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Suffrage universel
Le suffrage universel est le principe d'expression de la volonté populaire. Le corps électoral est constitué de tous les citoyens et citoyennes en âge de voter à condition qu'ils ne soient pas privés de leurs droits civiques.
Si, en France, le suffrage universel masculin est admis dès 1848, les États-Unis n'ont renoncé qu'en 1964 au système des « poll-taxes », qui maintenait dans certains États un cens électoral.
Historiquement, le suffrage universel s'oppose au suffrage censitaire, mode de suffrage dans lequel les électeurs sont uniquement les personnes de la population qui payent un impôt direct (le « cens ») d'un montant dépassant un seuil déterminé par la loi électorale en vigueur. C'était le mode de suffrage le plus usité au XIXe siècle.
Qu'en pensent les libéraux ?
En 1863, dans Le Parti libéral, son programme et son avenir, Édouard Laboulaye, à l'instar de Prévost-Paradol, mais contrairement à Benjamin Constant ou à Montalembert, juge cette réforme indispensable pour éduquer la majorité de ses compatriotes à la raison et à la liberté. Avant lui, John Lilburne notamment avait défendu dès le XVIIe siècle cette idée.
Toutefois, pour nombre de libéraux et de libertariens, le suffrage universel, expression de la démocratie, n'est qu'un moyen de sélection des représentants, et surtout pas une fin en soi. Hayek écrit notamment : « Que dans le monde occidental, le suffrage universel des adultes soit considéré comme le meilleur arrangement, ne prouve pas que ce soit requis par un principe fondamental » (La Constitution de la liberté).
Friedrich Nietzsche relève une contradiction liée au suffrage universel, qui est que seule "l'unanimité de tous les suffrages" (une base plus large que le vote majoritaire) devrait permettre de l'instaurer, ce qui n'a jamais été le cas en pratique. Il est donc illégitimez :
- Une loi qui détermine que c'est la majorité qui décide en dernière instance du bien de tous ne peut pas être édifiée sur une base acquise précisément par cette loi ; il faut nécessairement une base plus large et cette base c'est l'unanimité de tous les suffrages. Le suffrage universel ne peut pas être seulement l'expression de la volonté d'une majorité : il faut que le pays tout entier le désire. C'est pourquoi la contradiction d'une petite minorité suffit déjà à le rendre impraticable : et la non-participation à un vote est précisément une de ces contradictions qui renverse tout le système électoral.[1]
Le suffrage universel présente l'inconvénient de favoriser les politiques les plus démagogiques, sous couvert d'« acquis sociaux », particulièrement dans des pays comme la France où la moitié des personnes ne paient pas d'impôt sur le revenu. Le problème majeur que pose un tel vote est qu'il ne discrimine pas entre les gens qui payent des impôts et ceux qui n'en payent pas ou qui en vivent (fonctionnaires, retraités, chômeurs, etc.). Autrement dit, ceux dont les revenus dépendent de l'impôt ont autant voix au chapitre que ceux qui sont imposés. Le droit de vote pour tous constitue donc un écart par rapport à l'égalité devant la loi et participe donc plus de l'égalitarisme que de l'isonomie chère aux libéraux.
Si l'on admet que l'État n'est pas autre chose que la propriété des citoyens, les règles relatives à la propriété devraient s'appliquer, et l'importance du vote d'une personne devrait être proportionnelle aux impôts qu'elle paie : il faudrait donc abandonner le principe égalitariste "un homme, une voix".
Citations
- Que les fonctionnaires, les retraités âgés, les chômeurs, etc., aient le droit de voter sur la manière dont ils doivent être payés sur la poche du reste, et qu'ainsi leur vote soit sollicité par la promesse d'être payés davantage, voilà qui n'est guère raisonnable. Il ne le serait pas non plus si les employés de l'État avaient voix au chapitre pour décider que soient adoptés les projets qu'eux-mêmes ont élaborés, ou si les personnes qui ont à exécuter les ordres de l'Assemblée gouvernementale avaient part aux décisions sur le contenu de ces ordres. (Friedrich Hayek)
- Cette controverse [sur le suffrage universel] (aussi bien que la plupart des questions politiques) qui agite, passionne et bouleverse les peuples, perdrait presque toute son importance, si la Loi avait toujours été ce qu'elle devrait être. En effet, si la Loi se bornait à faire respecter toutes les Personnes, toutes les Libertés, toutes les Propriétés, si elle n'était que l'organisation du Droit individuel de légitime défense, l'obstacle, le frein, le châtiment opposé à toutes les oppressions, à toutes les spoliations, croit-on que nous nous disputerions beaucoup, entre citoyens, à propos du suffrage plus ou moins universel ? Croit-on qu'il mettrait en question le plus grand des biens, la paix publique ? Croit-on que les classes exclues n'attendraient pas paisiblement leur tour ? Croit-on que les classes admises seraient très jalouses de leur privilège ? Et n'est-il pas clair que l'intérêt étant identique et commun, les uns agiraient, sans grand inconvénient, pour les autres ? (Frédéric Bastiat, La loi)
Notes et références
- ↑ "Humain, trop humain", III (Le voyageur et son ombre), §276 (Le droit de suffrage universel).
Voir aussi
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