Vous pouvez contribuer simplement à Wikibéral. Pour cela, demandez un compte à adminwiki@liberaux.org. N'hésitez pas !


Mark Granovetter

De Wikiberal
Aller à la navigation Aller à la recherche

Mark Sanford Granovetter, né le 20 octobre 1943, est un sociologue américain et professeur à l'université de Stanford. Il est surtout connu pour ses travaux en théorie des réseaux sociaux et en sociologie économique, en particulier dans sa théorie sur la diffusion de l'information dans les réseaux sociaux connue sous le nom de La force des liens faibles (1973)[1]. Il a obtenu son premier diplôme universitaire (Bachelor of Arts) en histoire à l'Université de Princeton (en 1965) et un doctorat en sociologie à l'Université de Harvard (en 1970). Il fut professeur à l'École des sciences humaines de Stanford et directeur du département de sociologie. Il a auparavant travaillé à l'Université Northwestern, à l'Université d'État de New York à Stony Brook et à l'Université Johns Hopkins.

Travaux

La nouvelle sociologie économique et l'encastrement

La « nouvelle sociologie économique » a commencé à émerger à la fin du XXe siècle avec la publication de l'article de Mark Granovetter « Action économique et structure sociale : le problème de l'encastrement » (1985), considéré comme un point clé du développement des recherches dans ce domaine, donnant le ton à une nouvelle sociologie économique. L'article met en relief le concept d'encastrement qui développe l'idée que les relations économiques entre individus ou entreprises sont intégrées dans des réseaux sociaux réels et non pas dans un marché idéalisé abstrait. La nouvelle sociologie économique espère éviter à la fois une vision sursocialisée de l'individu donnée par la sociologie traditionnelle[2] et une vision sous-socialisée de l'individu atomisée de l'économie néo-classique[3].

La vision sursocialisée comporte le risque de considérer que les acteurs sont perçus comme étant trop obéissants aux opinions des autres et aux normes de la société, ne laissant aucune place à une conception de la rationalité individuelle. À l'inverse, s'appuyer trop fortement sur une théorie de l'acteur économique rationnel peut aussi conduire à des problèmes de compréhension de la société. Comme le font les économistes néo-classiques, l'élimination des relations et de la structure sociales de l'analyse économique suppose que les acteurs prennent des décisions purement utilitaristes, sans considération pour le marchandage, la négociation ou la pression sociale. Pour éviter ce double souci, Mark Granovetter propose une alternative, celle où l'action économique de l'individu se situe dans une structure sociale.

Mark Granovetter et Richard Swedberg (2001) expliquent que la nouvelle sociologie économique avance trois propositions clés sur la relation entre l'économie et la société. Premièrement, l'action économique est une action sociale, en ce sens qu'elle implique un effort pour changer quelque chose dans l'état actuel du monde. Elle est sociale car elle est tournée vers les autres. Deuxièmement, l'action économique est socialement encastrée, c'est-à-dire qu'elle se produit dans un contexte de relations sociales sans fins. Troisièmement, les résultats économiques sont socialement construits. Cela signifie que les résultats économiques ainsi que les significations que nous attachons aux résultats économiques sont le produit d'êtres humains qui se coordonnent, coopèrent et se font concurrence.

La force des liens faibles

En marketing, en sciences de l'information ou en politique, les liens faibles décrits par Mark Granovetter permettent d'atteindre des populations et des publics inaccessibles via des liens forts. Les liens faibles sont donc des connaissances qui ne sont pas renforcées par de nombreuses amitiés mutuelles, et qui sont particulièrement essentiels dans l'efficacité des flux d'information. Dans l'article qu'il a écrit en 1973, Mark Granovetter a défini la force d'un lien comme une combinaison de la durée, de l'intensité émotionnelle, de l'intimité (confiance mutuelle) et des services réciproques qui le caractérisent. Il a fait valoir que les liens faibles, parce qu'ils relient fréquemment des ensembles d'acteurs dont la zone d'influence ne se chevauchent pas, sont une clé de l'intégration sociale et sont souvent des sources d'informations nouvelles pour les acteurs qu'ils relient. L'auteur fait donc appel à une attention accrue aux liens faibles, telles que les connaissances, par opposition aux liens forts, tels que les parents et les amis. Depuis 1973, il existe de nombreuses recherches, dont des travaux sur l'impact des liens faibles sur les processus de recherche d'emploi et d'accès aux revenus des individus, sur la diffusion des innovations culturelles et scientifiques, et sur l'organisation sociale des groupes de pairs.

Les espaces sociaux sont des lieux au sein desquels des liens faibles peuvent se transformer en liens forts (étroits). Les travaux de Mark Granovetter (1973, 1982) sur la force des liens faibles soulignent l'importance des liens faibles pour faciliter les relations (discussion) et le transfert d'informations entre différents groupes sociaux. En discutant comment comprendre la force des liens dyadiques, il a souligné l'importance de la fréquence des interactions. En effet, les liens forts nécessitent une fréquence d'interaction élevée pour se développer.

En 1992, Mark Granovetter utilise l'exemple des communautés d'immigrants pour illustrer comment diverses organisations composées de groupes très unis, variables en taille, en composition et en structure juridique, travaillent ensemble pour coordonner l'investissement et la production dans de nombreuses industries et entreprises.

Mark Granovetter a également développé un modèle du déclenchement des évènements sociaux basés sur les comportements de certains types d'individus. Il fait l'hypothèse que dans une foule, la décision de chaque personne afin de déclencher ou non une émeute dépend de ce que font les autres. Selon Mark Granovetter, les instigateurs motivés commencent à déclencher une émeute même si personne d'autre ne le fait, tandis que d'autres ont besoin de voir un nombre critique de fauteurs de troubles commencer leur action avant qu'ils ne se révoltent également. Ce seuil[4] est supposé être distribué selon une loi de probabilité. Les résultats peuvent diverger largement bien que la condition initiale du seuil ne diffère que très légèrement.

Informations complémentaires

Notes et commentaires

  1. Son article, « The Strength of Weak Ties » est l'un des articles les plus influents en sciences sociales, avec 67 625 citations selon Google Scholar (en date du 2 décembre 2022). En 1969, il avait soumis le même article à l'American Sociological Review mais les éditeurs avaient décidé de le rejeter. Heureusement, Mark Granovetter ne s'est pas découragé et finalement, cette recherche pionnière fut publiée en 1973.
  2. En effet, la sociologie adopte parfois une conception sursocialisée des acteurs économiques qui sont entièrement dépendants des normes et des valeurs du système social dans lequel ils existent. Ces acteurs sursocialisés sont des formes d'automates sociaux dont les actions sont entièrement déterminées par les facteurs sociaux.
  3. Dans l'économie néoclassique, l'individu est considéré comme un décideur atomisé, et donc sous-socialisé, utilisant le calcul d'utilité pour déterminer chaque choix. Ces acteurs sous-socialisés sont apparemment des créatures socialement isolées.
  4. Ce modèle de seuil de comportement social a été aussi proposé par Thomas Schelling et il fut popularisé par le livre de Malcolm Gladwell, "The Tipping Point".

Publications

  • 1973, "The strength of weak ties", American Journal of Sociology, Vol 78, n°6, pp1360-1380
  • 1974, "Getting A Job: A Study of Contacts and Careers", Cambridge, Mass: Harvard University
  • 1976, "Network sampling: Some first steps", American Journal of Sociology, Vol 81, pp1287-1303
  • 1978, "Threshold Models of Collective Behavior", American Journal of Sociology, Vol 83, n°6, pp1420–1443
  • 1985, "Economic Action and Social Structure: The Problem of Embeddedness", American Journal of Sociology, Vol 91, n°3, pp481–510
  • 1990, "The Old and New Economic Sociology: A History and Agenda", In: Roger Friedland, A. F. Robertson, dir., "Beyond the Market place: Rethinking Economy and Society", New York: Aldine de Gruyter, pp89-112
  • 1992, avec Richard Swedberg, dir., "The Sociology of Economic Life", Boulder, CO: Westview Press
  • 1993, "The Nature of Economic Relationships", In: Richard Swedberg, dir., "Exploration in Economic Sociology", New York: Russell Sage, pp3-41
  • 1995, "Coase Revisited: Business Groups in the Modern Economy", Industrial and Corporate Change, vol 4, n°1, pp93-130
    • Repris en 2001, In: Mark Granovetter, Richard Swedberg, dir., "The Sociology of Economic Life", Boulder: Westview Press
  • 1999, "Coase Encounters and Formal Models: Taking Gibbons Seriously", Administrative Science Quarterly, Vol 44, pp158-162
  • 2000, "Ökonomische Institutionen als soziale Konstruktionen. Ein Analyserahmen" ("Les institutions économiques en tant que constructions sociales. Un cadre d'analyse",), In: Dieter Bögenhold, dir., "Moderne Amerikanische Soziologie", Stuttgart: UTB, pp199-218
  • 2001, avec Richard Swedberg, dir., "The Sociology of Economic Life", Boulder: Westview Press
  • 2005,
    • a. "Society & Economy: The Social Construction of Economic Institutions", Cambridge, MA: Harvard University Press
    • b. "The Impact of Social Structure on Economic Outcomes", Journal of Economic Perspectives, Vol 19, pp33–50

Littérature secondaire

  • 2002, S. Plociniczak, "Action économique et relations sociales: La notion d’encastrement chez Karl Polanyi et Mark Granovetter", Paris: Université Paris 13

{{Portail économie}

5179-pittux-Stylo.png Accédez d'un seul coup d’œil au portail des grands auteurs et penseurs du libéralisme.