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Augustin Thierry
Augustin Thierry | |||||
Historien | |||||
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Dates | 1795 - 1856 | ||||
Tendance | Libéral | ||||
Nationalité | France | ||||
Articles internes | Autres articles sur Augustin Thierry | ||||
Citation | « L'alliance des mots la plus menteuse, un gouvernement qui donne la liberté. » | ||||
Interwikis sur Augustin Thierry | |||||
Jacques Nicolas Augustin Thierry (Blois, 10 mai 1795 - Paris, 22 mai 1856) est un historien français, une des figures du libéralisme.
Biographie
Né à Blois, il n'a pas l'avantage de la naissance ou de la fortune, mais il se révèle vite extrêmement doué. Il récolte de nombreux prix et se distingue au lycée de Blois, ce qui lui permet d'entrer à l'École normale supérieure en octobre 1811. En deux ans, il décroche le baccalauréat ès lettres, le baccalauréat ès sciences et la licence de lettres. Il quitte l'ENS en 1813, envoyé comme professeur à Compiègne pour y enseigner les humanités. Il y séjourne peu de temps et revient rapidement à Paris.
Sa nature ardente et généreuse l'a conduit à embrasser les idées de la Révolution française avec enthousiasme. Il se rapproche alors de la vision idéale de la société de Saint-Simon qui lui demande son aide, puis dont il devient le secrétaire entre 1814 et 1817 et, comme il le disait lui-même, son fils adoptif. Mais, pendant que la plupart des disciples de Saint-Simon s'occupaient des affaires de la vie, des problèmes théoriques et pratiques, Thierry décida de porter son attention sur l'histoire.
Sa vocation d'historien a été fortement influencée par la lecture des Martyrs de Chateaubriand. Son ardeur romantique a été plus tard nourrie par les écrits de Walter Scott, et même s'il n'écrivait pas de récits de fiction, sa conception de l'histoire intégrait son aspect littéraire et dramatique.
En 1817, Augustin Thierry entre au journal Le Censeur (qui devient ensuite le Censeur Européen) et se lance dans le combat libéral en fournissant un article par semaine dès 1819, ses écrits essayant de trouver dans l'histoire les arguments nécessaires à la réfutation de la politique contemporaine. Augustin Thierry affirme ainsi que ses premières recherches devaient lui fournir “un arsenal d’armes nouvelles pour la polémique” engagée contre la Restauration. “En 1817, préoccupé d’un vif désir de contribuer pour ma part au triomphe des opinions constitutionnelles, je me mis à chercher dans les livres d’histoire des preuves et des arguments à l’appui de mes croyances politiques”. Plus qu’une histoire politique, il s’agit explicitement pour lui, comme pour Guizot, d’une politique de l’histoire.
Son idée directrice sur les invasions barbares, la conquête normande, la formation des communes, l'ascension progressive des nations vers le gouvernement libre et les institutions parlementaires s'observent déjà dans ces articles. Une fois le Censeur Européen disparu en 1820, c'est dans ses Lettres sur l'histoire de France publiées dans le Courrier Français en 1820 qu'il expose les principes de la « réforme historique » qu'il souhaite inscrire dans son siècle, mais les critiques virulentes soulevées par ses écrits le font quitter le Courrier Français en janvier 1821.
Grâce à Fauriel, il a appris à utiliser les sources originales et cherche à faire l'histoire afin de la comprendre et non plus pour ses aspects subjectifs. Grâce à l'aide de chroniques latines et de la collection des lois anglo-saxonnes jusque là très mal comprises, il a fait paraître en 1825 son Histoire de la conquête de l'Angleterre par les Normands dont la parution souleva l'enthousiasme. Cet ouvrage, publié à l'issue de nombreuses années de travail acharné, a entraîné pour Augustin Thierry de graves problèmes de vue. En 1826, il se trouve dans l'obligation d'engager des secrétaires pour l'assister, et quelques années plus tard, il est quasi-aveugle.
En 1827 il publie à nouveau ses Lettres sur l'histoire de France, avec quinze nouvelles additions dans laquelle il décrit les épisodes les plus frappants de l'apparition des communes médiévales. Les chroniques des XIe et XIIe siècles ainsi que quelques chartes communales lui ont founi les bases d'un édifice solide.
En 1828, son état de santé devient préoccupant : il est atteint d'un tabès dorsal qui le paralyse. Immobilisé et aveugle, il est accueilli par la famille d'Espine. Cette période lui permet de lier une amitié épistolaire avec Chateaubriand.
Thierry fut un ardent partisan de la Révolution de Juillet qui porta ses amis au pouvoir. Guizot lui octroie une pension et nomme son frère Amédée préfet de Haute-Saône. Ce dernier l'invite à passer quelque temps chez lui pour se reposer : il arrive à Vesoul le 22 avril 1831. Il passe quatre ans dans la région, rencontrant Julie de Querengal qu'il épouse le 7 novembre de la même année et qui devient sa plus proche collaboratrice. A ses yeux, désormais, avec les Trois Glorieuses, la haine des races doit céder la place à la réconciliation des classes.
En 1834, il réédite sous le nom Dix ans d'études historiques ses premiers essais parus dans le Censeur européen et le Courrier français. Il publie également ses Récits des temps mérovingiens (le premier d'entre eux sort en 1833) dans lequel il reproduit sous une forme vivante et dramatique quelques-uns des récits les plus célèbres de Grégoire de Tours. Ces Récits sont parus tout d'abord dans la Revue des deux mondes, puis regroupés en volumes précédés de la très pertinente introduction Considérations sur l'histoire de France où il exprime sa philosophie politique.
Déjà membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres depuis le 7 mai 1830, cette publication lui vaut de recevoir en 1841 le Prix Gobert de la part de l'Académie française. Le duc d'Orléans lui offre même la direction de sa bibliothèque en 1835. Son protecteur Guizot lui confie la direction de grandes publications de documents historiques dont il tire un Essai sur le Tiers état en 1850. Il a été également chargé de publier les Documents inédits, une sélection d'actes jalonnant l'histoire du Tiers état. Avec tout un réseau de collaborateurs zélés tels que Charles Bourquelot, Charles Louandre, Ernest Renan, il compile ces documents dans le Recueil des monuments inédits de l'histoire du Tiers état (1850-1870), qui ne porte cependant que sur la partie septentrionale de la France. Sa préface à cet ouvrage a ensuite été publiée séparément sous le nom Histoire du Tiers état.
La fin de sa vie a été assombrie par des problèmes personnels et des soucis de santé. Il perd sa femme Julie de Querengal le 9 juin 1844, une femme intelligente qui avait été pour lui une collaboratrice aussi capable que dévouée. La Révolution de 1848 lui infligea un dernier coup en ruinant son interprétation de l'histoire nationale basée sur la concorde : dans son système, la révolution de 1848 est impossible car impensable dans une société réunifiée. Il ne dissimule pas son désarroi en constatant le renversement du régime de la bourgeoisie libérale qu'il avait posé en épilogue inéluctable à l'histoire de France.
Il a alors commencé à se détacher des opinions rationalistes et à se rapprocher de l'Église : on ne retrouve plus dans sa dernière édition de l'Histoire de la conquête ses sévères jugements sur la politique de Rome. Sans renoncer à ses amis libéraux, il a cherché la compagnie de prêtres éclairés, et, juste avant sa mort, il a semblé disposé à rejoindre l'Église.
Le sens de l'histoire selon Thierry
Augustin Thierry développe ses conceptions historiques dans Dix ans d’études historiques et dans ses Considérations sur l’histoire de France. Pour lui, les conflits politiques du présent tirent leur sens des vieilles invasions qui, du fond des âges, continuent de régir le destin de la société française. Celle-ci reste marquée par la brisure originelle de la conquête qui commande tous les événements ultérieurs. Le plus immédiat se comprend par le plus lointain. « Je crus apercevoir, dans ce bouleversement si éloigné de nous, la racine de quelques-uns des maux de la société moderne : il me semble que, malgré la distance des temps, quelque chose de la conquête des barbares pesait encore sur notre pays, et que, des souffrances du présent, on pouvait remonter, de degré en degré, jusqu’à l’intrusion d’une race étrangère au sein de la Gaule, et à sa domination violente sur la race indigène ».
Le schéma historique, partagé par ses contemporains, s’articule autour de deux moments forts. Au Ve siècle, la race des Francs asservit celle des Gaulois et organise sa domination de classe à travers les institutions et les lois. « Nous croyons être une nation, et nous sommes deux nations sur la même terre, deux nations ennemies dans leurs souvenirs, inconciliables dans leurs projets : l’une a autrefois conquis l’autre ; et ses desseins, ses vœux éternels sont le rajeunissement de cette vieille conquête énervée par le temps, par le courage des vaincus et par la raison humaine. »
La lutte de classes, née de cette rivalité de races, se perpétue jusqu’à la Révolution, second pivot de l’histoire nationale. Revanche des vaincus, elle renverse le pouvoir né de la conquête. Le Tiers-État, de sang gaulois, se libère enfin du joug du roi et de la noblesse, d’origine franque. « Tout ce qu’avait produit, dans l’ordre politique, la succession des événements arrivés en Gaule depuis la chute de l’empire romain, cessa d’exister par la révolution française ». Le présent trouve son sens et sa vérité dans l’exploration des époques antérieures. La conquête du Ve siècle rend raison en effet des clivages politiques contemporains. Mais inversement, la connaissance positive de l’Histoire tire son intelligibilité des événements politiques présents. Les révolutions de 1789 et de 1830 donnent leur signification aux révolutions communales du Moyen Âge qui les préparent et les annoncent
Pierre-Simon Ballanche est sans doute l’initiateur philosophique de cette nouvelle rationalité de l’histoire. Les analogies gouvernant l’histoire délivrent donc la vérité du début car celui-ci se répète sans fin. Ce qui s’est produit à l’origine est semblable à ce qui s’est passé indéfiniment par la suite. Ce qui vient après éclaire donc ce qui existait avant. La méthode historique connaît le passé par le présent, qui lui donne sa vérité. Les constructions historiographiques d’Augustin Thierry rendent possible la réfutation de la connaissance du passé par les événements actuels. Si le présent délivre la vérité du passé, toutes les modifications du présent bouleversent la connaissance que l’on peut en avoir. Cela explique en grande partie, l’oubli dans lequel est tombée une œuvre reposant sur des bases aussi problématiques.
Littérature secondaire
- 1951, Kieran Joseph Carroll, Some Aspects of the Historical Thought of Augustin Thierry, Washington, D. C.: Catholic University of America Press
- 1960, Dietrich Gerhard, "Guizot, Augustin Thierry; und die Rolle des Tiers Etat in der franzosischen Geschichte", Historische Zeitschrift, 190, no. 2
- 1973, Rulon Nephi Smithson, "Augustin Thierry. Social and Political Consciousness in the Evolution of Historical Method", Geneva: Dmz
- 1976, Lionel Grossman, "Augustin Thierry and Liberal Historiography", Theory and History, Beiheft 15, Wesleyan University Press
Citations
- « L'alliance des mots la plus menteuse, un gouvernement qui donne la liberté. » (Dix ans d’études historiques, 1839)
- « Si la noblesse peut revendiquer dans le passé les hauts faits d’armes et le renom militaire, il y a aussi une gloire pour la roture, celle de l’industrie et du talent. C’était un roturier qui élevait le cheval de guerre du gentilhomme, et joignait les plaques d’acier de son armure. Ceux qui égayaient les fêtes des châteaux par la poésie et la musique, étaient aussi des roturiers ; enfin la langue que nous parlons aujourd’hui est celle de la roture ; elle la créa dans un temps où la cour et les donjons retentissaient des sons rudes et gutturaux d’un dialecte germanique » (Dix ans d’études historiques, 1839)
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