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Stanislas de Clermont-Tonnerre
Stanislas de Clermont-Tonnerre | |||||
homme politique | |||||
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Dates | 1757-1792 | ||||
Tendance | libéral conservateur | ||||
Nationalité | France | ||||
Articles internes | Autres articles sur Stanislas de Clermont-Tonnerre | ||||
Citation | Il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout accorder aux Juifs comme individus | ||||
Interwikis sur Stanislas de Clermont-Tonnerre | |||||
Stanislas de Clermont-Tonnerre ou plutôt Stanislas-Marie-Adélaïde comte de Clermont-Tonnerre, né au château d'Harmonville, à Mandres-aux-Quatre-Tours, le 8 novembre 1757 et mort à Paris, le 10 août 1792, est un homme politique français qui a joué un rôle dans les débuts de la Révolution française.
Un aristocrate des Lumières
Stanislas est le fils aîné du marquis François-Joseph de Clermont-Tonnerre (1726-1809) et de sa première femme, Marie Anne de Lentilhac de Gimel, ainsi que le petit-fils du duc Gaspard de Clermont-Tonnerre (1688-1781), maréchal de France.
Fils d’un maréchal de camp, premier chambellan du roi de Pologne, il fait ses études au collège de Pont-de-Mousson, puis au collège du Plessis à Paris. En 1773 il commence sa carrière militaire comme sous-lieutenant sans solde dans le premier régiment du Colonel-général-dragons. Il passe ensuite dans la légion des Flandres, puis (comme capitaine) aux dragons de la Reine. À la veille de la Révolution, il était parvenu au grade de colonel dans le régiment de Royal-Navarre.
En 1778, il se rend à Vienne auprès de son cousin par alliance Breteuil qui représentait la France à la cour de Marie-Thérèse. En 1781, à la mort de son grand-père, il a hérité d’une pension de 3000 livres et de la charge de chevalier d’honneur de Monsieur.
Il épouse en 1782 Marie Louise Joséphine Delphine de Rosières de Sorans (1766-1832) : des trois enfants du couple, seule leur fille aînée arrivera à l'âge adulte et se mariera.
Clermont-Tonnerre participe la même année à la prise d’armes de Genève destinée à soutenir les patriciens au pouvoir contre la bourgeoisie révoltée. Il est initié à la franc-maçonnerie, dans la loge parisienne la Candeur. En Auvergne, il appartient à la loge Saint-Maurice de Clermont, où il rencontre le futur montagnard Georges Couthon, avec qui il se lie d’amitié. En 1787, il est membre du bureau intermédiaire de l’Assemblée provinciale d’Île-de-France. Il appartient à la société des Trente, et en 1789, rédige le cahier de la noblesse de Meaux.
Le député de l’Assemblée nationale 1789-1791
Élu en 1789 premier député de la noblesse de Paris aux états généraux, il se montre favorable aux prétentions du tiers état, notamment que les trois ordres devaient vérifier leurs pouvoirs en commun. Avec le duc d'Orléans, il conduit les 47 députés nobles qui rejoignent l'Assemblée nationale le 25 juin, après le serment du Jeu de paume. Il se joint au groupe des députés modérés du tiers état animé par Jean-Joseph Mounier. En compagnie de Pierre-Victor Malouet, Gérard de Lally-Tollendal et Nicolas Bergasse, ils vont former ce que l’on appellera bientôt les monarchiens. Leur but commun est de concilier pouvoir royal et volonté populaire. Ils entendent concilier la séparation des pouvoirs chère à Montesquieu à la dynamique contractuelle de Rousseau.
À deux reprises, il est élu à la présidence de l'Assemblée le 17 août 1789 avec 473 voix sur 812 votants, puis le 12 septembre avec 380 voix sur 727 votants (devant Pétion avec 123 voix et Redon avec 80). Le président de l’Assemblée nationale était élu pour 15 jours et n’était pas directement rééligible.
Dès le 14 juillet 1789, Clermont-Tonnerre est élu parmi les huit membres du Comité de constitution. À ce titre, le 27 juillet, il avait présenté à l'Assemblée le rapport d’ensemble sur les cahiers de doléances. Il signalait comme principales demandes en matière de Constitution : la régénération de l’État, la rédaction d’un texte précédé d’une Déclaration des droits de l’Homme, la nécessité d’un corps législatif puissant, qui consentirait l’impôt mais aussi organiserait les corps administratifs et assurerait la protection des citoyens.
Cultivé et éloquent, il avait acquis rapidement une certaine ascendance sur l’Assemblée mais déclinante très rapidement. Partisan d'une monarchie constitutionnelle à l'anglaise, il réclame l'établissement de deux Chambres. Entre les partisans du veto absolu pour le roi et ceux pour qui la sanction royale doit être automatique, il imagine la solution dite du veto itératif qui fixe à deux législatures la durée du veto. De la sorte, l’opinion publique décidera du sort de la loi en reportant ou non les députés au pouvoir. Vaincus dans les grands débats sur le bicamérisme et le pouvoir royal, les monarchiens démissionnent en bloc du Comité de constitution le 12 septembre 1789.
Quand le roi est contraint par la foule de quitter Versailles pour Paris, Mounier et Lally-Tolendhal quittent l'Assemblée nationale et émigrent. Clermont-Tonnerre lui-même pense gagner les États-Unis, mais se ravise et, faute de pouvoir peser sur la rédaction de la Constitution, se lance dans une série de combats ponctuels mais hautement symboliques : contre la confiscation des biens de l’Église, pour la citoyenneté des juifs, droit de faire la guerre et de négocier la paix.
Au sujet de la liberté religieuse, en octobre 1789, il rappelle le principe de base de sa philosophie politique : « Un État n’a point de religion, parce que le premier droit de chaque Homme est d’avoir la sienne, et de ne la soumettre à personne . » Dans un discours célèbre, en décembre, Clermont-Tonnerre prend position pour l'accession à la citoyenneté des Juifs en déclarant : « Il faut tout refuser aux Juifs comme nation et tout accorder aux Juifs comme individus ». Dans sa péroraison, il fonde en droit son appui à la cause juive : « l’état présumé de tout homme domicilié dans un pays est d’être citoyen. »
Le droit de la guerre pose une question de fond : qui du roi ou de l’Assemblée nationale en est responsable ? À cet égard, Clermont-Tonnerre prend une position originale. La conduite des opérations militaires appartient sans conteste au roi, mais celle-ci doit être soumise à des conditions strictes qui ne peuvent être que celles du « pacifisme » avant la lettre. C’est ainsi qu’il propose d’inscrire dans la Constitution un décret dont l’article 1 se lit comme suit : « Que la nation française ne portera jamais d’atteinte à la liberté ni aux propriétés d’aucune puissance. » De même, toute alliance doit être défensive et « son but doit être de protéger, par les forces combinées de deux puissances, la liberté et la propriété de ces deux puissances. Tout ce qui entre dans cette définition est légitime, tout ce qui en sort est injuste. »
Le Parti patriote, qui allait de Robespierre jusqu’à Barnave, rejette le raisonnement de Clermont-Tonnerre et attribue tous les droits à l’Assemblée nationale. Pied à pied, les monarchiens sont contraints de reculer et d’admettre le rétrécissement du pouvoir royal toujours suspecté des pires intentions. Les interventions de Clermont-Tonnerre se raréfient. Son ultime engagement public concernera l’affaire d’Avignon – la ville faisait partie des États pontificaux depuis le XIVe siècle. La France a-t-elle le droit d’annexer Avignon ou non ? Par principe pacifiste, Clermont-Tonnerre y est opposé. La France doit s’interdire de remettre en question la souveraineté d’une puissance étrangère. L’affaire peut sembler marginale, mais elle soulève les passions. Le 3 mai 1791, la vie de Clermont-Tonnerre est menacée pour la première fois, comme il le rapporte sobrement dans ses écrits : « c’est pour cette opinion que j'ai été assailli sur la terrasse des Feuillants, et poursuivi chez moi, que ma porte a été brisée et mes murs escaladés . »
Par deux fois, Clermont-Tonnerre, en compagnie de son ami Pierre Victor Malouet, tentera d'organiser les monarchiens après le départ de Mounier et de Lally-Tollendhal. Fin novembre 1789, le Club des Impartiaux est créé, mais ne réunit jamais plus qu’une quarantaine de députés et sera laminé entre la droite aristocratique et la gauche jacobine. Il perd toutes ses causes et ferme ses portes en mai 1790 après six mois d’existence. En décembre 1790 une Société des amis de la Constitution monarchique dont le nom évoque directement le Club des Jacobins (de son vrai nom Amis de la Constitution). Dès la première réunion, une manifestation tumultueuse trouble les débats. Les sections du Louvre et de la Croix-Rouge entament aussitôt des démarches prônant la destruction « par tous les moyens » de ce « foyer de séduction » monarchique. D’autres sections suivent, et finalement le Club des Jacobins intervient. La Société naissante doit suspendre ses activités et passer le plus clair de son temps devant les comités de section, l’hôtel de ville et les tribunaux pour obtenir le droit de fonctionner. Clermont-Tonnerre rédige avec Jean-Pierre Louis de Fontanes le Journal de la Société monarchique. La fuite manquée du roi à Varennes en juin 1791 sonne la fin de la Société moribonde et de son Journal.
En septembre 1791, Clermont-Tonnerre publie une Analyse raisonnée de la Constitution française, très critique du caractère coercitif de la Déclaration des droits de l'Homme aussi bien que de la Constitution. Il déplore l'absence d'un juge pour en garantir les fondements [l'idée d'un juge constitutionnel était à ses balbutiements]. Pour que les droits civils et naturels portées par la Constitution s'imposent, nous dit Clermont-Tonnerre : « il faudrait qu’il y eût un juge qui prononçât s’il y a identité ou contradiction entre la loi et le principe dont on la rapproche : mais ce juge n’existe pas » [1].
Une fin tragique
Après la séparation de la Constituante, il publie ses Opinions en octobre 1791 (quatre volumes in-octavo). En avril 1792, il se joint à la conjuration Malouet qui prévoit de faire sortir Louis XVI de Paris, non plus en cachette comme durant le triste épisode de Varennes, mais à la tête d’une petite troupe et de le conduire vers Rouen où un navire est prévu pour gagner l’Angleterre. Le 6 août 1792, la reine oppose son veto au déclenchement du plan Malouet prévu pour le lendemain.[2]
Arrêté lors de la chute de la royauté, le 10 août 1792. Il est conduit à la section municipale de la Croix-Rouge où la garde nationale le relâche. Des émeutiers l'assaillent à la sortie des locaux. Il essaie une dernière fois de haranguer la foule. Un moment, il semble réussir, lorsqu'un tueur anonyme lui porte un coup de faux à la tête. Il s'enfuit dans une maison amie et, poursuivi jusqu'au quatrième étage par les émeutiers, est défenestré.
Notes
- ↑ Clermont-Tonnerre, Analyse raisonnée de la Constitution française, Paris, Imprimerie de Migneret, 1791, également cité dans M. Gauchet, La Révolution des droits de l’homme, Paris, Gallimard, 1989, p. 143.
- ↑ Mémoires de Malouet (publiés par son petit-fils le baron Malouet), 1868, Paris Librairie académique Didier et Cie, t. 2, p. 158-164
Clermont-Tonnerre, Analyse raisonnée de la Constitution française, Paris, Imprimerie de Migneret, 1791, également cité dans M. Gauchet, La Révolution des droits de l’homme, Paris, Gallimard, 1989, p. 143.
Mémoires de Malouet (publiés par son petit-fils le baron Malouet), 1868, Paris Librairie académique Didier et Cie, t. 2, p. 158-164
Citations
- E. Lavaquery : « Avec des dons inestimables, il laisse l’impression d’une vie manquée ».
- F. Furet et R. Halévy : « Il est l’orateur le plus brillant et le plus écouté de la noblesse ».
Sources
- « Stanislas de Clermont-Tonnerre », dans Marie-Nicolas Bouillet et Alexis Chassang (dir.), Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, 1878
- Adolphe Robert, Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889, Paris, Bourloton, 1889, tome 2, 2/CLEMENT_CLUSERET.pdf de Clément à Cluseret, p. 187
- Biographie universelle, ancienne et moderne, Paris, Michaud frères, tome 9 (Cl-Co), p. 90-92
- François-Xavier Feller, Dictionnaire historique, ou histoire abrégée de hommes qui se sont fait un nom par leur génie, leurs talents, leurs vertus, leurs erreurs ou leurs crimes, Lille, L. Lefort, 1832, tome 4, p. 45-46
- Charles du Bus, Stanislas de Clermont-Tonnerre et l’échec de la Révolution monarchique (1757-1792), Paris 1931, 524 p.
- Eugénie Droz, Stanislas de Clermont‐Tonnerre et l’occupation de Genève en 1782 d’après une correspondance inédite, Annuaire-bulletin de la Société de l’histoire de France, 1960-61, pp. 71-158.
- François Furet et Ran Halévy (dir.), Orateurs de la Révolution française, t. 1, Les Constituants, 1989, Paris, Gallimard (Bibliothèque de La Pléiade), pp. 1256-1261.
Liens externes
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