilisation ;
  • la complexité des structures syndicales.

Les ressources actuelles des syndicats

Malgré l'absence de comptes publiés officiellement, plusieurs enquêtes ou rapports permettent d'appréhender le financement actuel des syndicats, qualifié d' « opaque et complexe » par le journal La Croix[4]. Le rapport Hadas-Lebel parle lui de « grande opacité »[5].

Cotisations

Les cotisations des adhérents représentent une part très faible du financement des syndicats, liée à leur faible nombre d'adhérents (Moins de 10% de la population active est syndiquée). On estime à un peu plus de 20% la part de ces cotisations dans les ressources des syndicats contre environ 80% en Europe du Nord. Les centrales syndicales belges perçoivent à elles seules deux fois plus par les cotisations que les organisations françaises (400M€ contre 190M€)[2].

Taux de syndicalisation et montant des cotisations[6]
Pays Taux de syndicalisation montant des cotisations
Allemagne 29% 1.300 M€
Belgique 65% 400 M€
France 8% 190 M€
Grande-Bretagne 29% 1.000 M€
Italie 25/50% 1.100 M€
Suède 83% 900 M€



Cotisations reçues en 2003 par syndicat selon le rapport Hadas-Lebel
Syndicat Cotisations Part dans le budget de la confédération
CGT 75M€ 34%
FO 35M€ 57%
CFDT 69M€ 50%
CFTC 12M€ 20%
CGC n.d. 40%

Subventions

Les subventions publiques étaient estimées en 2000 à « au moins 600M de francs »[7]. Ces subventions passent par la formation syndicale qui en 2000 représentait 213 millions de francs (32,47 millions d'euros)[8]. Une réduction fiscale est par ailleurs accordée aux adhérents des syndicats depuis 1989. Cette réduction a été augmentée de 40% en 2000. Le financement public peut également passer par les collectivités locales à travers la mise à disposition gracieuse de locaux ou par des subventions directes.

Les entreprises comptent également parmi les premiers pourvoyeurs de ressources des syndicats, officiellement ou sous le manteau. Axa a ainsi instauré en 1990 un «bon de financement syndical» que chaque salarié peut donner au syndicat de son choix[9]. Le groupe Casino, La Poste ou France Télécom distribuent également des subventions directes[7].

A ces montants s'ajoutent les sommes versées au titre de la gestion des organismes paritaires (Sécurité sociale, Unédic) ainsi qu'une part prise sur les fonds récoltés pour la formation professionnelle (40 millions € par an, répartis également entre patronat et syndicats)[10].

Décharges syndicales

Le décret n° 82-447 du 28 mai 1982[11] a organisé l'exercice du droit syndical dans la fonction publique; il accorde ainsi aux organisations syndicales des « décharges syndicales ». Les syndicalistes concernés ne sont plus tenus d'occuper leur poste et peuvent travailler pour leur syndicat, tout en percevant leur salaire. Les décharges sont accordées en fonction des critères de représentativité de chacune des organisations syndicales.

Selon un rapport d'information du Sénat, en 1998, 7.000 personnes étaient ainsi déchargées au ministère de l'éducation nationale, partiellement ou totalement. Cependant, selon les auteurs du rapport, « il semble que la pratique en matière de décharges syndicales, se développe au-delà de ce qui est autorisé »[12]. Pour la Police Nationale, 1 600 agents sont totalement déchargés, soit plus d’un policier sur 100 selon Valeurs Actuelles[13].

Les syndicalistes peuvent également bénéficier d'« autorisations spéciales d'absence » pour participer à des congrès syndicaux, dans la limite de 10 ou 20 jours par an[14]. En 1998, ces autorisations d'absence représentaient 103.688 journées de travail[12].

Ces décharges existent également dans une moindre mesure dans les entreprises privées.

Financements occultes

Financement patronal occulte

Certains financements restent eux secrets; L'UIMM a été accusée en octobre 2007 d'avoir retiré des sommes s'élevant entre 18 et 20M€ en liquide de 2000 à 2006 pour, entre autres, le financement des syndicats. Yvon Gattaz, ancien patron du CNPF (ancêtre du Medef) a confirmé ces accusations, déclarant à propos des retraits: « C'est le financement des syndicats. [..] Ce sont les entreprises qui finançaient des caisses destinées aux syndicats »[15]. Selon ses propos tenus sur France Inter, ce mode de financement des syndicats par le patronat est vieux comme la loi Waldeck-Rousseau. Dans le cas de l'UIMM, l'Epim, la caisse destinée à « mettre de l'huile dans les rouages et à prévenir les grèves », aurait été créée en 1947 puis recréée en 1972 et représenterait un montant de 500 à 600 M€. Son utilisation à des fins de financement de syndicats n'aurait cependant été qu'une des finalités de la caisse qui servait également d'assurance pour couvrir les coûts des grèves subies par les entreprises cotisantes[16]. Cette dernière est expressément autorisée par la loi Waldeck Rousseau: « Les syndicats professionnels de patrons ou d'ouvriers pourront, sans autorisation[..], constituer des caisses spéciales de secours mutuel »[1].

Autres financements occultes

Certains syndicats sont également accusés d'avoir eu recours à des financements occultes, en particulier en utilisant les fonds de comité d'entreprise, en particulier la CGT avec le comité d'entreprise d'EDF. Au début des années 2000, cette polémique a pris un tour judiciaire, d'une part avec la révocation du Directeur Général de la CCAS, qui avait évoqué des irrégularités lourdes et des dysfonctionnements, et, d'autre part, par le dépôt d'une plainte au nom des agents. Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT), a été entendu par la justice en juillet 2006 dans le cadre de cette affaire et une enquête judiciaire a été ouverte pour abus de confiance, escroquerie, faux et usage de faux et abus de biens sociaux[17].

Par ailleurs, la Cour des comptes dans son rapport présenté[18] le 4 avril 2007 a émis un certain nombre de critiques, à l'encontre de la qualité de la gestion du comité d'entreprise et de son efficacité [19].

Notes et références

  1. Revenir plus haut en : 1,0 et 1,1 Acrobat-7 acidtux software.png [pdf]Texte de la loi Waldeck Rousseau
  2. Revenir plus haut en : 2,0 et 2,1 L'argent des syndicats ou la mécanique des fluides, Le Point, 18 octobre 2006
  3. Acrobat-7 acidtux software.png [pdf]Rapport Hadas-Lebel Pour un dialogue social efficace et légitime : Représentativité et financement des organisations professionnelles et syndicales, mai 2006
  4. Le financement des syndicats en question, La Croix, 8 octobre 2007
  5. Pour un dialogue social efficace et légitime : Représentativité et financement des organisations professionnelles et syndicales, Rapport Hadas-Lebel remis au Premier Ministre en mai 2006, page 56
  6. Rapport 2004 de l'IGAS. Les chiffres français proviennent de l'article cité ci-dessus
  7. Revenir plus haut en : 7,0 et 7,1 La vérité sur l'argent des syndicats, Le Nouvel Observateur, 15 juin 2000, p 84-89
  8. Le Monde, 20 novembre 2001
  9. Le Monde, 26 septembre 2000
  10. Le financement des syndicats en question, 8 octobre 2007, La Croix
  11. Lire le décret en ligne
  12. Revenir plus haut en : 12,0 et 12,1 Mieux gérer, mieux éduquer, mieux réussir, Rapport 328, 1998-1999, commission présidée par Adrien Gouteyron
  13. L'argent des syndicats, Valeurs Actuelles, Guillaume Desanges, 19 octobre 2007
  14. Article 13 du décret 82-447
  15. Un ex-patron du Medef évoque un financement à l'image des partis politiques, Challenges, 17 octobre 2007
  16. Le fonds antigrève de l'UIMM se précise, Le Figaro, 19 octobre 2007
  17. EDF, la vache à lait des communistes?, La Libre Belgique, 20 juillet 2006
  18. CE d'EDF, Séguin veut en finir avec le manque de transparence, Le Figaro, 5 avril 2007
  19. « La Cour considère que de profonds changements doivent être apportés à l’organisation et au fonctionnement des institutions sociales. », Acrobat-7 acidtux software.png [pdf]Rapport de la Cour des comptes, page 87

Voir aussi

Bibliographie

  • 2008, Roger Lenglet, Christophe Mongermont et Jean-Luc Touly, L'argent noir des syndicats, Fayard.
  • 2006,
    • a. Erwan Seznec, Syndicats, grands discours et petites combines, Hachette, ISBN 978-2012359505
    • b. Dominique Andolfatto, Histoire des syndicats : (1906-2006), Seuil, ISBN 978-2020812405
  • 2007, Dominique Andolfatto et Dominique Labbé, « Le financement clair-obscur du syndicalisme français », Les Cahiers d'histoire sociale, N°33, hiver

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