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Travail

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L'étymologie du mot travail vient du bas latin tripalium (VIe siècle) instrument de torture formé de trois pieux. Des modifications et altérations de sens se retrouvent dans la famille de trabs, trabis : poutre (travée). Au XIIe siècle, le travail signifie le tourment et la souffrance. Au XVIe siècle, il devient : « Se donner de la peine pour ».

Dans un sens restreint, le travail est une action non dictée par la survie de l'espèce, bien souvent en échange d'une rémunération ou d'une gratification. Dans un sens plus large, le travail est une action nécessitant de l'énergie ou d'accomplir une activité quelconque contre une rémunération.

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Travail et chômage

La relation entre travail et chômage est complexe et difficile à comprendre. Pour comprendre cette relation, partons du constat suivant : l'homme naît pauvre, ou plus précisément, il naît dans une société, dans une communauté, dans laquelle ses membres travaillent, s'organisent, afin de créer des richesses susceptibles de satisfaire les besoins de ses semblables. En effet, l'homme doit, pour développer des conditions favorables à son existence, transformer la nature, utiliser les ressources de la terre afin de sortir de la rareté, de la pénurie. La vie de l'homme est donc faite de travail car il doit faire des efforts pour satisfaire ses propres besoins mais aussi ceux des personnes de la communauté qui ne participent pas directement à la création de richesses (personnes âgées, celles frappées d'incapacité, les lycéens, les étudiants...). L'impératif de l'homme est donc le travail car toute acte de satisfaction, de consommation, nécessite du travail.

Le chômage est une « construction sociale »

Contrairement au travail, le chômage est une « création sociale ». En effet, le chômeur n'existait pas dans les sociétés traditionnelles basées sur la soumission. Par exemple, l'esclave et le serf n'étaient pas menacés par le chômage. De même, les sociétés caractérisées par ce qu'Émile Durkheim nommait une « solidarité mécanique » (grosso modo les sociétés traditionnelles) c'est-à-dire une communauté régie par une solidarité issue de l'activité religieuse et de type "villageoise", "familiale" où la profession était transmise du père au fils, la femme s'occupant du domestique, ne connaissaient pas le phénomène du chômage qui caractérise nos sociétés "modernes". Ces anciennes formes d'organisation sociale étaient en quelque sorte des sociétés de castes puisque le statut social était acquis, ou subi, dès la naissance de sorte que les chances de promotion sociale étaient très faibles.

La révolution intellectuelle et sociale du XVIIe et XVIIIe siècle va bouleverser cet état de choses. En France, la Révolution française de 1789 a supprimé les privilèges. Par la suite, la Constituante vote, le 26 août, la Déclaration des Droits de l'Homme et du citoyen. Ainsi, de sujet, l'individu devient citoyen. Et l'État n'existe que pour protéger les droits de l'individu. Progressivement l'individualisme de la Révolution gagne les sociétés européennes et plus particulièrement la manière dont celles-ci organisent la production des richesses. En France le décret D'Allarde et la loi Le Chapelier de 1791 organisent, pour le premier fois, un véritable « marché du travail ». Or un marché suppose qu'il y a échange d'une marchandise contre une autre. L'individu devient donc un marchand qui vend sa force de travail à un employeur. Le chômage ne stipule donc pas absence de travail mais exprime l'incapacité de l'individu de trouver un acheteur pour sa force de travail. C'est bien pour cette raison que la définition de la population active englobe les actifs occupés mais également les chômeurs.

Le chômage est un état qui est apparu dans nos sociétés à la suite de la rencontre de deux actions : l'extension du salariat comme mode d'organisation majeur de la production des richesses et la création, et par des institutions spécialisées de l’État qui créent un intérêt à se déclarer comme chômeur.

Le salariat est apparu assez tardivement en France puisque, au lendemain de la libération, un bon tiers des Français vivaient directement de la terre et la moitié habitaient à la campagne. Or aujourd'hui le salariat représente 90 % de la population active. Le XXe siècle a donc confirmé la suprématie du salariat comme forme d'organisation dominante de la force de production. Ceci est véritablement une "révolution silencieuse".

L’État a également contribué à cette révolution et à l'émergence du statut de chômeur. En effet, le chômeur est né dans les statistiques de l'État en 1896 à la suite de sa volonté de rationaliser le marché du travail et de stabiliser les travailleurs par le contrat de travail. La conséquence de cette organisation scientifique de la population est que le chômeur, l'individu, est devenu un chiffre, une dépense pour la collectivité. Or ce chiffre est en expansion puisque de 300000 demandeurs d'emploi en France dans les années 1970 nous sommes passés à 3 000 000 dans les années 1990... L'intervention réglementaire et législative de l’État a de facto créé une zone illégale du travail. Le travail au noir ou travail dissimulé est une activité rémunérée non-déclarée à l'administration étatique, et par conséquent non-soumise à impôts, taxes, contributions sociales et astreintes des règlementations.

L’État et ses représentants prétendent que les impôts non payés en raison du travail au noir constituent un vol, que ce « manque à gagner » doit être transféré sur ceux qui s’acquittent légalement des charges fiscales qui sont imposées. En réalité, les échanges volontaires entre les individus ne sont certainement pas des crimes et le vol est bien le fait de l’État, qui n'acquiert pas ses ressources autrement que par la coercition et la violence, les gens étant contraints de contribuer. Dans ce cas, le travail au noir est, pour certains travailleurs et entrepreneurs, une réponse légitime à l’empiètement étatique. Le travail au noir est un travail que l'État a arbitrairement déclaré comme "illégal". En fait, l'État crée lui-même le problème en voulant règlementer le marché du travail, en empêchant, entre autres, les immigrés de travailler, et en institutionnalisant le chômage.

Les raisons de la croissance du chômage

Il est utile de se poser la question de la croissance du chômage. Plusieurs explications peuvent être avancées : les conditions du marché du travail, les assurances chômage aux effets pervers de démotivation et les politiques de relance keynésienne.

La première explication est un raisonnement en termes de marché. Ici, le travail est une marchandise comme les autres, une ressource rare qui trouvera toujours une manière de s'employer à condition d'accepter une rémunération adéquate issue des mouvements naturels des prix. Dans ce sens, le marché du travail doit respecter les conditions communes à tout marché où seule l'initiative individuelle existe. Le marché doit être transparent (information parfaite) et les individus doivent effectuer des calculs rationnels (recherche du meilleur résultat possible). Ainsi, l'offre de travail émane des individus qui raisonnent sur un salaire réel, les effets de l'inflation étant supposés faire partie des calculs d'optimisation. Dans ce modèle, les agents effectuent en quelque sorte un arbitrage entre les avantages tirés du statut de chômeur et ceux engendrés par l'obtention d'un travail rémunéré (effets de substitution), le salaire étant le prix de renonciation aux loisirs selon les enseignements de Gary Becker. Le travail est donc conçu négativement, comme une renonciation aux loisirs. En effet le mot "travail" ne vient-il pas du latin "tripaliare" qui signifie torture, le tripalium étant un instrument de torture et le mot "chômage" du grec "kauma" qui signifie chaleur torride ? Par ailleurs Malthus affirmait que "l'homme est par nature apathique, paresseux et ennemi du travail".

Dans ce sens les nombreuses mesures mises en place par les pouvoirs publics pour protéger les chômeurs et leur accorder des rémunérations peuvent avoir des conséquences de désincitation, les individus préférant le chômage plutôt que l'activité. C'est la thèse de l'économiste Jacques Rueff. Pour lui, c'est l'instauration de différentes formes d'indemnisation du chômage (notamment la Dole en Grande Bretagne instaurée en 1911) qui est la cause du chômage permanent. En effet, la Dole établit un certain niveau minimum de salaire à partir duquel l'ouvrier préfère toucher la Dole plutôt que de travailler. Ainsi la Dole stabilise le salaire à un niveau entièrement indépendant du niveau des prix. Pour Rueff, sans indemnisation le travailleur accepte les baisses de salaire car il est obligé de travailler, la peur de la misère étant un puissant mécanisme d'incitation. Il estime que le mécanisme des prix libres, de par le processus d'adaptation progressive, permet d'absorber le chômage. Comme l'école autrichienne, le penseur soutient que dans toutes les domaines où un prix a été artificiellement fixé à un taux différent de celui issue de la volonté individuelle, il y a crise. En ce qui concerne la demande de travail celle-ci provient des entreprises. Étant donné que le salaire représente un coût pour les employeurs cette demande est freinée par les prélèvements, les règlementations qui frappent l'utilisation du travail vivant. Aujourd'hui, les contraintes imposées par le code du travail sont régulièrement évoquées pour expliquer les difficultés rencontrées par les PME pour créer des emplois.

John Maynard Keynes s'oppose à cette vision en termes de marché. En effet les entrepreneurs ne raisonnent pas sur le prix mais sur la demande effective, c'est-à-dire la demande anticipée par les employeurs. Ainsi l'emploi ne dépend pas seulement des choix des entreprises mais aussi des consommateurs et de tous les choix des membres de la catallaxie. Deux conceptions du chômage se dégagent alors : la conception keynésienne qui insiste sur l'importance de la demande effective, et une autre classique qui explique le chômage par l'insuffisance de la rentabilité. Selon la conception adoptée, les mesures préconisées pour lutter contre ce fléau vont être radicalement différentes. Le keynésianisme stipule un rôle actif de l'État, alors que la pensée libérale accorde plus d'importance à l'initiative privée. Aujourd'hui il est certain que la régulation du marché du travail s'éloigne des mécanismes concurrentiels. En effet, on observe une quasi-indexation des salaires sur les prix depuis 1969. De même, le salaire indirect connaît une expansion importante en France à cause de la gestion de la sécurité sociale. Comme le remarque R. Boyer, une régulation de type socio-politique se substitue progressivement à la régulation stricte des individus.

François Mitterrand affirmait que tout avait été fait pour essayer de lutter contre le chômage. Peut être que le problème est justement que les différents gouvernements ont tout essayé...

La flexibilité du marché du travail

Parmi les facteurs de la flexibilité, la durée du travail est souvent avancée par les décideurs politiques. Hors, la durée du temps de travail devrait être un des termes du contrat de travail plutôt qu'une contrainte extérieure imposée par la règlementation dans un but malthusien (le prétendu "partage du travail"). Dans le même genre d'idées, Frédéric Bastiat proposait, par plaisanterie cynique et paradoxal, d'interdire aux travailleurs l'usage de la main droite pour augmenter la quantité de travail (et donc d'augmenter la richesse) :

Quand les ouvriers de toute sorte seront réduits à leur main gauche, représentons-nous, Sire, le nombre immense qu'il en faudra pour faire face à l'ensemble de la consommation actuelle, en la supposant invariable, ce que nous faisons toujours quand nous comparons entre eux des systèmes de production opposés. Une demande si prodigieuse de main-d'œuvre ne peut manquer de déterminer une hausse considérable des salaires, et le paupérisme disparaîtra du pays comme par enchantement. (Sophismes Économiques, La main droite et la main gauche, [1])

De leur côté, les économistes et les théoriciens des organisations se sont souvent opposés sur les logiques de flexibilité[1] dans les relations d'emploi. Certains avancent des arguments sur une approche de l’emploi stable fondée sur un marché du travail interne[2] tandis que d'autres privilégient une gestion d’adaptation rapide basée sur un marché du travail ouvert. Pour les théoriciens du marché interne, le recrutement est assez discriminant puisqu'il favorise plutôt l'embauche de personnes en début de carrière avec un statut juridique de Contrat à Durée Indéterminée (CDI). Confrontées à des lois anti-discriminantes et à la surveillance distante d'un organisme comme la Halde, en France, ces pratiques de gestion en Ressources Humaines conduisent quelquefois à l'hypocrisie ("vous êtes trop senior pour ce poste") ou à l'indifférence ("syndrome du téléphone silencieux"). Dans un marché du travail ouvert, les recrutements s'effectuent pour tous les âges même si la flexibilité implique quelquefois des contrats en Durée Déterminée (CDD), à du travail temporaire ou à de la sous-traitance (transformation de la relation de travail en relation commerciale). La rémunération s'effectuera pour les uns, comme dans le modèle de l'administration, sur une grille de classification. L'évolution se déroule selon l’ancienneté, selon des notations de supérieurs hiérarchiques sur les capacités d'intégration, de socialisation et de performance collective tandis que dans le marché du travail ouvert, ce sont les conditions du marché qui déterminent le salaire et les évolutions se produisent en fonction des résultats de l’individu.

Dans le marché du travail interne, il existe des possibilités de promotion et de mobilité interne avec un marché qui s'organise à l'intérieur de l'organisation comme des bourses de l’emploi ou des aides à l’orientation. Sur le marché du travail ouvert, la relation de travail est fortement liée à un contrat transactionnel qui autorise les relations à long terme mais sans engagement assuré. Dans cette vision, l’emploi concerne avant tout une mission ou un poste. Dans ce contexte, il n'existe véritablement pas de politique de formation. L’entreprise n’emploie que des personnels formés ou immédiatement opérationnels. A l'inverse, la politique du marché interne favorise la formation au poste, aux évolutions du métier ou à l’évolution professionnelle.

La stratégie de gestion des ressources humaines est également totalement opposée. Dans un marché interne, s'appuyant sur une logique de convention professionnel, d'accord de branche, d'entreprise ou inter-établissement il existe un effort d’anticipation par l'établissement d'une gestion et d'une prévision des emplois et des compétences (GPEC). La flexibilité est d'ordre quantitative en interne ou la flexibilité peut être fonctionnelle en proposant d'autres perspectives à des salariés. Sur le marché ouvert, la flexibilité est davantage externe. L'adaptation s'effectue par le non-renouvellement des contrats, par des licenciements, par des démissions (plus ou moins manipulées), des ruptures conventionnelles de contrat, ou par l'externalisation.

Citations

  • Mieux que tous les analgésiques, soporifiques, stimulants, tranquillisants, narcotiques, et, jusqu'à un certain point, mieux encore que tous les antibiotiques - bref, la seule « panacée universelle » connue de la science médicale, c'est... le travail. (Thomas Szasz)
  • Si le Communiste voit en toi un homme et un frère, ce n'est là que sa manière de voir des dimanches ; les autres jours de la semaine il ne te regarde nullement comme un homme tout court, mais comme un travailleur humain ou un homme qui travaille. Si le premier point de vue s'inspire du principe libéral, le second recèle l'illibéralité. Si tu étais un « fainéant », il ne reconnaîtrait pas en toi l'homme, il y verrait un « homme paresseux » à corriger de sa paresse, et à catéchiser pour le convertir à la croyance que le travail est la « destination » et la « vocation » de l'homme. (Max Stirner)
  • Mais si l'homme ne travaille plus, c'est aussi parce que la société va lui garantir, à travers une série de droits sociaux, un minimum de subsistance. C'est une invention moderne née avec la généralisation de l'État-providence. Dans ce cas, le travail n'apparaît plus comme une nécessité. Il est même considéré par certains comme un processus d'exploitation auquel il conviendrait de se soustraire. (Jean-Louis Caccomo, Le modèle français dans l'impasse)
  • L'État est fondé sur l'esclavage du travail. Que le travail soit libre, et l'État s'écroule. (Max Stirner)
  • Le travail éloigne de nous trois grands maux : l'ennui, le vice et le besoin. (Voltaire)

Informations complémentaires

Notes et références

    • Bernard Bruhnes, 1989, « La flexibilité du travail. Réflexions sur les modèles européens », Droit du travail, n°3, mars, pp251-256
    • C. Everaere, 1997, Management de la flexibilité, Paris, Economica
  1. * P. B. Doeringer et M.J. Piore, 1971, Internal Labor Markets and Manpower Analysis, Armonk, New York, M.E. Sharpe, Inc.

Bibliographie

Voir aussi

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